Mythe et organisation sociale au Soudan français - article ; n°1 ; vol.25, pg 39-76
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Description

Journal de la Société des Africanistes - Année 1955 - Volume 25 - Numéro 1 - Pages 39-76
38 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1955
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Germaine Dieterlen
Mythe et organisation sociale au Soudan français
In: Journal de la Société des Africanistes. 1955, tome 25. pp. 39-76.
Citer ce document / Cite this document :
Dieterlen Germaine. Mythe et organisation sociale au Soudan français. In: Journal de la Société des Africanistes. 1955, tome
25. pp. 39-76.
doi : 10.3406/jafr.1955.1873
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0037-9166_1955_num_25_1_1873MYTHE ET ORGANISATION SOCIALE
AU SOUDAN FRANÇAIS
PAR
G. DIETERLEN
Au cours des enquêtes poursuivies depuis plusieurs décades en
Afrique Noire Occidentale par les missions Griaule, l'attention des
chercheurs a été attirée par le fait que de nombreuses populations
de ce territoire — notamment au Soudan et en Haute- Volta — se
déclaraient toutes issues d'une souche commune située au Mandé.
Cette région est le siège de l'ancien empire Kéita, dit du Mali,
qui a fait l'objet d'un certain nombre d'études historiques г : son
centre actuel est Kangaba, nommé Kaba par les autochtones. Une
liste des populations se déclarant issues du Mandé a été relevée et
publiée, ainsi que des renseignements complémentaires recueillis au
cours d'enquêtes menées dans les régions de Ségou, San, Macina,
Diaf arabe, Mopti, Bandiagara, Tougan, Ouahigouya 2.
Au cours de nos cinq derniers séjours (mars 1953, août-octobre 1953,
avril 1954, octobre 1954 - janvier 1955, août-décembre 1955) les
enquêtes ont été poursuivies à Bamako et à Kangaba auprès de per
sonnalités Kéita appartenant à ces deux agglomérations comme
auprès des membres des familles Kouyaté de Kangaba et Dyabaté
de Kéla, qui sont leurs griots traditionnels 3.
De plus, nous avons assisté en avril 1954 à la cérémonie septen
nale de Kangaba qui réunit Kéita et apparentés pour la réfection
du kamâ blô, sanctuaire érigé dans cette agglomération par Mansa-
sama, descendant de Soundiata. Or cette construction est la réplique
du premier construit par les Kéita à une époque plus
1. Ci. notamment J. Vidal, Au sujet de l'emplacement du Mali, Bulletin du Comité histo
rique et scientifique de l'A.O.F., 1923 ; C. Monteil, Les Empires du Mali, Bulletin du Comité
historique et de l'A.O.F., 1929 ; H. Labouret, Les Manding et leur langue, Larose,
Paris, 1934. 2. Cf. D. Zahan, Aperçus sur la pensée théogonique des Dogon, Cahiers Internationaux
de sociologie, 1949, vol. iv, pp. 113-133 ; G. Dietehlen, Essai sur la religion Bambara,
Paris, Presses Universitaires de France, 1953, p. XIII sqq. et 228 n. 1.
3. Nous remercions ici tous les informateurs qui ont travaillé en collaboration avec nous SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES 40
i
ancienne, lequel se trouve non loin de Kri, près de Nyagassola. La
région montagneuse s'étendant de Kri, vers l'Est, jusqu'au-dessus
et au-delà de Sibi est considérée par les Kéita, qui la nomment Kou-
roula, comme le berceau de cette famille.
La réfection du sanctuaire de Kangaba est d'ailleurs précédée
d'un sacrifice offert dans l'ancien sanctuaire par des personnalités
Keita. Au cours de la cérémonie de Kangaba, qui dure cinq jours,
les Dyabaté du village de Kéla, seuls accrédités pour exécuter cette
partie du rite, pénètrent à l'intérieur du sanctuaire, avant la pose
du toit, et durant toute une nuit, récitent, en se relayant, le mythe
de la création, les généalogies mythiques, puis les généalogies histo
riques des Keita, comme celles des familles apparentées ou alliées
à ces derniers.
Le nombre de 44 (ou 48) populations issues du Mandé, souvent
mentionné par la tradition, est un nombre théorique, qui correspond
aux cinq premières générations mythiques reconnues par la plupart
des Soudanais, sous des formes comparables dans les diverses popul
ations étudiées. La cinquième génération comporte généralement
44 descendants. Le système d'alliances matrimoniales des Soudanais
— notamment celui des Dogon * — s'appuie sur cette conception.
Mais, historiquement parlant, les généalogistes ou traditionna-
listes, nommés habituellement griots, déclarent tous que 30 familles
— dont suivent les noms — considérées comme ayant leur souche
au Mandé, ont essaimé sur un très large espace en Afrique Noire
et relèvent d'une origine commune.
5 familles Masaré, ou Kéita 2, dites mammuru si ke duru, issues
de 5 frères Kéita descendants de Soundiata ;
5 familles de Marabouts, dites mori si ke duru : Bérété
Touré
Haydara
Fofana
Saganogo
4 familles de gens de caste, dites war a nani ou namakala :
— les généalogistes ou griots, dyelu
— les forgerons, numu
— les travailleurs du cuir, garanke
— les vanniers, fina ou fine
1. Cf. G. Dieterlex, Parenté et mariage chez les Dogon, Africa (sous presse).
2. Le nom de famille est Masaré et le dyamu Keita (litt. « qui a pris (toutes) les choses »)
qui fut attribué à Soundiata. Il ne pourrait être porté officiellement par ses descendants qu'à
partir de l'âge de 22 ans, ET ORGANISATION SOCIALE AU SOUDAN FRANÇAIS 41 MYTHE
16 familles de « captifs nobles» dits 15 ta dyô ta ni woro, «16 captifs
qui ont pris l'équipement de guerre ». Ce sont les alliés volontaires
des Keita, avec lesquels ceux-ci sont unis parfois également par le
mariage :
Traoré
Koné
Kamara (ou Doumbia)
Kourouma
Mogasouba
Dansouba
Koulibali
Dagnogo
Dyara
Dante
Dougonno
Sogoré (ou Kanté)
Diallo
Diakité
Sidibé
Sangaré
A ces « familles * » sont rattachés non seulement tous les groupes
de langue mandingue, Malinké, Bambara, Dyoula ou Kassoukhé,
mais encore la plupart des populations du Sénégal, du Soudan, de
la Côte d'Ivoire, du Togo, etc. La liste qui suit, non exhaustive,
donne un premier aperçu de leur extension :
sont des Keita : les Kissi, les Dogon, les Toma, les Guerzé, les
Lobi, les Mandé, les Baoulé ;
sont des Keita et des Traoré : les Ouolof ;
sont des Traoré : les Mossi, les Haoussa, les Samogo, les Senoufo,
les Gouro, les Sérères ;
sont des Traoré et des Koné : les Koniagui et Bassari, les Bobo blé
et les Bobo fi ;
sont des Koné : les Minianka ; des et des Kamara : les Baga ;
sont des Kamara (ou Doumbia) : les Kabré, les Sosso ;
sont des Kourouma : les Kouroumba du Haut Yatenga.
Tous les Peul interrogés reconnaissent les liens avec le Mandé
des quatre grandes familles nobles Diallo, Diakité, Sangaré et Sidibé 2.
1. Nous avons donné ici une première liste, qui pourra subir, ultérieurement, des modifi
cations. Cf. p. 73.
2. Ces quatre noms sont « les noms du Mandé» des quatre grandes familles nobles des Peul,
respectivement Dyal, Ba, So et Bari. Les noms offrent, en effet, des variantes suivant !ез régions ; SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES 42
Ces faits éclairent d'une façon décisive les changements de noms
d'individus venant se fixer loin de leur pays d'origine, observés par
nombre d'auteurs et restés jusqu'ici inexpliqués *.
De plus, l'axe géographique du système, tel qu'il vient d'être
succinctement décrit, est le cours du Niger, depuis sa source jusqu'au
Lac Debo. Les agglomérations de rôle rituel situées aux deux extré
mités de cet axe sont respectivement Kri et Kri Кого 2 au Mandé,
Baka et Akka près du Débo. Tout le long du fleuve, des lieux-dits,
dits faro tyn, sont l'objet de rites importants, tandis que certaines
agglomérations (notamment Kaba, Koulikoro, Nyamina, Tamani,
Sama, Ségou, Dyaf arabe, etc..) marquent, pour les usagers, les
étapes d'événements mythiques, proto-historiques, ou historiques,
liés au développement des familles citées plus haut et à leur exten
sion territoriale (Fig. 1) 3.
Ce système à la fois religieux, social et politique est bien connu des
autochtones islamisés comme de ceux qui ont conservé leur religion
traditionnelle. Il s'articule sur un mythe considérable, réservé aux
initiés, qu'il est nécessaire de connaître pour pénétrer l'infrastructure
de cette organisation qu'on peut qualifier d'internationale. Le mythe
— dont nous donnerons ci-après un résumé dans sa versi

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