L Embellie
86 pages
Français

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Description

Elle prit l'habitude de penser à lui et il se mit à incarner un idéal. Sans rien savoir de lui, elle décida d'en faire un but, de consacrer toute son énergie à le conquérir. Elle n'était pas absolument certaine qu'il soit dans la même disposition d'esprit, mais qu'à cela ne tienne elle en vint à croire qu'il y avait entre eux une entente tacite pour qu'un jour ils envoient promener leur existence respective, la vie respective que chacun avait construite et vivait de son côté, elle pensait à lui, rêvait de lui avec véhémence, elle ne savait pas s'il s'agissait d'amour parce qu'elle n'avait jamais bien su définir en quoi l'amour consistait, elle avait jeté son dévolu sur lui, et rien d'autre ne comptait plus pour elle. Il devint une idée fixe. Yves est sorti de sa vie il y a trente ans, et pourtant elle n'a jamais cessé de penser à lui depuis. Osera-t-elle l'inviter à la fête d'anniversaire de ses soixante ans? Ce roman en forme de dialogue intérieur, aux couleurs vieillies des souvenirs pourtant vivaces, donne lieu à une intense et intime réflexion sur l'amour et le sens que chacun y donne dans sa vie. Avec beaucoup de sensibilité et d'abnégation, M.-C. Mir livre ici ses doutes, ses rêves et ses regrets, dans une sorte d'autopsie de son histoire d'amour passée. Un livre touchant de réalisme et d'introspection.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 22 novembre 2012
Nombre de lectures 23
EAN13 9782748397314
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0049€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait












L’Embellie Marie-Claire Mir










L’Embellie






















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IDDN.FR.010.0118054.000.R.P.2012.030.31500




Cet ouvrage a fait l’objet d’une première publication aux Éditions Publibook en 2012


À Delphine, Tristan, Hélène, Jean



I. L’invitation



Je repose le téléphone. Finalement je ne l’appellerai
pas. Je me souviens de la dernière fois où j’ai entendu sa
voix. La dernière fois que j’ai entendu sa voix, c’était juste
avant mon départ pour l’Afrique, quand il m’a téléphoné
(« …puisque tu pars… ») – alors c’est vrai ce qu’on m’a
dit, tu t’en vas ? Oui. C’était il y a vingt ans. Nous ne nous
étions pas revus depuis cinq ans.

Inutile de l’appeler puisque tu as renoncé à l’inviter.
Finalement.

Il y a deux ans, j’ai décidé d’organiser une fête pour
mes soixante ans, avec le projet d’inviter tous les gens qui
ont compté pour moi. Cela fait deux ans que je dresse la
liste des invités, petit à petit, j’appelle, j’écris, je recherche
sur internet. Dans deux mois, tout le monde sera là, enfin
tout le monde sauf ceux que je n’ai pas retrouvés, plus
ceux qui ont décliné l’invitation pour des raisons diverses,
et de toute façon il y aura tout le monde sauf lui, Yves.
Il fait encore frais, il est tôt : sortir, aller marcher au
bord du Lez, se promener pour faire passer de l’air dans le
crâne, atténuer la fièvre, calmer le jeu et se persuader qu’il
vaut mieux ne pas le revoir, c’est mieux ainsi, laisser les
choses en l’état, les souvenirs qui restent suffisent, c’est
une histoire du passé qui n’a nul besoin d’être rafraîchie
par une invitation à se revoir, nul besoin d’être remémorée
par lui présent ici, à cette fête que je prépare pour mes
soixante ans et dont j’ai conçu le projet il y a deux ans
uniquement pour le revoir lui, Yves.
9
Si tu l’invitais, Il constaterait en te voyant combien
l’image qu’il a gardée de toi – peut-être – dans son
souvenir, est ruinée. Il en serait épouvanté – peut-être – même
s’il garderait cette déconvenue par-devers lui, en dedans,
derrière ses yeux verts Véronèse, ses yeux de loup :
comment, c’est cette femme, cette fille, cette personne, c’est
elle… Et le visage d’aujourd’hui se superposerait sur
celui d’hier, il ne parviendrait plus à se souvenir de toi telle
que tu étais il y aura de cela trente ans en septembre
prochain.

Si je l’invitais, ce serait un projet de se revoir comme
se revoient maintenant les « copains d’avant ». Parmi les
invités il y aurait les hommes de ma vie, presque tous les
hommes de ma vie, et lui se retrouverait là parmi eux :
peut-il avoir le même statut que les autres ?

Maintenant que trente ans ont passé, tu te demandes
s’il a eu autant d’importance… Tu hésites à en douter.

Si je l’invitais, à supposer qu’il vienne, que ferait-il une
fois franchie la porte ? Il regarderait chacun et chacune,
serrerait des mains, je le présenterais à chacun et chacune,
il y aurait pour chacun et chacune des anecdotes alors que
je ne saurais pas quoi dire pour lui, un ancien amant, non,
un homme que j’ai bien connu il y a longtemps, dans les
années quatre-vingt, nous étions collègues, nous avons
créé ensemble la première cellule sur le travail autonome à
la MAFPEN, sur le quoi ? Où ? À la quoi ? Oui c’est vrai
maintenant tout cela est bien loin, enfin c’est sympa d’être
venu, et il ne connaîtrait personne de tous ceux que j’ai
connus en dehors de lui, il se demanderait ce qu’il fait là,
et la meilleure chose qu’il aurait à faire serait de repartir
assez tôt, cela me fait plaisir de t’avoir revue.

10 Il poserait son regard sur toi et le vert de ses yeux te
détruirait. De nouveau.

Ne vaut-il pas mieux qu’il soit le seul absent et que son
absence même soit le signe de l’importance qu’il eut dans
ma vie… Ne vaut-il pas mieux, qu’il garde dans ma
mémoire cette place si nécessaire à la préservation du secret
qui me permet de rester en alerte et de marcher ce matin
au bord du Lez, vent en poupe, le stylo dans la tête à jeter
les premiers mots du projet de remplacer l’invitation par
un livre. Comme si les livres étaient le moyen le plus sûr
de garder auprès de soi ceux que l’on aime.

Tu te demandes quel visage il a maintenant : ses traits
ont-ils été modifiés par les années ?

Les ajoncs se froissent dans l’air frais. Sur les berges du
Lez, quelques pêcheurs endormis. Bientôt je serai arrivée
au bout du sentier. Ni passerelle ni radier, ni gué, et il n’y
a pas moyen de faire une boucle, il faut retourner sur ses
pas, c’est un aller-retour.

Frêle promenade, chiche horizon, que penserait-il de
toi, échouée ici, dans ce village à peine provençal, flanqué
d’une centrale nucléaire ?

Il disait qu’il fallait se dépêcher d’aller habiter ailleurs.
Et pourtant Laon n’était pas une ville industrielle ! Petite
préfecture d’un petit département tout abîmé dans le
peloton des endroits où il fait, encore aujourd’hui, le moins
bon vivre d’après une enquête récente de l’Express, la
ville se partageait entre le haut et le bas, entre pierres et
jardins, entre Cathédrale et champs de blé.
Dans ces années 80 déjà, il tenait des propos
écologistes dont à cette époque elle était incapable de comprendre
le sens, immergée qu’elle était dans une vie quotidienne
11 fabriquée par l’urgence des soucis domestiques, et
convaincue d’habiter un coin de campagne déjà
suffisamment – trop éloigné de la ville.
Il habite maintenant à Forcalquier où, d’après internet –
mais le site est-il à jour ? – il s’occupe avec sa femme
d’une association qui accueille les nouveaux arrivants et
facilite leur adaptation. Il semble avoir créé par ailleurs
une association pour la protection de l’agriculture et pour
une consommation proche de la nature. On peut lire sur
internet :
« À égale distance du Rhône, des Alpes et de la mer, à
mi-hauteur entre plaine et montagne, à la rencontre du
monde alpin et du monde méditerranéen – tout en recevant
les derniers effluves atlantiques – le pays de Forcalquier
est un milieu de la Provence, et une Provence du milieu.
Aujourd’hui, le pays de Forcalquier demeure
remarquablement articulé sur son bourg-centre : l’une des plus
petites sous-préfectures de France accueille toujours un
des plus grands marchés de toute la Provence, et
Forcalquier, microville mais ville véritable, conserve largement
son rôle de phare culturel du haut pays provençal.
Forcalquier est situé entre la montagne de Lure et le
Luberon, au bord de la Via Domitia. Son nom signifierait

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