Malik l éveillé
58 pages
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Description

Malik l'éveillé

Jean-Marc Brières

Pulp de 268 000 car.

Que dire de ses grands yeux marron clair toujours rieurs ? Sans omettre sa bouche aux lèvres charnues, magnifiquement dessinées, qui me rappellent celles tant embrassées de mon Tom. Un visage des plus agréables, couvert aux endroits adéquats d'un splendide duvet brun faisant ressortir sa virilité déjà bien affirmée. L'objet de ma fascination secrète fait partie de ces exceptions s'agissant du savoir-vivre. Peu m'importe, il est trop craquant !

Les aventures de Malik, un demi Beur éveillé, de ses débuts à sa vie de post-ado – pré-adulte.

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Informations

Publié par
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EAN13 9791029400070
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0030€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Malik l'éveillé
 
ou les aventures d'un jeune étourneau
 
 
 
Jean-Marc Brières
 
 
 
 
 
 
Chapitre 1 : Le début
 
 
Parents éternellement amoureux l'un de l'autre. Maman et papa éternellement béats devant leur fils unique à qui ils passent tout, même les plus insupportables caprices. Beau bébé, qu'ils disent. Un gamin merveilleux, qu'ils clament. À ces compliments se joignent d'autres éloges, celles de mes grands-parents, tantes et oncles – toute une véritable smala. Mes cousines m'adorent. Elles jouent les mamans qui gâtent leur enfant me gavant de sucreries et autres présents comestibles. Mes cousins me jalousent. Je leur pique leurs jouets, les assaille de maintes niches qu'ils dénoncent à leurs géniteurs, mais en vain : je suis le plus petit, on doit me comprendre et ne pas râler. Moi, je les traite de mouchards. Sauf Ben. Mais je ne lui pique rien, à lui que je laisse tranquille. Il me semble si beau, plein de mystères, délicat. En plus, jamais il ne me rabroue quand je veux lui demander un truc ou tout simplement parler. Il m'écoute, me comprend. Dommage que l'on ne se voit pas souvent. Il téléphone régulièrement à la maison et n'oublie jamais de demander à me parler. Dommage que ce soit un vieux : plus de onze ans que moi quand je fête mes cinq bougies, pensez !
Si nous ne nageons pas dans la fortune, nous vivons à l'aise. Papa est grutier dans une grande entreprise de bâtiment. Maman se farcit les malheurs des pauvres : elle est assistante sociale. Malgré un caractère jovial inné, il lui arrive parfois de « craquer ». Alors, elle me prend sur ses genoux, m'entoure de ses bras, et marmonne ses misères tandis que je m'endors. Tout va pour le mieux dans notre petit monde.
Ce bonheur s'arrête d'un coup : maman hospitalisée d'urgence ne reviendra plus à la maison. Papa m'explique qu'elle s'en est allée au ciel, tout là-haut, dans les nuages, à côté du Bon Dieu. C'est Lui qui l'a rappelée. Moi, le Bon Dieu me gonfle. Il prend ses aises, celui-là ! Il aurait pu demander mon avis. Et je Lui aurais dit que ma maman, c'est avec son fils qu'elle doit rester, et avec mon papa qui ne rit plus depuis qu'elle est partie. C'est ce que j'explique à papa, juste après les obsèques, alors que nous nous retrouvons tous les deux en tête-à-tête. Il me laisse parler, vider mon sac, en quelque sorte. J'ajoute, crâneur :
— … Je vais lui dire au Bon Dieu, quand j'irai me confesser. Il va m'entendre. Il nous la rendra, ma maman. Comment qu'Il est le Bon Dieu, Papa ?
— Personne ne le sait, fiston.
— Quand maman reviendra, elle nous le dira. On dit qu'il a une grande barbe blanche. Je n'aime pas les barbus : on ne sait pas comment leur figure est faite. Peut-être que Lui, on la voit pas Sa barbe...
Le gamin de dix ans, que je suis, continue sur le sujet. Papa me laisse divaguer. Nous nous endormons sur le canapé, harassés.
La vie reprend ses droits, selon la phrase consacrée. Une voisine me surveille quand papa travaille. Sinon, c'est toujours lui qui s'occupe de moi. Souvent, quand nous parcourons les allées d'un grand magasin à la recherche d'un article quelconque, il bougonne :
— … Qu'est-ce qu'elle aurait choisi, ta mère ? …
Évidemment, j'ai vite compris que maman ne reviendrait plus parmi nous. Cependant, encore maintenant malgré mes vingt-quatre ans, je ne manque pas de regarder les étoiles la nuit, ou les nuages qui les cachent, persuadé que maman est devenue une étoile qui brille pour nous deux, papa et moi. Lui aussi le croit, j'en suis certain. Il nous arrive de rester un long moment, côte à côte, silencieux, yeux dirigés vers le ciel.
Je crois que c'est à partir de cette époque que les oncles, tantes, cousines et cousins se sont faits plus rares pour enfin ne plus venir nous voir et nous éviter. Je n'en connaissais pas la raison, papa non plus. Ses dernières lettres restent sans réponse. Une pointe de regret pour Ben que j'affectionnais tout particulièrement. Seuls mes grands-parents continuent de me couver.
 
*
* *
 
L'école ! Quel foutoir ! Enfin, je la vois comme cela. Avant, du temps de maman, j'allais comme externe dans une école privée. Maintenant, je suis dans un établissement public. Nous ne sommes pas miséreux, papa et moi. Néanmoins, nous tenons les cordons de la bourse très serrés. Le crédit de la maison n'est pas encore fini de payer, les frais sont identiques à ce qu'ils étaient jadis alors qu'il manque un salaire. Ça je l'ai rapidement compris. Dans l'école privée, c'était l'ordre et le silence durant les cours, une certaine tenue durant les récréations et au réfectoire. Ici, dans l'école publique, tout le monde crie, chahute, se bouscule en cours. Les professeurs s'acharnent à déverser un savoir que peu d'élèves veulent connaître. J'observe, soucieux de me tenir à l'écart de cette fourmilière que j'estime dangereuse. Malheureusement, si j'ignore ce qui m'entoure, l'entourage ne veut pas m'ignorer. Je passe pour le « premier-de-la-classe » – je le suis réellement –, la tête de Turc, le pistonné, le chouchou. Tout cela parce que je suis attentif aux cours, que j'obtiens des notes relativement correctes, que je ne me mêle pas aux distractions des autres élèves. En plus, je déteste le sport ! Femmelette, c'est le surnom que l'on me donne. D'autres ironisent sur mes origines et me traitent de « Beur mou » ou de « Beur fondu ». Maman est fille de kabyles. Ceux qui m'infligent leur mépris de cette façon sont, pour la plupart, beurs eux-mêmes. Une année scolaire à subir leurs brimades. Je résiste, n'en parle pas à papa. C'est notre voisine, celle qui veille sur moi de temps à autre, qui le met au courant, la veille de la rentrée scolaire, après les vacances d'été : son fils à elle, un qui est dans ma classe, lui a annoncé toute sa rancœur à mon encontre, décrétant que j'étais un sale pédé indigne d'être considéré comme un beur. Résultat, je retourne au collège privé, mais comme interne. Papa m'explique que c'est pour ma tranquillité, assure que tous les jours chômés je les passerai avec lui, à la maison, vacances scolaires comprises. Il tiendra parole. Avant de me laisser dans mon nouvel habitat, il me parle des différences de culture, de races etc. J'écoute, mais ne comprends pas qu'il cherche à excuser des imbéciles imbus de leurs origines qu'ils sont les premiers à salir.
Nouvel interne à bientôt treize ans, je suis accueilli chaleureusement. Beaucoup d'élèves de mon âge étaient avec moi en classe, alors que j'étais seulement externe. Ils se souviennent. Cela facilite l'intégration. Seul point noir : je ne suis plus à la maison, avec papa, dans ma chambre où je peux admirer un poster géant représentant maman avec papa. Mais Tom, mon ancien copain de classe, ne m'a pas oublié. Il se charge de me distraire. Je retrouve le calme qui sied aux études, la joie de jeux simples dans une atmosphère apaisée. J'oublie vite l'école publique.
Cette quiétude se trouve interrompue lors des vacances de la Toussaint. Je reviens de chez le boulanger où j'ai acheté notre pain. Quatre anciens de l'école publique me barrent le passage, tandis que je traverse la ruelle, raccourci vers la maison. Je comprends qu'ils ne vont pas me ménager. Je décide de ne pas résister, de les laisser faire. Ils m'injurient, me crachent dessus, s'emparent de mes vêtements, exception faite de mes sous-vêtements. Ils prennent ma montre, l'argent et jettent le pain dans une flaque d'eau après l'avoir écrabouillé histoire de rigoler. Je regagne la maison, les pieds nus, le corps couvert d'hématomes et un œil bien poché. Pas besoin de conter ma mésaventure à papa. Il me soigne, une fois passé sous la douche. Très calme, il annonce ne pas aller travailler le lendemain. Il exige seulement que je lui donne les noms de mes agresseurs. Ce que je fais sans hésiter. Vingt-quatre heures plus tard, papa me rend ma montre ainsi que mes vêtements, l'argent. Il m'annonce :
— … Des copains de travail m'ont aidé à raisonner tes anciens camarades de classe qui ont promis de ne plus te créer d'ennui. Quant à leurs parents qui parlaient de porter plainte, ils en sont revenus à de meilleurs sentiments à notre égard et sévissent contre leur progéniture. Ils tiennent à ce qu'en leur nom je te présente leurs excuses...
Effectivement, ces gars ne croiseront plus notre chemin.
Cependant, cette mésaventure m'a ouvert les yeux s'agissant des risques encourus quand on veut rester à l'écart des autres alors qu'on aime étudier.
Autre fait marquant en cette treizième année de ma jeune vie : mon refus obstiné de faire ma communion solennelle, refus sans cesse réitéré depuis bientôt un an. Papa se fiche éperdument que je la fasse ou non. Il me l'a proposé uniquement en mémoire de maman qui, elle, aurait voulu me voir avec une belle aube blanche parmi les autres communiants. Bien que fille kabyle, maman fréquentait l'Église catholique, uniquement les jours fastes comme elle disait. Elle savourait le côté mystique, les pompes et les ors parfumés à l'encens lors des grandes cérémonies. Par contre, les curés du collège me bassinent pour que je me plie à leurs us et coutumes. C'est en colère et de façon péremptoire que je rétorque :
— … Je ferais ma communion solennelle si le Bon Dieu me rend ma mère ! Je ne vais pas adorer un vieux barbu qui prive un garçon de sa maman…
S'ensuivent maintes tentatives pour me faire céder, chantages à l'appui. J'ai la rancune tenace et l'esprit buté. Je ne cède pas. L'école privée étant laïque, bien que tenue par des religieux, les curés cèdent, mais promettent de me rendre la scolarité difficile. J'argumente encore :
— … Vous oubliez que moi, je suis musulman. Vous ne pouvez pas me forcer. Sinon, je sais à qui dire que vous êtes des intégristes dans votre genre !…
L'ennui, c'est que je ne crois en rien, excepté en mon papa ! Le principal reste que j'obtienne gain de cause et qu'on me fiche la paix.
 
*
* *
 
Gagnée la bataille religieuse, une nouvelle question s'en vient trifouiller mon cervelas : un corps qui

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