Vingt ans de réforme des systèmes juridique et judiciaire en Russie : quelques éléments pour un premier bilan - article ; n°2 ; vol.38, pg 9-30
23 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Vingt ans de réforme des systèmes juridique et judiciaire en Russie : quelques éléments pour un premier bilan - article ; n°2 ; vol.38, pg 9-30

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
23 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Revue d’études comparatives Est-Ouest - Année 2007 - Volume 38 - Numéro 2 - Pages 9-30
Cet article s'interroge sur l'ampleur des changements apportés, depuis la perestroïka, aux systèmes juridique et judiciaire de la Russie. Les transformations qu'ont connues ces systèmes sont profondes. Le droit soviétique a fait place à un nouveau droit qui paraît, dans l'ensemble, adapté au passage à une économie de marché, à la construction d'une démocratie et d'un État de droit. La réforme judiciaire, lancée en 1991, a permis l'apparition de nouvelles juridictions (notamment en matière constitutionnelle et commerciale), un accroissement de l'indépendance et de la professionnalisation des juges et des avocats. Malgré tout, ces transformations rencontrent d'importantes limites. Les unes sont dues à l'attachement à certains aspects de l'héritage soviétique, les autres à l'attention insuffisante portée au développement du droit public.
Twenty years of reforming the legal system and judiciary in Russia: A few points for an initial assessment
What has been the scope of the changes made in Russia's legal system and judiciary since perestroika? Thoroughgoing changes have taken place. Soviet law has yielded to a ne w law that, overall, seems adapted to the transition toward a market economy, democracy and the rule of law. The reform of the judiciary, launched in 1991, has created new jurisdictions (in constitutional and trade law, in particular) and increased the independence and professionalization of judges and lawyers. However these changes have encountered serious limits, some of the latter due to an attachment to the Soviet legacy, others to the insufficient attention paid to developing public law.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2007
Nombre de lectures 97
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Anne Gazier
Vingt ans de réforme des systèmes juridique et judiciaire en
Russie : quelques éléments pour un premier bilan
In: Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 38, 2007, N°2. Les mutations du droit et de la justice en
Russie. pp. 9-30.
Résumé
Cet article s'interroge sur l'ampleur des changements apportés, depuis la perestroïka, aux systèmes juridique et judiciaire de la
Russie. Les transformations qu'ont connues ces systèmes sont profondes. Le droit soviétique a fait place à un nouveau droit qui
paraît, dans l'ensemble, adapté au passage à une économie de marché, à la construction d'une démocratie et d'un État de droit.
La réforme judiciaire, lancée en 1991, a permis l'apparition de nouvelles juridictions (notamment en matière constitutionnelle et
commerciale), un accroissement de l'indépendance et de la professionnalisation des juges et des avocats. Malgré tout, ces
transformations rencontrent d'importantes limites. Les unes sont dues à l'attachement à certains aspects de l'héritage soviétique,
les autres à l'attention insuffisante portée au développement du droit public.
Abstract
Twenty years of reforming the legal system and judiciary in Russia: A few points for an initial assessment
What has been the scope of the changes made in Russia's legal system and judiciary since perestroika? Thoroughgoing changes
have taken place. Soviet law has yielded to a ne w law that, overall, seems adapted to the transition toward a market economy,
democracy and the rule of law. The reform of the judiciary, launched in 1991, has created new jurisdictions (in constitutional and
trade law, in particular) and increased the independence and professionalization of judges and lawyers. However these changes
have encountered serious limits, some of the latter due to an attachment to the Soviet legacy, others to the insufficient attention
paid to developing public law.
Citer ce document / Cite this document :
Gazier Anne. Vingt ans de réforme des systèmes juridique et judiciaire en Russie : quelques éléments pour un premier bilan. In:
Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 38, 2007, N°2. Les mutations du droit et de la justice en Russie. pp. 9-30.
doi : 10.3406/receo.2007.1827
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/receo_0338-0599_2007_num_38_2_1827r
O CM

3
O
O
I*
U 0 Q. .
01 <
"O CM
a: £ o >
Vingt ans de réforme des systèmes
juridique et judiciaire en russie :
quelques éléments pour un premier bilan
Anne GAZIER
Maître de conférences de droit public à l'Université Paris X-Nanterre
(anne.gazier@wanadoo.fr )
Résumé : Cet article s'interroge sur l'ampleur des changements apportés, depuis la
perestroïka, aux systèmes juridique et judiciaire de la Russie. Les transformations
qu'ont connues ces sont profondes. Le droit soviétique a fait place à un
nouveau droit qui paraît, dans l'ensemble, adapté au passage à une économie de
marché, à la construction d'une démocratie et d'un État de droit. La réforme judiciaire,
lancée en 1991, a permis l'apparition de nouvelles juridictions (notamment en
matière constitutionnelle et commerciale), un accroissement de l'indépendance et
de la professionnalisation des juges et des avocats. Malgré tout, ces transformations
rencontrent d'importantes limites. Les unes sont dues à l'attachement à certains
aspects de l'héritage soviétique, les autres à l'attention insuffisante portée au
développement du droit public. 10 Anne Gazier
Recrudescence des assassinats de députés, de journalistes et d'hommes
d'affaires, clémence de la police et des tribunaux à l'égard des auteurs tou
jours plus nombreux de crimes racistes et xénophobes, restrictions appor
tées par la loi au pluralisme politique et à la liberté d'association, violations
massives des droits de l'homme en Tchétchénie : ce tableau de la « dérive
politique » (selon l'expression employée par Françoise Daucé et Gilles
Walter) que connaît aujourd'hui la Russie renvoie une image très négative
de la situation du droit et de la justice dans le pays (Daucé & Walter, 2006).
Si l'on ajoute la persistance, au sein de la population, d'un fort scepticisme,
voire d'une méfiance à l'égard du droit (sentiment qualifié en Russie de
« nihilisme juridique »*) et celle d'un manque de confiance envers les trib
unaux (qui conduit notamment de nombreux entrepreneurs à résoudre leurs
différends en ayant recours à une «justice parallèle »), on peut estimer que
la Russie ne s'achemine guère vers la mise en place d'un État de droit.
Pourtant, il y a maintenant vingt ans, les premières mesures prises sous la
perestroïka pour réformer le système économique et politique de l'URSS
commençaient à en ébranler les fondements et lançaient un vaste « chantier »
qui allait s'attaquer aux bases mêmes de l'ordre juridique soviétique. Très vite,
les changements ont cherché à concilier trois buts essentiels : la démocratis
ation des institutions, l'affirmation des droits et des libertés des citoyens et
l'instauration d'une économie de marché. Ainsi, en 1991, une « Conception
de la réforme judiciaire » a été adoptée par le Soviet Suprême de la RSFSR
(République socialiste federative soviétique de Russie) visant à instaurer une
justice indépendante du pouvoir politique et protectrice des droits de l'hom
me. Depuis lors, les transformations du droit et de la justice se sont poursuiv
ies, certes à un rythme plus ou moins soutenu, en gardant les mêmes objectifs
(même si, à compter des « événements » de septembre-octobre 19932 et plus
encore, de l'arrivée au pouvoir, en 2000, de Vladimir Poutine, une nette prio
rité a été accordée au troisième but : la transition vers le marché).
Dans un tel contexte, comment expliquer le constat fait ci-dessus ? Les r
éformes menées ont-elles échoué ? Les caractéristiques essentielles du droit
soviétique auraient-elles résisté aux attaques dont elles ont fait l'objet ? Rien
ne paraît moins sûr. En effet, les systèmes juridique et judiciaire actuels de la
Russie diffèrent considérablement de leurs prédécesseurs soviétiques.
Rappelons brièvement les grands traits du système juridique et de la jus
tice soviétiques. En premier lieu, le droit soviétique, qualifié de « socialis-
1. Voir notamment, à propos du « nihilisme juridique » russe, les extraits traduits en
français de l'article de Vladimir 1\imanov publié dans la revue Gosudarstvo ipravo en 1993
(Tumanov, 1995).
2. On rappellera que ces événements, déclenchés par la décision anticonstitutionnelle de
Boris Eltsine de suspendre l'activité du Parlement de la RSFSR, ont conduit notamment à
la prise d'assaut du bâtiment de celui-ci (la « Maison Blanche ») où s'étaient retranchés un
grand nombre de députés.
VOLUME 38, JUIN 2007 Vingt ans de réforme des systèmes juridique et judiciaire en Russie 11
te » par opposition aux droits « bourgeois », n'était qu'un instrument pour
l'édification du socialisme. Placé au service du prolétariat (sous Lénine)
puis de tous les travailleurs (sous Staline) et, enfin, du peuple tout entier
(sous Brejnev), il était subordonné à l'idéologie marxiste-léniniste et aux
évolutions qu'elle connaissait. Ce droit comportait pourtant des points
communs avec les droits de la famille romano-germanique. Ainsi, il était
largement codifié3. Il comprenait une hiérarchie des normes mais aucun
mécanisme juridictionnel ne permettait de la faire respecter. En outre,
l'adoption de normes conjointes par les organes de l'État et du Parti com
muniste, pratique apparue sous Staline et largement développée par la sui
te, est venue perturber cette hiérarchie. Par ailleurs, s'agissant de l'applica
tion de ce droit, dès qu'il le fallait, la « légalité socialiste » {socialisticeskaja
zakonnosf) cédait la place à la «logique du Parti » (partijnost'). Plus géné
ralement, les mécanismes juridiques et notamment le contrat jouaient un
faible rôle en URSS, surtout si on les compare à d'autres procédés comme
les lie

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents