Une décennie de grands projets. Les leçons de la politique énergétique du Brésil - article ; n°120 ; vol.30, pg 907-925
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Tiers-Monde - Année 1989 - Volume 30 - Numéro 120 - Pages 907-925
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1989
Nombre de lectures 17
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Michel Duquette
Une décennie de grands projets. Les leçons de la politique
énergétique du Brésil
In: Tiers-Monde. 1989, tome 30 n°120. pp. 907-925.
Citer ce document / Cite this document :
Duquette Michel. Une décennie de grands projets. Les leçons de la politique énergétique du Brésil. In: Tiers-Monde. 1989, tome
30 n°120. pp. 907-925.
doi : 10.3406/tiers.1989.3885
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1989_num_30_120_3885UNE DÉCENNIE DE GRANDS PROJETS
LES LEÇONS DE LA POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE DU BRÉSIL
par Michel Duquette*
CONSIDERATIONS GENERALES
A l'époque du « miracle » économique des années 1967-1973, le Brésil connaît
des taux de croissance de plus de 7 % par an et devient de loin l'économie la plus
dynamique d'Amérique latine. Cette croissance à tout prix, obtenue par le biais
d'un modèle « libéral » associant étroitement Etat local, entrepreneurs locaux et
firmes multinationales, implique une concentration de la rente, le maintien des
bas salaires et, en général, le soutien d'un secteur oligopoliste greffé au dynamisme
du marché mondial des échanges. Autoritaire et capitaliste, le Brésil est vu, dans
les nouveaux pays industriels, comme l'exemple d'un développement spectaculaire
aux horizons illimités. Mais, là comme ailleurs, la crise du pétrole, à partir
de 1973, modifie les règles du jeu et bouleverse les calculs des bureaucrates de
Brasilia.
Dès lors, la politique énergétique du Brésil a pour mission de maintenir,
dans des circonstances de plus en plus difficiles, les objectifs de croissance et
tente de réduire les pressions énormes que crée sur l'économie la crise de l'énergie,
soit l'incertitude accrue des approvisionnements dont dépend un appareil pro
ductif très énergivore et surtout les coûts croissants des importations de pétrole.
Dans un contexte de financement facile, obtenu à partir de la manne des euro
dollars, le Brésil des militaires jouit pendant quelques années d'une marge de
flexibilité financière suffisamment grande pour entreprendre divers grands projets.
D'une part, il accélère son programme d'électrification entrepris à la fin des
années 1960 avec l'expansion du réseau national à partir d'une trentaine de
grandes centrales hydro-électriques destinées à doubler la capacité du pays en
énergie continue1. Autre grand projet, on lance le Proalcool, destiné à substituer
* L'auteur est politicologue à l'Université de Montréal et chercheur au Centre de Recherche
en Développement industriel et technologique (credit), associant diverses universités montr
éalaises.
1. De 17 millions de kilowatts au début de 1975, la capacité atteignit 30 millions en 1979,
grâce à l'achèvement de Paulo Afonso IV (1 200 000 kW), Ilha Solteira (3 200 000 kW),
Revue Tiers Monde, t. XXX, n» 120, Octobre-Décembre 1989 ' MICHEL DUQUETTE 908
une fraction de l'essence dans les voitures et les véhicules utilitaires, et on signe
en 1975 un accord avec la rfa, pour la construction de 8 grandes centrales électro
nucléaires très sophistiquées.
Ces objectifs, prenant un caractère d'urgence, impliquaient une forte dose
de contrôles gouvernementaux et un interventionnisme économique qui contras
tent avec la volonté de laisser au secteur privé local la maîtrise d'œuvre sur le
terrain de la production, comme l'affirmaient les militaires dès l'aube de la prési
dence Geisel (Shooyans, 1976). D'où la formule « politisation d'une économie de
marché », utilisée par certains auteurs dans une tentative de traduire ce paradoxe
(Barzelay, 1986).
« Les généraux brésiliens, commis au départ à une idéologie économique
orientée vers les intérêts privés et pressés de développer de nouvelles collaborations
avec le capital étranger, ont fini par élargir la sphère d'influence du secteur
étatique. Ils en sont même venus à une dispute avec le gouvernement américain
à propos du transfert de technologie nucléaire. »2
Dans cet article, nous passerons en revue les trois volets de la politique
énergétique brésilienne. Nous aborderons dans l'ordre les mesures de relance
de la prospection pétrolière, l'évolution du Proalcool et enfin le programme
nucléaire. Nous laisserons de côté le programme d'équipements hydro-élect
riques, qui mérite par son ampleur un traitement à part. Pour chaque volet, nous
ferons ressortir l'objectif de départ, les pressions et revendications des lobbies
visés par ces mesures, les institutions ou accords mis en place pour leur implant
ation, les moyens financiers investis dans leur réalisation et enfin leur performance
relativement aux projections de départ dans le contexte de l'ensemble de l'éc
onomie; ce qui fait clairement référence au problème de l'endettement.
I. — LA RELANCE DE LA PROSPECTION PÉTROLIÈRE
La firme publique petrobras exerçait depuis 1954, année de sa fondation,
un rôle déterminant dans la prospection, le transport et le raffinage des produits
pétroliers dans le pays. Devenue la plus grande firme publique d'Amérique
latine, son monopole était particulièrement évident dans la prospection. Quelques
firmes étrangères se cantonnaient dans le raffinage et la distribution. Mais,
devant la montée de la dépendance pétrolière3, le président Geisel dut renoncer
Sobradinho (660 000 kW), Maribondo (1 400 000 kW), Sào Simâo (2 500 000 kW), Itumbiara
(2 100 000 kW), Agua Vermelha (1 400 000 kW), Salto Osorio (1 100 000 kW) et Itauba
(500 000 kW). D'ici 1990, les centrales suivantes seraient greffées au réseau : Itaipu
(12 000 000 kW), construit en collaboration avec le Paraguay, Foz do Areia (1 200 000 kW),
Salto Santiago (1 900 000 kW), Xingo (3 300 000 kW) et enfin Tucurai (3 000 000 kW).
2. Fernando H. Cardoso, The Characterization of Authoritarian Regimes, dans David
Collier (éd.) et al., The New Authoritarianism in Latin America, Princeton University Press,
1979, p. 32.
3. Le Brésil accuse une dépendance sur le pétrole importé de l'ordre de 80 % à la fin des
années 1970. Voir à ce sujet : République du Brésil, ministère des Mines et de l'Energie (mme),
Balance energético nacionál, 1986, Brasilia, 1986. UNE DÉCENNIE DE GRANDS PROJETS 909
à son corps défendant au monopole exclusif de petrobras sur la prospection
en territoire national et en zone off-shore, et autorisa la signature de contrats
de risque entre la firme publique et les pétrolières Shell, Mobil et Pecten4.
petrobras s'était déjà dotée d'une filiale internationale, braspetro, qui prospect
ait en zone productrice, par le biais d'accords de concession avec divers pays.
Ainsi l'Iraq avait concédé à braspetro les champs pétrolifères de Majnoon.
Cette forme de coopération internationale ne contribuait cependant pas à réduire
la dépendance du Brésil; en 1973, la production locale ne satisfaisait que 23 %
des besoins, qui augmentaient rapidement.
Cinq ans plus tard, la production brésilienne ne dépassait guère 170 000 barils
par jour de brut alors que le pays en consommait plus d'un million. Cette
importation massive équivalait alors, en sorties de devises, à 64,5 % de la valeur
totale des exportations du pays. La contribution significative du pétrole au déficit
commercial fut un puissant incitatif à une approche plus « internationalisante »
dans un secteur tenu jusque-là pour un symbole de souveraineté nationale5.
De janvier 1976 à octobre 1985, 243 contrats furent signés entre petrobras
et diverses firmes, tant nationales que multinationales, pour une zone off-shore
d'une superficie de 245 000 km2 et une zone territoriale de 1 202 000 km2. Ces
contrats donnèrent lieu à des relevés sismologiques portant sur 147 000 km2 6.
Des ressources de l'ordre de 1,6 milliard de dollars us furent investies, dont
453 millions par des firmes nationales (28 % du total)7. Ces efforts ne menèrent
cependant qu'à la mise en exploitation d'un seul puits off shore de gaz naturel,
Merluza au large de Sâo Paulo, découvert par la pecten international8. Il n'en
reste pas moins que, malgré l'importance des moyens investis, les résultats de la
formule des contrats de risque furent mitigés.
Le jugement

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