L Armée canadienne n est pas l Armée du Salut
68 pages
Français

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L'Armée canadienne n'est pas l'Armée du Salut , livre ebook

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Description

Avec L’armée canadienne n’est pas l’Armée du salut, le politologue et antimilitariste Francis Dupuis-Déri poursuit son plaidoyer contre la présence armée du Canada en Afghanistan. L’auteur démonte la rhétorique de la guerre humanitaire, qui cherche à légitimer un conflit armé à court de justifications, et développe, en réponse à la théorie de la guerre juste, une théorie de la guerre injuste.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 13 mai 2013
Nombre de lectures 1
EAN13 9782895966036
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0005€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Déjà parus dans la collection « ῀ Lettres libres ῀ » ῀ : Francis Dupuis-Déri, L’éthique du vampire Jacques Keable, Les folles vies de La Joute de Riopelle Duncan Kennedy, L’enseignement du droit et la reproduction des hiérarchies Robert Lévesque, Près du centre, loin du bruit Pierre Mertens, À propos de l’engagement littéraire Jacques Rancière, Moments politiques. Interventions 1977-2009 Pierre Vadeboncoeur, La justice en tant que projectile Pierre Vadeboncoeur, La dictature internationale Pierre Vadeboncoeur, L’injustice en armes Pierre Vadeboncoeur, Les grands imbéciles
© Lux Éditeur, 2010 www.luxediteur.com
Dépôt légal ῀ : 1 er  trimestre 2010 Bibliothèque et Archives Canada Bibliothèque et Archives nationales du Québec ISBN (papier) 978-2-89596-102-4 ISBN (epub) 978-2-89596-603-6 ISBN (pdf) 978-2-89596-803-0
Ouvrage publié avec le concours du Conseil des arts du Canada, du Programme de crédit d’impôt du gouvernement du Québec et de la SODEC . Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre de Canada ( FLC ) pour nos activités d’édition.
A VERTISSEMENT
Ce livre offre dans leur forme originelle ou modifiée, des articles publiés dans des journaux et des revues, des textes inédits, dont la conclusion, ainsi que des éléments de conférences prononcées en diverses occasions. Certaines répétitions ont été conservées pour préserver l’esprit et la cohérence des textes individuels, tandis que certains des titres originaux ont été modifiés pour éviter les redites.
I NTRODUCTION L A GUERRE DES HYPERACTIFS [1]
L E GOUVERNEMENT DU CANADA a annoncé que l’engagement militaire canadien en Afghanistan se terminerait 2011 [2] . Il n’est pas clair aujourd’hui que cette promesse maintes fois répétée sera tenue, ni qu’elle signifie le retrait de tous les militaires canadiens d’Afghanistan. Plusieurs affirment qu’il faudrait bien garder des troupes sur le terrain pour y protéger les « ῀ humanitaires ῀ » et pour former les soldats et les policiers afghans. Dans tous les cas, le choix de l’État canadien n’implique pas la fin de la guerre, puisque les autres armées étrangères vont très certainement se maintenir en Afghanistan pendant encore quelques années. 
En 2009, des personnalités politiques et militaires, et non des moindres, ont toutefois commencé à laisser entendre qu’il ne serait pas possible de gagner la guerre contre les insurgés afghans. Le premier ministre du Canada, Stephen Harper, a ainsi déclaré ῀ : « ῀ [H]istoriquement, l’Afghanistan a été un pays indompté. Alors, je pense que l’idée de mater complètement une insurrection est irréaliste, [...] [f]ranchement, à mon avis, nous ne vaincrons jamais l’insurrection [3] . ῀ » Selon le président des États-Unis, Barack Obama, « ῀ nous ne pourrons pas vaincre l’insurrection du jour au lendemain. Ce ne sera pas rapide. Ce ne sera pas facile [4] ῀ ». Pour David Richards, chef des armées britanniques, « ῀ le processus pourrait prendre entre trente et quarante ans [5] ῀ ». Le brigadier Mark Carleton-Smith, commandant du contingent britannique en Afghanistan, tout comme Richard Barrett, haut fonctionnaire des Nations unies chargé d’évaluer les activités des « ῀ terroristes ῀ » en Afghanistan, sont pour leur part convaincus que les troupes étrangères encouragent la rébellion par leur seule présence dans ce pays. L’ambassadeur britannique à Kaboul, Sherard Cowper-Coles, quant à lui, considère que les soldats étrangers font partie du problème, non de la solution. Des experts se joignent à ce chœur, comme Paddy Ashdown, membre de la British Security Strategy, de l’Institute for Public Policy Research de Londres ῀ : « ῀ Nous sommes en train de perdre en Afghanistan et nos jeunes soldats meurent là-bas parce que nos politiciens sont incapables d’accoucher d’une stratégie cohérente [6] . ῀ » En prenant sa retraite à l’automne 2009, Zamir Kaboulov, l’ambassadeur russe à Kaboul depuis les années 1980, a déclaré qu’il y avait des « ῀ similitudes ῀ » entre l’intervention militaire de l’URSS dans le pays, de 1979 à 1989, et l’intervention occidentale depuis 2001 ῀ : « ῀ [D]ans les deux cas, le résultat n’est pas brillant. Après tant d’années en Afghanistan, je suis triste de quitter un pays toujours en guerre et sans espoir d’amélioration. ῀ » Et de conclure ῀ : « ῀ [P]opulation négligée, absence de coopération au niveau local, habitants laissés à la merci de l’ennemi... Si vous comparez la situation à ce qu’elle était il y a cinq ou six ans, vous verrez qu’elle est bien pire [7] . ῀ »
Alors que depuis des années quelques antimilitaristes répètent que la guerre en Afghanistan est un fiasco, il semble qu’enfin des militaristes en soient venus à la même conclusion... Il faut dire que l’année 2009 a été particulièrement violente. De janvier à octobre 2009, plus de 400 soldats des troupes étrangères ont été tués, ce qui en fait déjà l’année la plus meurtrière – pour les soldats étrangers – depuis l’invasion en 2001 [8] . Il s’agira sans doute aussi de l’année la plus sanglante pour la population afghane, qui pleure déjà 30 000 morts (selon des estimations qui ne sont pas les plus pessimistes) en raison de cette guerre menée sur son territoire depuis 2001.
Les soldats eux-mêmes semblent moins enthousiastes après quelques années de guerre. Au fil de mes interventions publiques et médiatiques, des militaires et des vétérans de l’Afghanistan sont venus me parler, d’autres m’ont envoyé des courriels, généralement pour m’insulter. Engageant la discussion, j’ai pu confirmer que chez plusieurs militaires qui ne prennent pas la parole publiquement, cette guerre est effectivement perdue, que les actions de l’armée canadienne sont beaucoup plus violentes et meurtrières qu’on veut bien nous le faire croire, et que l’armée canadienne ne contrôle pour ainsi dire rien, en termes de territoire et de population. Quand des militaires canadiens retournent en Afghanistan pour un second déploiement, au gré des rotations de contingents, ils doivent se battre pour « ῀ libérer ῀ » la même route, la même colline, le même village qu’ils avaient « ῀ libéré ῀ » quelques mois auparavant. Cette guerre tourne en rond, littéralement. Au mieux, les soldats patrouillent, la peur au ventre, dans des véhicules blindés d’où ils ne sortent qu’à contrecœur. Il ne leur faut jamais s’arrêter sans raison sur la route, de peur d’une attaque, et ils reviennent le plus rapidement possible à la base, la seule zone contrôlée, qui est la cible quotidiennement de tirs plus ou moins intenses. Interdiction, évidemment, d’aller au marché ou ailleurs en ville. De la population qu’ils sont venus sauver et libérer, les soldats canadiens ont peur, ils se méfient de tout le monde, même des enfants. Au-delà de la peur, le mépris raciste ῀ : les militaires canadiens parlent des « ῀ Turbans ῀ » et des « ῀ Babouches ῀ » pour désigner les Afghans.
Il est donc erroné de prétendre que les soldats canadiens doivent rester déployés en Afghanistan pour empêcher les taliban [9]  de reprendre le contrôle du pays et d’y opprimer les femmes ῀ ; les insurgés contrôlent déjà la majeure partie du territoire, et les femmes sont opprimées partout, même à Kaboul. De plus, le régime officiel de la République islamique d’Afghanistan (véritable nom du pays) et les troupes étrangères mènent des actions brutales et meurtrières qui ne consistent en rien en une « ῀ pacification ῀ » du territoire.
Les insurgés, qu’ils soient taliban ou non, sont perçus aujourd’hui par les militaires comme l’étaient les pirates au XVIII e  siècle, soit des ennemis du genre humain [10] , à qui toutes les peines pouvaient être imposées pour les punir et se venger, dont la torture [11] . Mais les Turbans et les Babouches, ce sont aussi les civils dont la vie n’est pas prise en considération quand vient le temps de frapper un grand coup, d’où les « ῀ bavures ῀ » et autres « ῀ dommages collatéraux ῀ ». En septembre 2009, par exemple, des avions de guerre ont bombardé deux camions-citernes qui avaient été volés par les insurgés, tuan

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