Note sur les forgerons de l Ader (Pays Hausa, République du Niger) - article ; n°2 ; vol.35, pg 353-372
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Note sur les forgerons de l'Ader (Pays Hausa, République du Niger) - article ; n°2 ; vol.35, pg 353-372

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Description

Journal de la Société des Africanistes - Année 1965 - Volume 35 - Numéro 2 - Pages 353-372
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1965
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Madame Nicole Echard
Note sur les forgerons de l'Ader (Pays Hausa, République du
Niger)
In: Journal de la Société des Africanistes. 1965, tome 35 fascicule 2. pp. 353-372.
Citer ce document / Cite this document :
Echard Nicole. Note sur les forgerons de l'Ader (Pays Hausa, République du Niger). In: Journal de la Société des Africanistes.
1965, tome 35 fascicule 2. pp. 353-372.
doi : 10.3406/jafr.1965.1397
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0037-9166_1965_num_35_2_1397NOTE SUR LES FORGERONS DE L'ADER
(Pays Hausa, République du Niger)
PAR
N. ÉCHARD
Aux marches du pays nomade s'étend l'Ader, province dépendant
traditionnellement du sultanat d'Agadès qui offre, du point de vue
géographique, deux aspects opposés : à l'ouest, une succession de col
lines dunaires, à l'est de vastes plateaux latéritiques creusés de longues
vallées au lit argileux. Dans cette zone de contact entre les cultures
d'influence berbère venues du nord et celles proprement africaines, le
peuplement est remarquable par son hétérogénéité : groupes nomades,
semi-nomades ou sédentarisés (Peul et Twareg) se superposent à une
population de cultivateurs noirs et haoussaphones. Celle-ci se dit Asna
Çasnaa x) mot pour lequel il serait risqué d'avancer une hypothèse
sémantique quelle qu'elle soit. Elle est formée partie de gens venus
d'ailleurs — des quatre points cardinaux — partie de gens originaires
du pays qui apparaissent, dans l'état actuel des recherches, en être les
premiers occupants sédentaires. Les Asna se scindent d'un point de
vue religieux en deux ensembles : l'un, celui des Asna Mallamawa
(mallamaawaa, pluriel de maalàm : personne lettrée capable de lire
l'arabe, nom donné couramment aux marabouts), est constitué de
groupes plus ou moins anciennement islamisés, le processus d'isl
amisation encore actuellement en cours tendant à s'étendre à toute la
population ; l'autre, celui des Asna Masafa Çasnaa maSàafaa), con
serve une religion animiste traditionnelle comportant des pratiques
rituelles sacrificatoires. Parmi ces derniers, les Asna dits Asnan Ramu
(Raamuu, pluriel de Raami : trou dans le sol), « les Asna des trous »,
1. Dans le système de transcription phonologique utilisé ici le redoublement de la voyelle indique
sa longueur. Le hausa ayant deux tons, seul le ton bas est noté par un accent grave. Les consonnes
glottalisées sont indiquées par des majuscules (Injectives : B, D ; Ëjectives : K, S, C) ainsi que le
г roulé (R). Ce sont les formes dialectales propres du hausa de l'Ader qui ont été notées dans ce
texte, lesquelles diffèrent souvent de celles du hausa standard. Nous remercions ici M. Claude
Gouffé, professeur de hausa à l'École Nationale des Langues Orientales Vivantes, qui a bien voulu
revoir et corriger les diverses transcriptions figurant dans cet article. 354 SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES
seraient autochtones et se disent issus de cavernes souterraines où
jadis ils séjournaient et qui étaient situées non loin de leur actuel habit
at. Leur sortie et leur installation hors de la caverne, dont le souvenir
est demeuré très vivace parmi eux, seraient dues à une rencontre avec
des gens vivant à l'extérieur et dont la spécialisation techno-écono
mique n'était pas la même que la leur, les informateurs se donnant
toujours comme occupants de la caverne.
La présente note porte sur les forgerons des populations AsnaMasafa.
Il s'agit d'un groupe endogame, détenteur de l'ensemble de la tech
nique métallurgique et des pratiques religieuses qui en permettent
l'accomplissement.
Les origines.
La connaissance des techniques de fonte et de transformation du
métal ne se trouve pas expliquée dans les récits d'origine, lesquels
rendent compte de l'arrivée du forgeron au sein du groupe dans le cas
des Asna Masafa venus d'autres contrées ou, chez les Asnan Ramu
autochtones, constatent sa présence depuis les origines.
Chez les premiers, le forgeron, absent lors de la formation du groupe,
se serait introduit par l'intermédiaire d'une femme apparue avec le
seul marteau et qui détenait certains pouvoirs à l'égard du feu, ainsi
qu'en témoigne le récit suivant, recueilli dans un village peuplé de gens
originaires de l'ouest et du sud de l'Ader :
Origine des forgerons de Mogar.
Jadis, du temps de Dambo x, alors que les Konawa 2 étaient déjà arrivés, un
soir, peu après le coucher du soleil, au moment où les femmes achèvent de
préparer la nourriture, une femme est tombée du ciel dans le quartier des
Konawa.
Cette femme s'appelait Lola
Dans sa main droite elle tenait un marteau 3 sa gauche elle une louche remplie de viande *
Cette femme était de la famille des forgerons
1. Ancêtre fondateur de Mogar, venu avec son frère d'un village de la région de Filingé, situé à
180 kilomètres environ au nord-est.
2. Konawa, pluriel de Ba'Kone, gens venus de la région de Birnin Koni, située à 80 kilomètres
environ au sud du village. Groupe de chasseurs.
3. En hausa, 'abadeešii, marteau de forgeron.
4. C'est la Dàagiyaa, don de nourriture autre que les céréales constituant la base de l'alimenta
tion que se font les femmes entre elles après qu'elles aient terminé la préparation du repas. Les
échanges se pratiquent par-dessus les clôtures d'enceinte à l'intérieur d'un petit groupe d'habitat
nommé gaRkaa et sont le symbole des relations de voisinage. NOTE SUR LES FORGERONS DE l'aDER 355
Elle s'est mariée avec les Konawa
Quand elle se fâchait, elle cachait le fer rougi dans un grand panier de coton
Le feu s'éteignait chez tous les forgerons.
Ce récit, sous une forme quelque peu différente, explique l'origine
de l'invulnérabilité au feu acquise par certains des membres de la com
munauté forgeronne par le truchement d'une femme. II semble inté
ressant de donner ici cette variante recueillie dans le même village :
Dans un village au ciel on préparait la nourriture
On en donna une part x à la femme Wari 2, une fille de forgeron, afin qu'elle
aille la porter à ses voisines
Elle plaça cette part dans un 'akùsii 3
En chemin, elle glissa et tomba en bas sans avoir aucune blessure de sa chute
Elle tomba dans le quartier des Konawa
Elle chez les forgerons
C'est un certain Tawaye qui l'a épousée
Elle en eut une fille qui se nommait Takera 4
Celle-ci allait filer le coton avec ses amies
Un jour, en passant, elle trouva sur l'enclume le fer rougi avec lequel on forge
l'iler
Elle le prit avec la main et le déposa dans son panier de coton
Elle ne se brûlait pas parce qu'elle avait une médecine qui s'appelle laezana
Elle continua son chemin
Plus loin, quelqu'un l'a croisée
Ceux qui étaient à la forge n'avaient rien vu
Ils discutaient autour de l'enclume
Ils s'étonnaient d'avoir perdu le fer
Quelqu'un dit : « J'ai rencontré Takera sur le chemin »
Les autres dirent : « Oui, c'est possible qu'elle ait pris le fer »
Ils coururent derrière elle et arrivèrent chez ses amies
« C'est toi qui as pris notre fer »
Elle demanda : « Qui m'a vue prendre le fer ? »
« Personne ne t'a vue »
« Je vous rends donc votre fer »
Quand Wari et sa fille se fâchaient, elles cachaient le fer rougi dans le coton
et le feu s'éteignait dans les forges
Si on les traitait bien et qu'on leur demandât des excuses, elles sortaient le fer
Si l'on blessait le cœur de l'une des deux femmes, l'eau ne bouillait plus dans
les marmites.
Takera, fille de Wari et de Tawaye — nommé Gudano, chef des
Forgerons, dans une autre version de ce même mythe — serait appa-
1. La Dàagiyaa. Cf. note précédente.
2. Dans une autre version, Wari est un jeune homme qu'une vache aurait poussé alors qu'il
portait la Dàagiyaa aux voisins. Il serait tombé avec la pluie sur un auvent de tiges de mil où on
l'aurait découvert au matin, à la fin de la tornade, nu et transi.
3. Récipient d'origine twareg, en forme de demi-calebasse, taillé dans du bois et noirci au feu.
4. taa KeeRà = Elle forge. Serait dénommée ainsi pour être née un jour où il y avait grande
activité à la forge de son père. 356 SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES
rentée à un

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