Le Marge T2
346 pages
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Le Marge T2 , livre ebook

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Description

« L'homme heureux... non pas heureux, plutôt l'homme accompli n'a pas peur de la mort : celle-ci n'est pas la ruine d'une vie passée à courir après des chimères aussi saisissables – car l'homme accède à ses aspirations, c'est le nœud gordien du problème –, qu'éphémères et sans substance. » D'une plume enlevée, Gérard Nicolas poursuit le récit de la vie de Friedrich. À présent installé au Danemark, le jeune homme au profil atypique continue ses expériences spirituelles en compagnie d'Axelle. Leur voyage de noces qui leur fait découvrir le Village des Pruniers, où se réunissent des bouddhistes qui cherchent à vivre en « pleine conscience du moment présent », marque une étape dans leurs questionnements existentiels. Le couple marginal est bien décidé à ne rien sacrifier de sa liberté, jusque dans le choix de sa fin. D'un commun accord, ils organisent méthodiquement et avec sérénité leur fin de vie, tout en se ménageant des moments de volupté particulièrement intense. Dans ce roman radical, la longue quête de sens du protagoniste débouche enfin sur son épanouissement.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 18 janvier 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342164947
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Le Marge T2
Gérard Nicolas
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Le Marge T2
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
Partie 4 Adelina voudrait savoir quel sens a ta vie ?
 
Quelques jours plus tard, Friedrich emménage pour de bon chez Axelle. Bien sûr, il y a eu des mises au point. Axelle a clairement expliqué à Friedrich qu’elle supportait très mal la jalousie. Son aventure précédente avec Kurt lui a clairement ouvert les yeux à ce niveau et, plus que jamais, elle s’est alors rendu compte de l’importance de sa liberté. Aussi est-elle bien d’accord, et même elle souhaite largement que Friedrich vienne habiter chez elle, et c’est elle-même qui, la première, a utilisé les mots : se mettre en ménage ensemble. Mais à la condition qu’elle puisse à l’occasion s’offrir du bon temps avec un copain de passage, en précisant bien que ça n’arriverait pas tous les mois, peut-être même pas tous les ans.
De son côté, Friedrich est partagé entre l’idée de faire sa vie avec Axelle, – car il est clair que, malgré ses discours sur la liberté, c’est bien là qu’Axelle veut en venir –, et ses réflexions sur sa propre liberté qui, à l’inverse de celles d’Axelle, ne voient pas le couple comme élément fondamental. Axelle voit surtout en Friedrich un complice, un véritable ami, sur lequel elle veut être sûre de pouvoir compter dans les moments durs. Lors de cette discussion, il apprend qu’elle a déjà beaucoup souffert de solitude et que celle-ci l’angoisse.
Ils en ont bien discuté. Friedrich n’a pas manqué de parler de sa rencontre avec Michèle, et de cette attirance particulière, presque magique, qu’il sent envers cette inconnue ; du fait qu’il veut rester libre, si un jour il la retrouve, de décider si oui ou non il restera avec Axelle. Celle-ci est presque amusée de l’entendre parler de Michèle, qu’il n’a vue qu’une seule fois et, moyennant l’accord qu’il ne la laissera tomber que dans ce cas, ils ont convenu de se lier, en dehors des liens sacrés du mariage, pour la vie – ou du moins tant qu’ils auront le courage de se supporter l’un l’autre –, même, et surtout, dans les moments difficiles.
L’un comme l’autre sont étonnés de la vitesse de leur décision. Ils ne se connaissent que depuis quelques jours mais, c’est vrai, le courant passe très bien entre eux et, malgré le court délai qu’ils ont mis, leur décision a été mûrement réfléchie.
Bien entendu, Friedrich conserve ses liens d’amitié avec les ex-copains du squat, et bien évidemment avec la famille de sa compagne, entendez par là surtout sa sœur qui, par moments, trouve qu’il s’intéresse d’un peu trop près à sa grossesse. C’est vrai que celle-ci se passe bien et souvent Friedrich a remarqué le regard d’Axelle sur le ventre de Solen qui, au fil des semaines qui passent, commence à se tendre.
Pour Axelle, mais elle seule le sait pour l’instant, la maternité est inconcevable avec le but qu’elle s’est fixé dans la vie. Pourtant, lors de discussions avec Solen, qui souhaite avoir plus de garanties sur l’indépendance de son propre enfant, celle-ci la pousse à envisager d’avoir un enfant. Axelle répond que ce n’est pas le moment et qu’elle est décidée à bien profiter de la vie et ne souhaite pas s’enfermer, bon gré, mal gré, dans un rôle de mère, et encore moins être liée par son ou ses enfants. Friedrich, qui ne sait rien des motivations profondes d’Axelle, partage tout à fait son avis mais suggère quand même que le futur neveu vienne régulièrement passer quelques jours chez eux.
Pendant les mois qui suivent le déménagement, Friedrich consacre beaucoup de son temps libre à retaper bénévolement des appartements ou de petites maisons pour le compte de la Maison des Femmes . En effet, l’organisation elle-même, ou par l’intermédiaire de ses bienfaiteurs, est propriétaire ou gestionnaire de plusieurs logements. De même, la Maison des Femmes cherche à offrir à ses protégées, après leur passage sur place, des logements à louer en vue de leur autonomie. Et la plupart du temps ceux-ci ne sont pas en très bon état et les propriétaires, qui, c’est vrai, louent bon marché, n’ont pas l’intention d’arranger ceux-ci.
Il devient ainsi petit à petit l’homme de référence de la Maison des Femmes . En fait il va très peu sur place car certaines femmes ont une peur panique dès qu’elles voient un homme. Mais, justement, Axelle, par son intermédiaire, valorise les côtés positifs de l’homme et à ce titre invite souvent les femmes à lui demander de menus services.
En fait il n’est pas le seul homme à évoluer dans cet univers particulier de femmes. Il y a aussi Orff, surnommé Moumoute car il est connu qu’il porte une perruque. Moumoute, avant l’arrivée de Friedrich, était le seul homme à évoluer dans ce milieu. C’est un électricien de son état, qui a été engagé pour faire les nombreux travaux qui sont nécessaires pour entretenir et remettre en état les bâtiments. Moumoute se plaint souvent d’être tout seul pour des travaux trop lourds pour lui. Il est vrai qu’il a déjà plus de cinquante ans et que, souvent, il y a des travaux importants à effectuer, comme faire des cloisons, placer des châssis ou refaire complètement une installation électrique. Il voit donc d’un très bon œil l’arrivée de Friedrich, dont chaque journée est planifiée pour au moins deux ou trois jours de travail.
Moumoute se plaint beaucoup du statut bénévole de Friedrich, et du peu de temps qu’il peut lui consacrer, vu qu’il a toujours son travail au port, et il est le premier à demander au conseil d’administration d’envisager de l’engager comme homme à tout faire. L’idée fait rapidement son chemin, aidée en coulisse par Axelle qui, en n'ayant l’air de rien, tape toujours sur le bon clou au bon moment, jusqu’à ce que le président lui-même émette l’idée qu’il serait intéressant, étant donné que le budget le permet, d’engager un deuxième homme à tout faire.
Axelle, bien sûr, suit cela de très près mais, pour ne pas donner de faux espoirs à Friedrich, elle évite de lui parler de l’imminence de la décision : elle sait en effet que certaines exigences, ou du moins recommandations, sont faites pour choisir le candidat, et son compagnon ne répond pas tout à fait à ce qui est souhaité. De plus le salaire est sensiblement moins élevé qu’au chantier portuaire où il travaille et elle a peur, si elle insiste trop, qu’un jour il lui reproche de l’avoir poussé à accepter ce travail. Aussi laisse-t-elle Moumoute mettre Friedrich au courant de la situation.
Lors de leur journée de travail suivante, celui-ci est tout heureux d’apprendre la bonne nouvelle à Friedrich. Il lui explique que si la décision d’engager a été vite acquise, il n’en a pas été de même pour sa désignation. Tu comprends… ? ajoute-t-il.
Visiblement, non, il ne comprend pas ! Moumoute est un peu gêné. Il croyait qu’Axelle lui avait expliqué son propre état, mais apparemment ce n’est pas le cas. Il rougit un peu et, tout de suite, à voir son attitude, Friedrich se dit : Moumoute est homosexuel.
Mais il ne s’agit pas de cela. Moumoute lui explique qu’il y a de longues années, il a eu un accident – en restant très vague – et que, suite à cet accident, il a perdu le bien le plus précieux de tout homme. Moumoute est eunuque. C’est lui-même qui emploie ce terme.
Pendant un moment, Friedrich reste abasourdi. Il comprend maintenant certaines attitudes efféminées qui ne l’avaient jusque-là pas tellement marqué. Il comprend aussi pourquoi son engagement à lui posait problème. Ainsi, pour la sérénité des femmes, le profil idéal du travailleur masculin – si on peut encore employer ce terme – est justement qu’il doit avoir perdu ses attributs.
Il reste un peu perplexe. Ne prend-il pas un risque en acceptant ce poste ? Si un jour quelqu’un plus conforme postule à sa place, quelle garantie a-t-il de le garder ? Et par rapport aux intervenants extérieurs, quelle image va-t-on lui coller ? Sans compter qu’il va perdre pas loin de cent vingt couronnes (environ 150 euros) par mois s’il accepte la place.
Mais Moumoute insiste : un engagement, c’est un engagement. On n’est pas au Kremlin. Quant à son état sexuel, Axelle a su convaincre tout le monde qu’il était important pour les femmes de regagner confiance dans l’homme en tant que personne entière. En disant cela, Friedrich voit bien que Moumoute souffre, mais rapidement il se ressaisit et passe au-dessus de sa douleur interne.
Finalement, Friedrich décide d’accepter et de remettre son préavis au chantier portuaire dès le lundi qui suit.
 
Voilà maintenant plus de trois mois que Friedrich travaille avec Moumoute. C’est un bonhomme curieux. Bien sûr son état particulier explique sans doute certaines attitudes qui, sans être à proprement parler efféminées, sont parfois stupéfiantes. Moumoute est souvent l’objet de moquerie des femmes qui l’entourent et, visiblement, il aime cela. À n’en pas douter, il doit avoir un côté masochiste. Mais, parfois, il sait se montrer très agressif, surtout quand le travail ne va pas comme il l’entend. Friedrich en a plus d’une fois fait l’expérience, et alors, la comparaison qui lui vient à l’esprit est celle du docteur Jekyll et de Mister Hyde.
Dire que son entrée officielle dans la Maison des Femmes s’est passée sans problème serait un mensonge. Bien sûr il travaillait là depuis un moment comme bénévole, mais alors ses apparitions

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