L assassin dîne chez le juge
65 pages
Français

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L'assassin dîne chez le juge , livre ebook

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Description

La nuit ! Les quais de Seine ! Des policiers chargés de chasser les clodos se retrouvent face à un curieux duo. Un rude gaillard et son berger allemand leur donnent du fil à retordre : un agent à l’hôpital et un autre à la baille.


Alors que Monseigneur, l’étrange clochard, et son clebs sont entendus par le commissaire, c’est le branle-bas de combat dans les couloirs du poste de police : un dangereux individu tente de s’échapper en défouraillant à tout va après avoir subtilisé l’arme de son geôlier.


Monseigneur n’a qu’un mot à dire pour que Diabolo, son chien, se jette avec courage sur le malfaiteur, au péril de sa vie.


Le commissaire imagine très vite les services qu’un tel animal pourrait rendre aux forces de l’ordre et ne tarde pas à faire appel aux deux insolites consultants quand un crime est commis dans une usine proche de l’habitation d’un juge d’instruction...


Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 avril 2018
Nombre de lectures 14
EAN13 9782373474008
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Monseigneur et son « clebs » - 1 -
L'ASSASSINDÎNECHEZ LE JUGE
De Marcel PRIOLLET
I
Les habitants du quartier ne s'y trompèrent point quand, une heure après la tombée de la nuit, ils virent arriver les cars de police et s'établir, un peu partout, des barrages d'agents.
Il y en eut boulevard Saint-Michel, rue des Écoles, boulevard Saint-Germain et tout au long des quais, de la place Saint-Michel jusqu'au pont de l'Archevêché. C'était une opération d'assez grande envergure, jus tifiée, semblait-il, par l'audace croissante des gangsters de Paris. Elle faisait partie d'un plan d'ensemble. Tout étant prêt, la rafle commença. On fouillait le s moindres ruelles. Cafés, bars et garnis étaient visités. Sur les berges, en contrebas du quai Montebello, le s policiers « cueillaient » des clochards déjà endormis. Ces pauvres diables, certes, étaient beaucoup moins nombreux qu'autrefois. Le clochard est un type qui se perd. Les œuvres sociales et aussi la guerre, avec ses privations, en ont fortement diminué l'espèce. Il en reste cependant, de ces irréductibles qui préfèrent leur liberté au dortoir de l'asile ou à la salle d'hôpit al. Et puis, cette nuit de fin septembre était douce, sans brise, avec un ciel bienveillant, clouté d'étoiles. Ici donc, près du fleuve, la rafle était sans éclat. On secouait des corps inertes. Quelques mots, toujours les mêmes : — Debout ! Viens avec nous...
D'une façon générale, aucune protestation. Pour les gueux, la fatalité, cette vieille compagne, prenait simplement ce soir la forme d'agents en uniforme ou en civil. Deux de ces derniers — des « en bourgeois », comme on dit — s'apprêtaient à remonter l'escalier, quand l'un étendit la main. — Encore quelqu'un, là-bas, sous le pont ! désigna-t-il.
— Il allait nous échapper, celui-là.
— Allons voir !
L'ombre était plus profonde, au pied de l'arche. Il avait fallu des yeux bien exercés pour distinguer une masse noirâtre. De plus près, les po liciers reconnurent que l'homme s'était fait une couverture de son veston. Écrasé de sommeil, il n'avait pas décelé leur approche. Ils firent encore quelques pas, mais stoppèrent lor squ'ils surprirent un significatif grognement. — Attention ! Il a un cabot avec lui...
— Un cabot ? Ça me connaît. J'en fais mon affaire...
Ces répliques avaient été à peine chuchotées. Du chien couché auprès du vagabond, on apercevait confusément la tête aux oreilles pointues. Son attitude enseignait la prudence aux deux agents. Ils savaient, par expérience, que les bêtes sont souvent plus braves et plus redoutables que les hommes.
Celui qui avait parlé en dernier lieu, s'éloignait maintenant, et se mettait à fureter. Il se souvenait d'avoir buté, quelques instants auparavant, dans un morceau de fil de fer qui avait tinté comme une corde de harpe.
Il eut tôt fait de retrouver le fil de fer. Un mètre cinquante de longueur. Juste ce qu'il lui fallait. Rapidement, il confectionna un nœud coulant, une sorte de « collier de force ». Puis il rejoignit son collègue. Le chien, à présent, était sur ses pattes. Gardien vigilant, il grognait plus fort. Il n'eut pas le temps de s'élancer... Il ne put que se débattre en sauts désordonnés, quand il se sentit soudain étranglé par le lasso métallique qui se resserrait davantage à chacun de ses bonds. Entre lui et l'agent, c'était une lutte farouche, mais qui ne pouvait que tourner à l'avantage du second.
Cependant, aux cris rauques de l'animal, le dormeur s'agitait, s'éveillait. Il se mit debout.
Autant qu'on pouvait en juger, c'était un homme de belle taille, aux cheveux abondants et en désordre, aux bras nus jusqu'aux coudes, car son veston était resté à terre.
Il demeura quelques secondes tout interdit. Puis, ayant secoué ses dernières torpeurs, il comprit ce qui se passait. Alors...
Alors ce ne fut pas long !
Le solide gaillard, bien réveillé, arqua son bras, le détendit... Son poing vint écraser la face de l'adversaire du chien, qui roula à terre avec un « han ! » de douleur.
Pendant que la bête, s'aidant de ses pattes de devant, s'employait à se libérer du collier de fer enfin détendu, son maître fonçait, tête basse, sur le second des policiers.
Son coup porta en pleine poitrine...
Le « en bourgeois », suffoqué, recula, battant des bras. Il chancela ainsi jusqu'au bord du quai, puis il s'abattit en arrière, dans l'eau noire qui fit « plouf ».
La scène n'avait pas duré une demi-minute. Mais il faut croire qu'elle avait eu des témoins plus ou moins proches, car ce fut aussitôt un tumulte de cris, d'appels, de coup de sifflet, de pas précipités. De toutes parts, des uniformes accouraient.
Le chien, délivré maintenant, plissa les babines, montrant les crocs. Il était prêt à se jeter sur le premier qui apparaîtrait.
Mais son maître, à mi-voix, ordonna :
— Halte, Diabolo... Couché !
Diabolo obéit. Tous deux attendirent...
***
Dans son bureau du quai des Orfèvres, le commissair e Bellavent compulsait des dossiers, tout en prêtant une oreille attentive au rapport matinal que lui faisait le brigadier Cachat. — Quand nous sommes arrivés sur la berge, poursuivait le brigadier, l'énergumène n'a opposé aucune résistance. Il a même empêché son chi en de s'élancer sur nous. Une bête terrible, ce chien... — À la Fourrière, j'espère ?
— Pas encore, monsieur le commissaire. L'homme a affirmé que si on le séparait de son « clebs », comme il dit, il refuserait de parler. U n lascar pas commode, je vous assure ! Mais c'est un personnage intéressant, malgré tout. — Qu'est-ce qui vous permet de porter ce jugement ? — Au Dépôt, on a interrogé les autres clochards. Pas un qui vaille la peine d'être gardé. Mais ils connaissent bien l'homme au chien. Ils l'appellent « Monseigneur », long comme le bras. Ils ignorent s'il a un autre nom. Il paraît que Monseigneur, avant la guerre, fréquentait souvent ces berges. Il s'y était acquis une grande popularité. Secourable et généreux comme pas un ! On ne l'avait pas revu depuis plusieurs années...
— Mais... qui est-il au juste ?
— On ne sait pas.
— Ses papiers ?
— Aucune pièce d'identité. Pas d'arme non plus. Mais de l'argent, pas mal d'argent...
— Bizarre ! Je commence à comprendre pourquoi le patron a tenu à ce que je m'occupe personnellement de ce client.
— Il est là, monsieur le commissaire.
— Avec son chien ?
— Bien sûr ! Oh ! rien à craindre d'eux. Monseigneu r, ce matin, est doux comme un mouton et Diabolo — c'est le nom du chien — n'est féroce que sur ordre... — Bon ! Nous allons voir ça... Un mot encore, Cacha t. A-t-on des nouvelles des victimes de ce forcené ? — Oui. L'agent Blondin a pu regagner son domicile après un court séjour à l'hôpital. Il a beaucoup saigné et les cartilages du nez restent tu méfiés. Mais rien de grave. Quant à Grimeux, il en a été quitte pour un bain forcé. Il sait très bien nager...
Le brigadier, se mettant à rire, ajouta :
— Pour du sport, je vous certifie que c'était du sport ! — Ce n'est peut-être pas l'avis de Blondin et de Gr imeux. Enfin... faites entrer Monseigneur. Je vais l'expédier rapidement. J'ai à procéder aussi, ce matin, à l'interrogatoire de « Mister Dick ». Le brigadier Cachat parut intéressé.
— Ah ! oui, le fameux Mister Dick ! On a enfin mis la main sur lui ! En voilà un qui a fait couler de l'encre et de la salive ! Je viens de l'apercevoir, dans l'antichambre, entre deux gardes. Il ne fait pas le flambant...
— Allez, Cachat.
Le commissaire Bellavent resta seul quelques instants. Puis on frappa à la porte du bureau et un garde apparut, qui escortait Monseigneur et son « clebs ».
Le héros de l'aventure du quai Montebello semblait très à l'aise, en dépit des menottes qui enserraient ses poignets.
Quant au chien, collé contre la jambe de son maître, réglant son pas sur le sien, il donnait l'impression d'un animal familier, parfaitement inoffensif.
Le commissaire, assis derrière sa table, les contemplait tous deux avec un visible intérêt. C'était bien la première fois, au cours de sa carrière, qu'il se trouvait en présence d'un pareil couple. Et jamais un chien, de mémoire de policier, n'avait pénétré dans cette pièce.
Une bête splendide, ce Diabolo, avec sa robe café a u lait à zones brunes, son corps élancé, ses membres nerveux aux fines attaches, sa queue en forme de sabre et son long museau où pétillaient deux yeux obliques, d'un jaune orangé. Un collier de cuir rouge jetait une note vive dans le poil plus abondant du cou. Mais c'était surtout l'homme qui retenait l'attention du policier. Monseigneur avait vraiment belle allure. Bâti en athlète, le regard dominateur, le cheveu indiscipliné, châtain clair et à peine grisonnant sur les tempes, ce personnage semblait âgé d'une quarantaine d'années, tout au plus.
Il avait un visage remarquable. Une moustache soyeu se et blonde, à la gauloise, comme on n'en porte plus guère, ornait une lèvre mince et bien dessinée où, pour l'instant, courait un sourire un peu hautain.
La mise était simple : pantalon et vareuse de velours bronzé à côtes. Le col de la chemise s'échancrait sur une large poitrine. On devinait des muscles souples et puissants, ces mêmes muscles dont les agents Blondin et Grimeux, hier soir, avaient fait la cruelle expérience.
Son examen terminé, le commissaire invita :
— Approche. Assieds-toi. Nous avons à bavarder tous les deux... Monseigneur obéit. Une fois installé et son chien c ouché à ses pieds, il montra ses poignets entravés et dit :
— Bavarder ? Je veux bien... mais ma langue ne se d éliera qu'autant que je serai débarrassé de ces bracelets. La voix était lente et grave, sonore comme l'enclum e et teintée d'un très léger accent faubourien. Mais il semblait que cet accent fût une sorte de coquetterie, une façon que Monseigneur avait de vouloir s'apparenter à ses amis les clochards des berges. — Enlevez-lui ses menottes, autorisa Bellavent en s'adressant au garde. Que risquait-il ? L'homme, passé à la fouille, avait les poches vides. Le garde était armé et il y en avait d'autres, de ces gardes, dans l'antichambre voisine, où Mister Dick, le fameux Mister Dick, comme avait dit le brigadier Cachat, attendait son tour d'être interrogé.
L'enquêteur, résolu à mener rondement les choses, n e perdit plus un instant pour questionner : — Nom, prénoms, âge, lieu de naissance, profession, domicile ? Tu as entendu ? Réponds ! Calme, Monseigneur débita :
— Diabolo, quinze mois, né à Buchenwald...
— Tu te moques de moi ? interrompit le commissaire. — Non ! mais je croyais que ça s'adressait à mon « clebs », rapport au tutoiement... — Pour l'instant, il s'agit de toi, de toi seulement...
— Vas-y, je t'écoute...
— Ah ! ça...
— Dame ! quand on me tutoie, je tutoie. J'ai l'air, comme ça... mais je ne suis pas fier. Tu disais donc ?
— Soit ! grommela le policier. Monsieur veut des égards ? On en aura. Mais souviens-toi... souvenez-vous que vous vous êtes mis dans un bien mauvais cas. Un agent à l'hôpital, grièvement blessé. L'autre noyé, coulé à pic. On n'a pas encore retrouvé son corps.
À dessein, Bellavent dramatisait la vérité. C'était une, méthode. Il espérait « dégonfler » son interlocuteur. Mais celui-ci, ricanant :
— Laissez-moi rigoler ! Je connais ma force, je sais la doser. Le coup de poing n'a pu qu'endommager un nez. Quant à l'autre bonhomme, une fois dans la flotte, je l'ai vu qui commençait à tirer sa brasse. Autrement, je l'aurais repêché moi-même. Et d'abord pourquoi n'étaient-ils pas en uniforme, tous les deux ? Est-ce que je savais à qui j'avais affaire, moi...
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