Fantômes et fantoches
54 pages
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Fantômes et fantoches , livre ebook

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Description

Dans «Le Lapidaire», un vieil homme possède la plus merveilleuse (et par là même la plus convoitée) des collections de pierres. Une fois encore la convoitise ne restera pas impunie. - «La Fêlure» est la retranscription posthume des derniers écrits du grand romancier Salvien Farges. Ces écrits ont été gardés secret car leur auteur y explique avoir été témoin d'une aventure à caractère surnaturel... - «Le Bourreau de Dieu» est l'histoire d'un enfant malingre, recueilli dans un monastère et baptisé Christophe. Il en sera chassé plus tard et commencera à errer jusqu'au moment où il décide de s'installer au bord d'un sentier conduisant à la cime d'une montagne. Très vite son succès auprès des touristes est envié par Marcoux le contrebandier...

Informations

Publié par
Date de parution 30 août 2011
Nombre de lectures 118
EAN13 9782820609472
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0011€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Fant mes et fantoches
Maurice Renard
1905
Collection « Les classiques YouScribe »
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ISBN 978-2-8206-0947-2
LE LAPIDAIRE

I

Il y avait à Gênes, sous le dogat d’UbertoLazario Catani, un lapidaire allemand fameux entre tous lesmarchands de pierreries.
C’était une époque favorable aux célébritéspacifiques.
La peste, dont la dernière épidémie avait faitdes ravages très meurtriers, ne sévissait plus depuis deux ans.
Entre Venise et sa rivale, la haine séculairemourait dans une lassitude et un affaiblissement militairesimultanés.
Enfin, Andrea Doria venait de délivrer sapatrie en chassant les Français, et dans Gênes indépendante ilavait constitué un nouveau gouvernement républicain dont la forceet l’harmonie promettaient une ère florissante de paix intérieure.Là était l’important ; car les Génois, prenant parti dans lesquerelles pontificales contre le pape ou contre l’empereur,entraînés dans les dissensions urbaines vers l’une ou l’autre desgrandes familles ennemies, poussant au pouvoir telle classe de lapopulation qu’il leur convenait, puis encore divisés sur le choixdes prétendants, allumaient la guerre civile à propos de futilités,et jusqu’alors ce n’avait été que perpétuels combats entre Gibelinset Guelfes, Spinola et Grimaldi, noblesse et bourgeoisie, amis deJulio et partisans d’Alberto, discorde au sein des factions etbataille dans la bataille.
Mais tout cela, disait-on, n’était plus qu’unpassé regrettable.
Sur l’ordre d’Andrea Doria, une fusions’opérait : les patriciens adoptaient les bourgeois sans troprécriminer et l’on célébrait d’assez bonne grâce des mariagesmixtes.
Le calme régnait donc, et les citadinss’adonnaient au commerce avec une ardeur inusitée, heureux de neplus voir dans les rues ni cadavres de pestiférés, ni matelotsprêts à partir contre un Dandolo, ni gens d’armes de France, nisurtout ces horribles flaques de sang caillé, témoignages d’émeuteou de rixe, vestiges funèbres que d’ordinaire l’homme épouvantérencontre si rarement et dont naguère les Génois se détournaient àchaque sortie sans y pouvoir accoutumer leur répulsion.
De tout temps, les étrangers les moins prochess’étaient mis en route afin de visiter la Ville ; maisl’annonce de cette tranquillité inespérée avait multiplié leurnombre. Plus de cavaliers montés sur de robustes palefrois, àcheval entre la valise et le portemanteau, et suivis de leursserviteurs, franchissaient les portes bastionnées desremparts ; et surtout, on voyait débarquer, à l’arrivée desnefs moins rares une recrudescence de passagers, le fait étant bienconnu dans le monde que l’on devait atteindre Gênes par mer à causedu spectacle. Rien de plus exact ne fut jamais vérifié. Mais si letableau se trouvait être véritablement grandiose, il semblait forténigmatique à ceux qui l’admiraient pour la première fois. Aussiles voyageurs de l’Océan comme ceux de la terre, accostés dèsl’arrivée – fussent-ils ruisselants à l’égal de tritons ou pluspoussiéreux que meuniers – par les guides, dont la race estéternelle, se rendaient-ils en leur compagnie sur le môle, d’oùl’on découvrait la même vue que du large en l’écoutantexpliquer.
Des quais, la Ville s’échelonnait sur unecolline abrupte et la couvrait tout entière de toits pointus, deterrasses et de murs blancs. Elle paraissait bâtie afin que chaquemaison pût voir la mer, et la cité maritime formait une tribune auxcent gradins, préparée, semble-t-il, pour quelque naumachiecolossale. La crête d’une montagne aride découpait derrière elle unhorizon très élevé, couronné de forteresses et de monastères qui seressemblaient ; et Gênes profilait sur cet écran morose etmenaçant la silhouette plus claire de son amphithéâtre. À voircette disposition en escalier, on avait tout de suite l’idée queles différents ordres d’une population si partagée habitaientchacun le degré correspondant à la hauteur de sa condition sociale.On se trompait : la ville basse passait pour la plus riche, laproximité du port attirant de ce côté les marchands, et ellepossédait, comme la ville supérieure, ses palais. Ils étaientvisibles du môle – car la vue de cette cité presque verticale endonnait le plan – et les guides, esprits méthodiques, après avoirfait admirer la ceinture inexpugnable de Gênes entourée par l’eaude la mer et du Bisagno, par des citadelles et des fortifications –ce qui faisait sourire les sujets du feu roi Louis XII –désignaient les édifices :
– San Lorenzo ! San Marco ! Lepalais d’Andrea Doria !
– Où donc ?
– Pas loin de la Lanterna… Tout près dela rive… Contre le mur d’enceinte et en dehors… au milieu dejardins, ce grand château…
– Parfaitement. Doria, c’est le doge,n’est-ce pas ?
– Non ! Il a refusé le bonnet. Lecommandement de la flotte espagnole lui laisse peu de loisirs, etDoria persiste à servir l’empereur, disant ne pouvoir mieux obligerles siens qu’en leur conservant un allié si considérable. La guerrepourtant lui donne du répit ; le voilà parmi nous quelquetemps jusqu’aux expéditions prochaines. Il est tout-puissant et ledoge lui demande conseil. Les hommes de sa trempe ne devraient pasmourir, et ses cheveux sont blancs…
Puis, le boniment, récité à la façon d’uneconfidence, accentué de mimiques affairées, larmoyant parfois,présomptueux souvent, emphatique toujours, se poursuivait àl’occasion d’autres castels :
– Cette tour est celle de l’arsenal,effroyable magasin de la mort ! Au centre de la Ville, s’élèvele palais ducal. Que Dieu protège le doge ! Voici, dans lequartier bas, N. Donna delle Grazie ; la terrasse de l’orfèvreSpirocelli, voisine de l’église, s’aperçoit fort nettement. Quelartiste !… Je vous conduirai chez lui ; vous achèterez làdes bijoux délicieux, agencés selon les règles récentes de l’art…Et voyez-vous maintenant, à une portée d’arbalète de cette maison,celle dont la toiture bleue est percée de quatre fenêtres ?C’est la demeure d’Hermann Lebenstein, le beau-père de Spirocelli,le roi des lapidaires, une des gloires génoises ! Il possèdeune merveilleuse collection de pierres. Par la Sainte Madone !on ne saurait tarder davantage à connaître un tel trésor, car ilpourrait payer la rançon de toute la chrétienté, si les mécréantsvenaient à la capturer !
Alors, à travers le dédale des ruelles, lesvoyageurs accompagnaient leurs guides, et quand ils lesquestionnaient au sujet de ce lapidaire aussi renommé que SanLorenzo, l’arsenal ou Doria, les Italiens rusés faisaient mine dene pas entendre et nommaient obséquieusement les passants dequalité : Marino, Garibaldi, Fiescho…
II

Dans la rue des Archers, étroite et montante,les étrangers, fort intrigués, s’arrêtaient devant une habitationde belle apparence dont la porte et les fenêtres aux croisillons depierre étaient surmontées d’une accolade sculptée retombant àdroite et à gauche des ouvertures en cordons rigides, fruités deraisins à leur extrémité.
Le battant de chêne, poussé, donnait accèsdans une salle lambrissée d’armoires où, derrière une tableencombrée de balances, de pinces, de cuillers au manche perforé detrous ronds, un jeune garçon se tenait.
– Ce n’est qu’un serviteur, disaient lesguides.
Ses petits yeux verts inspectaient lesnouveaux venus à l’abri d’un front minuscule encore rétréci par unechevelure courte mais envahissante.
Ayant jugé à quelle sorte de pratiques ilavait affaire, le valet s’empressait d’aller quérir son maître, etbientôt un grand vieillard livide accueillait les étrangers d’unsourire souffrant. L’acier cliquetant d’un trousseau de clefsluisait à sa hanche, sur l’étoffe sombre du costume, et l’on sedemandait de quel prisonnier ce grave personnage avait lagarde.
C’était Hermann.
La bienvenue de cet homme trop pâle et detaille exagérée frappait toujours ses hôtes d’étonnement et lesconfirmait dans cette pensée émouvante que le logis d’un être aussianormal devait, en vérité, tenir du phénomène. C’est pourquoi, touten suivant le large dos parmi l’obscurité d’un couloir, ilsébauchaient, sans même le savoir, des récits merveilleux à l’usagedu retour, et ces Ulysses espagnols ou allemands préparaient pourBurgos ou Aix-la-Chapelle la relation incroyable de leur visite aurepaire d’un cyclope.
Cependant, le futur Polyphème des fablesinternationales fouillait dans l’ombre une serrure familière ;il en faisait jouer les combinaisons et l’on entendait glisser avecsoumission les leviers pesants de la fermeture compliquée ;une autre clef pénétrait une seconde m&#

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