Jan Cocheril, enquêteur à Saint-Briac
242 pages
Français

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Description

« Je me prénomme Jan Cocheril et je suis né à Saint Briac, en Ille-et-Vilaine, en Bretagne, en 1771. À cette époque-là, sous l'autorité de l'église et de ses puissants représentants, la date de naissance n'avait que peu d'importance. [...] Maintenant, bien des années sont passées, mais je vais vous raconter les événements qui se sont déroulés en 1788 et en 1789, dans mon village, petit port de pêche et de constructions de navires à l'époque, et qui ont guidé mon choix d'être ce que je suis maintenant, à savoir, capitaine dans la gendarmerie. » Orphelin d'un père marin dès l'âge de 10 ans, Jan Cocheril grandit en soutenant sa fratrie et en aidant sa mère. Cette dernière, à jamais meurtrie par la disparition de son mari, ne souhaite pas que ses enfants envisagent leur futur professionnel en mer. Dans ce petit village breton, laboureur est le métier le plus répandu, mais il n'enthousiasme pas Jan qui, pourtant, ne veut pas accroître l'angoisse maternelle. Cependant, l'assassinat de la femme de l'aubergiste offrira au jeune homme une autre perspective d'avenir puisqu'il sera sollicité pour enquêter discrètement sur ce crime. Cette investigation secrète et réussie marquera le début de sa carrière... Une intrigue ingénieusement menée et relatée dans un style captivant.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 avril 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342165968
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Jan Cocheril, enquêteur à Saint-Briac
François-Xavier David
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Jan Cocheril, enquêteur à Saint-Briac
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
Retrouvez l’auteur sur son site Internet :
http://francois-xavier-david.societedesecrivains.com
 
À Mathilde Cocheril,  mon amie de Saint-Briac-sur-Mer
 
L’homme est cet animal fou dont la folie a inventé la raison.
Cornelius Castoriadis (1922-1997)
 
Merci à Mathilde Cocheril, mon amie d’enfance,  et à sa sœur Anne, pour leurs conseils éveillés sur Saint-Briac.
Jan Cocheril
Je me prénomme Jan 1 Cocheril, je suis né en la sénéchaussée de Dinan – devenue le département breton de l’Ille-et-Vilaine depuis le 4 juillet 1790 – et plus exactement à Saint Briac 2 , en 1771. À cette époque-là, sous l’autorité de l’Église et de ses puissants représentants, la date de naissance n’avait que peu d’importance 3 .
Proche de la ville de Saint Malo 4 , Saint Briac est la dernière commune avant Lancieux, dans les actuelles Côtes du Nord, auparavant également en la sénéchaussée de Dinan. Pendant la terrible époque de la Révolution, elle portait le nom de Port-Briac mais, depuis quelques années, elle a repris ce nom d’origine qui me plaît bien, celle de ce saint irlandais venu en Bretagne en 548 avec saint Tugdual.
Maintenant, bien des années sont passées, mais je vais vous raconter les événements qui se sont déroulés en 1788 et en 1789, dans mon village, petit port de pêche et de construction de navires, à l’époque, et qui ont guidé mon choix d’être ce que je suis maintenant, à savoir, capitaine dans la Gendarmerie.
Tout avait commencé une nuit. Ce soir-là…
La Jacquemine
Ce soir-là, le vent soufflait épouvantablement, des rafales s’engouffraient dans le chaume des toits de la maison mais aussi de la grange, de l’étable, de l’écurie et de la bergerie, formant, pour cette dernière, un prolongement de notre habitation ; la porcherie, quant à elle, était en dur et assez distante des autres constructions, près de la mare, l’odeur mais surtout le grognement étaient les raisons premières de cet éloignement. Les volailles, assez nombreuses, trouvaient refuge principalement dans la grange mais également près des moutons et des chèvres, dans la bergerie.
À l’intérieur des maisons du voisinage, les gens grelottaient, de froid, mais aussi et surtout de peur. Pour ma part, je n’avais jamais vécu pareille tempête. Qu’allait-il advenir d’eux, après ces bourrasques comparables à celles d’il y avait trente ans au moins, paroles des anciens du village, même Maman n’avait pas connu cela ?
Je n’étais pas très fier et je m’étais terré dans la bergerie pour calmer les animaux ; les chèvres et les moutons ne savaient où se blottir. Leurs mouvements apeurés affolaient la volaille qui volait dans tous les sens, rendant les ovins encore plus nerveux, un cercle sans fin. J’avais auparavant prévenu ma mère que j’y passerai la nuit. Joseph, mon jeune frère, était resté avec elle, ainsi que nos petites sœurs, Janne et Julienne. Nous étions tous restés choqués depuis longtemps par des vents violents, mais là, c’était pire encore.
Que faire contre les éléments, surtout quand les vieilles du village, aidées par les nonnes et l’ancien curé, disaient à qui voulait l’entendre que c’était là, la colère du Tout-Puissant ? Qu’avions-nous donc fait, ou pas fait, pour mériter cela ?
Papa, marin pour le roi Louis XVI à bord de la frégate Inconstance 5 , avait péri quelques années plus tôt, dans un naufrage, près de la Martinique, dans une tempête semblable à celle-ci, mais loin, près d’autres pays que nous ne connaîtrions certainement jamais. Maman, dans ces moments de frayeur semblables à cette nuit-là, nous faisait jurer de ne jamais prendre la mer, même pour vivre cette vocation de marin dans la Royale, comme notre père. Il fallait que nous trouvions autre chose et, dans une région comme la nôtre, que pouvait-on faire à part laboureur ?
Des champs à labourer, ici, ce n’est pas ce qu’il manque. Quand tu tournes le dos à la mer, ce sont des terres à perte de vue ; et cette perte de vue, qu’en connaît-on, puisqu’on ne sort jamais du village ? Au-delà des rochers, dès que l’herbe commence à devenir un peu plus verte, un peu plus grasse, les laboureurs retournent la terre pour le propriétaire ou le seigneur, protecteur de la région, en l’occurrence, ici, un comte.
Mes oncles ne font que ça, mon grand-père aussi malgré son grand âge, et ils retournent et retournent encore cette terre qui offre des récoltes que personne d’entre nous ne voit. On crève la faim pendant que d’autres, un autre surtout, s’engraissent à s’en faire péter la sous-ventrière. Ici, il n’y a pas beaucoup de choix, tu as les familles de marins, comme dans la famille de Papa, ou tu as des familles de laboureurs, comme dans la famille de Maman. Nous serons donc malgré nous, Joseph et moi, des laboureurs.
Janne et Julienne trouveront certainement, chacune, un mari également laboureur, Maman ne veut plus de navigants dans sa maisonnée. Elle ne veut plus vivre ces peurs qui hantent ses nuits, encore maintenant, malgré tout ce temps passé. Les filles ont huit ans et n’ont jamais connu notre père, et lui, ne les a jamais tenues dans ses bras, elles sont nées trois mois et demi après le drame. Le curé avait accepté de les baptiser sous le nom de notre père – elles auraient pu être prises pour enfants naturelles – mais Maman allait souvent à la messe, avant la tragédie. Il l’avait vue grosse au bras de mon père, à la messe donc, mais aussi aux vêpres et à toutes les processions, aux fêtes religieuses et surtout, surtout, aux pardons.
Aux dates fixes de chacun des pardons du village, ou de ceux d’à côté, Maman revêtait son habit régional, celui avec lequel elle avait épousé Papa à la fin du printemps de l’année 1770. Lui aussi était habillé en habit, c’est Maman qui me l’avait dit. Son habit, maintenant, est toujours plié dans un linge, dans le coffre de la chambre. Normalement, je devrais pouvoir le mettre l’an prochain, pour mes dix-huit ans.
La robe de Maman est noire, la dentelle du bas, fine et gracieusement ajourée, l’est également. J’aime sa robe, longue, large et soyeuse au toucher. Sur le chemisier, que l’on distingue à peine, elle jette un châle du même noir de jais que sa robe, mais il a toute une série de fleurs brodées, rouges et blanches aux feuilles vertes, de ces verts de différentes nuances, rappelant celui des arbres quand les rayons du soleil les caressent. Le vert change selon la lumière. Et quand elle pose sa coiffe sur ses longs cheveux châtains, les deux rubans blancs viennent flotter au vent en se frottant à ces semblants de petites épines des bois de ces roses rouges et blanches brodées minutieusement et avec passion. Papa aussi avait des rubans, noirs, et en velours, qui entouraient son chapeau de feutre à larges bords et dont les deux pans de tissus duveteux bougeaient, eux aussi, au vent, tout comme ceux de Maman. Ils étaient beaux tous les deux, mais ça, c’était avant.
Quand Papa était là au moment des pardons, ils partaient tous les deux. Joseph et moi les suivions, fiers dans nos petits costumes identiques à celui de notre père. Au dernier pardon en famille, Maman avait le ventre déjà bien rond, ce fut notre dernier pardon avec notre père. J’avais neuf ans cette année-là, et Joseph cinq.
Papa n’était pas revenu de ce long voyage au départ de Saint Malo, tout comme les autres marins de cette frégate, ce qui faisait bien imaginer le pire, la perte corps et biens. Nous l’avions vu partir, comme bon nombre de familles, nous nous étions rendus à la pointe de la Garde Guérin, la frégate avait quitté le port, mais nous ne distinguions personne en particulier, juste des marins à bord qui s’activaient et que nous ne reverrions jamais plus. À cet instant présent, nous ne savions pas encore que nous fussions des veuves ou des orphelins en devenir, quelques-uns de plus dans le village.
Et depuis, le nombre ne cesse de s’agrandir, comme presque tous les ans, après un départ sans retour. Chaque départ de navire est un déchirement, surtout pour nos mères ; nous, les enfants, on ne se rend compte de rien, sauf quand nos pères ne reviennent pas et que nos mamans nous disent, des larmes plein les yeux, que nous sommes devenus les hommes de la famille, à presque dix ans, en ce qui me concernait.
Commencent alors des jours, des semaines, des mois, où l’on scrute la mer d’un espoir imbécile de voir arriver un matin la frégate tant espérée. Mais les mois bousculent les saisons et les années passent, l’horizon reste alors scandaleusement bleu et irrémédiablement stérile de ce retour tant attendu. Cette mer que l’on déteste et qui vit pourtant avec nous, là, tout près, à la toucher du doigt sur les nombreuses plages du village. Cette mer si proche que l’on entend les vagues se fracasser sur les rochers quand on dort, ceux-là mêmes qui ne sont pas encore couverts de cette herbe grasse qui ne demande qu’à être caressée du soc de bois dur d’une charrue d’un laboureur vieilli d’épuisement avant l’âge.
Puis mes petites sœurs sont nées, juste avant l’hiver. En plus d’être une jeune veuve avec deux enfants de neuf et cinq ans – ces deux enfants survivants d’une fratrie décimée par la mortalité infantile en bas âge que redoutaient bien des mères

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