Passé légendaire, archéologie et réalité historique : l'hellénisation de Chypre - article ; n°2 ; vol.44, pg 463-477

Claude Baurain

Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1989 - Volume 44 - Numéro 2 - Pages 463-477
Legendary Past, Archeology and Historical Reality
In the course of the past thirty years, many studies have been devoted to the Mycenœan colonization of Cyprus. The problem is a considerable one, and the stances adopted are more contradictory than certain widely read publications would lead one to think. For many years it was thought that Mycenœan communities were established on the island as early as the 14th century B. C. But the extraordinary boom in Cypriot archeology has mode a profound impression, and most researchers today rule ont any serions Mycenœan presence before the beginning of the 12th century B. C.. Faced with the massive destruction (at times attributed to the Dorians) which occurred in Greece at the end of the 13th century B. C., the Achœns are thought to have taken refuge in Cyprus where they ensured the survival of part of the Mycenœan heritage. But archeological data and Near-Eastern written evidence reveal a far more complicated historical picture. Their examination, however, leads above alil to illuminating the central role, in all such historical reconstructions, occupied by Homer's poetry and foundation legends relating to Cypriot centers. The centrality of epics and legends is hardly justifiable when one considers the nature of epic poetry and the speculative tendency dominating ancient historiography concerning the distant past.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: ANNALES_ECONOMIES_SOCIETES_CIVILISATIONS
• Publié le: 01 janvier 1989
• Nombre de lectures: 71
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Claude Baurain
Passé légendaire, archéologie et réalité historique :
l'hellénisation de Chypre
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 44e année, N. 2, 1989. pp. 463-477.
Abstract
Legendary Past, Archeology and Historical Reality
In the course of the past thirty years, many studies have been devoted to the "Mycenœan colonization" of Cyprus. The problem is
a considerable one, and the stances adopted are more contradictory than certain widely read publications would lead one to
think. For many years it was thought that Mycenœan communities were established on the island as early as the 14th century B.
C. But the extraordinary boom in Cypriot archeology has mode a profound impression, and most researchers today rule ont any
serions Mycenœan presence before the beginning of the 12th century B. C.. Faced with the massive destruction (at times
attributed to the Dorians) which occurred in Greece at the end of the 13th century B. C., the Achœns are thought to have taken
refuge in Cyprus where they ensured the survival of part of the Mycenœan heritage. But archeological data and Near-Eastern
written evidence reveal a far more complicated historical picture. Their examination, however, leads above alil to illuminating the
central role, in all such historical reconstructions, occupied by Homer's poetry and foundation legends relating to Cypriot centers.
The centrality of epics and legends is hardly justifiable when one considers the nature of epic poetry and the speculative
tendency dominating ancient historiography concerning the distant past.
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Baurain Claude. Passé légendaire, archéologie et réalité historique : l'hellénisation de Chypre. In: Annales. Économies,
Sociétés, Civilisations. 44e année, N. 2, 1989. pp. 463-477.
doi : 10.3406/ahess.1989.283601
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1989_num_44_2_283601METIER HISTORIEN
PASSE LEGENDAIRE ARCHEOLOGIE ET
ALIT HISTORIQUE HELL NISATION DE CHYPRE
CLAUDE BAURAIN
Fare storia significa studiare fonti La problema
tica storica non se non al caso limite uno studio
dei fatti in quanto tali ma uno studio delle fonti in
quanto in un modo oltro ci danno fatti
Arnaldo Momigliano Sesto contributo alla storia
degli studi classici del mondo antico 1980)
392)
expansion du monde mycénien tel il nous apparaît au terme un long
siècle activités archéologiques fait toujours objet de multiples études et
prises de position On longtemps cru reconnaître la présence physique de
Grecs mycéniens en des lieux aussi éloignés de la péninsule hellénique que
Italie du Sud la Sicile Anatolie occidentale Chypre ou encore Ugarit Dans
les derniers temps toutefois des recherches faisant appel une méthodologie
plus rigoureuse et des analyses plus fines fruits surtout efforts visant
cerner ce il convient en définitive entendre par monde mycénien ont
été amenées formuler des propositions plus mesurées1 pour essentiel les
véritables provinces mycéniennes englobèrent sans doute jamais davan
tage que la seule Grèce méridionale et centrale2
Parallèlement au cours de ces mêmes dernières années de très nombreuses
enquêtes ont été consacrées ce il est usage appeler la colonisation
mycénienne ou achéenne de Chypre savoir un mouvement migratoire
majeur il conviendrait de placer dans les derniers temps du Bronze Récent
la transition de Helladique Récent IIIB/IIIC ou du Chypriote
IIC/IIIA selon le point de vue archéologique adopté)3 Sur cette dernière ques
tion demeurée fort sensible pour des raisons politiques évidentes les avis les
plus autorisés sont multiples et souvent plus contradictoires que ne le laisserait
envisager une abondante littérature de vulgarisation
Dans la plupart des cas le premier regret formuler égard des thèses
visant rendre compte de intégration la fin de Age du Bronze de Chypre
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Annales ESC mars-avril 1989 n0 pp 463-477 TIER HISTORIEN
dans la sphère culturelle grecque est elles ne tentent guère de définir ce il
convient entendre par Grèce mycénienne Pourtant cette dernière est
désignée comme la responsable de hellénisation de île examen ainsi
on va le constater ces théories explicatives se résument trop souvent de
simples prises de position certaines très passionnées où les arguments
avancés se révèlent vite de portée très inégale4
Au cours une réunion restreinte qui est tenue en septembre 1985
Nicosie initiative de la Direction des Antiquités de Chypre5 chacun convint
avec Vassos Karageorghis that it is often hazardous to try to associate
archaeological phenomena with historical events La remarque va de
soi mais dans la pratique en est-il exactement
au début des années soixante opinion savante était inégalement par
tagée entre deux courants de pensée quant hellénisation de île le premier
sans doute moins répandu exprimait plutôt en faveur de existence de vérita
bles communautés mycéniennes colonies emporio Chypre dès le xive siècle
av.n.è. dans des établissements tels Enkomi ou Kourion Parmi les tenants
de cette vision on citera le fouilleur ugarit-Ras Shamra et inventeur
Enkomi Claude Schaeffer Pierre Demargne Eric Sjoqvist sur les thèses
duquel on reviendra ou encore Daniel le fouilleur de Kourion7 côté
de ce premier courant il en existait un autre aux origines duquel se trouve Einar
Gjerstad un des pères fondateurs de archéologie chypriote Pour ce dernier
dès 1926 dans ses Studies on Prehistoric Cyprus et il sera suivi par des cher
cheurs aussi prestigieux Arne Furumark ou encore Vincent Desbo-
rough la thèse une colonisation de Chypre dès époque mycénienne est
éminemment recevable mais il pas lieu de invoquer avant la fin de Hel-
ladique Récent IIIB8 Ce serait la suite des nombreuses destructions interve
nues en Grèce la fin des années 1200 que des Grecs achéens fuyant en grand
nombre les palais et centres ravagés de la Grèce mycénienne seraient venus
fonder dans île de Chypre des établissements qui allaient assurer hellénisa
tion de île Salamine Paphos Kourion Lapithos Chytroi Kyrénia
Tamassos Ledra Soloi Idalion...)9
Dans le courant des années soixante tandis que archéologie chypriote
connaissait un essor extraordinaire sous impulsion vigoureuse de Vassos Kara
georghis 10 Hector Catling livra trois publications essentielles sur la Chypre de
Age du Bronze son étude consacrée au mode occupation du sol dans île
pendant Age du Bronze sa somme sur la métallurgie chypriote dans le monde
mycénien et le fascicule dévolu Chypre depuis le Néolithique la fin de
Age du Bronze pages destinées prendre place dans la deuxième puis avec
quelques modifications mineures dans la troisième édition de la Cambridge
Ancient Historyï la suite de ces trois publications et de celles particuliè
rement nombreuses de Vassos Karageorghis consacrées pour une bonne part
au Chypriote Récent12 on assisté ce il faut bien appeler sinon un
triomphe des thèses de école suédoise tout le moins leur très large diffu
sion Ainsi dans ces dernières années refusant bon droit accorder trop de
poids aux grandes quantités de poterie mycénienne IIIA2 et IIIB découvertes
dans île une écrasante majorité de chercheurs exclut en termes souvent défi
nitifs idée une présence grecque digne de ce nom dans île avant la fin du
xnie siècle voire les débuts du xne siècle13 Mais vers cette époque confrontés
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ces destructions multiples déjà évoquées et parfois attribuées aux Doriens
que certains archéologues débusquent maintenant derrière la Barbarian
ware les Achéens en grand nombre se seraient alors réfugiés Chypre où
ils auraient assuré la survivance une part au moins de héritage mycénien En
fait ceci constitue le plus remarquable des factoids dénoncés par Franz-
Georg Maier qui définit lui-même ce vocable Mere hypotheses or specula
tions which have not been proved and often cannot be proved) but which by
constant repetition attained the apparent rank of established fact 14
En fait une enquête combinatoire approfondie récente qui intègre la
fois les textes proche-orientaux contemporains de la période en litige et les don
nées archéologiques des régions concernées permet entrevoir comme il fallait
attendre une évolution historique beaucoup plus complexe que le processus
mécanique généralement envisagé15 Se dessine en effet en Méditerran&#