Tunisie : fiscalité et développement - article ; n°11 ; vol.3, pg 429-478
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Description

Tiers-Monde - Année 1962 - Volume 3 - Numéro 11 - Pages 429-478
50 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1962
Nombre de lectures 45
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Extrait

André Nicolaï
Tunisie : fiscalité et développement
In: Tiers-Monde. 1962, tome 3 n°11. pp. 429-478.
Citer ce document / Cite this document :
Nicolaï André. Tunisie : fiscalité et développement. In: Tiers-Monde. 1962, tome 3 n°11. pp. 429-478.
doi : 10.3406/tiers.1962.1090
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1962_num_3_11_1090TUNISIE :
DÉVELOPPEMENT*
FISCALITÉ ET
par André Nicolaï (i)
Les cercles vicieux de la pauvreté ne sont souvent que les diallèles de
sophistes conservateurs. Un personnage de Ionesco constate : « Prene2 un cercle,
caressez-le et il finit par devenir vicieux. » II semble que parmi les théoriciens
et les experts du sous-développement il y ait une propension à caresser en rond.
I. — Cela est vrai de certaines études générales, mais aussi dans le domaine
plus technique, plus concret de la fiscalité. L'accord se fait aux plans des
principes généraux et du recensement des difficultés; il disparaît quand vient
le temps de préconiser une politique fiscale.
a) Au niveau des principes, on peut tenir pour admises les propositions
suivantes (2) :
1. Capital is made at home. Pour sécréter ce capital, deux sources : l'épargne
privée spontanée qui est insuffisante et trop souvent mal utilisée;
forcée qui peut s'obtenir par voie d'inflation ou de fiscalité. L'inflation ne
doit être utilisée qu'à dose modérée, car elle accroît l'inégalité des revenus sans
pour autant orienter les profits inflationnistes vers les branches offrant la plus
grande productivité sociale. Reste donc comme moyen principal, la voie fiscale;
2. La fiscalité actuelle des pays sous-développés se caractérise par la
faible part des impôts sur le revenu dans les ressources totales. On a donc
selon les cas une prédominance des recettes douanières si le pays est mono-
ou oligo-exportateur ; des droits de consommation s'il ne l'est pas ;
3. Les réformes fiscales récentes fondées sur l'introduction ou le renfor
cement des impôts sur le revenu n'ont pas donné les résultats escomptés.
b) Ce qui nous amène aux obstacles rencontrés par les gouvernements de
ces pays dans le choix d'un système fiscal. Là, plus encore que dans les régions
développées du monde, apparaît la difficulté de concilier la fonction financière
(assurer les recettes), la fonction sociale (réduire l'inégalité des revenus), la
(*) II est rappelé que la Revue n'assume pas la responsabilité des opinions de ses
collaborateurs.
(1) Attaché de recherches au C.N.R.S.
(2) On trouvera en annexe quelques éléments de bibliographie. De façon générale,
eauf références de citations ou de chiffres, on a regroupé dans cette annexe toutes les sources
utilisées.
429 ANDRÉ NICOLAÏ
fonction économique (promouvoir la croissance dans la stabilité) de l'impôt :
1. En fait, le problème se simplifie un peu quand on admet que la fonction
sociale n'est pas exclusive des deux autres. Car il ne s'agit pas tellement d'une
redistribution du revenu des classes riches aux pauvres, que de sa réorien
tation vers les entreprises privées ou publiques susceptibles de promouvoir
une croissance diversifiée. La réduction de l'inégalité joue pourtant un rôle
social, mais indirectement : elle apparaît aux yeux des plus défavorisés comme
une pénalisation des groupes dominants traditionnels. Elle joue surtout un
rôle économique : accroître l'épargne au détriment d'une consommation qui
apparaît d'autant plus ostentatoire qu'elle se satisfait de biens importés;
2. C'est entre la fonction financière et la fonction économique que sem-
blents s'interposer les incompatibilités majeures.
Même s'il opte pour la solution la plus libérale, l'État se voit contraint
à des dépenses croissantes pour mettre en place l'infrastructure économique
et sociale nécessaire au développement. A plus forte raison s'il croit devoir
intervenir directement dans les relations économiques. Pour faire face à ce
gonflement des emplois, il peut espérer une aide étrangère. Mais malgré une
rivalité exacerbée entre l'Est et l'Ouest, il y a fort peu de chances que les
capitaux ou les dons internationaux arrivent jamais à couvrir une fraction
importante des dépenses d'investissement du Tiers Monde. Il faut donc se
tourner vers les sources locales.
C'est là qu'apparaît un dilemme apparemment insoluble pour les pays
qui optent pour une croissance de type capitaliste ou même veulent pratiquer
la « troisième voie » de l'économie mixte. Faire peser principalement la fiscalité
sur les classes de revenus les plus bas est impossible du fait de l'extrême
faiblesse des ressources par tête. La faire supporter par les groupes économi
ques dominants traditionnels — gros propriétaires fonciers ou spéculateurs
du tertiaire — n'est qu'une solution temporaire puisque l'on s'oriente vers
leur suppression ou leur transformation en entrepreneurs modernes. Imposer
cette dernière catégorie détruit les incitations à l'épargne, au risque et à
l'effort. Enfin, comprimer les revenus des classes moyennes — fonctionnaires,
cadres, intelligentsia, professions libérales — est dangereux sur le plan politique
comme source de radicalisation conservatrice ou révolutionnaire.
Finalement l'alternative est la suivante : ou jouer de la fiscalité comme
d'un incitateur à l'épargne et à l'investissement et les recettes demeureront
insuffisantes ; ou lui faire rapporter les sommes nécessaires aux dépenses
publiques et l'initiative privée s'en trouvera inhibée.
3. Le problème, malgré son apparente insolubilité comporte une solution
théorique simple : il s'agit de frapper de plus en plus lourdement les tranches
de revenu qui, au-dessus d'un minimum vital à déterminer, sont consacrées
à la consommation et non à l'épargne productive. Mais il faut alors tenir
430 : HSCALITÉ ET DÉVELOPPEMENT TUNISIE
compte du niveau de développement déjà atteint, des dissemblances de rap
ports économiques et sociaux, des différences de couplage avec l'extérieur,
pour choisir le système fiscal apte à réaliser pratiquement cet objectif.
с ) C'est dire que les auteurs concluent d'une unité de problèmes à une
diversité des solutions. Les politiques fiscales des pays en voie de dévelop
pement doivent « être taillées sur mesure » (i).
1. Il ne reste alors à la recherche théorique que la voie des comparaisons
entre les avantages et inconvénients des différents types d'impôts : les droits
de douane sont d'un contrôle facile et d'un rendement élevé mais sujets à
instabilité. Les impôts indirects différenciés et par là même « progressifs »
doivent être préférés, dans l'immédiat, aux impôts directs. Les droits de suc
cession sont aisés à lever mais se heurtent à des oppositions politiques. La
mise en œuvre d'impôts fonciers paraît inévitable. L'impôt sur les bénéfices
sociétaires fournit une bonne source de revenus.
2. Seuls deux auteurs semblent avoir osé dépasser le stade des généralités
pour proposer un système fiscal adapté à la fois aux besoins d'investissement
et aux besoins publics croissants des pays sous-développés : N. Kaldor et
B. Higgins (2). ^
Dans les deux cas, le principe est d'imposer à des taux progressifs le
revenu consommé sans toucher au revenu épargné et investi. Afin de diversifier
le système, mais surtout afin de permettre un contrôle indirect des dépenses
et épargnes, ces auteurs proposent l'établissement d'autres impôts, sur la
richesse, les transactions, etc., sans que ces dispositions entraînent forcément
l'abandon des droits habituels sur la consommation et la propriété foncière,
ni à plus forte raison des droits de douane. Dans la version de B. Higgins
le système présenterait l'avantage d'être « auto-renforcé » tel que chacun
omettant de déclarer une opération imposable se verrait imposé de façon
plus sévère sous un autre chef ou menacé par une déclaration exacte 

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