Veuillez, agréer, Cher Monsieur Finkielkraut, mon clash le plus sincère
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SECRÉTARIAT D’ETAT A L’ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES
La Secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes
Monsieur Finkielkraut,
Quel honneur vous me faites !
Paris, le 23 mai 2017
L’honnêteté m’oblige à dire que j’ai toujours pensé que vous étiez un chroniqueur de télévision –je le dis sans malice, j’ai beaucoup de respect pour les chroniqueurs de télévision. Mais certains de mes amis pensent que vous êtes un grand philosophe, un Académicien, un homme de valeurs (le pluriel est d’eux). Je les crois.
C’est donc un honneur d’être, moins de 24 heures après ma nomination au Gouvernement, la cible privilégiée d’une personnalité telle que vous. Que vous, le grand philosophe, l’Académicien, l’homme de valeurs, ayez décidé de choisir comme adversaire politique et cible de vos attaques en cette période passionnante et cruciale la benjamine du gouvernement, issue de la société civile, élue locale, venant de quartiers populaires, non diplômée d’une grande école, femme, de gauche et féministe de surcroît, ou bien c’est un hasard, ou bien c’est un aveu de faiblesse de votre part, ou bien c’est un positionnement politique.
Dans tous les cas, cela m’honore.
Cela m’honore et me déçoit en même temps. Voyez-vous, même si je combats l’immense majorité de vos idées, je tenais en respect l’opinion de mes amis et donc, votre fonction de grand philosophe, d’Académicien. Je pensais que vous fondiez vos réflexions sur des éléments tangibles, des sources contradictoires, des mises en perspectives, et une analyse longue. Au lieu de cela, je découvre que vous vous adonnez à la curée. Vous faites dans le commentaire de commentaire de propos rapportés. Et vous vous transformez en Don Quichotte : lui combattait des moulins qui n’existaient pas, vous combattez une position que je n’ai jamais eue.
Monsieur Alain FINKIELKRAUT Maison de Radio France 116 Avenue du Président Kennedy75016 Paris
Hôtel du Petit Monaco - 55, rue Saint-Dominique - 75007 Paris01 42 75 80 00
En effet, une simple question que vous m’auriez adressée ou une simple recherche factuelle auprès d’amis mieux renseignés vous aurait permis de constater que j’étais une militante laïque, membre des années de la plus vieille association laïque de France, fondatrice de plusieurs appels de défense de la loi de 1905, contributrice d’ouvrages sur ces sujets qu’il faut faire l’effort de chercher en bibliothèques et non sur Google–et j’ai là aussi, beaucoup de respect pour Google. Et que, jamais, je n’ai milité contre l’interdiction du port du voile par les enseignantes ou par les élèves à l’école !
La « société du spectacle » n’est pas une succession d’images mais la mise en scène d’un rapport social entre les individus. Quand vous, le grand philosophe, l’Académicien, le chroniqueur de télévision, haussez le ton pour critiquer sans mesure des positions imaginaires d’une féministe progressiste, vous vous adonnez à ce que les féministes américaines nomment le «mans plaining ».Vous partez du principe que vous, l’homme, le grand philosophe, l’Académicien, avez forcément les avoir de votre côté et que la femme, la féministe, de surcroît quand elle est plus jeune, s’égare forcément, n’a pas compris forcément, ne sait pas ce qu’elle dit forcément. Vous pensez donc de votre devoir de la corriger. Sans même prendre la peine d’une vérification de ce que l’on vous demande de commenter, sans comprendre que vous brodez sur du mensonge.
Rudyard Kipling a écrit dans son poème Si… («If…»)« Situ peux supporter de voir tes paroles travesties par des gueux pour exciter des sots et, les entendant mentir, sans toi-même mentir d’un seul mot, pourtant répondre et te défendre (…) tu seras un homme, mon fils. » Je ne suis pas un homme, mais je vous réponds directement. Vous n’avez pas eu cette politesse de vous adresser à moi sans l’intermédiaire d’un plateau audiovisuel. Si le philosophe, le grand homme, l’Académicien, est réellement outré par les propos qu’il me prête et qui n’ont jamais été les miens, il les corrigera publiquement par honnêteté intellectuelle. Si le chroniqueur veut ajouter du commentaire au commentaire, il trouvera j’en suis certaine une parade médiatique pour continuer à surfer sur l’écume créée.
J’ignore si d’après Rudyard Kipling vous feriez partie de la catégorie qui travestit les paroles ou de la catégorie qui s’excite à cette idée.
Tout ce que je sais, c’est que ce procédé même et surtout venant d’un philosophe, d’un Académicien, ne m’inspire pas un profond respect.
Si, un jour, l’homme de valeurs que l’on me dit que vous êtes s’intéresse à la réalité de ma pensée philosophique, il sait désormais où m’interroger.
Veuillez, agréer, Cher Monsieur Finkielkraut, mes salutations sincères.
Marlène SCHIAPPA
Hôtel du Petit Monaco - 55, rue Saint-Dominique - 75007 Paris 01 42 75 80 00

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Publié le 26 mai 2017
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Langue Français

Extrait

SECRÉTARIAT D’ETAT A L’ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES
La Secrétaire d’État auprès du Premier ministre,chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes
Monsieur Finkielkraut,
Quel honneur vous me faites !
Paris, le 23 mai 2017
L’honnêteté m’oblige à dire que j’ai toujours pensé que vous étiez un chroniqueur de télévision –je le dis sans malice, j’ai beaucoup de respect pour les chroniqueurs de télévision. Mais certains de mes amis pensent que vous êtes un grand philosophe, un Académicien, un homme de valeurs (le pluriel est d’eux). Je les crois.
C’est donc un honneur d’être, moins de 24 heures après ma nomination au Gouvernement, la cible privilégiée d’une personnalité telle que vous. Que vous, le grand philosophe, l’Académicien, l’homme de valeurs, ayez décidé de choisir comme adversaire politique et cible de vos attaques en cette période passionnante et cruciale la benjamine du gouvernement, issue de la société civile, élue locale, venant de quartiers populaires, non diplôméed’une grande école, femme, de gauche et féministe de surcroît, ou bien c’est un hasard, ou bien c’est un aveu de faiblesse de votre part, ou bien c’est un positionnement politique.
Dans tous les cas, cela m’honore.
Cela m’honore et me déçoit en même temps. Voyez-vous, même si je combats l’immense majorité de vos idées, je tenais en respect l’opinion de mes amis et donc, votre fonction de grand philosophe, d’Académicien. Je pensais que vous fondiez vos réflexions surdes éléments tangibles, des sources contradictoires, des mises en perspectives, et une analyse longue. Au lieu de cela, je découvre que vous vous adonnez à la curée. Vous faites dans le commentaire de commentaire de propos rapportés. Et vous vous transformez en Don Quichotte: lui combattait des moulins qui n’existaient pas, vous combattez une position que je n’ai jamais eue.
Monsieur Alain FINKIELKRAUT Maison de Radio France 116 Avenue du Président Kennedy 75016 Paris
Hôtel du Petit Monaco - 55, rue Saint-Dominique - 75007 Paris 01 42 75 80 00
En effet, une simple question que vous m’auriez adressée ou une simple recherche factuelle auprès d’amis mieux renseignés vous aurait permis de constater que j’étais une militante laïque, membre des années de la plus vieille association laïque de France, fondatrice de plusieurs appels de défense de la loi de 1905, contributrice d’ouvrages sur ces sujets qu’il faut faire l’effort de chercher en bibliothèques et non sur Googleet j’ai là aussi, beaucoup de respect pour Google. Et que, jamais, je n’ai milité contre l’interdiction du port du voile par les enseignantes ou par les élèves à l’école!
La « société du spectacle» n’est pas une succession d’images mais la mise en scène d’un rapport social entre les individus. Quand vous, le grand philosophe, l’Académicien, le chroniqueur de télévision, haussez le ton pour critiquer sans mesure des positions imaginaires d’une féministe progressiste, vous vous adonnez à ce que les féministes américaines nomment le « mansplaining ». Vous partez du principe que vous, l’homme, le grand philosophe, l’Académicien, avez forcément le savoir de votre côté et que la femme, la féministe, de surcroît quand elle est plus jeune, s’égare forcément, n’a pas compris forcément, ne sait pas ce qu’elle dit forcément. Vous pensez donc de votre devoir de la corriger. Sansmême prendre la peine d’une vérification de ce que l’on vous demande de commenter, sans comprendre que vous brodez sur du mensonge.
Rudyard Kipling a écrit dans son poème Si… («If…») « Si tu peux supporter de voir tes paroles travesties par des gueux pour exciter des sots et, les entendant mentir, sans toi-même mentir d’un seul mot, pourtant répondre et te défendre (…) tu seras un homme, mon fils. » Je ne suis pas un homme, mais je vous réponds directement. Vous n’avez pas eu cette politesse de vousadresser à moi sans l’intermédiaire d’un plateau audiovisuel. Si le philosophe, le grand homme, l’Académicien, est réellement outré par les propos qu’il me prête et qui n’ont jamais été les miens, il les corrigera publiquement par honnêteté intellectuelle. Si le chroniqueur veut ajouter du commentaire au commentaire, il trouvera j’en suis certaine une parade médiatique pour continuer à surfer sur l’écume créée.
J’ignore si d’après Rudyard Kipling vous feriez partie de la catégorie qui travestit les parolesou de la catégorie qui s’excite à cette idée.
Tout ce que je sais, c’est que ce procédé même et surtout venant d’un philosophe, d’un Académicien, ne m’inspire pas un profond respect.
Si, un jour, l’homme de valeurs que l’on me dit que vous êtes s’intéresse à la réalité de ma pensée philosophique, il sait désormais où m’interroger.
Veuillez, agréer, Cher Monsieur Finkielkraut, mes salutations sincères.
Marlène SCHIAPPA
Hôtel du Petit Monaco - 55, rue Saint-Dominique - 75007 Paris 01 42 75 80 00
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