Pouvoir mystique, sorcellerie et structure sociale chez les Rukuba (Benue-Plateau State, Nigeria) - article ; n°3 ; vol.11, pg 71-111
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Pouvoir mystique, sorcellerie et structure sociale chez les Rukuba (Benue-Plateau State, Nigeria) - article ; n°3 ; vol.11, pg 71-111

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Description

L'Homme - Année 1971 - Volume 11 - Numéro 3 - Pages 71-111
41 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1971
Nombre de lectures 38
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Jean-Claude Muller
Pouvoir mystique, sorcellerie et structure sociale chez les
Rukuba (Benue-Plateau State, Nigeria)
In: L'Homme, 1971, tome 11 n°3. pp. 71-111.
Citer ce document / Cite this document :
Muller Jean-Claude. Pouvoir mystique, sorcellerie et structure sociale chez les Rukuba (Benue-Plateau State, Nigeria). In:
L'Homme, 1971, tome 11 n°3. pp. 71-111.
doi : 10.3406/hom.1971.367196
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1971_num_11_3_367196POUVOIR MYSTIQUE, SORCELLERIE
ET STRUCTURE SOCIALE CHEZ LES RUKUBA
(Benue - Plateau State, Nigeria)
par
JEAN-CLAUDE MULLER
La population rukuba vit à quelques kilomètres à l'ouest de la ville de Jos
située sur le Plateau Nigérian dans l'État Benue-Plateau de la Confédération
nigériane. Les Rukuba sont au nombre de 12 000 environ et la plupart d'entre eux
cultivent leurs champs à la houe pour assurer leur subsistance et, en cas de besoin,
obtiennent de l'argent liquide en travaillant pendant la saison sèche dans les
mines d'étain à ciel ouvert qui se trouvent sur le territoire tribal ou aux alentours.
Ce sont surtout les jeunes gens qui s'engagent ainsi dans les mines pour des
périodes de deux à trois semaines et qui retournent chez eux après chacun de ces
contrats à court terme, lesquels peuvent être renouvelés plusieurs fois pendant
l'année1.
La population tout entière est divisée en deux groupes exogamiques que
j'appelle « moitiés » bien qu'il n'existe aucun terme vernaculaire pour les désigner.
La filiation est ce qu'il est convenu d'appeler patrilinéaire et la résidence est patri-
virilocale. Ce système à moitiés résulte de l'interaction des règles du mariage pri
maire (mariage avec une jeune fille non mariée) et du mariage secondaire (mariage
avec une femme déjà mariée), règles qui fonctionnent de la manière suivante :
chaque moitié est composée d'un certain nombre d'unités que j'appelle unités pre
neuses d'épouses ; ces unités, le plus souvent localisées, comprennent tous les
membres qui ne peuvent contracter ni mariage primaire ni mariage secondaire
entre eux. En revanche, les hommes de chaque unité preneuse d'épouses peuvent
épouser des jeunes filles non mariées provenant de n'importe quelle unité semblable
appartenant à la moitié opposée et, également, les femmes déjà mariées de n'im-
1. Le matériel de cet article a été recueilli chez les Rukuba entre 1964 et 1967, alors que
l'auteur était employé à Jos (Nigeria) par l'Unesco. Des fonds de recherche ont été accordés
à par le Département d'Anthropologie de l'Université de Rochester, N. Y., — qui
en est ici remercié — pour compléter le travail de terrain durant l'été 1968. 72 JEAN-CLAUDE MULLER
porte quelle unité preneuse d'épouses appartenant à la même moitié. Comme tr
aditionnellement le divorce n'existe pas chez les Rukuba, une femme peut être
l'épouse simultanée de plusieurs maris faisant tous partie de la moitié opposée à la
sienne mais appartenant chacun à une unité preneuse d'épouses différente. Toutef
ois une femme doit cohabiter avec l'un quelconque de ses maris pendant une
année au moins, après quoi elle peut soit prolonger son séjour avec le même
homme, soit prendre un nouvel époux, soit encore retourner chez un mari qu'elle
a quitté au cours des années antérieures1.
La tribu est composée de 24 villages territorialement distincts dont la populat
ion varie entre 70 et 2 000 habitants. Un village peut être défini comme l'entité
politique minimale responsable pour toutes les personnes vivant sur un territoire
donné et qui comprend, d'abord, un noyau de mâles appartenant à la même moitié
et formant une unité preneuse d'épouses. Ce noyau est formé de plusieurs clans,
deux au minimum pour les plus petits villages et, dans ce cas, les clans sont tou
jours celui du chef et celui du gardien de la santé de tous les enfants des femmes
nées dans ce noyau central, c'est-à-dire les enfants des filles appartenant à l'unité
preneuse d'épouses. Dans la plupart des villages on trouve aussi d'autres clans
dont les chefs remplissent des fonctions au bénéfice du village tout entier : favoriser
ou réduire les pluies, préserver le village des influences maléfiques venant de l'ex
térieur comme de l'intérieur, convoquer les chasses collectives et agir comme porte-
parole du chef. Les clans sont divisés en sous-clans. Ceux-ci n'ont aucune fonction
politique ; ils réglementent les relations prémaritales qui se nouent entre garçons
et filles des différents sous-clans à l'intérieur d'une unité preneuse d'épouses
avant que les jeunes filles ne se marient dans la moitié opposée, de préférence
avec le fils de l'ex-amant de leur mère2.
Bien que les membres de la plupart des unités preneuses d'épouses se disent
issus d'un même ancêtre, ce n'est pas nécessairement toujours le cas et l'unité
preneuse d'épouses ne doit pas être assimilée, dans son essence, à un groupe de
descendance unilinéaire. L'unité preneuse d'épouses et donneuse de filles est une
unité politico-jurale que définit l'interdiction pour chaque membre masculin de
contracter des mariages secondaires avec les épouses des autres membres du
groupe, que celles-ci y résident avec eux ou vivent avec d'autres maris appartenant
à d'autres unités de la même moitié. Cette prohibition est enseignée lors de la
cérémonie aso qui clôt le cycle d'initiation par lequel tout jeune garçon doit passer.
Chaque village est formé au moins d'une unité preneuse d'épouses qui appart
ient, pour les questions matrimoniales, à l'une ou l'autre des moitiés. Ainsi trou-
vera-t-on des villages A et des villages B. Aucune moitié n'a de prépondérance
politique au niveau de la tribu. Mais lorsque sur le territoire d'un village A, par
1. Pour une courte description du système de mariage, cf. Muller 1969.
2.de plus amples renseignements sur cette question, cf. ibid. SORCELLERIE RUKUBA 73
exemple, vivent aussi un ou plusieurs groupes minoritaires appartenant à la
moitié B, ceux-ci sont politiquement dépendants du groupe majoritaire relevant
de A ; ils n'ont pas d'institutions politiques propres et n'ont d'autre fonction,
à l'intérieur du village, que celle d'assistants rituels du groupe majoritaire. Très
souvent ces groupes constituent de jure des unités preneuses d'épouses, possédant
une cérémonie d'initiation autonome pour le rituel aso, mais certains peuvent
aussi être formés de migrants appartenant à une autre unité preneuse d'épouses.
Dans ce dernier cas, politiquement dépendants du groupe majoritaire du village
où ils se sont établis, ils restent néanmoins rattachés rituellement à l'unité pre
neuse d'épouses dont ils sont originaires. Ces groupes minoritaires ne sont géné
ralement pas des clans1 et, de ce fait, ne possèdent pas d' « officier »2 chargé de
protéger le village des mauvaises influences extérieures et intérieures ; ils doivent,
pour ce genre d'affaires, s'adresser à la personne compétente du groupe majoritaire.
Dans les très petits villages où cet office n'existe pas, les problèmes sont traités par
la personne compétente du village le plus proche.
Tout village rukuba appartient à l'une des cinq sections rituelles localisées qui
divisent la tribu. Ces sections sont composées d'un village politiquement et rituell
ement supérieur, de ses dépendants directs et, éventuellement, des dépendants de
ses dépendants. Les fonctions politiques et rituelles sont quelquefois partagées
de manière ambiguë entre deux villages, mais on en trouve toujours un qui se
targue d'être la dernière instance judiciaire et politique à l'intérieur d'une section
rituelle. En fait, le degré d'indépendance effective des villages subordonnés varie
grandement de section à section.
Le concept de sorcellerie
Le concept de sorcellerie peut désigner, dans d'autres cultures, des phénomènes
proches de ceux que, dans la nôtre, il sert à regrouper ; mais il peut aussi recouvrir
ou faire partie d

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