Au bord du gouffre
115 pages
Français

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Description

7 petits-fils, 7 missions, 7 destins, 7 romans À la mort de leur grand-père, DJ, Steve, Spencer, Bunny, Webb, Adam et Rennie reçoivent chacun en héritage une mission. L’occasion pour eux d’en savoir un peu plus sur leur grand-père mais aussi sur eux-mêmes.

Rennie n’a rencontré qu’une seule fois son grand-père mais il a, lui aussi, une mission à accomplir : se rendre en Islande et retrouver les traces d’un ange, une femme qui aurait sauvé son grand-père après le crash de son avion. Une fois sur place, les difficultés se multiplient pour Rennie : Son guide n’est pas disponible et il doit composer avec le mauvais caractère de Byjna, sa fille. Et que cherche à lui communiquer le vieux Sigurdur à propos de son grand-père ? Quelle tragique épreuve a connu la famille de Bryjna ? Une chose est vraie : on ne peut jamais se fier aux apparences…

L’ouvrage original a été publié sous le titre Close to the Heel.


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 juin 2017
Nombre de lectures 24
EAN13 9782215134961
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sommaire
UN
DEUX
TROIS
QUATRE
CINQ
SIX
SEPT
HUIT
NEUF
DIX
ONZE
DOUZE
TREIZE
QUATORZE
QUINZE
SEIZE
­DIX-SEPT
­DIX-HUIT
­DIX-NEUF

Remerciements
Notes
La série 7
Page de copyright
À Jens, en remerciement pour une nouvelle chute d’eau (ou deux, ou trois) et un nouveau conte chaque jour.
« La porte s’est refermée trop près du talon ; mais mieux vaut avoir les pieds douloureux que de servir le Diable. » Tiré de The Black School, un conte islandais

UN
Je vais mourir. C’est aussi simple que ça.
J’ai un creux dans l’estomac rien que d’y penser, mais je n’y peux rien.
Je tire un pied hors de la neige. De la neige ! Pourtant, on n’est qu’en octobre. Je le force à bouger et le regarde disparaître dans la blancheur. Je prie pour trouver un point d’appui plutôt qu’une crevasse sans fond.
Mon pied touche quelque chose de solide. Je le sais, pas parce que je le sens – je ne sens rien –, mais parce que je peux lever mon pied gauche, mouvement que je peux faire uniquement si mon pied droit est sur une base solide. Je m’oblige à avancer.
Je n’ai aucune idée de l’endroit où je suis.
J’ignore depuis combien de temps je suis ici.
Je n’ai aucune idée de la direction vers laquelle je me dirige, ni de celle que je devrais prendre.
Je n’ai aucune idée de la distance que j’ai parcourue, ni de celle qu’il me reste à parcourir.
Tout ce dont je suis certain, c’est que je vais échouer.
Je sais que mes pieds sont au bout de mes jambes, mais je ne les sens pas. Je ne peux pas les voir non plus. Je ne vois rien d’autre que du blanc, et je ne sais pas si c’est le blanc de la neige ou la cécité des neiges. J’ai les yeux qui brûlent. En même temps, ils sont pleins d’eau, ce qui me fait craindre qu’ils ne gèlent. J’ai arrêté de grelotter, mais je ne sais pas si c’est bon ou mauvais signe.
Au début, quand les tremblements ont cessé, j’ai eu mal partout. Je sais à quoi c’est dû – la fatigue musculaire induite par les violents grelottements ou la douleur causée par le froid. Quoi qu’il en soit, mon état me fait peur, car je ne peux m’empêcher de penser à toute l’énergie que je dépense.
Il m’a fallu du temps avant de me rendre compte que je ne tremblais plus. ­Peut-être que la neige agit comme un isolant ? Ou ­peut-être – j’aime mieux ne pas y penser – que le corps arrête de grelotter quand sa température chute en dessous d’un certain point ?
Je vais mourir.
Alors pourquoi ­est-ce que je n’abandonne pas ? Pourquoi ­est-ce que je fais tous ces efforts pour avancer d’un pauvre pas dans cette neige qui me monte jusqu’aux genoux, alors que l’exercice est aussi épuisant que si j’en faisais dix ? Pourquoi ­est-ce que je ne m’assois pas pour laisser les choses arriver ? Ou, encore plus simplement, pourquoi ­est-ce que je ne me couche pas et ne me laisse pas aller ?
La neige est moelleuse. Elle est épaisse aussi. Si je m’y étends, j’aurai l’impression de m’allonger sur un matelas en plumes ou sur ce que j’imagine d’un matelas en plumes. Je pourrai m’étirer et me détendre en attendant de me retrouver dans l’autre monde, s’il y a un autre monde.
Ça ne ferait pas mal. C’est ce qu’on dit. Il paraît que lorsqu’on meurt de froid, c’est comme si on s’endort, et tout ce qu’on sait (enfin, on ne peut pas vraiment le savoir), c’est qu’on est parti. On est éteint. On a rendu l’âme. On s’aventure dans des terres d’où personne n’est jamais revenu.
C’est ce que Shakespeare appelle les terres inconnues. (Merci, professeur Banks ; vous nous avez toujours dit que la connaissance de l’œuvre de Shakespeare procure une banque d’images dans laquelle on peut puiser tout au long de sa vie.)
Je force mon pied à sortir de la neige et à faire un autre pas. ­Vas-y, jambe ! Ne me laisse pas tomber maintenant. Ne me laisse pas finir comme ça, au milieu de nulle part, où mon corps ne sera jamais retrouvé.
Je pense que c’est ce qui me permet de rester en mouvement – la pensée que l’on ne me retrouverait pas. Ça et le fait que je ne me suis jamais défilé, et encore moins rendu.
Et aussi parce que s’il y a une chose que je sais, c’est la raison pour laquelle je suis ici.
Je fais un autre pas.
Je pense au major et à tout ce qu’il a essayé de me faire entrer dans la tête au cours des ­dix-sept dernières années. S’il y a une chose que le major déteste, c’est les lâcheurs. Il dit que personne n’est venu au monde en composant une symphonie (sauf ­peut-être Mozart). On doit tous commencer quelque part. On doit apprendre à marcher avant de pouvoir courir. Chaque journée commence par un premier pas.
Et se poursuit avec un autre, et encore un autre.
On doit s’y tenir. On n’a pas envoyé un homme sur la Lune en abandonnant après le premier échec. Les guerres ne se gagnent pas par des armées prêtes à se rendre à la première défaite.
Je lève mon pied. Je ne peux pas le sentir. Je remue les orteils ou plutôt je pense que je les remue car ils ont dépassé le stade de pouvoir bouger, quelles que soient les commandes dictées par mon cerveau. J’ai l’impression que l’on m’a attaché des briques en ciment aux chevilles car mes pieds sont très lourds.
Après quelques pas, je tombe à genoux. Je n’en peux plus. Les carottes sont cuites, comme dirait le major. Je ne sais pas comment m’exprimer autrement, car le major déteste que l’on blasphème. D’après lui, ceux qui le font démontrent la pauvreté de leur vocabulaire. Quand je blasphème, il m’envoie consulter le dictionnaire et me demande de trouver cinq autres manières de dire ce que je souhaite communiquer. S’il était sergent, l’armée serait complètement différente.
Le vent projette de la neige sur moi tandis que j’essaie de rythmer ma respiration. C’est un truc qu’on m’a appris pour me détendre. Je me retrouve rapidement avec de la neige jusqu’aux cuisses et, étrangement, ça me donne une sensation de chaleur.
Je me laisse glisser jusqu’à m’asseoir sur mes talons. Juste quelques minutes, le temps de reprendre mon souffle. C’est bon de se reposer. C’est tellement bon.
Je relève brusquement la tête et réalise que je me suis endormi.
Je panique.
Je tente de me remettre sur pied, mais tombe face la première dans la neige.
Je panique encore. Il n’y a pas à dire, je m’améliore côté panique.
J’essaie de m’accroupir ; ça peut sembler facile, mais ça ne l’est pas. Puis je tente de me mettre debout. Je tombe. Un voile noir m’enveloppe – un voile de terreur. Je vais réellement mourir. Si je n’arrive pas à me relever et à me remettre en marche, ce sera la fin.
Une autre phrase préférée du major me vient en tête : « Tu ne peux pas gagner si tu ne joues pas. »
« Tu ne pourras aller nulle part si tu ne fais pas au moins un pas, Rennie », me ­dis-je.
Je parviens à me remettre debout. Je titube, face au vent et à la neige. Je suis tout étourdi. Je vais encore tomber.
J’ai soudain un regain d’énergie. Ce n’est pas vraiment l’instinct de survie. Non, c’est plus comme mon pire défaut et mon principal trait de caractère : j’ai besoin de prendre ma revanche. Je ne sais ­peut-être pas où je suis, ni comment j’y suis arrivé et encore moins comment je vais m’en sortir, mais je me rappelle pourquoi je suis ici.
Je fais un pas.
Je sais pourquoi je suis ici et ce que je suis censé y faire : disparaître. M’évanouir dans la nature sans laisser de traces, pour que tous ceux qui me connaissent puissent dire, avec un hochement de tête : « C’est bien lui, Rennie qui bousille tout depuis toujours. C’est pas surprenant qu’il ait encore merdé. Que ­peut-on attendre d’autre d’un jeune comme lui ? »
Sauf que ce n’est pas ce qui est arrivé.
Je n’ai pas tout bousillé. Pour une fois, c’était quelqu’un d’autre. Quelqu’un qui voulait m’écarter de son chemin.
Je continue d’avancer. Ce n’est pas plus facile, mais je ne pense plus à m’arrêter ou à me reposer. Un autre majorisme : « Tu pourras te reposer quand tu seras mort. »
Je ne prendrai pas le blâme pour tout ceci. Je ne me laisserai pas conduire gentiment dans cette nuit de ténèbres (clin d’œil au profes

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