Systèmes de succession et de dotation en Yougoslavie et en Turquie - article ; n°3 ; vol.7, pg 25-47
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Systèmes de succession et de dotation en Yougoslavie et en Turquie - article ; n°3 ; vol.7, pg 25-47

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Description

L'Homme - Année 1967 - Volume 7 - Numéro 3 - Pages 25-47
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 46
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jean Cuisenier
Systèmes de succession et de dotation en Yougoslavie et en
Turquie
In: L'Homme, 1967, tome 7 n°3. pp. 25-47.
Citer ce document / Cite this document :
Cuisenier Jean. Systèmes de succession et de dotation en Yougoslavie et en Turquie. In: L'Homme, 1967, tome 7 n°3. pp. 25-
47.
doi : 10.3406/hom.1967.366893
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1967_num_7_3_366893SYSTÈMES DE SUCCESSION ET DE DOTATION
EN YOUGOSLAVIE ET EN TURQUIE
par
JEAN CUISENIER
Opposer masculinité et féminité comme deux pôles dans un système de valeurs,
et non comme deux déterminations à fondement biologique, est certes le point
de départ obligé de toute interrogation sur la différenciation sexuelle des rôles
dans les systèmes sociaux. Mais à Margaret Mead, dont c'est l'une des thèses
principales1, on ne peut manquer de répondre, comme Morris Zelditch, que « si
nous devons accepter la théorie selon laquelle cette forme prédominante de diff
érenciation n'est pas inhérente à la constitution biologique, alors les observations
nécessaires pour en administrer la preuve semblent montrer plutôt que la diff
érenciation des rôles est dépourvue de toute espèce de fondement biologique »2.
Si l'on soumet en effet les matériaux de Margaret Mead à un nouvel examen,
on s'aperçoit que sa thèse n'est guère qu'un paradoxe, soutenable à la condition
seulement de s'abstenir de toute précision dans la définition des systèmes auxquels
se réfèrent les comportements. Margaret Mead remarque, en effet, que chez les
Arapesh de Nouvelle-Guinée, par exemple, les pères répugnent à exercer toute
discipline sur leurs enfants et à accepter toute autorité, mais que les frères de la
mère, eux, font régner un certain ordre dans l'univers domestique et n'hésitent
pas à remplir les tâches de gouvernement dans la maisonnée. Or il ne suit null
ement de là, comme Margaret Mead l'infère, que chez les Arapesh les hommes
soient plus « maternels » ni que l'autorité soit une prérogative moins « masculine »
que ce n'est le cas dans la culture de référence choisie par l'auteur, celle des États-
Unis contemporains. Ces hommes en effet, qui, comme pères, répugnent à exercer
1. Cf. en particulier, M. Mead, Sex and temperament, New York, William Morrow and
C°, 1935-
2. M. Zelditch Jr., « Role différenciation in the nuclear family. A comparative study »,
in T. Parsons et R. Bales, Family, socialization and interaction process, Glencoe, The
Free Press, 4e éd., 1964, p. 322. JEAN CUISENIER 26
des fonctions disciplinaires, sont les mêmes qui, comme frères de mères, n'hésitent
pas à infliger blâmes et châtiments. Leur conduite n'est ni plus « maternelle »,
ni moins « masculine » que d'autres : elle est alternativement autoritaire ou non,
selon la situation à laquelle elle se réfère. Il n'est donc nullement nécessaire de
rechercher, pour prouver que la différenciation sexuelle des rôles n'est pas innée,
des sociétés dans lesquelles les rôles seraient peu différenciés. L'appartenance
multiple est au contraire de règle dans toutes les sociétés humaines, même les
moins complexes, et ce sont toujours les mêmes hommes et les mêmes femmes
qui remplissent des rôles différents dans les divers sous-systèmes identifiables
au sein des systèmes de parenté1.
Pareillement, si l'on veut faire apparaître les effets différentiels d'un système
de transmission des biens selon que la voie en est masculine ou féminine, il n'est
nullement nécessaire de rechercher des sociétés patrilinéaires et de les opposer
globalement à des sociétés matrilinéaires. Outre que l'imputation de la patri-
linéarité ou de la matrilinéarité à une société n'est pas une tâche aussi simple
qu'on le croyait naguère2, c'est en toute humaine, et non pas dans certaines
sociétés seulement, que contrôle masculin et contrôle féminin s'opposent quant
aux dispositifs de régulation de la circulation des biens. Dans les sociétés les plus
typiquement patrilinéaires en effet, comme la société arabe préislamique, les
patrimoines en troupeaux et en terres transitent, certes, par les hommes. Les
femmes cependant ne sont pas dépourvues de tout droit sur les héritages, comme
le montre l'obligation où se trouvent les frères de faire un don aux sœurs quand
ils entrent en possession des biens paternels, et de le répéter dans certaines ci
rconstances rituellement définies. Les alliances, il est vrai, sont contractées par
les hommes, qui ont pouvoir de décision sur les femmes, et qui usent de ce pouvoir
à des fins stratégiques. Les biens échangés à l'occasion des mariages échappent
donc pour la plupart au contrôle féminin, mais non pas tous : certains biens
de prestige, comme les parures et les bijoux, puis, après l'islam, les douaires,
sont exclus de la sphère de contrôle masculine dès qu'ils ont été affectés, sans
que l'on puisse dire, toutefois, qu'ils entrent dans un véritable réseau de circula
tion féminin. Si en outre les femmes, comme conjointes possibles, n'ont aucun
pouvoir dans la détermination des alliances, elles ne sont pas sans contribuer,
comme mères, à l'élaboration des tactiques matrimoniales. Là même, donc, où la
circulation des biens est le plus directement sous contrôle des hommes, les femmes
agissent aussi, dans une certaine mesure, sur les dispositifs qui en règlent le
fonctionnement. On ne discerne, en vérité, dans aucun système de transmission
des biens, de voies qui seraient en soi « masculines » ou « féminines ». On distingue
1. Ibid., p. 323.
2. G. P. Murdock, « Double descent », American Anthropologist, 1940, vol. 42, pp. 555 sq. ;
J. Goody, « The classification of double descent systems », Current Anthropology, fév. 1961,
pp. 3 sq. SUCCESSION ET DOTATION 27
fort bien, en revanche, des différences selon les sexes quant à la maîtrise des
dispositifs qui, par l'héritage et la dotation, font circuler les patrimoines dans les
réseaux de parents et d'alliés.
Or rien n'exprime mieux, probablement, la position respective des sexes que
l'étendue et les modalités de ces pouvoirs. Si l'on oriente l'investigation vers
l'étude des mouvements de biens qui ont pour canaux les réseaux de filiation et
d'alliance, et si l'on fait abstraction des mythes et des rites qui animent ces échanges,
on limite certes l'interrogation à l'un des sous-systèmes qui se laissent discerner
dans les systèmes de succession et de dotation. On rend possible, cependant,
la quantification des phénomènes, indispensable préliminaire de toute analyse
structurale des sociétés complexes, pour l'intelligibilité desquelles la construction
de modèles statistiques n'est pas moins nécessaire que l'édification de modèles
géométriques1.
Mais à cette fin, une plus complète elucidation des concepts directeurs est
requise, à laquelle on ne saurait parvenir sans fixer au préalable un certain
nombre de définitions.
Définitions.
a) Réseaux d'ascendance et réseaux d' alliance.
L'ensemble ordonné des ancêtres d'un couple i,j forme le réseau d'ascendance
des i,j. Si loin que l'information disponible permette de remonter, les réseaux
d'ascendance saisissables empiriquement ne sont toutefois que des parties du
réseau définissable théoriquement. Par convention, on appellera réseau d'ascen
dance l'ensemble des ancêtres identifiables.
L'ensemble ordonné des alliés de i et de j forme le réseau d'alliance du
couple i,j. Comme pour les réseaux d'ascendance, seule une partie des réseaux
d'alliance est empiriquement saisissable. On appellera réseau d'alliance l'ensemble
des alliés identifiables.
b) Réseaux réduits.
Si l'objectif d'une étude de l'alliance et de la filiation est de rechercher comment
certains biens, certains titres et certains droits sont transmis d'une génération à
une autre et d'une descendance à une autre, seuls peuvent être retenus ceux des
ancêtres qui ont eu plus d'un descendant, ceux des al

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