Transition  politique,  « paysans »  et  « entrepreneurs agricoles » en Afrique australe - article ; n°153 ; vol.39, pg 119-144
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Tiers-Monde - Année 1998 - Volume 39 - Numéro 153 - Pages 119-144
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Roger Meunier
Transition politique, « paysans » et « entrepreneurs agricoles
» en Afrique australe
In: Tiers-Monde. 1998, tome 39 n°153. pp. 119-144.
Citer ce document / Cite this document :
Meunier Roger. Transition politique, « paysans » et « entrepreneurs agricoles » en Afrique australe. In: Tiers-Monde. 1998,
tome 39 n°153. pp. 119-144.
doi : 10.3406/tiers.1998.5222
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_1293-8882_1998_num_39_153_5222TRANSITION POLITIQUE, «PAYSANS»
ET «ENTREPRENEURS AGRICOLES»
EN AFRIQUE AUSTRALE
par Roger Meunier*
La fin des dominations blanches en Afrique australe a actualisé la
question de la réforme agraire et de la redistribution foncière. Bien que
l'ampleur de la dépossession subie par les communautés africaines suggère
des mesures radicales, celles-ci se heurtent à des obstacles à la fois écono
miques, politiques et sociaux, renforcés par les nouvelles contraintes liées à
la mondialisation et aux politiques d'ajustement structurel. Depuis quinze
ans, le Zimbabwe reste à la recherche d'une réforme agraire introuvable.
Quant au nouveau pouvoir sud-africain, il semble s'orienter vers une redis
tribution foncière limitée. En l'absence d'une véritable mobilisation popul
aire pour la terre, les partisans d'une réforme agraire radicale se trouvent
marginalisés. De fait, l'ANC s'est rallié aux vues de la Banque mondiale
visant à la constitution d'un nouveau secteur paysan, composé de petits
producteurs familiaux orientés vers le marché, tout en laissant en place une
grande partie des fermes blanches et l'agriculture de survie ou de complé
ment présente dans les anciens bat ous tans.
La dépossession foncière massive des communautés indigènes const
itue un point commun de l'histoire coloniale de l'Afrique du Sud, du
Zimbabwe (ex-Rhodésie) et de la Namibie. Dans ces trois pays, depuis
environ un siècle, s'est mise progressivement en place une structure
duale de l'agriculture opposant un secteur traditionnel, cantonné dans
des réserves et faiblement orienté vers le marché, et un secteur agro-past
oral contrôlé par des fermiers blancs, bénéficiant du soutien de l'Etat
colonial, et présentant les traits d'une agriculture capitaliste, assurant à
la fois la subsistance des villes et une participation active au commerce
* École des hautes études en sciences sociales et GDR 846 du CNRS.
Revue Tiers Monde, t. XXXIX, n° 153, janvier-mars 1998 Roger Meunier 120
international des produits agricoles. La récente arrivée au pouvoir de la
majorité noire, qui dans les trois cas s'est faite dans le cadre de transi
tions politiques négociées, actualise une question agraire complexe,
riche d'implications politiques et économiques, alors que jusque-là
n'était envisagée qu'une question foncière, essentiellement posée en
termes idéologiques. Dans les formulations les plus fréquentes, on about
issait à une aporie mettant fondamentalement en cause la légitimité du
processus colonial, l'opposition des droits historiques collectifs des
anciens possesseurs de la terre - les communautés indigènes exigeant la
restitution de la terre ancestrale - et de ses actuels détenteurs, arc-bou-
tés sur le droit de propriété individuel mais aussi sur une praxis qui,
pour être plus récente, inclut à la fois une profonde transformation du
monde rural et de son économie et des dimensions symboliques qui ne
sauraient être complètement ignorées, en particulier pour les Boers
d'Afrique du Sud.
Paradoxalement, le compromis historique global qui a abouti au
transfert du pouvoir politique des minorités d'origine européenne à la
majorité autochtone a relativisé la question de la terre, ou tout au moins
l'a mise entre parenthèses. Celle-ci n'a jamais constitué un point majeur
d'achoppement des laborieuses négociations qui ont caractérisé la décolo
nisation de cette partie de l'Afrique australe. La question symbolique a
trouvé une réponse symbolique dans l'affirmation de la légitimité de la res
titution, voire d'une redistribution, et dans la réaffirmation parallèle de la
garantie du droit de propriété, classiquement limité par la possibilité d'ex
propriations devant faire l'objet d'une juste indemnisation. Force est de
constater que, pour ce qui concerne le Zimbabwe, dont la décolonisation
remonte à plus d'une quinzaine d'années, un quasi statu quo foncier a pré
valu : en dépit de proclamations diverses, la redistribution du patrimoine
foncier ne s'est opérée qu'à la marge, laissant intacte la structure dualiste
de l'agriculture. Il n'en est pas moins vrai que l'ampleur de la dépossession
foncière et de la crise des zones rurales en Afrique du Sud crée un consen
sus en faveur d'une véritable réforme dont la forme, l'ampleur et les
rythmes demeurent encore incertains, bien qu'elle soit un élément décisif
de la stabilisation politique et économique du pays.
LE CAS DU ZIMBABWE
Le Zimbabwe (ex-Rhodésie du Sud et Rhodesie) compte environ
10 millions d'habitants pour une superficie de 390 000 km2. L'agricul
ture y occupe plus de la moitié de la population active. La production Transition politique, «paysans » et «entrepreneurs agricoles » 121
agricole représente environ 15% du pib et le tiers des exportations.
Bien diversifiée, cette production est nettement excédentaire en année
normale. Elle est cependant tributaire des aléas climatiques : des séche
resses récurrentes (1982-1983, 1991) entraînent des déficits vivriers
temporaires.
La structure foncière héritée de la colonisation1 juxtapose trois sec
teurs : de grandes fermes blanches (moyenne 2 000 ha) occupent envi
ron 44% des terres; le reste se répartit entre des zones communales
(plus de 50%) et des zones d'appropriation privée (Purchase Area
Land, environ 5%).
La Réforme agraire introuvable
La réforme agraire constituait un point important du programme du
mouvement nationaliste, au pouvoir depuis 1981. Thème récurrent de la
rhétorique politique zimbabwéenne, elle correspond à une profonde aspi
ration populaire, dont l'aspect le plus visible est constitué par des occupat
ions sporadiques de terre. Durant la décennie quatre-vingt, les garanties
constitutionnelles liées aux accords de Lancaster limitaient la redistribu
tion foncière des fermes blanches à des cessions volontaires (principe du
willing seller / willing buyer). Depuis 1990, seul subsiste le droit à une juste
indemnisation et des formes d'expropriation sont possibles. Cependant, la
redistribution foncière demeure l'Arlésienne de la politique intérieure du
pays. Installés dans l'incertitude quant à leur avenir à moyen terme, privés
de leur considérable influence politique antérieure, les fermiers blancs ont
globalement maintenu leur position foncière et économique, en dépit de
leur petit nombre. Voici quelques éléments du processus de consolidation
de la présence foncière blanche et des tentatives mitigées d'enclenchement
d'un processus de redistribution foncière :
— Contrairement à une idée reçue, les fermiers blancs ont su,
durant la fin de la période de la domination blanche, se situer dans la
fraction la plus libérale et la plus éclairée de la communauté blanche2.
Significativement, le premier ministre de l'Agriculture du gouvernement
Farmers' Mugabe a Union. été Denis Norman, jusque-là président de la Commercial
1 . Pour une revue de la situation agraire et de la problématique des réformes à la veille de la fin du
pouvoir blanc en Rhodesie, on peut se référer à l'excellente synthèse de Roger Riddel, The Land problem in
Rhodesia: alternatives for the future, Harare, Mambo Press, 1978.
2. Sur ce point, voir les commentaires pertinents de Norman Reynolds, Lessons for South Africa from
the first decade of Zimbabwe's indépendance, Johannesburg, Center for policy studies. University of the
Witwatersrand, 1991. 122 Roger Meunier
— Ils ont su faire preuve d'un grand dynamisme économique : pre
miers bénéficiaires de la levée des sanctions économiques, qui a particu
lièrement profité aux exportateurs de tabac, ils ont su développer rap
idement de nouveaux secteurs de production orientés vers l'exportation,

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