Georges Simenon
161 pages
Français

Georges Simenon , livre ebook

-

161 pages
Français

Description

L'extraordinaire fécondité littéraire de Simenon a suscité deux contresens. Le premier a été commis par ses détracteurs : arguant de l'antinomie entre quantité et qualité, ils n'ont voulu voir en lui qu'un fabricant de romans de gare largements surfaits. Les plus zélés simenoniens ont fait de leur maître un génie instinctif de l'écriture. Or, une lecture attentive des romans et déclarations de Simenon conduit à voir dans ce point de vue un second contresens. Plus lucide que ses défenseurs les plus ardents, le romancier savait ce que son prétendu instinct devait à sa puissance de travail, à ses voyages et à sa culture intellectuelle.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2009
Nombre de lectures 123
EAN13 9782296231733
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Georges Simenon
Trois romans et un mytheEspaces Littéraires
Collection dirigée par Maguy Albet
Dernières parutions
Mohamed SALMA WY, Naguib Mahfouz. Le dernier train,
2009.
Jean-Pierre RENAU, Clément Privé (1842-1883), Journaliste et
poète,2009.
Anton Pavlovitch TCHEKHOV, Lettres de voyage.
MoscouSakhaline - Moscou. Février 1890 -janvier 1891, 2009.
Claude HERZFELD, Georges Hyvernaud. Les ressentiments
fraternels,2009.
Irène WEKSTEIN, Le roman des Juifs d'Europe de l'Est.
Figures de la modernité dans la littérature yiddish de
l'entredeux-guerres,2009.
Frantz-Antoine LECONTE (sous la dir.), Josaphat-Robert
Large, lafragmentation de l'être, 2008.
Sophie OLLIVIER, Paoustovski, l 'homme du dégel, 2008.
Renaud DUMONT, De la langue à la culture. Un itinéraire
didactique obligé, 2008.
Marta GINE-JANER (sous la dir.), La guerre d'Indépendance
espagnole dans la littérature française du XIXe siècle.
L'épisode napoléonien chez Balzac, Stendhal, Hugo..., 2008.
Mohamed MAALEJ, Eberhardt, miroir d'une âme et d'une
société, 2008.
Wieslaw Mateusz MALINOWSKI et Jerzy STYCZYNSKI, La
Pologne et les Polonais dans la littérature française (XIV-XIX
siècles), 2008.
Didier COURSE (textes choisis et présentés), En ma fin est mon
commencement. Ecrits religieux et moraux de la reine Marie
Stuart suivis des réactions et commentaires sur sa vie, son
emprisonnement et sa mort, 2008.
Ralph ALBANESE, Corneille à l'époque républicaine, 2008.
Claude HERZFELD, Julien Gracq, préférences médiévales,
2008.
Yinde ZHANG, Littérature comparée et perspectives chinoises,
2008.Jean-Paul FERRAND
Georges Simenon
Trois romans et un mythe
L'HarmattanDu même auteur
La Conscience, l'inconscient, le désir, les passions, Paris,
Ellipses, 1996.
Schopenhauer ou l'épreuve de la volonté, Paris, Ellipses,
1998.
La Conscience, l'inconscient, le sujet, Paris, Ellipses, 2002
@
L'Harmattan, 2009
5-7, rue de l'Ecole polytechnique; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan l@wanadoo.fr
ISBN: 978-2-296-09315-7
EAN: 9782296093157Avant-propos
Les quatre essais qui composent ce petit livre peuvent être
lus indépendamment les uns des autres, dans l'ordre qu'on
préfèrera. Cela, pourtant, ne signifie pas qu'aucun fil
directeur ne les enchaîne les uns aux autres. Les trois romans
commentés ici expriment ce qu'à défaut de théories, on peut
appeler des croyances ou des convictions de Simenon.
Simplement alléguées comme thèmes à l'occasion de l'étude des
romans, elles font l'objet d'un traitement explicite dans
l'essai conclusif, Un homme comme un autre.
En ne gratifiant pas le romancier d'un titre de théoricien,
qu'il eût d'ailleurs farouchement refusé, il n'est cependant
pas question de faire encore une fois de lui l'incarnation
parfaite du « degré zéro de la penséel ». Simenon lui-même était
convaincu de son impuissance à forger et à manier des
abstractions, mais son œuvre n'en a pas moins fasciné des
intellectuels aussi prestigieux et différents que Carl-Gustav Jung,
Hermann von Keyserling, André Gide ou Henri Birault, le
spécialiste français de Nietzsche et de Heidegger. Cette
fascination invite à révoquer en doute les critiques qui,
aujourd'hui encore, traitent les romans de Simenon comme
autant d'œuvres qu'on lit et qu'on oublie aussi vite qu'elles ont
été écrites. Conscient de l'injustice d'une telle réputation,
Gide confessait au romancier dès 1938 : « Ce que je voudrais
dire [...], c'est le curieux malentendu qui s'établit à votre
sujet; vous passez pour un auteur populaire et vous ne vous
adressez nullement au gros public. Les sujets mêmes de vos
livres, les menus problèmes psychologiques que vous
soulevez, tout s'adresse aux délicats; à ceux qui, précisément,
pensent, tant qu'ils ne vous ont pas encore lu: "Simenon
n'écrit pas pour nous,,2». En réalité, une compréhension
quelque peu approfondie des œuvres du romancier ne peut
faire abstraction des concepts philosophiques,
psychanalytiI
Cf. Angelo RINALDI, Service de presse, Paris, Plon « Commentaire », 1999, p. 91.
2
André GIDE, lettre à Simenon du 31 décembre 1938, in Georges Simenon et André Gide...
sans trop de pudeur, Correspondance 1938-1950, Paris, Omnibus, « Carnets », 1999, p. 23.ques et sociologiques dont Simenon fait un usage certes
spontané, mais très sûr. Car le rapport de cet autodidacte à la
culture intellectuelle est moins lâche et surtout plus vivant
qu'on ne l'a dit et répété. Il a découvert Nietzsche à vingt
ans, Freud et ses disciples à vingt cinq. Les Essais de
Montaigne ont été son livre de chevet durant dix ans au moins3...
Ces grands auteurs, Simenon les a abordés, « absorbés»
faudrait-il dire, comme il convient à un créateur de le faire:
avec admiration, mais en veillant constamment à garder
visà-vis d'eux la distance indispensable à la protection de sa
propre originalité. Dans une lettre adressée à Keyserling, il
évoque l'attitude que sa condition de romancier lui impose à
l'égard des maîtres qui ont durablement retenu son attention:
« Il y a, me semble-t-il, à notre époque confusion entre le
mot écrivain et le mot romancier. Car, pourquoi diable
veuton que le romancier émette des idées?
Elles sont si rares, n'est-il pas vrai? C'est l'affaire des
philosophes et quand une idée neuve naît dans un cerveau, je
ne vois pas la nécessité de la dissoudre dans une action
fictive, de l'enfoncer dans la carcasse d'un roman. Voit-on
Freud - je ne veux pas parler de vous-même - exposant ses
théories en une grande série de romans à la Zola ou à la
Balzac contenant un échantillonnage de ses cas cliniques? Ce
fut là affaire de romanciers. Certains l'ont fait exprès, ont fait
du freudisme, ont voulu dire quelque chose - et je crois
qu'ils ont eu tort. D'autres, sans le vouloir, ont été influencés
et ne s'en sont pas aperçu... Si j'étais Freud, ce sont surtout
ceux-là que je considèrerais comme mes vrais disciples4. »
Cette confidence justifie une approche de Simenon
soucieuse de repérer dans ses romans et dans ses propos les
traces discrètes de l'influence qu'ont exercée sur lui
philosophes, psychanalystes et sociologues. D'aucuns estimeront
peut-être l'entreprise trop risquée, et trop étroit le point de
3 Cf. Quandj'étais vieux, in « Tout Simenon », t. 26, Paris, Presses de la Cité, « Omnibus »,
1993, t. 26, p. 232.
4 Lettre envoyée fin octobre 1936, citée par Paul MERCIER dans La Correspondance entre le
comte de Keyserling et Georges Simenon, article paru in Traces 5, Simenon et la biographie,
Centre d'études Georges Simenon. Université de Liège, 1993, p. 101. Nous soulignons.
8vue adopté ici sur l'œuvre de l'écrivain liégeois. Il n'y a
pourtant aucune raison de croire cette approche moins
instructive que celle qui consiste à éclairer les romans de
Simenon par sa seule biographie. Ignorer la vie d'un créateur,
c'est assurément manquer certains aspects essentiels de sa
production. Mais une biographie, si documentée soit-elle,
reste stérile si elle ne rend pas compte des convictions qui
déterminent les réactions d'un homme aux événements
marquants de son existence: «C'est le lot des êtres humains,
écrit Alfred Adler, de vivre dans le royaume des
représentations. Leur expérience ne porte pas sur des événements bruts,
perçus objectivement, mais sur la signification qu'ils leur
donnent [...] Nous appréhendons toujours la réalité à travers
le sens que nous lui attribuons, subjectivement, comme à
travers une interprétation5. » Une enquête sur les influences qui
ont contribué à forger les convictions inscrites,
consciemment ou non, dans les romans « durs» de Simenon doit donc
permettre de mieux cerner la personnalité d'un créateur si
peu disposé à séparer son œuvre de sa vie qu'il se plaisait à
répéter: « l'écris [...] par besoin d'écrire, de même que vous
mangez par besoin de manger6. »
Après la vague

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