Aux armes et caetera
164 pages
Français

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Aux armes et caetera , livre ebook

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Description

Ce livre retrace l'engagement d'"oseurs" (de Gainsbourg à Zebda, de Brassens à Mc Solaar, d'Aznavour à Renaud ou de Sardou à Calogero), dont les idées et l'oeuvre ont nourri la société et la nation. A travers des thématiques aussi diverses que l'homosexualité, le racisme, l'égalité hommes/femmes, la désindustrialisation, le nationalisme ou l'écologie, l'expression musicale a influencé les époques et a été le témoin des évolutions de la société.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2011
Nombre de lectures 95
EAN13 9782296466746
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Aux armes et cætera
La chanson comme expression populaire et relais démocratique depuis les années 50
Philippe Guespin
Aux armes et cætera
La chanson comme expression populaire et relais démocratique depuis les années 50

L’Harmattan
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-55423-8
EAN : 9782296554238
« Métier d’auteur, métier d’oseur »
Beaumarchais.
à Eliot
Introduction
Musiques et chansons sont toute notre vie, au jour le jour, d’année en année. Elles disent l’actualité, elles sont le reflet des tendances, le miroir de la société. Elles sont un exutoire, un relais d’opinion, une voix alternative aux débats qui font le ciment de notre société, cette société mutante, une société vivante… de la démocratie en chanson.
Mais ces chansons sont beaucoup plus encore. Elles sont l’expression même de notre liberté de penser, d’agir et de dénoncer. La polémique orchestrée par Eric Raoult, en novembre 2009, en est un exemple parfait. Le député UMP de Seine Saint-Denis et maire de la ville du Raincy voulait imposer aux écrivains récompensés par le Goncourt « un devoir de réserve ». Le parlementaire n’a pas apprécié les propos tenus par la lauréate 2009 de ce prestigieux prix littéraire, Marie Ndiaye, dans un entretien publié en août 2009 par le magazine Les Inrockuptibles . L’auteur y expliquait pourquoi, depuis 2007, elle avait choisi de vivre à Berlin.
Marie Ndiaye raconte qu’elle s’en est allée « en grande partie à cause de Sarkozy (…) qu’elle trouve cette France (de Sarkozy) monstrueuse » et ajoute : « Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux » . Des propos « insultants » pour Eric Raoult qui en appelle à l’arbitrage de Fréderic Mitterrand. Et au ministre de la Culture de vite ne pas prendre position au prétexte que ce débat ne le « concerne pas en tant que ministre » . L’homme, qui en a trop dit, cette fois n’en fait pas assez.
Qui, plus que le ministre de la Culture, est légitime pour clore le débat sinon réaffirmer haut et fort que le devoir de réserve pour un auteur est une ineptie, une chimère, une billevesée, une atteinte à la liberté d’expression, une censure ! Le chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy lui-même, alors candidat à la présidence de la République, avait écrit en 2007, dans la lettre lue à l’audience lors du procès de Charlie Hebdo , préférer « l’excès de caricature à l’absence de caricature » . Alors pourquoi demander un droit de réserve aux auteurs ? Pour favoriser l’autocensure et anémier le sens critique ? À peine croyable ! Le législateur a prévu des possibilités de recours pour celui ou celle qui se sentirait offensé ou insulté. La loi sanctionne la diffamation et la calomnie et cette disposition se suffit largement à elle-même.
Ce droit de réserve, ce politiquement correct, cette autocensure, les artistes et les auteurs s’en sont (presque tous) affranchis. Beaucoup d’entre eux, de Boris Vian à Brassens, de Renaud à Perret ou à Zebda, ont choisi la chanson pour exprimer leurs idées, leur ras-le-bol ou leur indignation.
Renaud, après avoir écrit Miss Maggie , charge contre Margaret Thatcher, manque de provoquer un incident diplomatique entre la France et la Grande-Bretagne. D’autres, antimilitaristes comme Vian ou Le Forestier, ont lancé, à la force des mots et des cordes de leur guitare, de violentes diatribes à l’attention des puissants. Certains, plus universalistes, à l’instar de Perret, ont préféré fredonner une ode contre la triste réalité qu’expriment le rejet et la peur de l’autre. Comme nous allons le voir tout au long de ce livre, l’expression artistique en général et les chansons en particulier ont contribué à leur manière à l’exercice de la démocratie. Parfois reflet des tendances, tantôt relais d’opinion, les chansons comme leurs auteurs ou interprètes ont influencé, suivi ou critiqué l’actualité et leurs contemporains. La chanson reste un moyen d’expression dont la portée a souvent dérangé. En cela elle est un contre-pouvoir et participe à l’élan démocratique.
La chanson a la vertu de l’insaisissable. Elle brocarde, pastiche, suggère, aboie, scande, interpelle, nourrit, alerte, décrit, bref, la chanson est polymorphe. Elle aborde tous les thèmes – politiques, économiques, sociaux. Quel que soit le parti pris de son auteur, une chanson s’adresse à tous : aux puissants comme aux faibles. Le message qu’elle véhicule, au prétexte de défendre ou d’attaquer les uns ou les autres, est certes reçu de façon asymétrique mais reçu cinq sur cinq par ses destinataires.
Toutes ces chansons, comme les courants musicaux qui les portent, ont aussi marqué de leurs empreintes notre mémoire. Aimées ou détestées, elles sont l’instantané d’une époque. Pour illustrer ce propos, j’ai sélectionné une soixan-taine de chansons qui ont abordé les plus grands thèmes de notre histoire récente et de nos problématiques modernes : des années 50 à aujourd’hui. Mais il y en a tant d’autres ! Le propos ici n’est pas d’être exhaustif, mais suffisamment étayé pour mettre en évidence une argumentation, tisser le fil qui relie, par exemple, avec trente ans d’écart, Michel Sardou à Bernard Lavilliers sur le thème du monde ouvrier et des industries, replacer dans son contexte des sujets sociaux et politiques comme le rapport à l’homosexualité, à la nation, aux drogues, au racisme ou à la société de consommation, étudier comment, par exemple, des chansons écrites dans les années 1960 trouvent leur pendant à l’orée du XXIe siècle sans que le propos ait changé ou la société avancé sur le sujet. Autant de chansons et de textes qui ont fait débat, qui ont été l’objet d’une controverse ou qui ont alimenté notre réflexion.
La diffusion et la consommation de la musique ces cinquante dernières années n’ont eu de cesse d’évoluer.
Du disque microsillon au vinyle, rapporté des Etats-Unis par Eddy Barclay, jusqu’au CD et au MP3, c’est toute une industrie qui s’est transformée. J’ai donc souhaité, dans une troisième partie, évoquer quelques-uns de ces changements les plus emblématiques et leurs impacts sur notre manière de percevoir la musique et de la consommer.
Pour aller plus loin dans l’analyse, vous trouverez en index les références de ces chansons qui m’ont aidé à étayer mon discours. Elles vous permettront d’affiner ou de forger votre point de vue.
Et vous conviendrez peut-être avec moi que l’expression artistique dans son ensemble et la chanson en particulier participent à la bonne marche de notre vivre ensemble, à une économie, au fonctionnement de la société, à une communauté d’hommes et de femmes libres de leurs idées, libres de les exprimer, de les chanter, de les interpréter, sans aucun droit de réserve, aucun !
Première partie. Reflet des évolutions et des tendances miroir de la société
L’évolution politique et le projet de société
Passent les jours et les semaines y’a qu’le décor qui évolue.
« La France n’est réellement elle-même qu’au premier rang » (1). Ainsi parlait le général de Gaulle. Le gaullisme a quitté l’Elysée depuis un an et il faut maintenant regarder « la France telle qu’elle est » (…) « une puissance moyenne » selon les propres termes du président Giscard d’Estaing en 1975. Et au chef de l’Etat d’enfoncer le clou lors de la présentation de ses vœux aux Français le 31 décembre de la même année, disant, toujours à propos de la France, préférer le terme de rayonnement à celui de grandeur. La phrase choque. Cette déclaration du président de la République, élu il y a à peine dix-huit mois, se veut en rupture avec la droite orléaniste et catholique symbolisée par celui que l’on surnommait « le Grand Charles ». Cette droite incarnée par Valéry Giscard d’Estaing est une droite plus pragmatique et plus gestionnaire. La grandeur de la France est derrière nous, les Français doivent le savoir et en être conscients. Ce coup de canif idéologique porté par Valéry Giscard d’Estaing au contrat moral qui le lie aux Français pour sept années préfi

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