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Description

Marge, directrice d'un musée, se sent mise à l'écart par sa hiérarchie depuis qu'elle lui a montré les dysfonctionnements qu'elle a constatés. Se doutant d'une manœuvre cherchant à l'évincer et malgré le risque professionnel, elle soumet à Paul Clerman, anonyme comptable d'une collectivité, des informations confidentielles. Quelles sont les motivations de Paul qui, dès lors, à force de recoupements et grâce à un sort du hasard tentera de démonter l'écheveau d'une sombre histoire?

Informations

Publié par
Date de parution 10 janvier 2013
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312007274
Langue Français

Extrait

La Battue
Éric Caramano
La Battue














Les éditions du net 70, quai Dion Bouton 92800 Puteaux

À Fanny et Lucille






























© Les Éditions du Net, 2013 ISBN : 978-2-312-00727-4
Jeudi 06 Mai 2010 17 h 45
Loin de se douter de ce que les jours à venir allaient lui réserver comme lots de surprises et de découvertes , Paul CLERMAN rentrait chez lui après sa journée de travail .
Paul , vous l ’ avez sans doute déjà croisé sans y prêter attention . Un anonyme parmi les autres anonymes dans la foule que l ’ on croise au quotidien . La quarantaine grisonnante , vêtu sans luxe ni goût particulier mais toujours élégant . Il a l ’ air taciturne de ces personnes qui n ’ attendent plus grand chose de la vie . C ’ est un modeste employé de bureau comme il en existe des millions . Son travail il l ’ exécute sans plaisir mais avec application , sachant que ce n ’ est pas là qu ’ il trouvera son épanouissement car ce job n ’ est qu ’ alimentaire et encore est - ce tout juste suffisant une f ois payés le loyer , les charges et la pension alimentaire qu ’ il verse à son ex en espérant que celle - ci en fasse bon usage pour l ’ éducation de leurs enfants . Sans les perfusions financières de sa famille , Dieu seul sait ce qu ’ il deviendrait .
Oui , il a de quoi être taciturne , désabusé . Il se réfugie dans sa soif de connaissance , sa faim de culture et l ’ ironie profonde dont il abuse pour cacher sa timidité et son mal - être . Sa chanson préférée , la version live de Money des Pink Floyd dans l ’ album Delicate Sound of thunder , dont les paroles reflètent l ’ air du temps avec sa crise financière . « Money , it ’ s a gas » .
Il rentre chez lui comme quasiment tous les soirs , un coup d ’ œil dans la boîte aux lettres , des pubs , au pire des factures . Arrivé dans son appartement , il ouvre son PC et consulte ses boîtes mails , encore de la pub et quelques fichiers amusants envoyés par des contacts . La télé qu ’ il a allumée machinalement en entrant vomit son flot d ’ images de vulgarité ordinaire du quotidien , le fortifiant dans son idée qu ’ il se fait du monde .
Pour autant , Paul est un être sociable . Des amis il en a quelques - uns dont il est sûr de l ’ indéfectible fidélité . Des copains , camarades de travail bien sûr qu ’ il en a , ils lui permettent de le distraire de sa torpeur quotidienne . Car Paul est un personnage attachant , essayant toujours d ’ avoir le mot pour rire , dérision quand tu nous tiens , prêt à donner son attention là où d ’ autres n ’ auraient prêté que leur oreille .
Avec une telle personnalité on peut se demander si Paul a déjà été amoureux . Bien sûr , comme tout un chacun , et il n ’ a jamais laissé sa place . Adolescent et pré - adulte il était prêt à tout pour voir ses petites amies . Il succomba même dans une passion fougueuse , vorace , quasi cannibale . Du sexe , des excès , de la violence à l ’ image de la force des sentiments qu ’ ils éprouvaient . Une relation qui s ’ était finie de façon aussi brutale qu ’ elle était née et qu ’ ils l ’ avaient vécue .
Puis il rencontra celle qui allait devenir la mère de leurs enfants . Au début cela ressemblait à sa relation précédente , puis , petit à petit tout cela s ’ était étiolé , non par la faute des enfants , mais à cause du mal être de cette vision du monde que Paul commençait à ressentir . Enfin , il y avait eu la séparation et son lot de turpitudes communes .
Paul n ’ espérant plus grand chose de la vie , ne s ’ attendait pas à retomber amoureux et y prenait même garde . Plus ou moins malgré lui , il avait dressé des barrières qu ’ il se refusait de franchir , même s ’ il sentait parfois poindre en lui des sentiments troublants auprès de certaines personnes de la gente féminine , il faisait de son mieux pour cacher son trouble .
Pour le sexe , il s ’ y adonnait encore parfois mais plus par hygiène que par recherche du plaisir , même s ’ il le prenait évidemment . Mais , lorsqu ’ il sortait de ces relations éphémères c ’ était toujours avec un certain dégoût de lui - même et l ’ envie de reculer encore plus loin la prochaine échéance de ces soubresauts orgasmiques persuadé qu ’ un jour il serait capable de s ’ abstenir , tant cela reflétait en lui la médiocrité dans laquelle il était tombé et celle de l ’ espèce humaine .
Médiocre parmi les médiocres , mais qui ne s ’ ignore pas , voilà l ’ image qu ’ il avait de lui .
Paul c ’ est monsieur tout le monde à la différence près que ses expériences passées qui viennent souvent troubler ses nuits de cauchemars aux images bien trop réelles où la misère et la terreur qu ’ il a pu côtoyer de trop près l ’ ont persuadé que la vie est dérisoire et que le monde qui nous entoure est bien plus vil que l ’ on veut nous le faire croire .
Il avait dans l ’ esprit que toute sa petite vie pourrait tenir dans une boîte à chaussures . Pour résumer , Paul , 40 ans , divorcé , 2 enfants , comptable . Bonjour la caricature de loser .
Restauré et lavé , il retourne sur son PC pour effectuer quelques recherches historiques ou généalogiques selon les soirs , entrecoupés de morceaux choisis de l ’ actualité brûlante , le tout en musique bien entendu . Puis , sentant la fatigue monter , il s ’ installe pour son sommeil , programmant sa télé pour qu ’ elle s ’ éteigne dans l ’ heure qui suit dés fois qu ’ il s ’ endorme . Mais pas ce soir - là .
Jeudi 06 Mai 2010 22 h 37
Le téléphone sonne , il s ’ empresse de décrocher , même si les coups de fils tardifs ou trop matinaux éveillent en lui l ’ angoisse que quelque chose de terrible vient de se produire , une vieille résurgence du passé quand , à quelques années d ’ intervalles , ses grands - parents paternels étaient partis . C ’ est la voix de sa meilleure amie , une ex - collègue de travail avec qui le courant était passé tout de suite , qui le tire de sa somnolence .
Paul ! C ’ est Marge !
Oui , comment vas - tu ?
Pour que je t ’ appelle à une heure pareille tu dois bien t ’ en douter .
Des soucis ?, l ’ art de la concision par excellence .
Oui , d ’ ordre professionnel , mais je préférerais t ’ en parler de vive voix plutôt qu ’ au téléphone . Tu es disponible demain soir ? J ’ ai besoin de te parler .
Tu sais bien que pour toi je le serais
Bon . OK . Je t ’ envoie un message dès que je sors du boulot demain et je te dirais où l ’ on se retrouve . Tu es sûr que ça ne te dérange pas ?
Puisque je te le dis . Je ne t ’ ai jamais menti . J ’ attends ton message demain .
Merci . Bonne nuit et à demain
Bonne nuit à toi aussi et ne cogites pas trop même si je ne connais pas l ’ importance de tes soucis . Bises .
Bises .
Ah ! Marge . Sacré bout de femme , se dit - il en raccrochant tout en se demandant ce qui pouvait bien se passer pour qu ’ elle l ’ appelle à une heure aussi tardive . En général ce n ’ était pas bon signe .
En se remettant en position pour tenter de s ’ endormir , il se remémora ce qu ’ ils avaient vécu ensemble et les circonstances de leur rencontre .
Cela faisait maintenant cinq ans qu ’ ils se connaissaient . Dès leur première rencontre , lorsque son directeur était venu lui présenter la nouvelle arrivante dans le service , comme cela se fait à l’ accoutumée , il s ’ était immédiatement douté que cette femme compterait dans sa vie . Une intuition . Elle débarquait au moment où il se dépatouillait de son divorce , au moment où sa vie avait basculé dans une routine maladive de divorcé . Métro , boulot , dodo . Ils avaient commencé à se retrouver de temps à autre dans la salle fumeurs , à parler de tout et de rien . De leurs goûts musicaux , littéraires , puis , petit à petit ils en étaient venus à se faire des confidences sur leur vie . Ce dont Paul se souvint de plus surprenant est que , cette année - là , lorsqu ’ il avait adressé un message à ses collègues de bureau pour leur souhaiter de bonnes fêtes de fin d ’ année ,

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