Les Croyances populaires comme récit mythologique - article ; n°2 ; vol.10, pg 94-108
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Description

L'Homme - Année 1970 - Volume 10 - Numéro 2 - Pages 94-108
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 15
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Nicole Belmont
Les Croyances populaires comme récit mythologique
In: L'Homme, 1970, tome 10 n°2. pp. 94-108.
Citer ce document / Cite this document :
Belmont Nicole. Les Croyances populaires comme récit mythologique. In: L'Homme, 1970, tome 10 n°2. pp. 94-108.
doi : 10.3406/hom.1970.367129
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1970_num_10_2_367129o f.
LES CROYANCES POPULAIRES
COMME RÉCIT MYTHOLOGIQUE
par
NICOLE BELMONT
Nombre d'anthropologues parmi ceux que l'on pourrait nommer de la « pre
mière génération » se sont préoccupés des rapports qu'entretiennent entre eux
les croyances, les mythes et les rites. Une opportune réédition du volume d'essais
de A. M. Hocart1 (choisis et réunis par Lord Raglan en 1952) révèle des vues
anticonformistes sur ces questions, même si cet anticonformisme paraît parfois
aboutir à des lieux communs du discours ethnologique. Ainsi quand Hocart
déclare que « le mythe décrit le rituel et le rituel représente le mythe » (p. 22)
ou « si vous voulez savoir pourquoi la Médecine Dance a été instituée, ne le
demandez pas à un Winnebago ; demandez-le à ses mythes » (p. 49), ces décla
rations peuvent paraître banales aux ethnologues contemporains. Il semble,
cependant, qu'ils auraient parfois intérêt à les reconsidérer : inscrites dans le
contexte de l'anthropologie actuelle elles ne peuvent qu'y apporter une bénéfique
stimulation.
A l'œuvre de Hocart, on peut ajouter bien entendu celle de Frazer2, mais
aussi de E. S. Hartland3, de A. Lang4, etc. Ce problème des rapports entre mythe
et croyances constitue l'objet de cet article, mais on le placera dans une optique
un peu différente, celle de la narration.
* Sous une forme légèrement différente, ce travail a été présenté au Symposium inter
national d'Urbino sur les structures narratives en septembre 1969.
1. A. M. Hocart, The Life-Giving Myth and Other Essays, London, Methuen, 2e éd., 1970.
2. J. G. Frazer, The Golden Bough, a Study in Magic and Religion, London, Macmillan,
3e éd., 1907-1915.
3. E. S. Hartland, Ritual and Belief, Studies in the History of Religion, London, Williams
and Norgate, 191 4. Le même auteur, dans son étude sur Persée, The Legend of Perseus.
A Study of Tradition in Story, Custom and Belief (London, D. Nutt, 1896), utilise en les
privilégiant les croyances et les coutumes indo-européennes dans son interprétation du mythe.
4. A. Lang, Myth, Ritual and Religion, London, 1887. CROYANCES POPULAIRES ET RÉCIT MYTHOLOGIQUE 95
Le titre de cet article recèle une contradiction dans les termes. En effet, le
terme de croyance évoque une production close sur elle-même, figée, statique,
à l'opposé même du mythe qui, en tant que récit, relève de la succession et du
déroulement. Pour nous exprimer d'une autre manière, disons qu'une croyance
populaire n'est en apparence pas susceptible d'une narration. On peut la formuler
en une phrase ou en plusieurs ; en tout cas elle consiste toujours en un seul énoncé.
Inutile de dire qu'un mythe, tout au contraire, est formé d'une succession d'énon
cés puisque c'est un récit. Mais on objectera qu'on peut toujours formuler une
succession de croyances populaires, donc une succession d'énoncés, et qu'on
retrouve là notre description du mythe. Mais on voit immédiatement que la
logique de la succession n'est pas la même dans les deux cas. L'enchaînement
des séquences dans le récit mythique a un sens1, tandis que la logique d'une succes
sion de croyances populaires, s'il y en a une, n'est pas inhérente à l'énoncé de
celles-ci comme c'est le cas dans le récit mythique2. Le « sens » d'une croyance
populaire — comme on vient de parler du sens d'un récit mythique, c'est-à-dire
la succession de ses séquences — ne peut se découvrir que si on replace celle-ci
également dans un enchaînement, par exemple le contexte que constitue la culture
d'où on l'a extraite, c'est-à-dire un ensemble syntagmatique comme l'est le récit.
Encore ce sens est-il beaucoup moins apparent que celui que manifeste le mythe
qui est, d'abord, une histoire que tout le monde peut comprendre. Chacun peut
comprendre un récit mythique, même sans appartenir à la culture d'où il est
extrait ; en revanche on ne peut pas « comprendre » une croyance populaire si
on n'appartient pas à la culture où elle est en usage — « comprendre » se référant
ici à une intelligibilité immédiate et superficielle.
En première approximation, on posera donc que le mythe est porteur d'une
signification perçue de façon immédiate, celle de l'histoire racontée (ainsi, même
si les événements ont de l'incohérence, un héros assure une sorte de continuité),
alors que la croyance ne présente pas de sens apparent ; mais on sait qu'elle en
possède un qui est latent, comme le mythe d'ailleurs à cet égard. En outre le
premier apparaît comme une succession de séquences, d'énoncés rattachés log
iquement les uns aux autres, tandis que la seconde consiste en un énoncé unique.
On a cependant admis qu'il était possible de formuler un ensemble de croyances
1. Même si Cl. Lévi-Strauss dit que « tout peut arriver dans un mythe, il semble que
la succession des événements n'y soit subordonnée à aucune règle de logique ou de continuité »
(« La Structure des mythes », dans Anthropologie structurale, Paris, Pion, 1958 : 229).
2. Dans « Problème de l'analyse du discours » {Langages, mars 1969, 13), J. Sumpf et
J. Dubois disent : « La séquence des phrases constitue l'énoncé qui devient discours lorsqu'on
peut formuler des règles d'enchaînement des suites de phrases » (p. 3). En anticipant sur une
partie de cette étude, disons qu'on y cherchera les règles (si elles existent) qui font des énoncés
que sont les croyances populaires, un discours ou récit mythique dans notre langage. 0,6 NICOLE BELMONT
populaires, sans que cette succession d'ailleurs puisse jamais devenir un récit.
De quelle manière peut-on réaliser une telle formulation ? Deux modes de classi
fication sont possibles, qu'on appellera respectivement horizontal et vertical,
la notion utilisée étant celle de corpus.
Une classification horizontale consistera à recueillir toutes les croyances
populaires d'une culture choisie ; la classification verticale réunira au contraire
toutes les modalités d'une seule croyance populaire dans toutes les cultures à la
fois historiques et géographiques de manière idéale, et de manière plus réalisable
dans un grand nombre de cultures, ou encore dans toutes les cultures d'une aire
homogène.
Prenons un exemple de cette façon de procéder ; imaginons qu'on veuille
étudier la coutume de la couvade. On sait qu'elle existe dans des cultures indiennes
de l'Amérique du Sud. Il sera donc possible de formuler le corpus de toutes les
croyances et coutumes d'une population indienne de l'Amérique du Sud où la
couvade existe et de voir quelles sont les relations qu'elle entretient avec l'ensemble
des représentations collectives de cette population. Il sera aussi possible de recueill
ir le corpus des manifestations de la couvade dans toutes les populations d'Amér
ique du Sud où elle a été notée.
Ces corpus constitués de l'une ou l'autre manière le sont en l'absence de toute
hypothèse préalable, sinon la conviction très générale selon laquelle toutes les
croyances d'une culture participent de la structure de celle-ci et que la même
croyance recueillie dans un grand nombre de cultures doit conduire à dégager
sa signification — ce qui est déjà beaucoup moins assuré, à moins qu'il ne s'agisse,
comme dans l'exemple de la couvade, d'une aire culturelle relativement homogène.
Mais les choses ne sont pas si simples. S'il est en effet utile de définir les deux
modes de production d'un corpus, on s'aperçoit vite, à pratiquer ces questions,
qu'il est nécessaire de se servir des deux types de manière complémentaire. Il
serait absurde d'étudier la couvade par rapport à l'ensemble des croyances d'une
population sans se référer à celles des populations voisines, ne serait-ce que pour
mettre au j

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