Sur les phénomènes intellectuels - article ; n°1 ; vol.2, pg 54-69
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Description

L'année psychologique - Année 1895 - Volume 2 - Numéro 1 - Pages 54-69
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1895
Nombre de lectures 8
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

B. Bourdon
Sur les phénomènes intellectuels
In: L'année psychologique. 1895 vol. 2. pp. 54-69.
Citer ce document / Cite this document :
Bourdon B. Sur les phénomènes intellectuels. In: L'année psychologique. 1895 vol. 2. pp. 54-69.
doi : 10.3406/psy.1895.1528
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1895_num_2_1_1528IV
RECHERCHES SUR LES PHÉNOMÈNES INTELLECTUELS
Pour les recherches dont il va être rendu compte, j'ai pro
cédé de la manière suivante : j'ai écrit 500 mots, chacun sur un
bout de papier, j'ai placé les 500 bouts de papier dans une boîte,
puis j'ai pris au hasard successivement chacun d'eux et noté
les deux premières idées suggérées par chaque mot. Je n'ai
généralement pas voulu noter plus de deux idées, parce que
j'eusse été souvent incertain de leur ordre d'apparition : une
pareille incertitude peut même se produire dans le cas de deux
idées seulement notées. Parfois aussi je n'ai relevé qu'une
idée, parce qu'il ne s'en présentait pas assez tôt une seconde ;
certains mots en effet provoquent une représentation dont
l'esprit a quelque peine à se débarrasser, tandis que d'autres
provoquent facilement et promptement plusieurs représen
tations successives. On verra aussi notés quelquefois des phé
nomènes qui ne sont pas à proprement parler des
tations: tels sont une attention, un sens de mot.
Les résultats qui vont être rapportés n'ont qu'une valeur
individuelle. Il n'eût guère été possible de trouver des personnes
disposées à se prêter à des recherches longues et minutieuses
telles que les présentes. C'est à chacun de ceux qu'intéresse la
psychologie de refaire pour lui-même de pareilles recherches
-et d'en publier les résultats ; lorsque l'on disposera d'un certain
nombre de ces monographies, on pourra les comparer et for-
jnuler quelques conclusions générales.
Il ne faut d'ailleurs pas s'exagérer ce caractère individuel
des résultats qui vont être rapportés. Il est très probable qu'il
m'y est fortement marqué qu'en ce qui concerne l'analyse quant
itative, mais que l'analyse qualitative fournira sensiblement
les mêmes éléments pour quiconque voudra faire des recherches B. BOURDON. — SUR LES PHÉNOMÈNES INTELLECTUELS 55
analogues ; en d'autres termes, quelque autre pourra constater
chez lui une plus forte proportion de représentations de cou
leur, par exemple, mais en somme elles ne font pas défaut ici.
Les principaux phénomènes suggérés ont été les suivants :
1° Une représentation non verbale ;
2° Une verbale (mot ou expression) ;
3° attention à des objets ou à des phénomènes voisins ;
4° Un sentiment de connu, sans représentation ;
5° Une prononciation mentale emphatique ;
6° Un sens.
1° Représentations non verbales. — Telles sont la représen
tation ou l'image d'un arbre, d'une couleur, d'un mouvement,
d'un bruit, etc. Je fais aussi rentrer dans ce groupe des repré
sentations d'émotions.
2° Représentations verbales. — II s'agit ici de mots ou d'ex
pressions, parfois même de phrases entendus, articulés,
vus, etc., mentalement. Ces représentations ont été à peu près
exclusivement motrices-auditives ; quelques cas très rares de
vue de mots se sont aussi produits.
3° Attention à des objets ou à des phénomènes voisins. —
Ainsi un mot comme cinq peut diriger l'attention sur la main ;
dans ce cas il y a perception. Mais peut être aussi
représentative, et alors il y a interférence entre ce troisième
groupe et le second : tel est le cas lorsque par exemple l'atten
tion se dirige sur la représentation d'un meuble que l'on a der
rière le dos.
4° Sentiment de connu, sans représentation. — Des noms
propres ont provoqué ce phénomène : ainsi en entendant ou
lisant un mot comme Berthe, on peut n'y associer de prime
abord aucune représentation, mais on peut sentir néanmoins
qu'on connaît ce nom-là. Le même phénomène pourrait être
provoqué par des mots d'une langue étrangère avec laquelle on
ne serait pas très familier.
5° Prononciation mentale emphatique. — Ainsi, à la vue du
mot phrase, au lieu d'associer une représentation, par exemple
la vue d'un passage d'un livre, à ce mot, on prononcera menta
lement avec emphase le mot lui-même (Phrases/). Ce groupe
pourrait peut-être se rattacher au premier, ces prononciations
emphatiques étant alors considérées comme des représentations
d'émotions. Le phénomène est du reste rare. 56 MÉMOIRES DES COLLABORATEURS
6° Sens. — Parfois l'attention s'arrête sur le sens du mot,
sans qu'il y ait représentation véritable. C'est ainsi qu'en lisant
rapidement, surtout s'il s'agit de choses abstraites, on comprend
le sens de ce qu'on lit, mais on n'a pas de représentations pro
prement dites. On peut comparer le sens des mots, sur la
nature duquel il sera d'ailleurs discuté un peu plus loin, au
sentiment de connu dont il a été question ci-dessus. Le sens
des mots se manifeste très nettement dans certains cas, c'est
lorsque le mot qu'on considère est amphibologique : on sent
alors parfois l'attention osciller d'un sens à l'autre, chacun des
sens mettant l'autre en relief ; exemples : mémoire, neuf, poli.
Les mots qui ont suggéré deux représentations non verbales
sont ceux que l'on peut appeler les plus concrets. Tels sont :
ouest, nuage, tonnerre, chien, orme, hauteur, frêne, sapin,
armoire, etc. On est surpris de trouver parmi ces mots un,
définition, question, et deux ou trois autres ; les représenta
tions provoquées par un ont été celle du chiffre 1, puis celle du
chiffre "1 (représentations visuelles) ; définition m'a fait voir
des pages du traité de logique de Wundt, question les signes
interrogatifs français, puis espagnols.
Les mots qui n'ont suggéré que des représentations ver
bales sont au contraire, en général, ceux qui désignent les
idées les plus abstraites (au sens vulgaire du mot abstrait).
Tels sont : lundi, hypothèse, mars, idée, comparaison, six,
nombre, profession, demain, orthographe, parfait, lui, absolu,
rien, siècle, raisonner, mardi, jeudi, samedi, devoir, mille,
quelquefois, toujours, morale, devoir, vérité, animal, etc.
On remarque aisément parmi ces mots qui ne suggèrent de
prime abord que des mots la prédominance de noms de temps
(jours de la semaine, mois, etc.), de noms de nombre, de noms
de choses philosophiques (parfait, absolu, etc.). Il est assez
curieux de rencontrer parmi ces mots même hier et demain,
et les noms des nombres peu élevés, deux, quatre, six, sept,
huit. Le fait qu'on y trouve même deux et bien que
les nombres désignés par ces mots soient facilement percept
ibles et imaginables, tient sans doute au caractère essentie
llement verbal de notre science arithmétique.
Entre ces deux extrêmes de l'abstraction et de la concrétion,
nous trouvons les mots qui provoquent d'abord une représen
tation non verbale, puis une représentation verbale et ceux
qui provoquent les deux mêmes phénomènes, mais dans
l'ordre inverse. En réalité, ces mots désignent des choses BOURDON. — SUR LES PHÉNOMÈNES INTELLECTUELS 57 B.
beaucoup plus concrètes qu'abstraites, et le fait n'a rien de
surprenant : même lorsque nous pensons à des objets très
concrets, nous sommes fortement poussés à les nommer, à
prononcer mentalement quelque chose à leur sujet; il existe
même des hommes pour qui penser sans parler mentalement
est presque une impossibilité : tels semblent être ceux qui ont
reçu une éducation extrêmement verbale, ceux qui s'adonnent
à des sciences verbales comme les mathématiques, la philo
sophie, l'étude des langues. En outre, tous ceux qui ont de
vives dispositions naturelles à parler à haute voix en ont pro
bablement aussi à parler mentalement, et leur pensée, même
lorsqu'elle porte sur des objets aussi concrets que possible,
doit tendre à prendre une forme relativement abstraite.
Une forte préoccupation involontaire, la plus persistante

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