De la case africaine à la villa romaine
496 pages
Français

De la case africaine à la villa romaine , livre ebook

-

496 pages
Français

Description

L'auteur est un ancien élève de l'Ecole nationale de la France d'outre-mer qui vit passer Max Jacob, Félix Eboué, Pierre Messmer. Dans cet ouvrage, il nous fait part de sa longue expérience dans la diplomatie. Alain Pierret a vécu l'apartheid sud-africain et le communisme. Membre de la délégation française à la conférence d'Helsinki sur la sécurité et la coopération en Europe, chef du service des Nations Unies, il a pratiqué la négociation multilatérale et approché quelques-unes des personnalités les plus marquantes de notre temps.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2010
Nombre de lectures 408
EAN13 9782296253520
Langue Français
Poids de l'ouvrage 28 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

AVANT-PROPOS
La mémoire est comme l’oiseau : Si tu ne la saisis pas, elle s’envole Proverbe africain
« Un vieillard qui disparaît, c’est une bibliothèque qui brûle. » Amadou HAMPÂTÉBÂ
L’adage énoncé par l’écrivain-conteur africain est bien connu. Aujourd’hui, la transmission orale de la tradition et de l’histoire se traduirait mieux par cette formule : «Tout ce qui n’est pas écrit est condamné à disparaître». J’ai trop souvent regretté, dans ma carrière administrative comme dans l’histoire familiale, combien désolante était l’absence de témoignages sur une personne ou sur un événement donné – je pense, notamment, à la campagne de Russie de mon trisaïeul Gilles Pierret ou à la présence de mon père au Vélodrome d’hiver le 16 juillet 1942, jour de mes douze ans – pour ne pas m’efforcer aujourd’hui de laisser quelques traces de ce que j’ai entendu de nos proches ou vécu moi-même. Ma vie professionnelle s’est déroulée tout au long de la seconde moitié du e XXsiècle, si extraordinaire à tant d’égards. Ce demi-siècle a vu l’asservissement de l’atome, terriant dans ses applications militaires, prometteur sur le plan civil ; la conquête de l’espace ; l’émergence et l’omnipotence de la mondialisation grâce au développement des moyens de communication, sur la route, les mers et dans les airs, par les ondes, de l’informatique au téléphone portable ; le développement de la télévision, souvent positive dans ses aspects d’information, ambivalente en matière d’éducation, parfois négative dans les domaines éthiques et moraux ; en sciences de la vie, il a allégé, sinon totalement supprimé la douleur, créé trans-plantations cardiaques et greffes des membres, inventé le scanner et l’IRM, la microchirurgie, tous progrès inouïs, inconcevables au lendemain de la dernière guerre mondiale. En 1930, mon espérance de vie était de 54 ans. En 2008, la moyenne est passée en France à 77 ans pour les hommes, de 59 à 84 pour les femmes, un quart de siècle supplémentaire en une génération ! Nous avons accompagné l’aggiornamento de l’Église grâce à un pape inat-tendu et à Vatican II ; apprécié le geste courageux de Sadate se rendant à Jéru-salem, dont ni Arafat, ni à ce jour les Palestiniens et les dirigeants israéliens n’ont
7
su tirer la leçon ; ressenti la banalisation des drogues, l’émergence dans le monde du VIH du sida, tout ensemble peste et choléra des temps modernes, mais dont la diffusion est imputable à l’homme seul ; l’est aussi, en partie, le réchauffement de notre terre, dramatique pour son destin et celui des générations futures si la fringale de consommation et l’égoïsme continuent de prévaloir dans nos sociétés nanties. En France, après la décision aussi tardive que bienvenue sur le vote des femmes, je me suis réjoui de l’abolition de la peine de mort. J’ai compris la loi Veil sur l’avortement dont les intentions louables furent néanmoins détour-nées pour en faire un moyen de contraception ordinaire. D’autres choix contesta-bles ont entraîné des conséquences préoccupantes pour l’avenir des générations montantes, de l’obstination de l’Éducation nationale à imposer plusieurs décen-nies durant la méthode globale dans l’apprentissage de la lecture, responsable de la paupérisation intellectuelle de nombreux jeunes, à la suppression du service militaire, creuset oublié de l’unité nationale et instrument négligé de réduction de la fracture sociale, si coûteuse aujourd’hui. J’ai vécu ou suivi de près des conits et des drames d’une intensité inimagi-nable, connu l’occupation allemande et admiré la détermination de l’Allemagne à faire table rase du nazisme, éprouvé le système ségrégationniste sud-africain et entendu la plaidoirie de Mandela au tribunal de Pretoria, vu à l’œuvre le commu-nisme totalitaire en Union soviétique ou dans la Fédération yougoslave. J’ai applaudi à la chute de toutes ces idéologies inhumaines, formes modernes de l’esclavage, intervenue plus vite que je ne l’espérais, bien tard toutefois pour ceux qui en furent les victimes. Je naviguais sur les côtes du Centre-Annam à la défaite de Ðiên Bin Phú. Je me trouvais en Algérie lors du putsch des généraux. J’habitais Montparnasse en mai 1968, Belgrade quand Tito est mort, Tel Aviv à la première intifada et à la chute de Scuds irakiens pendant la guerre du Golfe, Bruxelles au moment de la disparition du roi Baudouin. J’ai connu Jean-Paul II, acteur essentiel des e événements qui ont bouleversé le monde au cours du dernier quart duXXsiècle, admiré l’élection d’un Noir à la tête d’un État où sévissait naguère leéau de la ségrégation raciale. Grâce à des hommes exceptionnels, en premier lieu de Gaulle et Adenauer qui se sont retrouvés en 1962 à Mourmelon, cette localité où je suis né – symbole de réconciliation entre la France et l’Allemagne, j’ai vu s’édier progressivement une nouvelle Europe, victime toutefois d’un élargissement imprudent, en tout cas trop rapide. Cinquante ans après le traité de Rome, de la CEE à l’UE, de la PESC 1 à la PESD , les sigles ont changé, mais, en cetten 2009 où le traité de Lisbonne est enn approuvé, elle rencontre toujours des difcultés pour se donner une vraie
1. Communauté économique européenne – Union européenne politique étrangère et de sécurité commune – Politique européenne de sécurité et de défense.
8
diplomatie et une défense communes, le dernier exemple en date concernant les déboires de l’avion de transport A400M. Même si, grâce à la présidence fran-çaise, l’indépendance de la Géorgie a été sauvegardée, néanmoins amputée de quelques territoires, l’Union a reconnu un peu vite l’indépendance du Kossovo. Elle possède sa monnaie propre qui nous a certes sauvés de ces dévaluations auxquelles une France isolée sacriait volontiers, mais ses membres ont eu bien du mal à s’entendre pour juguler la crise économique etnancière de 2008. Et, si je suis heureux pour la Belgique, membre fondateur de l’Europe, du choix de Hermann van Rompuy pour présider l’UE, il faudra du temps avant qu’elle puisse se faire entendre sur la scène internationale. Mon propos n’est pas de réécrire l’histoire politique des pays où m’ont conduit mes carrières d’administrateur de la France d’outre-mer et de diplomate. D’un autre côté, je ne pouvais ignorer les événements les plus marquants de cette période ni manquer d’en rappeler certains susceptibles d’éclairer cette chronique. Je me concentrerai sur ceux que j’ai vécus personnellement, les accompagnant d’anecdotes ou de faits relevant parfois de la « petite histoire ». En toutes occa-sions cependant, la place et le rôle de la France ont guidé ma réexion et mes actes.
Saint-Maximin-La-Sainte-Baume, Noël 2009.
  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents