Rencontre avec Pierrette Soumbou - article ; n°187 ; vol.47, pg 565-580
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Tiers-Monde - Année 2006 - Volume 47 - Numéro 187 - Pages 565-580
Anne Biadi-Imhof - A meeting with Pierrette Soumbou.
During an interview on the question of mental health, a Congolese woman in France talked about the advantages and insufficiencies of traditional collective methods of intervention. These approach psychiatric trouble not as an individual problem but as a social one. This collective means, aiming for basic overall mental health, does not enable an individual to appropriate his or her own history. An intermediary level of professional care that might allow that is missing. The dramatic events that have marked Congo's recent history hold clues for understanding how individuals'accounts of their suffering contribute to the reconstruction of a collective memory, yet without in any way curing the traumas experienced.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2006
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Anne Biadi-Imhof
Rencontre avec Pierrette Soumbou
In: Tiers-Monde. 2006, tome 47 n°187. pp. 565-580.
Abstract
Anne Biadi-Imhof - A meeting with Pierrette Soumbou.
During an interview on the question of mental health, a Congolese woman in France talked about the advantages and
insufficiencies of traditional collective methods of intervention. These approach psychiatric trouble not as an individual problem
but as a social one. This means, aiming for basic overall mental health, does not enable an individual to appropriate his
or her own history. An intermediary level of professional care that might allow that is missing. The dramatic events that have
marked Congo's recent history hold clues for understanding how individuals'accounts of their suffering contribute to the
reconstruction of a collective memory, yet without in any way curing the traumas experienced.
Citer ce document / Cite this document :
Biadi-Imhof Anne. Rencontre avec Pierrette Soumbou. In: Tiers-Monde. 2006, tome 47 n°187. pp. 565-580.
doi : 10.3406/tiers.2006.5671
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_2006_num_47_187_5671RENCONTRE AVEC PIERRETTE SOUMBOU
Anne Biadi-Imhof *
Au cours d'un entretien sur la question de la santé mentale,
une femme congolaise en France évoque les avantages et les
insuffisances de l'intervention traditionnelle à caractère col
lectif qui aborde le trouble psychique non pas comme un
problème individuel mais social. Cette approche collective
pour une santé mentale de base ne permet pas l'appropria
tion individuelle de son histoire. Il manque pour cela un
échelon intermédiaire de professionnels. Les grands événe
ments qui ont marqué l'histoire récente du Congo permettent
de comprendre comment la parole individuelle de la souf
france contribue à reconstruire une mémoire collective, sans
pour autant guérir les traumatismes.
PIERRETTE SOUMBOU : UN PARCOURS
Pierrette Soumbou est mariée, mère de 4 enfants.
Elle est née au Congo, d'une mère congolaise et d'un père mi-ghanéen
mi-portugais - son métissage la préservant, analyse-t-elle, d'entrer dans les diff
érends interethniques, mais ne l'en mettant pas à l'abri.
Elle a quitté le Congo Brazzaville en 1977 à 17 ans pour aller étudier en ex-URSS
durant 5 ans à l'Institut Polytechnique d'Odessa, puis à l'Institut d'Économie de
Plekhanov. Elle a obtenu un master en économie en 1982. Arrivée en France à l'âge
de 22 ans, elle y a suivi des études de 3e cycle en gestion et administration des
entreprises.
Après de vaines tentatives pour faire valoir ses diplômes sur le marché du
travail, elle se lance dans l'activité militante et solidaire, à la rencontre des femmes
non scolarisées désirant travailler, avec la volonté de sortir du carcan des
communautés.
* Sociologue, CNRS umr 7022-Université Paris VIII, grass (Groupe d'analyse du social et de la
sociabilité).
№ 187 -JUILLET-SEPTEMBRE 2006 - p. 565-580 - REVUE TIERS MONDE 565 Anne Biadi-ïmhof
En 1989, elle crée à Rouen I'asifa (Association Interculturelle des Femmes
Actives), qui met en place des ateliers gérés par des bénévoles en fonction de leur
savoir-faire, et où sont menées des actions de sensibilisation aux problèmes du
quartier (toxicomanie, violences, précarité...).
En 1995, elle ouvre avec cinq femmes « ifd Plein Sud » qui fait travailler des
femmes d'origines diverses dans une démarche d'entreprenariat collectif et d'éco
nomie solidaire.
En 1998, avec l'Agence Développement de l'Économie Locale elle crée
« Ré'actives » (Réseau d'activités d'économies solidaires) qui regroupe des initia
tives de femmes dans les zus (zone urbaine sensible).
TEMOIGNAGE OU DISTANCIATION CULTURELLE ?
La rencontre avec Mme Soumbou offre le témoignage d'une personne dont la
famille - grands parents, parents, frères et sœurs et entourage proche - a eu à vivre
des périodes particulièrement difficiles et éprouvantes pour l'équilibre psychique,
liées aux divers événements historiques qu'a traversé le Congo Brazzaville.
Mme Soumbou a quitté le Congo à 17 ans pour faire des études supérieures en
URSS. C'est sans doute cette prise de distance qui lui permet le recul culturel dont
elle fait preuve, auquel s'ajoute un engagement associatif militant. Cet échange est
aussi une opportunité pour questionner la distanciation culturelle, c'est-à-dire la
réflexivité que l'on peut avoir sur sa propre culture. Au-delà de son expérience,
Mme Soumbou s'interroge sur ce qui « fait culture », sur ce qui permet, ou ne
permet pas à une société en adaptation constante de tisser ou de retisser les liens
entre le collectif et l'individuel. L'importance qu'elle accorde à la parole et à la
mémoire dans ce processus psychique d'adaptation invite à questionner le fonc
tionnement de ces mêmes mécanismes dans notre société.
Concernant les ressources de son témoignage, elle ne prétend pas être au fait
de la situation sanitaire exacte de son pays dans le domaine de la santé mentale.
Parallèlement, les événements historiques qu'elle mentionne sont peu développ
és, en revanche elle nous donne accès à la dynamique « sociétale » d'un certain
nombre de pratiques culturelles. En quelque sorte elle s'interroge sur leur effica
cité et leur insuffisance en termes de logique de civilisation.
Elle analyse notamment une vision du monde communautaire et collective
dans laquelle la santé mentale n'est pas vécue sur un registre personnel mais
comme un problème social. Les personnes n'y sont pas « pointées » comme
malades ayant une part de responsabilité dans leur maladie, c'est le groupe, la
« communauté » qui est porteuse du problème et qui doit parvenir, avec l'aide de
ses médiateurs (guérisseurs), à restaurer l'un des siens fragilisé dans ses liens
sociaux. Cette « vision du monde » offre l'avantage incontestable d'assurer une
« santé mentale de base » mais rend difficile en revanche une appropriation
individuelle des événements vécus.
Dans la situation africaine dont parle P. Soumbou, la responsabilisation collec
tive de la santé mentale épargne de désigner l'individu comme malade, mais en
566 REVUE TIERS MONDE - № 187 -JUILLET-SEPTEMBRE 2006 Rencontre avec Pierrette Soumbou
conséquence elle ne permet pas qu'une personne soit reconnue dans sa souf
france individuelle et encore moins qu'elle se vive comme victime. Elle protège
encore un peu de la discrimination et de l'isolement, du moins tant que la situation
n'est pas trop grave, mais elle s'adapte mal au processus d'individualisation que
rencontrent les sociétés africaines ouvertes à la mondialisation.
L'espace d'écoute individuelle par des « professionnels de la santé mentale »
qui manque dans la société congolaise pose la question du statut de la parole et du
travail de mémoire produit par cette parole. Selon la place qui lui est accordée et
la vision du monde qui la soutient, la parole peut en effet produire de la victimi
sation et de l'exacerbation identitaire ou au contraire retisser du lien social et de la
mémoire collective.
En France, cette problématique entre en résonance avec la démarche sociale et
politique « de réappropriation du sens du soin et des pratiques thérapeutiques »
devant ce mal être généralisé nommé « souffrance psychique » dont témoigne
l'ouvrage de Jean-Pierre Martin *, démarche menée par des soignants sur le terrain
de la « psychiatrie communautaire ». Ces intervenants, en facilitant un accès aux
soins 24 heures sur 24 sur les lieux de vie, cherchent à faire se rencontrer une
« demande sociale de soins et l'engagement dans une démarche thérapeutique ».
C'est l'espoir pour les soignants d'utiliser le temps de la crise psychique pour
amorcer une problématique du sujet, avec en parallèle un « mouvement "aller-
vers" le domicile, le lieu d'accueil social ou associatif», pour y trouver des « tiers »,
sensibles à ces situations de catastrophe, et capable d'offrir des ressources « com
munautaires ». Dans cette perspective communautaire à la française, la dimension
sociale de la responsabilité renvoie à un registre essentiellement politique, celui
de l'État qui, de par le régime soci

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