Stratégies de lutte contre la disette au Sénégal oriental - article ; n°1 ; vol.56, pg 35-50
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Description

Journal des africanistes - Année 1986 - Volume 56 - Numéro 1 - Pages 35-50
Abstract In 1983, there was a severe drought (752 mm) in eastern Senegal. Whereas all farmers responded to the consequent dearth by practising intensive gathering — an activity that had been gradually abandoned — and even fishing resumed importance, their other responses, since these «wild» foods could not make up for crop shortages, varied depending on the ethnic group : some sold cattle, others borrowed money or else tried to earn some by looking for work in towns during the dry season: or by working in the fields of other farmers during the rainy season. One group intensified its gold-seeking activities, which used to be limited to old women. Aid sent by immigrants to their families in the villages also counted as a function of the ethnic group. Although rainfall has since then risen to more than 1 000 mm, aftereffects of the drought still remain
Résumé L'année 1983 a été marquée au Sénégal oriental par une sécheresse prononcée (752 mm) qui a abouti à une disette sévère. Pour pallier cette pénurie, les agriculteurs ont utilisé des stratégies différentes selon les groupes ethniques. Tous ont pratiqué une cueillette intensive, qui avait été peu à peu abandonnée. La pêche reprit aussi de l'importance. Par ailleurs, ces nourritures «sauvages» ne suffisant pas pour compléter les récoltes déficitaires les agriculteurs ont suivant les groupes étudiés : vendu leur bétail, emprunté de l'argent, essayé d'en gagner en cherchant du travail en ville en saison sèche ou en travaillant dans les champs des autres en saison des pluies. Une des populations a beaucoup intensifié sa pratique de l'orpaillage traditionnellement limitée aux vieilles femmes. Enfin des aides gratuites, envoyées entre autres par les immigrés à leur famille restée au village, ont joué un rôle plus ou moins important suivant les groupes étudiés. Si la pluviométrie est remontée depuis au-dessus de 1 000 mm bien des séquelles de la disette subsistent encore aujourd'hui.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Th. de Lestrange
Madame Monique Gessain
D. Fouchier
G. Crépy-Montal
Stratégies de lutte contre la disette au Sénégal oriental
In: Journal des africanistes. 1986, tome 56 fascicule 1. pp. 35-50.
Résumé L'année 1983 a été marquée au Sénégal oriental par une sécheresse prononcée (752 mm) qui a abouti à une disette
sévère. Pour pallier cette pénurie, les agriculteurs ont utilisé des stratégies différentes selon les groupes ethniques. Tous ont
pratiqué une cueillette intensive, qui avait été peu à peu abandonnée. La pêche reprit aussi de l'importance. Par ailleurs, ces
nourritures «sauvages» ne suffisant pas pour compléter les récoltes déficitaires les agriculteurs ont suivant les groupes étudiés :
vendu leur bétail, emprunté de l'argent, essayé d'en gagner en cherchant du travail en ville en saison sèche ou en travaillant
dans les champs des autres en saison des pluies. Une des populations a beaucoup intensifié sa pratique de l'orpaillage
traditionnellement limitée aux vieilles femmes. Enfin des aides gratuites, envoyées entre autres par les immigrés à leur famille
restée au village, ont joué un rôle plus ou moins important suivant les groupes étudiés. Si la pluviométrie est remontée depuis au-
dessus de 1 000 mm bien des séquelles de la disette subsistent encore aujourd'hui.
Abstract In 1983, there was a severe drought (752 mm) in eastern Senegal. Whereas all farmers responded to the consequent
dearth by practising intensive gathering — an activity that had been gradually abandoned — and even fishing resumed
importance, their other responses, since these «wild» foods could not make up for crop shortages, varied depending on the
ethnic group : some sold cattle, others borrowed money or else tried to earn some by looking for work in towns during the dry
season: or by working in the fields of other farmers during the rainy season. One group intensified its gold-seeking activities,
which used to be limited to old women. Aid sent by immigrants to their families in the villages also counted as a function of the
ethnic group. Although rainfall has since then risen to more than 1 000 mm, aftereffects of the drought still remain
Citer ce document / Cite this document :
de Lestrange M. Th., Gessain Monique, Fouchier D., Crépy-Montal G. Stratégies de lutte contre la disette au Sénégal oriental.
In: Journal des africanistes. 1986, tome 56 fascicule 1. pp. 35-50.
doi : 10.3406/jafr.1986.2109
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0399-0346_1986_num_56_1_2109MARIE-THÉRESE DE LESTRANGE, MONIQUE GESSAIN,
DANIELE FOUCHIER, GHISLAINE CRÉPY-MONTAL
STRATÉGIES DE LUTTE CONTRE LA DISETTE AU SÉNÉGAL ORIENTAL
Donne-nous de la pluie, assez et un peu plus...
J'accepte . de périr noyé si telle est : ta volonté,
mais ne m'ôte pas la vie par tes caprices, ne me
tues pas par ta parcimonie. Surtout pas de sécher
esse, ciel ! ciel !
(Karen Blixen, La femme africaine.)
Depuis: I960,, le Centre de recherches anthropologiques du musée de
l'Homme poursuit des recherches dans les différentes populations du départe
ment de Kédougou. L'Ethnobotanique tenda publiée en 1970 citait plus de 85
plantes sauvages consommées, certaines essentiellement en période de disette.
Uni autre volume des Documents du CR АМН, consacré à> l'alimentation des :
Bassari, Peuls et Boïn du département de Kédougou donne des renseignements
sur l'usage et la préparation des produits de cueillette consommées en période ;
de pénurie1 .
Une enquête sur. l'alimentation en période de disette (juin-septembre
1984), proposée par M; Gessain chez les Bassari, fut reprise par M.-Th. de
Lestrange chez les Peuls et Boïn et par D. Fouchier chez les Diallonké. Elle
fut complétée en 1985 par G. de Crépy -Montai chez les Bassari et Malinké,
tandis que D. Fouchier faisait, de même chez les Diallonké et M.-Th. de
Lestrange chez les Peuls. et Boïn. A partir des documents ainsi réunis, Marie-
Thérèse de Lestrange a rédigé le texte ci-dessous, dont l'essentiel avait été
exposé par les auteurs à la séance de la-Société des africanistes tenue le 25
février 1986.
De tous temps la sécheresse a dû être ce qu'elle est encore de nos jours,
une des grandes craintes du cultivateur. Dans les régions où la vie repose enti
èrement sur les fruits du travail agricole, ses conséquences sont: encore plus
importantes qu'ailleurs. C'est le cas bien entendu du Sénégal oriental, où des
1. «Il ne faut pas confondre la famine qui est un manque total de produits alimentaires dans un pays,
avec la disette qui est la pénurie de vivres en certains points, due à une récolte déficitaire.» Diction
naire Larousse en trois volumes 1966.
Journal des africanistes, 56 (1) 1986 : 35-50. .
MARIE-THERESE DE LESTRANGE 36
pluies insuffisantes aboutissant à de mauvaises récoltes provoquent une disette
plus ou moins générale dont les conséquences se font sentir pendant plusieurs
années. Disette en bassari se dit «regarder en l'air». Peut-être faut-il y voir une
allusion à la recherche des nuages annonciateurs de pluie et antidote de la
famine.
Comparables aux. rogations de l'Eglise catholique,, des rites destinés : à
appeler la pluie sont pratiqués par ces paysans du Sénégal oriental. Pour les
quand' les pluies tardent, les chenilles sortent de terre. Il faut alors ; Bassari,
faire un sacrifice wobdta or bidien, où les chenilles sont offertes aux oiseaux.
A Etyolo, c'est une chèvre qui sera offerte en sacrifice au sommet de la colline
Pate. Les Malinké immolent un bœuf sur la place du village et offrent des
grains de mil et de riz au premier «étranger» qui y passe. Un autre rituel,
considéré comme le plus efficace, consiste en l'offrande de noyaux de fruits
de karité qui. sont ensuite jetés dans un cours d'eau. Il existe aussi, toujours
chez les Malinké; une danse kuba kuba pour appeler la pluie. Les Diallonké
t'ont une «charité», c'est-à-dire: distribuent de l'argent ou du grain aux vieux
■et aux «étrangers».
L'existence de ces rites comme celle de nombreux proverbes concernant
la pluie ou la disette montre bien l'importance de ces deux phénomènes et de
leur liaison dans la conscience de ces populations.
Si l'on; peut ' considérer le Sénégal oriental comme relativement privilé
gié jusqu'à présent par rapport à d'autres régions du Sénégal et de pays voisins,
l'évolution de la pluviométrie aux environs de Kédougou depuis 1919 ne laisse
pas d'être inquiétante.
Le diagramme illustre l'évolution des précipitations depuis 1919Î (Les
chiffres manquent entre 1958 et 1962, période de l'accession du Sénégal •
à l'indépendance2 .). La moyenne pour la période: 1919-1957 (39 ans) atteint
1 312 mm, elle n'est plus que de 1 186 mm entre 1962 et 1986. Si l'on étudie
l'évolution de la pluviométrie au cours de la période la plus récente, on constate
une baisse continue de la hauteur des précipitations. (Nous avons arbitrair
ement divisé cette période en trois tranches de 8,8 et 9 ans.)
1Г apparaît également que dans la période 1919-1958, trois années seulement
ont vu des précipitations inférieures à: 1 000 mm, alors que l'on en , trouve
également trois au cours de la dernière période de 9 ans dont la dernière, avec
752 mm, atteint un niveau encore jamais enregistré. Par ailleurs, si l'on trouve
quatorze années où la pluviométrie dépasse 1 500 mm dans la première période
de 39 ans, iKn'y en a plus qu'une au cours de la seconde de 25 ans. Si cette
évolution devait: continuer, les conséquences, pourraient être dramatiques,
car non seulement les récoltes pâtissent des déficits pluviaux, mais les puits ne
viendraient-ils pas à tarir par épuisement de la nappe phréatique ?
Cette tendance générale vers une sécheresse de plus en plus grande est
déplorée par les cultivateurs qui ne sont guère conscients de leur responsabilité
2. Les données qui ont servi à l'établissement de ce diagramme sont celles de la météorologie natio
nale, station de Kédougou jusqu'en 1980. Ensuite les chiffres concernent Salemata. •
STRATÉGIES DE LUTTE CONTRE LA DISETTE AU SÉNÉGAL ORIENTAL 37.
dans cette évolution. En effet, le

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