Vampires de sorcellerie
171 pages
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Vampires de sorcellerie , livre ebook

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Description

Cet été-là, une série de meurtres est l’œuvre d’un tueur que les médias appelleront avec a propos bien qu’en toute ignorance « Le Vampire ».

Ma partenaire, Lía Fáil, se dédie aussitôt à la tâche d’arrêter ce dangereux Éternel avant que ses crimes n’ameutent les tueurs de vampires. Hélas, elle rechigne d’autant plus à la prudence qu’elle se noie dans un chagrin gardé obstinément secret.

Quand ma dame sur les traces du Vampire disparaît à son tour, moi, Amaël Ailill, je pars aussitôt en quête de réponses. Sans elles, je sais qu’il me sera impossible de la retrouver saine et sauve...

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 50
EAN13 9782373420296
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Vampire de sorcellerie
Ou : « Vous savez qu’elle est la plus vieille histoire du monde ? C’est l’histoire du type qui demande pardon pour un crime qu’il n’a pas commis. » Lia Vilorë
Éditions du Petit Caveau - Sang neuf
Prologue Le martèlement de la pluie sur les pavés glissants m’était d’autant plus insupportable Du’il semblait faire écho aux battements sourds sous mes tempes. Le sang sur mes mains me rappelait sans cesse Dui j’étais, d’où je venais et ce dont je m’étais rendu coupable. es images de violence aveuglaient encore mon regard tandis Due je cherchais désespérément le visage pâle de ma fiancée dans la rue inondée par la nuit. — Maeve ! l’appelai-je d’abord dans un murmure, puis dans un cri. Ma voix rugissante me surprit tant elle semblait émaner d’une autre personne. Était-ce moi Dui venais de pousser ce hurlement ? Je me retournai. Le visage de mon père me fit face l’espace d’une seconde. Je m’entendis glapir et une sourde terreur me glaça le cœur, avant Due le gémissement de Maeve ne me parvienne. Mon regard flou se baissa sur son corps étendu au sol, au pied de la table à manger. Un verre était renversé et le vin coulait le long de la nappe. — Maeve ! m’écriai-je en m’agenouillant à ses côtés. Mes mains souillées de sang n’osèrent se poser sur elle. Je me figeai à l’instant même où elle m’accusa. Ses yeux verts s’ouvraient faiblement sur moi et me dévisageaient. — Soyez maudit, McAmhlaidh ! J’entendis le rire moDueur de mon géniteur au-dessus de moi.
Chapitre 1 – Réveil brutal Quand je vois se lever l’aube du jour, Il n’y a rien qu’elle me fait plus haïr Car elle me fait quitter Mon bien-aimé, pour qui j’ai tant d’amour. Certes, je ne hais rien tant que le jour, Bien-aimé, qui me sépare de vous. (Extrait d’« Aube », pièce lyrique courtoise peut-être du trouvère Gace Brulé) Santa Monica Appt.32, 757 Ocean Avenue 25 juillet – 20h10 Je me réveillai en sursaut, comme à chaque fois, chaque année. Un fracas venu de la cuisine me parvint au même instant. Je me jetai sans réfléchir hors du lit, le cœur battant, craignant que le cauchemar m’eût suivi dans la réalité. Je trouvai Lía Fáil, seule, accroupie face aux restes de ce qui avait dû être un mug en porcelaine. L’odeur de café envahit mes narines et me tira enfin de mon mauvais rêve. J’entendis ses reniflements et vis ses joues rouges et luisantes de larmes. — Lía Fáil ? l’appelai-je tout bas. Ma partenaire ne réagit pas. Je m’approchai et m’accroupis face à elle pour lui prendre les mains. À ce contact, ce fut comme si je venais de la mordre : elle releva brutalement le regard vers moi et retira d’un geste brusque ses mains des miennes. Ses yeux verts s’enflammèrent aussitôt de ce mélange entre peur, colère et haine auquel je m’étais habitué. Avec le temps, j’avais appris à ne pas le prendre personnellement. Même si chaque regard de ce genre me rappelait qu’il y avait toujours une frontière de douleur et de crainte entre nous. — Pourquoi pleurez-vous ? m’enquis-je avec douceur tout en esquissant un sourire que j’espérais rassurant. — Pourrien, rien du tout, réfuta-t-elle immédiatement d’une voix tremblante en baissant le regard sur les morceaux de porcelaine. Je ne cherchai tout d’abord pas à insister et l’observai. Tendue telle la corde d’un arc, elle tremblait des pieds à la tête. Qu’est-ce qui pouvait bien provoquer cet état de si bon soir ? — Vous avez eu un mauvais rêve ? — Je suis désolée pour le mug, s’excusa-t-elle soudain dans un bredouillement avant d’éclater en sanglots ! Elle plongea son visage dans ses mains et se recroquevilla. D’abord déstabilisé, je réagis ensuite rapidement. J’esquissai le geste de la prendre dans mes bras, mais lorsqu’elle le remarqua, elle se rebiffa. Lía Fáil se releva et balbutia qu’elle allait être en retard pour fuir hors de la cuisine au pas de course. — Lía Fáil ! l’appelai-je, bien que sachant parfaitement l’inutilité de la chose. Je soupirai malgré moi à fendre l’âme et promenai mon regard dans la pièce qui peut-être pourrait me fournir un indice expliquant l’attitude de ma partenaire. Le journal sur le comptoir attira mon attention. Je ramassai rapidement les morceaux de la tasse et les jetai à la poubelle avant de m’approcher du quotidien. Parcourant la page consultée des yeux, je remarquai un encadré narrant les conséquences d’un carambolage sur l’autoroute. Une femme y avait trouvé la mort. Elle laissait derrière elle son époux et leurs deux enfants. La propre mère de Lía Fáil était décédée lors d’un accident de voiture aux quinze
ans de ma compagne… Elle n’en parlait jamais, mais je savais cela du seigneur Maximilian, l’ancien Maître du Convent Órfhlaith. Le souvenir de cette perte était-il toujours aussi vivace dix ans après ? Dans le doute, je parcourus le reste de la page, puis le journal entier. Les gros titres étaient consacrés au dernier meurtre d’une série qui effrayait Los Angeles depuis près de six mois maintenant… Les victimes, toutes des femmes d’une vingtaine d’années, avaient succombé aux assauts de ce que la presse à scandale surnommait, avec raison, un vampire. Il était ce que nous détestions : le genre de malade qui mettait après nous les Van Helsings. Comme nous cachions notre existence, les mortels n’avaient qu’une seule vision du vampire : celle colportée par ces criminels. Ils imaginaient que nous étions tous des buveurs de sang dénués d’âme. La majorité des Éternels n’était pas ainsi, mais les chasseurs de vampires nous mettaient tous dans le même panier. Laissez-moi vous rappeler qui nous sommes. Tout d’abord, nous ne sommes pas des morts-vivants. Nous ne sommes pas des cadavres réanimés par une quelconque malédiction. Un mortel ne peut devenir un Éternel que s’il boitvivant le sang d’un Maître vampire. Nul besoin d’être mort ou à l’article de la mort. J’avais été en parfaite santé lorsque Maîtresse Ava m’avait proposé son sang. Soldat de l’armée de Sa Très Gracieuse Majesté au beau milieu du champ de bataille de l’Afghanistan, certes, mais en bonne santé. Donc, en tant qu’être vivant, nous avons les mêmes besoins : boire, manger, dormir et toutes ces sortes de choses. Alors qu’est-ce qui faisait de nous desvampirestant nommés, vous demandez- si vous ? Notre éternité a été créée lors d’un rituel de sorcellerie officié par quatre femmes, nos Fondatrices, il y a près d’un millénaire de cela. Nous sommes éternels par la magie contenue dans nos veines. Ce sang ensorcelé arrête l’influence que le temps a eue sur nous. Nous cessons de vieillir. Il nous garde dans un état constant de parfaite santé. Nos blessures ne guérissent pas au sens propre. Lorsqu’un Éternel est blessé, il s’immobilise complètement et remonte le temps jusqu’au moment où il a été indemne. C’est pour cela que, lorsque nous sommes empalés, nous ne pouvons ni bouger ni guérir tant que la blessure est constante. De la même manière lorsque notre cœur est touché, puisqu’il a pour charge de faire circuler notre sang, sonretour à la normale est plus long que pour n’importe quelle autre blessure. C’est aussi grâce à cela que nous ne pouvons plus tomber malade… et c’est à cause de cela que procréer est aussi impossible. Nos êtres sont figés dans le temps à un point X. Il ne peut plus ni dégénérer, ni générer. Cependant, tout acte magique demande un payement : afin de préserver et entretenir la magie du sang qui nous donne l’éternité, nous devons le renouveler tous les soirs. Et pour cela, il nous faut boire le sang d’un mortel à même sa gorge. Pas d’un animal, pas du sang en poche, mais celui d’un autre être humain encore mortel. Voilà ce qu’est notre vampirisme. Rien là-dedans n’oblige à tuer celui dont vous buvez le sang. Seuls les monstres et les imbéciles se gavent du litre et demi qui met la vie de la personne en danger. Vous avez souvent besoin de boire en une seule fois l’équivalent d’une bouteille d’eau, vous ? Moi, non. Quelques gorgées me suffisent et c’est pareil pour la majorité des miens. Lors de la chasse, tous les soirs, nous devons nous assurer que notre « donneur », comme nous les appelons, n’est pas en danger de quelque manière que ce soit par notre faute. Tous les donneurs s’endorment profondément après notre morsure et ne se souviennent de rien au réveil. La magie du sang y veille. Il est de coutume de les laisser se reposer dans un lieu public et fréquenté pour leur sécurité. Enfin, nous déposons à proximité une offrande pour les remercier : une boisson sucrée et de quoi grignoter afin de compenser la perte de sang qu’ils viennent de subir, comme lors d’un
on. Dans ces conditions, vous devinez que tuer un mortel est puni par l’exil, à la merci des chasseurs. C’est pourquoi ce que cet Éternel surnommé « le Vampire » se rendait coupable était pour nous aussi un crime abject de la plus haute gravité. Nous ne sommes pas des monstres et ne nous considérons pas comme tels : au terme « Vampires » nous préférons « Éternels ». Accuser un autre Éternel d’être un vampire était une insulte. Mais puisque ce monstre possédait notre sang, notre devoir était d’arrêter ce tueur qui saignait Los Angeles. Nos deux Convents s’efforçaient de traquer cet individu déviant pour l’exécuter. Sans succès, hélas, et ce malgré le pouvoir de Lía Fáil. Je relevai la tête et la tournai vers la porte de la cuisine, inquiet pour ma partenaire, ma protégée. Il y a un peu plus d’un an, Lía Fáil avait été victime d’un complot de la part de son condisciple Tristan. Il n’avait pas accepté la présence de la jeune femme, treizième disciple du Maître vampire Maximilian Órfhlaith. Il l’avait tenue pour une malédiction responsable des malheurs passés du Convent Órfhlaith. Tristan avait assassiné son Maître par désir de vengeance et avait rejeté la faute sur Lía Fáil afin qu’elle soit exécutée. Tout l’avait accusée, mais moi, j’avais cru en elle. Grâce à nos efforts, elle avait été innocentée, Tristan avait été reconnu comme le véritable coupable et tué. Et, enfin, sous l’insistance des autres Éternels Órfhlaith, Lía Fáil avait succédé au seigneur Maximilian afin de sauver le Convent Órfhlaith de la destruction. Car seul un disciple reconnu par Lía Fáil peut devenir un Maître Órfhlaith capable de créer d’autres Éternels. Mais personne n’avait voulu cette place. En fait, tous considéraient que le pouvoir farfelu de Lía Fáil faisait d’elle la candidate idéale. Tristan avait été découvert grâce à Lía Fáil et son don unique de faire parler les objets qui l’entouraient. Objets qui, leurs témoignages mis bout à bout, nous avaient permis de découvrir la vérité. Elle avait donc les moyens d’obtenir des informations que personne d’autre ne pouvait posséder, et comme chacun sait : l’information, c’est le pouvoir. Ma partenaire avait donc dû endosser ce rôle. Ainsi, cela faisait un peu plus d’un an que Lía Fáil était la Maîtresse du Convent Órfhlaith. Afin d’assumer ses nouvelles responsabilités tout en faisant honneur à son séduisant prédécesseur, elle avait effectué une transformation sur son physique. Je lui avais répété que son apparence importait peu à sa fonction, mais elle m’avait répondu par l’un de ces regards en biais qui me mettaient mal à l’aise. Ce qui m’inquiétait, outre son nouveau physique athlétique qui risquait fort d’attirer l’attention des butors mal intentionnés, était son assiduité à pister ce vampire. Nous ignorions quel était son pouvoir ; je craignais qu’elle ne tombât entre ses griffes si elle croisait sa route. — Ne commettez pas d’imprudence, je vous en supplie… murmurai-je dans la solitude de la cuisine. Je réalisai que je me trouvais en simple boxer… Le feu monta à mes joues malgré mes efforts pour l’ignorer. L’angoisse me noua ensuite la gorge à l’idée que Lía Fáil ait pu remarquer les cicatrices à mes poignets… L’instant suivant, je pris la mesure du trouble de ma partenaire si ma seule vue en sous-vêtement ne la distrayait pas de ses pensées… J’étais de plus en plus inquiet à son sujet. Quelque chose m’avait échappé pour comprendre cet émoi soudain, mais quoi ? Alors que j’essuyai le sol de la cuisine tout en réfléchissant, je compris que de ma partenaire française, je ne savais en réalité que peu de chose. J’ignorais son prénom et son nom de famille du temps où elle avait été une mortelle. Le seigneur Maximilian avait été très évasif quant à cette histoire d’amour désastreuse qui l’avait
métamorphosée en jeune femme fermée et farouche. Malgré ses efforts, je me heurtais encore souvent à sa méfiance craintive, comme le prouvait ce qui venait de se passer à l’instant. D'abord, elle me rejetait férocement, puis elle s’excusait avant de s’enfuir. Je déjeunai tout en lisant le journal après m’être lavé et habillé – il s’agissait du L.A. Times d’aujourd’hui – et ressassai ce que je savais d’elle grâce à Maximilian. Elle était d’origine bretonne et avait un frère aîné répondant au nom de Philippe. Ses parents avaient divorcé lorsqu’elle avait cinq ans. Elle avait vécu avec son frère à la mort brutale de sa mère. Durant cette période, elle avait suivi des études en sciences humaines à l’université de Rennes. Lesquelles ? Je l’ignorais, mais elle était incontestablement passionnée de folklore et parlait le gaélique irlandais. Tous les soirs, elle travaillait à des recherches sur son netbook avec autour d’elle une muraille de Chine constituée d’épais ouvrages dont les titres ne parlaient qu’à un spécialiste. Un autre article attira mon attention. On y lisait l’éloge du prochain livre d’un chercheur français du nom de Camille Larmant : « […] Son excellente étude sur la place de la femme irlandaise à travers des légendes médiévales. Une œuvre passionnante qui mêle autobiographie et thèse, des premières années de faculté à l'enseignement en université, » lus-je tout bas. Ce nom m’était inconnu. Je haussai un sourcil intrigué en constatant que cet encadré se trouvait au recto de la page que j’avais remarquée en premier lieu. J’imaginais fort bien Lía Fáil retourner le journal dans une tentative de cacher l’article avant que ses nerfs ne lâchent. Comme son insistance lorsqu’elle avait dit ne pleurer pour rien. Elle était habituée à faire des cachotteries et se mentait autant à elle-même qu’elle mentait aux autres… — Camille Larmant, répétai-je afin de mémoriser ce nom. Je fis la grimace à l’idée de devoir demander un service au jeune Yoann, le nouveau partenaire d’Anna depuis six mois. C’était un petit génie qui avait vite assimilé son rôle de Préfet, quoiqu’il possédât un ego surdimensionné. Mon regard se porta par automatisme sur la pendule au-dessus de ma tête. Je laissai s’échapper un juron en constatant que j’allais être en retard au travail ! J’attrapai les clés de la Suzuki et franchis à grands pas la distance me séparant de la porte, lorsque je remarquai le mouchoir en tissu sur le bureau de Lía Fáil. Elle avait oublié Larry… Ce maudit tissu était pire qu’un journal intime. Quand vous lui faisiez des confidences, le journal ne vous répondait pas, mais Larry… Avec un sourire mauvais, je saisis cet enquiquineur et l’étendis face à moi. — Tu pourrais me dire qui est ce Camille Larmant ? questionnai-je le fidèle confident. J’aurais apprécié posséder le pouvoir de ma partenaire à cet instant, car évidemment, le mouchoir resta aussi muet et inerte que banal. Dans un geste immature bien que satisfaisant, je transformai Larry en corde de nœuds. Il détestait ça. Après un nouveau soupir, je quittai l’appartement d’un pas résigné. J’allais devoir demander un service à Yoann.
Chapitre2 –May God bless America Hollywood Le Beltaine – 22h10 Il me fallut dix minutes pour me changer au club de ce lundi soir et me présenter formellement à la gérante. Elle m’avait dressé un tableau de la situation demandant mon renfort. Peu avant l’ouverture, je m’efforçais de trier les hôtes à l’entrée de cet établissement nocturne très prisé des célébrités en tous genres. La queue bien que très glamour se formait à perte de vue. Tout cela pour quoi, ou plutôt, pour qui ? Le PDG Gavin McCarthy. Je le connaissais : du temps où j’officiais dans l’armée, certaines de nos armes les plus performantes venaient des laboratoires McCarthy. Cependant, McCarthy avait encore augmenté sa popularité et sa fortune en participant à l’élaboration du prototype de l’arme au centre de l’intrigue du blockbuster de cet été qui connaissait un énorme succès. Il avait spécialement conçu cet accessoire et, en qualité de créateur, avait même joué le jeu de la promotion du film. Tout cela en faisait l’une des personnalités les plus en vogue de ces derniers mois. En conséquence, son visage était sur la plupart des journaux et des magazines. Impossible d’ignorer qui il était ni à quoi il ressemblait. D’ordinaire je n’ai rien contre les célébrités, cependant, McCarthy avait le don de m’insupporter. Pas seulement parce qu’il résumait à lui seul un aspect cynique des États-Unis. Car vous n’imaginiez pas combien de vocations pouvaient naître dans une salle de cinéma, lorsque les héros sont des soldats de l’armée régulière américaine… Non, il m’agaçait pour une tout autre raison. Je claquai la langue à ces pensées et un petit rire de nez échappa à mon collègue. — Amaël, pas de petite blonde en vue, détends-toi un peu ! m’enjoignit-il. Mon collègue était un prototype du videur de night-club : il possédait l’incontournable crâne rasé aussi lisse que celui d’un nouveau-né, les lunettes noires et la carrure d’une armoire à glace. Je lui répondis tout en tenant le cordon de sécurité afin de laisser passer une invitée à l’apparence assortie au club. — Ce n’est pas parce que tu ne la vois pas qu’elle ne s’est pas déjà faufilée à l’intérieur, chuchotai-je. Puisque Gavin McCarthy était ici ce soir, j’étais certain que ma partenaire le serait aussi. Pour une raison inconnue, son cœur de midinette suivait la mode et craquait littéralement sur lui. Je ne comprenais pas pourquoi et ça me rendait fou. Je trouvais cela suspect et inquiétant à la fois. Ce bellâtre avait droit à plus de crédit que moi ? Elle ne le connaissait même pas et il participait à l’un des aspects les plus discutables de l’Amérique ! J’ignorais même comment elle était venue à faire sa connaissance et je soupçonnais que c’était bien avant qu’il ne soit sous les feux de la rampe cet été. Cela me désespérait. Ajoutez à cela que Lía Fáil faisait toujours son possible pour ne pas payer l’entrée et vous pouviez imaginer la situation inconfortable dans laquelle je me trouvais. Je roulai des yeux derrière mes lunettes noires. Elle était l’incarnation féminine de l’Avarice. Enfin, plutôt celle d’un dragon rouge faite femme. Elle ne me soupçonnait pas de vouloir voler sa cassette remplie d’or, mais gare à moi si je proférais un seul commentaire sur ses acquisitions. — Amaël, concentre-toi un peu sur ton boulot ! me rappela à l’ordre mon collègue dans un chuchotement sec. Je m’excusai auprès de lui et du jeune homme qui patientait devant moi, planté dans le passage, alors que je lui avais autorisé l’accès à la boîte.
Une clameur s’éleva soudain dans la file d’attente au moment où une voiture s’arrêta face au club. Je sentis mes muscles se tendre lorsque je reconnus la personne qui sortait de l’habitacle et donnait son visage séducteur aux flashs qui illuminaient la nuit. McCarthy. La raison de ma présence en renfort allait causer une émeute s’il continuait à sourire comme une figure de mode ! Ne pouvait-il pas avoir un défaut ? Non seulement il était l’une des plus grandes fortunes de Californie, mais en plus, il avait un physique et un charisme dignes d’un acteur d’Hollywood ! Aussi grand que moi, moins large d’épaules, vêtu d’un jean gris et d’un polo vert sans manche, cet Américain aussi roux qu’un Irlandais arborait une trentaine d’années qui lui creusait quelques rides au coin des yeux. Les cheveux courts, le visage long, les traits fins, et des lèvres sensuelles… Les cris hystériques de ses admiratrices me vrillaient les tympans. — Je le hais, lâchai-je dans une moue impuissante. Le magnat de l’armement se dirigea vers moi. Il m’adressa un sourire charmeur de ses dents impeccablement blanches et légèrement pointues avant de retirer ses lunettes noires pour révéler ses immenses yeux bleus. — Mademoiselle Fáil est-elle en vue ce soir ? s’enquit-il d’une voix roucoulante de séducteur. — Bonsoir, M. McCarthy. Pas encore, monsieur, répondis-je d’un ton neutre tout en m’effaçant pour le laisser entrer. Il pesta en se tournant pour jeter un œil derrière lui. — Tant pis… soupira-t-il avec un sourire. Mais veillez à la laisser entrer si jamais elle pointe son petit nez par ici ! — Bien, monsieur. Bonne soirée. Je le détestais. Il ferait mieux de vite aller retrouver la fraîcheur des climatiseurs, parce qu’avec cette chaleur de juillet, s’il retirait son polo ici, je ne garantirais peut-être pas sa survie face à une horde d’admiratrices en délire. En plus de cela, j’ignorais comment une jeune femme telle que Lía Fáil, qui s’efforçait pourtant d’être ignorée la plupart du temps – sans grand succès cela dit – parvenait cette fois à attirer sur elle l’attention de ce… fantasme ! McCarthy avait jeté un sort sur ma partenaire. Je ne voyais pas d’autre explication ! Je devais garder un œil sur lui ! — Amaël, me questionna mon collègue une fois la file d’attente terminée deux heures plus tard, McCarthy a l’air d’avoir ta petite amie dans la peau ! Tu vas pas le laisser te la piquer, hein ? Je me contrôlai pour ne pas le foudroyer du regard. Lía Fáil étaitma partenaire. C’était elle, et personne d’autre ! Aucun bellâtre qui vendait ses flingues comme des petits pains ne saurait me la ravir ! — Pour la bonne raison qu’elle n’est pas ma petite amie, m’entendis-je pourtant répliquer avec le plus grand sérieux. Mon collègue s’esclaffa tandis que nous surveillions l’intérieur du club depuis la porte. — C’est ça ! Ouais ! Et moi je suis le roi de Prusse ! — Il pourra toujours tenter de la séduire, je sais qu’il ne réussira qu’à se ridiculiser. Je sentis un sourire carnassier retrousser mes lèvres. — Aucune fille ne résiste àça! riposta mon collègue. Il pointa du menton l’intéressé entouré par une ribambelle de suivantes. Je sus ce qu’il voulait dire par « ça ». Il parlait du charisme explosif de McCarthy qui emplissait la salle et nous balayait tous. Il parlait du sex-appeal animal de ce mètre quatre-vingt-dix tout en muscles puissants, et il parlait de la façon dont il marchait et prenait possession de chaque lieu : à la manière d’un conquérant invincible à qui le monde entier appartenait. — Lía préfère ses livres, grommelai-je sans conviction, sachant parfaitement que c’était « ça » qui faisait craquer ma partenaire. Nous sommes amis, rien de plus. — T’es plus possessif qu’un gamin avec sa sucette, arrête ton char ! se moqua-t-il. — Tu m’agaces, répliquai-je d’un ton sec lui signifiant que la conversation prenait fin
ici. Bien que je fusse soulagé par l’absence de Lía Fáil ce soir, l’événement de la cuisine me revint en mémoire. Je visualisai notre Tatouage avant de m’adresser à son esprit. « Vous êtes en train de rater McCarthy occupé à briller en société. Sa voix calme et claire s’éleva dans mon esprit. Apparemment, elle avait retrouvé contenance, quoique son ton était un peu froid. 1 Le Beltaine ? Merde ! J’ai oublié ! Je ne peux pas venir, je suis avec Sam & Max .Il me fallut un petit instant avant de me rappeler deux choses : la première, qu’elle faisait référence à un jeu vidéo, la seconde, qu’elle désignait ainsi les inspecteurs de la criminelle Hug Owen et Serena Howl, ses contacts à la LAPD. Je n’en savais pas plus. Du nouveau au sujet du Vampire ?Que dalle…Le Tatouage visualisé devint marron. Lía Fáil était maussade et découragée. Vous allez donc… ?Je caresse l’idée de m’inviter chez Anna et Yoann afin de revoir notre méthode, à défaut de caresser autre chose.Pris par surprise, je sentis mes pommettes s’enflammer. Lía Fáil ! m’écriai-je en serrant les dents pour ne pas proférer cette exclamation de vive voix. Le Triskèle de notre Tatouage changea de couleur pour devenir vert clair et sautiller. Elle s’amusait. Vers quelle heure allez-vous rentrer ?me questionna-t-elle soudain. Hélas, pas avant quatre heures du matin.Oh, murmura-t-elle d’un ton déçu.Bon, ben bon courage alors.» Elle coupa la communication et le Triskèle s’effaça de mon esprit. Je souris d’un air satisfait. McCarthy allait l’attendre longtemps. Mon sourire s’étira lorsque je réalisai que je lui manquais.
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