Histoire vraie d un pêcheur à la ligne - Tome II
332 pages
Français

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Histoire vraie d'un pêcheur à la ligne - Tome II , livre ebook

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Description

« À partir de 1990, après avoir déjà bourlingué canne en main sous de nombreux cieux exotiques, j'éprouvai un pressant besoin de diversifier également les lieux de mes exploits dans ma région d'adoption. Je souhaitais d'autre part renouer avec la pêche de Grandgousier, au souvenir de belles émotions et de quelques trophées, mais aussi parce que les fins de semaine me semblaient longues et ennuyeuses à partir du 30 septembre, date de fermeture de la truite. Dès lors, mon choix se porta naturellement sur la Semois, et je me mis en quête d'un parcours à la fois bien peuplé en voraces et pas trop en pêcheurs concurrents. » En grand amoureux de la pêche, Yves Mahieu revient avec un second tome partagé entre sa région d'adoption et des expéditions diversifiées : Maroc, Norvège, Argentine, Chili, Alaska, Tasmanie, Nouvelle-Zélande. Il dédie ses mémoires à tous dans un récit teinté d'humour, parsemé d'anecdotes et de souvenirs. Retour sur la période 1982-1993, une époque faite de petits bonheurs et malheurs, ainsi que de rencontres en tous genres.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 juillet 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342154443
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0071€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Histoire vraie d'un pêcheur à la ligne - Tome II
Yves Mahieu
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Histoire vraie d'un pêcheur à la ligne - Tome II
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.


À Mireille, mon épouse et compagne des bons et des mauvais jours, et à mes enfants Marc et Pierre, qui me remplissent de fierté.
 
Ils ont toujours dû composer avec la pêche, et celle-ci a trop souvent pris le dessus. À titre d’exemple, voici la dernière phrase du compte-rendu de la partie du dimanche 19 septembre 1993. Une journée que j’avais entièrement consacrée à pêcher la truite sur l’Attert.
« Je rentre épuisé (de 9 h à 18 h non-stop, sans rien avaler), mais globalement heureux, du moins jusqu’au seuil de la maison : Mi et les enfants sont attablés pour le souper et m’accueillent dans un silence glacial… »
 
Pourtant, Mireille a accepté de réviser les différents chapitres qui composent mon Histoire vraie d’un pêcheur à la ligne. De temps à autre, la version révisée m’est parvenue avec des commentaires acerbes, mais je dois bien reconnaître que je ne les ai pas volés…
Province de Hainaut (Belgique)
De 1977 à 1983
 
Le grand escogriffe
Pas de vacances à l’étranger durant l’été 1977. Mireille, qui venait d’entrer à la Régie des voies aériennes, suivait les cours d’introduction au métier d’aiguilleur du ciel. Pour employer mes jours de congé, j’avais décidé de passer deux semaines aux Herbières, dans le camping-car de mes parents. Ça me permettait d’entretenir quotidiennement l’amorçage à ma place réservée et dès lors d’espérer la visite de bancs de gardons, de mémères carpes… Mais non. En dépit de ma régularité à tapisser le fond de farines odorantes et de graines cuites à point, les résultats s’avéraient décevants : quelques gardons par-ci, quelques plaquettes (petites brèmes) par-là.
 
Après plusieurs jours de désillusions, j’avais porté mes pénates dans la réserve, une pièce d’eau peu profonde qui communiquait avec l’étang principal via un chenal étroit. Le sentier longeant l’étang, qui menait entre autres à mon emplacement, enjambait ce chenal par un petit pont de béton. Dans la réserve, mes captures étaient plus régulières, bien que de taille encore modeste. Cependant, une nichée de cinq jeunes canards colverts y avait aussi élu domicile, dans une roselière de bordure. Ils accouraient à tire-d’aile dès que je lançais mes boulettes d’amorçage. Durant dix minutes, le temps de réaliser qu’ils ne goûteraient pas à mes farines, ils se livraient à un bruyant charivari à l’endroit où elles avaient coulé, là même où je voulais disposer mes lignes. Inutile d’ajouter que l’effet de l’amorçage s’en trouvait largement contrarié et retardé, et que ce scénario répétitif me mettait de fort méchante humeur. Le quatrième matin, je jugeai qu’il avait assez duré. J’avisai une solide branche de hêtre qui traînait sur le sentier, et la lançai en direction des intrus. Elle partit au ras de la surface, en tournoyant, et brisa net le cou de l’un d’eux. Les autres s’égaillèrent aussitôt en tous sens, tandis que ma victime se mit à nager en rond, pitoyable, la tête enfouie sous l’eau. Zut ! J’avais seulement voulu les effrayer, et maintenant ce canard blessé tournait désespérément sur mon poste de pêche, et risquait d’y couler tôt ou tard. Je courus enfiler un maillot de bain à mon logis de toile et revins. Entre-temps, Claude R, en route vers son propre emplacement en vue de sa partie de pêche dominicale, était arrivé sur les lieux du drame. Debout sur le pont de béton, il avait posé son fourbi et, goguenard, contemplait le spectacle. Je l’ignorai d’abord, m’immergeai et nageai jusqu’à l’oiseau, que je ramenai sur la berge à proximité du pont en béton. Il se débattait encore faiblement, et j’avais peine à dissimuler mon embarras. Claude tendit le bras :
— Donne, il a assez souffert.
 
Je lui tendis ma victime. D’une brusque torsion du cou, il l’acheva et me le rendit.
— C’est un jeune de l’année, il doit être bon à manger.
 
Je le remerciai brièvement, retournai me changer et enfourchai mon vélo pour porter le canard à ma grand-mère, qui habitait à deux kilomètres. Elle avait géré une ferme dotée d’un grand poulailler, elle saurait qu’en faire. De retour aux Herbières, je me rendis directement à l’emplacement de Claude. Un cinq étoiles en comparaison avec le mien, que j’avais constitué à partir d’une simple palette et muni d’un pose-canne rudimentaire. Lui avait construit un confortable chalet sur pilotis, aux murs vernis et au plancher recouvert d’une moquette de récupération. Il m’accueillit avec le sourire amusé qu’il arborait souvent avec moi :
— Qu’est-ce qu’elle a dit ?
— Que pour une fois j’avais attrapé quelque chose d’intéressant à la pêche…
 
Grand éclat de rire. Et puis :
— Après un cirque pareil, les roches ne doivent pas se bousculer sur ton poste à canards. Ici, elles ont l’air de vouloir du chanvre. Tiens, prends ma deuxième canne.

Je connaissais Claude depuis des années, depuis l’époque de mes culottes courtes. Il constituait pour moi une référence, un modèle. Il était grand (un peu moins que moi à 23 ans, tout de même) et costaud, nettement plus que moi. Il en imposait physiquement. Sa relation avec la sœur du propriétaire des Herbières lui conférait un statut d’électron libre dans le club. Non qu’il se sentît au-dessus du règlement, mais il avait accès aux autres pièces d’eau, que le propriétaire réservait à l’usage de ses proches : l’étang de la Cheminée et le lac d’où il extrayait le sable du fond pour le commercialiser. Mais surtout : depuis le temps que je fréquentais le lac des Herbières, j’avais pu me rendre compte que Claude excellait dans la pêche de la roche (gardon), de la tanche, de la carpe et du brochet, et j’avais parfois tenté de solliciter ses conseils. Dans les premiers temps, l’adulte (il était mon aîné de 17 ans) avait plutôt rabroué le gamin emm… et je l’avais alors affublé du surnom de grand escogriffe. Mentalement seulement, car il m’impressionnait trop pour que j’osasse m’adresser à lui sous ce vocable. Petit à petit, il avait cependant adopté envers moi un ton plus enjoué, un sourire certes encore condescendant, mais de plus en plus empreint de tendresse, comme s’il avait été touché par mes efforts pour progresser dans notre passion commune.
 
Je m’assis sur le tabouret qu’il me désignait, pris en main sa deuxième canne, et m’efforçai de réagir efficacement aux frémissements de l’antenne du flotteur. Les gardons se manifestaient sur l’emplacement, certes, mais par des touches infimes, ultrarapides. Cependant, et c’était infiniment plus important : ce matin-là nous devînmes de vrais amis. Entre deux gardons, je lui parlai de moi, il me parla de lui, de son parcours, de son travail, de son mariage raté dont il avait quand même deux grands enfants, de sa copine Marina (la sœur du propriétaire) dont il était follement amoureux… À dater de ce jour, il nous arriva de plus en plus souvent de pêcher ensemble : le gardon, l’écrevisse, la carpe, le brochet…
 
L’étang de la Cheminée n’était qu’une petite pièce d’eau rectangulaire, enclavée dans le lac des Herbières proprement dit, celui qu’exploitait le club de pêche. Il n’en était séparé que par un large sentier bordé d’arbres, sauf en un passage étroit qui s’effritait sous l’action des courants poussés par les vents du secteur ouest, et que le propriétaire avait renforcé par deux treillis enserrant des sacs de sable. Ses eaux presque toujours ombragées par les frondaisons paraissaient sombres. Il hébergeait les mêmes espèces que l’étang principal, mais nul n’y pêchait… que Claude. Il en usait comme moi de la réserve : on ne le voyait à la Cheminée que lorsque le poisson se faisait par trop désirer à son emplacement attitré.
 
Un matin d’automne, quelques années avant l’épisode du colvert, j’avais bravé l’interdiction. En vadrouille sur le sentier qui séparait les deux étangs, j’avais aperçu la chasse d’un vorace, vraisemblablement un brochet qui avait surgi sous un banc d’ablettes folâtrant en surface, car elles avaient soudain giclé hors de l’eau en éventail, sous l’effet d’une irrépressible panique. Il n’y avait pas un pêcheur en vue. Je m’étais empressé d’aller chercher un grand lancer muni d’une ligne à vif, y avais enfilé une perchette extraite du tambour d’essoreuse qui, vissé à mon plancher, faisait office de réservoir à poissonnets, et j’avais lancé l’appât frétillant sur les lieux de la chasse. Dès lors, je revins inspecter l’état de ma ligne toutes les heures, jusqu’en début d’après-midi. À ce moment ma perchette n’avait toujours pas suscité l’intérêt du vorace, mais ma ligne avait été coupée. Plus précisément, elle avait été brûlée. Le bout du nylon qui pendait hors de la bobine du moulinet était clairement noirci et tire-bouchonné, comme s’il avait été au contact d’un mégot incandescent. Ma toupie évoluait librement, tirant en remorque une dizaine de mètres de nylon. Je pliai ma canne et regagnai piteusement mon emplacement. Le soir, la toupie avait disparu de la surface de la Cheminée.
 
À partir de l’épisode du colvert, il m’arriva occasionnellement de partager avec Claude les postes qu’il aimait occuper à la Cheminée. Sans crainte d’une réprimande de la part du propriétaire, encore moins d’un nylon brûlé par un mégot de cigarette.

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