Les Français, Fihroun et les Kounta, 1902-1916 - article ; n°2 ; vol.43, pg 175-195
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Les Français, Fihroun et les Kounta, 1902-1916 - article ; n°2 ; vol.43, pg 175-195

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Description

Journal de la Société des Africanistes - Année 1973 - Volume 43 - Numéro 2 - Pages 175-195
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

André Salifou
Les Français, Fihroun et les Kounta, 1902-1916
In: Journal de la Société des Africanistes. 1973, tome 43 fascicule 2. pp. 175-195.
Citer ce document / Cite this document :
Salifou André. Les Français, Fihroun et les Kounta, 1902-1916. In: Journal de la Société des Africanistes. 1973, tome 43
fascicule 2. pp. 175-195.
doi : 10.3406/jafr.1973.1711
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0037-9166_1973_num_43_2_1711J. de la Soc. des Africanistes
XLIII, 2, 1973» p. 175-195.
LES FRANÇAIS, FIHROUN ET LES KOUNTA
1902-1916
PAR
André SALIFOU
Les sources.
A la base de cette étude, nous avons utilisé essentiellement deux types de docu
ments : documents oraux, et documents écrits.
Parmi les premiers, notons tout particulièrement les traditions que le Targui Digga
ag Khammad Ekhya, a bien voulu confier le 12 juin 1969 à Niamey au C. R. D. T. O. *
et que ce dernier a transcrites, traduites, et publiées sous le titre Iwillimidan avec
la collaboration du C. N. R. S. H. 2 à la fin de l'année 1970. Il s'agit là d'un intéres
sant recueil de traditions orales très riches et fournissant aux chercheurs de nom
breux et précieux détails sur les Touareg en général et sur Fihroun et ses ancêtres en
particulier.
Quant à nos sources écrites, elles proviennent pratiquement toutes du Service
Historique de l'armée au Château de Vincennes. Dans les années 1965-1966, en effet,
quatre cartons contenant des archives, souvent hélas dans un piteux état, furent
transférés du Niger à Vincennes. Il y a dix-huit mois, le classement de ces archives
venait à peine de commencer et les cotes qui les affectaient étaient encore considé
rées comme provisoires par l'archiviste elle-même.
Introduction.
Dans la deuxième moitié du xixe siècle notamment, les tribus nomades de la
boucle du Niger étaient dominées par deux d'entre elles, celle des Kounta 3 et celle
des Touareg Iwillimidan «dont l'autorité morale s'étendait sur tous les Touareg
de la boucle ». Jusqu'en 1865 « la puissante tribu arabe des Kounta jusqu'ici amie
des Oulliminden ou au plus neutre dans les guerres de l'ouest se brouille avec eux.
L'animosité, entretenue et augmentée constamment par des rezzous mutuels, durera
jusqu'à nos jours * ».
1. Centre régional de Documentation pour la Tradition orale.
2.nigérien de Recherches en Sciences humaines (Niamey).
L'informateur, Digga, est un Targui qui se présenta lui-même comme étant un « forgeron de la fraction Kel
Ezar du Mali de la tribu des Kel Essuk t.
3. Les Kounta eux-mêmes se subdivisaient en une multitude de fractions : Touajitan, Atourchan, Tagar, Echark,
Almoussakaré, Ouldmelouk, etc.
4. Cf. Urvoy in Histoire des populations du Soudan central, Colonie du Niger, p. 84. I76 SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES
Mais dans les années 1890, la carte politique de la région se modifia avec l'infiltra
tion, encore timide il est vrai, des Français dans la boucle du Niger. Quel parti les
« Hommes Blancs » allaient-ils embrasser ?
En 1892, Madoudou, Aménokal des Iwillimidan, avait accordé sa protection au
lieutenant de vaisseau français, Hourst 4 Madoudou mourut en novembre 1899 et
fut remplacé par Laway, un «vieux chef rusé, mais blasé » qui, ajoute Rash «n'a
d'autre ambition que de vivre en paix, avec les siens comme avec les étrangers, sa
richesse le libérant en tout état de cause de tout souci (sauf la crainte d'être ruiné
à cause d'une politique imprudente) et de toute velléité de razzias. Sa lucidité est
suffisante pour qu'il se rende compte qu'il ne peut empêcher la venue et l'installation
des Français et lui faut se résigner à leur domination et en « payer le prix... 2 ».
Néanmoins, le nouvel Aménokal, n'obtempéra pas toujours automatiquement aux
ordres donnés par les Français, et ce, en dépit de sa détermination de vivre en paix
avec ces derniers. Il refusa tout contact direct avec eux, encouragé d'ailleurs en cela
par Fihroun. Il accepta, cependant, de payer tous les ans, aux Français, 80 bœufs et
1 000 moutons, et d'assurer, tous les ans également, le transport de 4 000 caisses du
fleuve à Filingué. Cette manière de baisser la tête devant les Français irrita bon
nombre d'Iwillimidan et non des moindres. Dans l'entourage immédiat de Madoud
ou, son neveu 8 et lieutenant Fihroun, piaffait d'impatience en attendant le jour où
il deviendrait effectivement l'Aménokal des Iwillimidan.
Laway avait, semble-t-il, une prédilection toute particulière pour les vaches à
robe rouge et portant une tache blanche sur le front. Il pillait les troupeaux de ses
sujets et en outre c'était un chef si peu généreux que la nature elle-même se fâcha
contre lui : les pluies cessèrent de tomber sur le pays et pratiquement ses trois années
de règne auraient été pour les nomades une effroyable période de famine 4. Pour
que la malédiction du ciel cessât de s'abattre sur la région, les Touareg, à la tête
desquels la tribu maraboutique des Kel Essuk, démirent Laway de ses fonctions
d'Aménokal, en faveur de Fihroun. Mais « Laway refusa [...] de céder le Tubal 5 ; Les
Touaregs et les forgerons tuèrent (alors) une vache blanche. Les forgerons fabr
iquèrent une grande écuelle, qu'ils transformèrent en Tubal. Les Kel Essuk confec
tionnèrent une amulette et la mirent dans le Tubal. L'ancien Tubal resta chez Laway.
Tout le monde prit parti pour Fihroun e ». Voilà donc comment Fihroun devint Amén
okal des Iwillimidan de l'ouest ce qui, au départ, ne fut pas sans inquiéter les Franç
ais. En effet, l'avènement de Fihroun se produisit au moment même où une véri
table lutte d'influence opposait Hamoadi 7, chef des Kounta et les Iwillimidan qui
entendaient faire respecter leur autorité dans la région, et, avec elle, l'inviolabilité
de leurs terrains de parcours par les Kounta.
1. En fait Madoudou accorda toute sa protection à l'officier français sans jamais accepter de le rencontrer. Hourst
s'était d'ailleurs présenté aux Iwillimidan comme étant le neveu d'Abdel-Krim, — Henrich Barth — qui, quelques,
décennies plus tôt, avait bénéficié de la d'El Khotab, père de Madoudou.
2. In Un établissement colonial sans histoires : les premières années françaises au Niger, thèse de 3e cycle. Paris
École pratique des Hautes Études, p. 94.
3. Plus précisément Fihroun était le fils d'Elinsar, cousin germain de Madoudou.
4. Cf. Digga, in Iwillimidan, C. R. D. T. O., 1970, p. 81.
5. Tambari chez les Hawsa : sorte de tam-tam, symbole du pouvoir détenu par les chefs.
6. Cf. Digga, in op. cit., p. 83. Il est intéressant de noter ce refus de Laway d'abandonner un pouvoir pour l'exer
cice duquel il n'aurait été élu, quelques années plus tôt, qu'à son corps défendant, s'il faut en croire le Dr Richer :
Les Oulliminden. Paris, Éd. Larose, 1924, p. 163.
7. Hamoadi = Hammoédi = Amoadi, dans les archives françaises. о о, CM CM
о I78 SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES
I. Les premiers actes de Fihroun.
Fihroun devint Aménokal des Iwillimidan, au mois d'octobre 1902, et ne voulut
rien entreprendre immédiatement qui pût justifier l'inquiétude des Français de le
voir accéder au pouvoir. Bien au contraire, il chercha à vivre en paix avec les Hommes
Blancs.
En 1902, Gouraud, commandant du Territoire de Zinder, récemment remplacé
à ce poste par le lieutenant-colonel Noël, entra au Soudan par Gao d'où il adressa
un message à l'Aménokal Fihroun, message par lesquel il demandait au chef des
Iwillimidan de se rendre à Gao pour conférer avec lui. Gouraud voulait, en fait, obtenir
de l'Aménokal la confirmation des accords de soumission acceptés par les Iwillimi
dan à Ansango. Fihroun se fit attendre. Le commandant Benoît, commandant par
intérim le Territoire de Tombouctou se trouvait quant à lui à Bourem. Il proposa
alors à Gouraud, de lancer sur les campements des Touareg Iwillimidan, un impor
tant rezzou de 600 Kounta qu'il avait à sa portée. Gouraud ne fut pas de cet avis. Il
ne fallait rien brusquer et d'ailleurs, Noël, nouveau commandant du territoire de
Zinder, était lui-même partisan d'une méthode pacifique. Le commandant Benoît
dut surseoir à son projet.
Si Tomb

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