Regards français sur la peinture allemande à l Exposition Universelle  de  1855 - article ; n°73 ; vol.21, pg 103-112
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Regards français sur la peinture allemande à l'Exposition Universelle de 1855 - article ; n°73 ; vol.21, pg 103-112

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Description

Romantisme - Année 1991 - Volume 21 - Numéro 73 - Pages 103-112
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 19
Langue Français

Extrait

Rachel Esner
Regards français sur la peinture allemande à l'Exposition
Universelle de 1855
In: Romantisme, 1991, n°73. pp. 103-112.
Citer ce document / Cite this document :
Esner Rachel. Regards français sur la peinture allemande à l'Exposition Universelle de 1855. In: Romantisme, 1991, n°73. pp.
103-112.
doi : 10.3406/roman.1991.5786
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1991_num_21_73_5786Rachel ESNER
Regards français sur la peinture allemande
à l'Exposition Universelle de 1855
Parmi les nombreux cas d'interaction dans le domaine des beaux-arts entre la
France et l'Allemagne au XIXe siècle, l'Exposition Universelle de 1855 offre un
excellent exemple de ce que Michel Espagne et Michael Werner ont appelé
« transferts culturels » \ Dans le cas de cette exposition, nous avons la certitude
qu'une série d'œuvres d'art a été vue par les critiques et le public français. Nous ne
sommes pas ici confrontés avec des idées ou des influences, dont la migration et
l'effet son souvent vagues et incertains, mais à un ensemble d'objets dont on peut
suivre le trajet vers la France et évaluer la réception dans ce pays. Ceci fait de
l'exposition de 1855 un champ particulièrement fertile pour l'étude de la réception
de l'art allemand au milieu du siècle. En examinant les réactions à cette expos
ition, le langage et les idéologies qui sous-tendent la critique, nous pourrons
mieux comprendre le rapport entre ces deux pays dans le domaine esthétique à ce
moment crucial.
L'Exposition Universelle de 1855 a été la première de son genre à inclure une
exposition internationale de beaux-arts 2. Si les artistes allemands avaient souvent
participé individuellement aux Salons annuels 3, ce fut alors seulement que les
critiques et le public purent regarder l'art allemand en masse en dehors de
l'Allemagne même. Bien que, dès 1855, les artistes les plus importants qui expo
saient fussent bien reconnus en Allemagne, ils étaient cependant pratiquement i
nconnus en France en dehors de certains milieux néo-catholiques 4. Cette « inva
sion » d'art étranger, venant non seulement d'Allemagne, mais aussi de vingt-sept
autres nations, força les critiques français pour la première fois à réfléchir série
usement sur les produits artistiques contemporains de pays autres que le leur.
Comme l'Allemagne n'était pas encore unifiée, il appartient aux royaumes,
aux principautés et aux Etats d'organiser individuellement leur propre exposition.
Huit d'entre eux au total envoyèrent des œuvres à Paris en 1855 : Baden-Nassau,
Bavière, Hanovre, Hesse, Prusse, Saxe, Wurtemberg, et les villes hanséatiques.
Le contingent prussien était le plus important, et avec 79 artistes et 143
peintures * il se classait au troisième rang des nations participantes pour le
nombre d'œuvres présentées. Les œuvres prussiennes étaient réparties dans la
moitié des trois grands salons carrés et partageaient les lieux avec l'art français 6.
Le deuxième participant allemand en importance fut la Bavière, avec 31 artistes et
65 œuvres. Le nombre total des exposants allemands était de 151 et le nombre
total des peintures de 265 7.
Si l'on s'en tient strictement aux quantités d'œuvres exposées, la contribution
allemande à l'Exposition Universelle consistait principalement en paysages (103,
ou 41%) puis en peintures de genre et d'histoire, cette dernière se plaçant seule
ment au troisième rang avec un total de 53 œuvres (21%) 8. Les proportions
ROMANTISME n°73 (1991 - Ш) Rachel Esner 104
étaient semblables pour les pays pris individuellement : la Bavière, par exemple,
exposait 26 paysages (40%), 15 tableaux de genre (23%) et 16 peintures d'histoire
(25%) ; les venant de Prusse formaient 45% de sa contribution (60
œuvres), les tableaux de genre 23% (31 œuvres), tandis que la peinture
représentait seulement 19% (25 œuvres). Le gouvernement français reconnut la
contribution allemande par un total de 29 récompenses, donnant respectivement
une Médaille d'Honneur et une Médaille de Première Classe aux peintures
d'histoire de Peter Cornélius et Wilhelm Kaulbach. Le peintre de genre Ludwig
Knaus et le portraitiste de la Cour de France, Franz-Xavier Winterhalter reçurent
aussi une Médaille de Première Classe 9.
Bien que certains critiques se crussent obligés de rendre hommage à l'idéologie
officielle de l'exposition - propager l'idée d'internationalisme et d'égalité de toutes
les nations participantes - 10, leur souci principal était de prouver que la peinture
française gardait la supériorité face à Г« invasion » étrangère représentée à
l'exposition internationale. Comment tenter de rester fidèle à la doctrine officielle
sans compromettre le rôle directeur de la France dans le monde de l'art, telle était
la question. Comme Patricia Mainardi le signale, les critiques résolurent le pro
blème en continuant à définir l'art étranger selon les « caractéristiques natio
nales ». Ceci leur permit d'apprécier la contribution de chaque pays selon ses
propres mérites, et d'empêcher en même temps les étrangers d'être un défi pour la
France. L'art français était défini comme « éclectique » ; comprenant ainsi tous
les styles et tous les genres, il pouvait être considéré comme un phénomène
« universel » plutôt que « national » ; c'était l'universalité qui le rendait supé
rieur n. Dans le cas de l'Allemagne, ces « caractéristiques nationales » venaient
de son penchant pour la philosophie et les choses de l'esprit, son manque d'intérêt
pour le sensuel et le matériel, en fait son incapacité de « voir » la réalité et la
couleur (peut-être due au climat gris de l'Allemagne) : en bref son « Inte
llectualisme », comme l'appelait Théophile Gautier, le critique officiel de l'exposi
tion 12.
Cette définition conduisit la critique de la section allemande à se concentrer
presque exclusivement sur les œuvres à sujets historiques ou religieux, bien que,
comme nous l'avons vu, cette catégorie de peinture ne représentât que 21% du
nombre total des peintures exposées. C'est ainsi que même l'œuvre d'Adolphe
Menzel, peintre eminent de « genre historique », Conversation de table à Sans-
Souci (1850, œuvre détruite), avec sa représentation de Voltaire à la cour de
Frédéric le Grand, n'attira que la plus minime attention. En conséquence, les
peintres les plus souvent discutés furent Peter Cornelius et Wilhelm von
Kaulbach, deux peintres renommés de sujets historiques, qui exposaient avec les
peintres prussiens 13. Bien qu'il n'exposât réellement aucune œuvre, beaucoup de
critiques français inclurent l'œuvre du « Nazaréen » Friedrich Overbeck dans leurs
articles critiques.
Comme il serait impossible d'examiner convenablement toute la critique con
sacrée à l'art allemand à l'Exposition Universelle de 1855, j'ai préféré me référer
aux écrits de trois auteurs de convictions politiques et esthétiques différentes :
Gustave Planche, Maxime Du Camp et Charles Perrier 14, et à ceux de trois
écrivains catholiques représentatifs : Bathild Bouniol, Claudius Lavergne et Louis
Joseph Hallez (peintre et étudiant d'Overbeck) dont l'intérêt pour la peinture
allemande était prépondérant, étant donné le désir avoué des Nazaréens de régénérer La peinture allemande à l'Exposition Universelle de 1855 105
l'art chrétien 1S. Bien que beaucoup d'autres critiques aient écrit sur les artistes
allemands en 1855, la critique a tendance à être répétitive et les opinions des
auteurs n'ont que de légères variations par rapport aux idées de base exprimées par
ceux que j'ai choisis. Avec cet échantillonnage, j'espère donner une idée des opi
nions impliquées dans le regard porté sur l'art allemand, et je voudrais démontrer
aussi leur étendue et leur variété, qui est, en fait, beaucoup plus grande - et plus
positive - qu'on n'a pu le supposer au premier abord.
L'un des critiques les plus influents de la section allemande de l'Exposition
est Gustave Planche dans la Revue des Deux Mondes. Pour Planche

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