La Petite Serviette de bain
194 pages
Français

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Description

Nous sommes dans les années soixante. Un adolescent né dans le Sud, élevé dans une famille pauvre, grandit comme il peut entre une mère, femme au foyer, qu'il aime et un père, officier de police, qu'il admire, des parents qui l'aiment dans le plus grand désordre, celui d'un couple à l'agonie. Une double trahison, celle de sa mère puis celle d'une jeune fille de son âge le marque durement. À 18 ans, il fuit le Sud dans les bagages d'une femme plus âgée avec laquelle il découvre la vie. Au contact de cette femme remarquable il devient un homme. Il s'engage dans des études de médecine. La maladie le freine dans son élan. Il devient tout de même médecin, attaché à ce métier dont il rêve depuis son plus jeune âge. Mais affectivement, il n'a de cesse de revenir en arrière, vers celle qu'il a laissée là-bas. Il finit par comprendre qu'elle n'existe plus pour lui, elle a construit sa vie. Alors, il avance en trébuchant, il s'échappe encore, il fuit de marche en marche, d'histoire en histoire, de tranche de vie en tranche de vie, avec à chaque fois le désir de revoir sa copie afin qu'elle ressemble à celle qu'il avait imaginée : le couple idéal, un homme et une femme qui s'aiment, ce couple qu'il avait cru découvrir à 18 ans. Il chemine lentement, en tâtonnant vers la sérénité.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 novembre 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342164190
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La Petite Serviette de bain
Emmanuel Achille
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
La Petite Serviette de bain
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
Retrouvez l’auteur sur son site Internet :
http://emmanuel-achille.societedesecrivains.com
 
À mon père, tant aimé.
À ma mère, tant désirée.
À mes parents, exemple parfait d’un couple désuni, dont la lutte n’a cessé qu’avec la mort de l’un des deux, mon père.
À ce couple, parfois infernal, qui m’a donné dans le désordre le plus complet l’amour dont il était rempli – cet amour qui n’avait pas ou plus trouvé d’autre destinataire – et qui m’a permis d’avancer tant bien que mal dans la vie.
 
Il fut un temps, pas si lointain, où il fallait, pour certains, se contenter des miettes. Cette expression au sens figuré est d’une utilisation courante et a perdu son sens initial. Conçue au sens propre, elle signifiait que l’on pouvait acheter dans une boulangerie des miettes, et en particulier des miettes de gâteaux, de pâtes brisées, de pâtes sablées, de pâtisseries diverses pour quelques sous. On partait rapidement, discrètement, en emportant ces restes, en évitant le regard de ceux qui pouvaient acheter les gâteaux dans leur entier, par deux, par quatre ou plus, sans aucun problème, sans compter leurs sous. Nos familles ont longtemps, trop longtemps, fait partie de ceux qui ne pouvaient pas acheter les pâtisseries dans leur présentation entière.
Ma mère
J’ai attendu que tu ne sois plus là, avec nous, pour écrire ton histoire, enfin notre histoire, ou plus exactement la mienne, telle que je l’ai ressentie et vécue. Sans ta présence constante, chaude et rassurante, je perds l’équilibre. J’ai besoin de voir plus clair dans le chaos de mon enfance et de mon adolescence. Cette période a conditionné mon arrivée à l’âge responsable et l’essentiel de ma vie d’adulte.
 
J’ai ma vision des événements. Il y a les faits, vus par un enfant puis par un adolescent. Mon imaginaire a pris le relais pour combler les quelques manques. J’ai mes certitudes. Témoin, je l’ai été, j’ai donc le droit d’en parler ou du moins je le crois et je le prends. J’ai été d’abord spectateur passif puis instrument de cette histoire durant des années. Je l’ai été jusqu’à ma fuite loin, très loin du foyer. Je me suis aperçu un peu plus tard de quelques erreurs de jugement…
Une histoire de plage
J’ai quinze ans, c’est bien. J’habite les bords de la Méditerranée, lieu où il fait toujours beau. Les étrangers m’envient vraiment de vivre là, avec une sincérité touchante, surtout quand ils habitent Châteauroux, Tourcoing ou bien le Luxembourg. Pour eux, c’est un pays de rêve. La réalité est bien moins idyllique, surtout quand on appartient à une famille comme la mienne. Il est préférable, cela reste vrai dans tous les domaines, d’appartenir à une famille aisée plutôt que d’être, malgré soi, parce qu’il n’y a aucune autre possibilité, le témoin passif de la vie des autres.
 
À quinze ans je n’ai encore aucun problème existentiel majeur. Je ne suis pas encombré par tout ce qui deviendra essentiel pour moi plus tard, réussir à faire quelque chose de ma peau, faire des études, gagner de l’argent, c’est-à-dire être heureux ou du moins essayer de l’être. Plus tard je serai envahi par ces angoisses diverses qui provoqueront une fuite éperdue, mais là, je n’ai qu’un objectif, certes limité, mais très conventionnel, rencontrer une personne du sexe féminin, quelle qu’elle soit.
 
Voilà un objectif simple qui, cependant, semble pour l’instant très éloigné, malgré ma persévérance. C’est vrai, malgré tous mes regards, mes appels, ma démarche étudiée et copiée sur celle de Marlon Brando, le seul comédien que je connaisse et avec qui j’ai quelques affinités secrètes, je suis seul. Je ne sors avec personne. Curieuse utilisation de l’époque du verbe sortir pour définir le fait d’avoir envie d’approcher le corps d’une femme et à l’extrême rigueur d’y pénétrer par tous les moyens.
 
Je vais à la plage, ce lieu mythique, propice aux rencontres. Là, les désirs sont dévoilés et les corps exposés. Pourtant, je n’y ai jamais rien trouvé jusqu’à présent, aucune de ces marchandises tant convoitées. J’y ai vu pourtant toutes sortes d’articles, corps de femmes vieillissantes à la peau flétrie, aux seins flasques, corps de femmes somptueux aux alentours de la quarantaine, avec ces seins lourds, ces hanches pleines, ou corps de jeunes filles à peine pubères avec ces seins figés, trop neufs, avec une mention spéciale envers les corps de femmes mères, agités et nerveux, totalement indisponibles, qui m’apparaissent indésirables, entourés qu’ils sont de gamins qui piaillent. Comme quoi, pour moi, disponibilité et désir, déjà, à cet âge, semblaient indissociables.
 
Je ne prête pas grande attention aux visages mais, par contre, je me souviens très bien de certains regards. Le regard dans lequel je me reconnais le mieux est celui qui est vide, du moins pour moi, celui qui me rend transparent, qui fait de moi un être inexistant. Les regards tour à tour prometteurs, accrocheurs, désespérés, pervers, fuyants, dédaigneux, lointains parfois, sont pour les autres. Moi, je suis abonné au modèle transparent. Pourtant, j’aurais volontiers répondu à un autre modèle, mai non, rien. Remarquez, il y a un certain confort à passer inaperçu. On peut aisément rester naturel, ou bien jouer d’une composition de son choix.
 
Les compositions possibles sont obligatoirement limitées. Ma musculature est faible pour ne pas dire médiocre. Je ne peux donc pas exhiber des biceps sympathiques ou des pectoraux avenants. Mon ventre n’est pas mou, pas du tout, mais il n’est pas barré par un alignement impeccable d’abdominaux comme celui de certains ventres de culturistes qui viennent en visite sur la plage et qui devant vous font, d’une manière insolente, des séries de vingt tractions, accrochés à une corniche de béton quelconque, sans présenter la moindre trace de souffrance apparente. Mes séries ne vont pas, à cet âge, jusqu’à dix, tant s’en faut. Ma puissance physique est limitée, très limitée et je fuis très soigneusement toute confrontation qui pourrait comporter un défi auquel je ne pourrais en aucun cas faire face. Je ne fais allusion qu’au problème de la force physique, parce que l’autre puissance celle qui ne s’exprime en principe que dans l’intimité il n’est pas décent de l’évoquer, car jusqu’à présent elle n’a pu briller, très régulièrement d’ailleurs, que dans une stricte autosatisfaction. Là, c’est vrai le fonctionnement semble irréprochable.
 
Mon intelligence est clairement moyenne. C’est vrai, j’ai deux ans d’avance et me trouve par les hasards de la petite histoire confronté au baccalauréat beaucoup trop tôt, mais je plonge progressivement dans les abîmes des notes faibles, de l’insuffisance de travail, de l’absence totale de motivation, plus préoccupé par l’examen attentif des hanches ou des profils des seins des filles de tout âge que je croise sur ma route, en particulier de toutes les filles des classes devenues mixtes. Tout cela m’intéresse davantage que la pénétration dans l’intimité des règles de la physique enseignée par une vieille fille revêche et celles des mathématiques, dont je ne comprendrai l’importance que bien plus tard, enseignés par un professeur dont l’éthylisme avancé, le place en permanence aux confins du delirium et qui trémule d’une manière excessive.
 
En fait je n’ai jamais fait travailler mon cerveau. À cet âge donc, il m’est impossible de dire ce qu’il peut produire. Je retiens cependant facilement des pages de texte que je récite bêtement d’ailleurs. 20/20 en récitation comme on disait à l’époque, c’est simple pour moi alors que cela pose beaucoup de problèmes à d’autres, ceux qui rient dans mon dos pendant que je débite mon texte devant le maître. Je n’ai compris leurs rires que plus tard, bien plus tard. Mon orthographe est irréprochable : 1,5 faute à l’examen de passage en classe de 6 e , j’avais 9 ans, c’est bien, non. À l’époque on attachait à la juste expression et à la parfaite disposition des mots de notre langue maternelle une certaine importance. Je peux donc penser que mon cerveau fonctionne bien. Mais je l’économise avec beaucoup de soin.
 
Mais en ce qui concerne l’abstraction, je sais déjà que je suis mauvais. J’admire mon père et son intelligence brillante, dont les capacités sont infiniment supérieures aux miennes. Là, je ressemble à ma mère très pragmatique, simple. À 12 ans elle était déjà placée comme femme de service. Elle a donc été contrainte d’économiser son cerveau et de faire fonctionner préférentiellement bras et jambes. En réalité mon cerveau est vierge, inutilisé, inutilisable, mon vocabulaire est fruste et doit s’apparenter à celui du berger qui garde non loin de là son troupeau sur les premiers contreforts des Alpes. Ma conversation est donc plus que limitée, mon rapport à l’autre nécessairement prudent.
 
Je suis donc avant tout, du fait de mes faibles performances physiques et intellectuelles et malgré un désir éperdu de devenir un être actif à tous les niveaux et en premier lieu dans l’initiation à la sexualité, un voyeur. D’ailleurs il faut reconnaître que le statut de voyeur n’est pas nécessairement désagréable. Il permet une certaine jouissance sans risque aucun. Il s’apparente à ce que nous connaissons

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