Haïti 2004
199 pages
Français

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Description

Au terme d'un patient travail de déconstruction, l'auteur montre, à contre-courant de la version officielle martelée par les médias, comment Jean-Bertrand Aristide a bien été, avec son gouvernement et son peuple, victime d'un véritable coup d'Etat, achèvement d'une entreprise de déstabilisation économique et politique orchestrée par la France, le Canada et les Etats-Unis.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2007
Nombre de lectures 86
EAN13 9782336269061
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© L’Harmattan, 2007
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
9782296043749
EAN : 9782296043749
Sommaire
Page de Copyright Page de titre Du même auteur sur Haïti : PRÉFACE CHAPITRE I - Arrêt sur image CHAPITRE II - Un kidnapping ? CHAPITRE III - L’ère du soupçon CHAPITRE IV - Les chimères de Paris et d’Ottawa CHAPITRE V - La Caraïbe CHAPITRE VI - De la guerre et des médias CHAPITRE VII - Le lien CHAPITRE VIII - Le soulèvement armé CHAPITRE IX - Zonbi ki gouté sel... CHAPITRE X - Haïti 2006 Chronologie Sélection bibliographique Sigles et abréviations
Haïti 2004
Radiographie d'un coup d'Etat

Gérard Lehmann
Du même auteur sur Haïti :
Babydocratie et presse écrite en Haïti , Odense University Press 1984
Haïti entre l’Afrique et la France in Francophonie et identitaire Collections Francophones, Odense University Press 1997
Histoire, mythe et littérature en Haïti : l’indien Taino in Frankofoni Ålborg University Press 1997
Pages retrouvées de Constantin Mayard, Coëtquen 2004
PRÉFACE
par Mireille Nicolas 1
À Elsie Haas, dont la générosité et la lucidité m ‘ ont fait tant de bien depuis le 29 février 2004.

Au début de l’année 2004, avec une soudaineté et un acharnement partagés par la grande majorité des médias français, nous étions sommés de croire que le président d’Haïti en exercice, Jean-Bertrand Aristide, était devenu un monstre assoiffé de sang, de drogue et d’argent. Quand, huit semaines plus tard, on asséna la nouvelle que dans la nuit du 29 février le tyran avait fui son pays, la boucle était bouclée, la morale sauve, l’histoire finie et bien. Pour ceux qu’Haïti n’intéresse pas plus que ça, oui, l’histoire s’achevait ; les médias l’avaient dit, c’était donc vrai. La télévision de 20 heures l’avait ressassé, les radios, les journaux. Grand nombre de mes connaissances faisaient tinter mon téléphone : est-ce que j’arriverai à me remettre d’avoir côtoyé un pays aussi terrible et un président aussi diabolique et d’avoir moi-même travaillé pour un dictateur ?
C’est une des douleurs de notre monde que d’assister impuissant au déroulement d’une médiatisation forcenée et caricaturale. Porter plainte ? Auprès de qui ? Multiplier des lettres à des journalistes et des organismes quand ce qu’on veut leur dire est complètement différent de ce qui officiellement imposé ? C’est pourtant ce que j’ai fait.
Mon dernier livre, qui dénonçait un lynchage médiatique, avait été refusé par deux éditions très connues qui, en revanche, avaient édité les chantres, l’un haïtien, l’autre français, de l’opposition au président Aristide. Et tout cela dans le sillage du tout-puissant Régis Debray.
L’Harmattan accepta mon livre. Mais il ne suffit pas qu’un livre soit édité. Il faut qu’il soit lu.
Dans notre société privilégiée aux moyens d’information multiples et immédiats, il n’en reste pas moins qu’il est souvent difficile de faire entendre sa voix.
Les journalistes auxquels je m’adressais renvoyaient mes accusés de réception, une signature illisible au dos. Aucune de toutes mes tentatives n’eut le moindre résultat, ni les appels téléphoniques ni non plus les SMS en direct pendant certaines émissions.
La France - à part dans certains milieux haïtiens que je retrouvais de temps en temps à Paris - semblait complètement rétive à écouter autre chose que la lame de fond qui avait été soudain imposée.
Sous la liberté d’expression qu’on est si fier en France de revendiquer se cache une forme de censure d’autant plus dangereuse qu’elle est sournoise.
Cette méchante idée s’est imposée à moi le jour où, de Boston, à la fin juin 2006, j’ai reçu un appel téléphonique de Nicolas Rossier.
Nicolas Rossier est un jeune cinéaste américain d’origine suisse. A la fin du mois de mars 2006, il était présent à Paris aux deux séances de présentation de son film au Festival des droits de l’homme.
Espace Christine, un petit cinéma non loin de la rue Saint-André des Arts dans le VI e arrondissement de Paris. Une salle minuscule. Insuffisante pour la longue file d’attente. Tous ceux qui font la queue sous la pluie fine de printemps sont venus, comme moi, chercher un autre souffle.
Et là, officiellement, dans le cadre d’un festival prestigieux, arrive enfin en France un autre point de vue que celui qui nous a été imposé depuis janvier 2004.
Le film porte un titre en anglais Aristide and the endless revolution 2 . Pro-Aristide ou pas, pro-Lavalas 3 ou pas, tous ceux qui sont ici cherchent une réponse : le 29 février 2004, ne serait-ce pas un nouveau coup d’État qui a forcé à l’exil le président démocratiquement élu trois ans auparavant ?
Grand, souriant, très calme, Nicolas Rossier, arrivé des États-Unis, prend la parole à la fin de la projection de son film. Il s’étonne de la monotone répétition des informations qu’il a découvertes dans les journaux français depuis le début de l’année 2004. On est en mars 2005 et il comprend encore moins qu’elles n’aient cessé de bégayer. Il ne voyait là qu’un acharnement. Et il en arrivait à sourire ; cette attitude lui paraissait si typiquement française, si propre à la France ! Aussi au lieu de s’indigner, il alla jusqu’à rire du titre français qu’on avait imposé à son film. Aristide and the endless revolution 4 était devenu Aristide et le naufrage d’une révolution ! Certes il faut adapter les titres des œuvres aux différentes langues et à leurs beautés spécifiques. Mais là nous n’arrivions pas à comprendre. Ou plutôt, une fois de plus, nous ne comprenions que trop bien. Voilà que le bel adjectif endless, accolé au mot si prometteur en Haïti revolution, voilà que par une mystérieuse métamorphose, il devenait un nom si négatif, naufrage  !
C’est ce que Nicolas Rossier me répéta au téléphone en cette fin 2006. Que c’était là une basse manœuvre franco-française, qu’aux USA son film marchait très bien, malgré le gouvernement Bush et l’implication qu’il avait dans le coup d’État du 29 février 2004 contre le président Aristide. Parce qu’aux États-Unis, nombreuses étaient les voix des intellectuels qui avaient dit et écrit leur indignation sur le nouvel abus de force. 5
En France, en revanche, les intellectuels qui ont accaparé l’information - et c’est toujours vrai en ce moment où j’écris, début novembre 2006 - l’ont façonnée à leur guise, ont distordu la réalité et ont choisi en Haïti ceux forcément qui leur ressemblaient.
Mais pourquoi en France ce lynchage absolu contre le président Aristide ? Pourquoi cette unanimité qui donnait plus de force à la diatribe, quand aux USA les voix étaient beaucoup plus diversifiées et nuancées ? Pourquoi cette différence entre deux pays qui ont colonisé Haïti et gardent avec elle des liens permanents ? Pourquoi au lynchage français contre le président Aristide correspond aux USA un ensemble de points de vue tellement plus fins ? Sont-ce les positions géographiques ? Est-ce parce que le nombre de réfugiés haïtiens est bien plus nombreux aux États-Unis qu’en France où il atteint seulement 50 000 personnes ?
Heureusement, grâce aux nouvelles méthodes de communication, les accusations portées par des journalistes français et l’espèce de censure générale qui a enveloppé cette affaire, toute cette atmosphère nauséabonde sans aucune preuve donnée, se sont mises à s’ébrécher. Parce que soudain l’oxygène dont je manquais dans cet étouffoir médiatique français commença à m’être donné par Internet. Ces grandes voix anglophones, voici que je les trouvais toujours riches de notes et de références. Quoique je les aie relativement peu utilisées dans mon livre qui s’est voulu un témoignage personnel, ethnologique de mes relations avec Haïti, elles me réconfortaient.
J’avais commencé toute seule, poussée par l’indignation. Ces voix venues d’ailleurs, lointaines et fraternelles, m’encourageaient maintenant à te

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