Qui a tué le bonhomme de neige ?
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Qui a tué le bonhomme de neige ? , livre ebook

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Description

La police reçoit un courrier anonyme lui signalant qu’une personne va être assassinée le soir même, lors d’une soirée chez un peintre réputé.


La missive n’aurait pas été prise au sérieux si elle n’avait rappelé au commissaire Bellavent, une précédente, datant d’un an pile, prédisant la mort d’une jeune effeuilleuse de cabaret. Celle-ci avait été supprimée, comme annoncé.


Pour éviter une autre victime, Bellavent décide de se rendre sur place, accompagné de deux policiers, de Monseigneur et, surtout, de son clebs dont le flair et la célérité pourraient être bien utiles...


Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 5
EAN13 9782373474084
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0007€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Monseigneur et son « clebs » - 5 -
Q UIATL E BONHOM M E DENEIGE ?
De Marcel PRIOLLET
I
Gilbert Fontanys, le célèbre portraitiste — membre de l’Institut, président de plusieurs jurys, commandeur de la Légion d’Honneur — s’attardait à sa toilette quand, après quelques coups frappés à la porte, il reconnut la voix de Gustave, son valet de chambre.
— Qu’est-ce que c’est ?
— Monsieur... il y a là un visiteur...
— À neuf heures du matin ! Bigre ! Quel est cet original ?
Je ne sais trop. Ce monsieur a jugé inutile de me d onner son nom. Il a dit seulement qu’il s’agissait d’une chose urgente et q u’il fallait que Monsieur le reçoive. Je l’ai fait entrer dans l’atelier.
— Quel genre, ce phénomène ?
— Oh ! tout ce qu’il y a de bien. Sans ça...
— Je suis à lui dans cinq minutes.
Le peintre, achevant de s’habiller, s’enveloppa d’u ne robe de chambre en velours ouatiné et consulta un instant son miroir q ui lui réfléchit l’image de l’homme heureux qu’il était.
À soixante ans, Gilbert Fontanys paraissait à peine atteindre le demi-siècle. Grand et élancé, il avait un beau visage tout rasé, sculpté comme une médaille, tout en finesse. Ses cheveux d’argent, loin de le v ieillir, lui conféraient un charme supplémentaire. De très bonne heure, l’artis te avait reçu le baiser de la Renommée, en même temps que celui de la Fortune. Ép ris d’indépendance, il s’était farouchement voué au célibat. Mais il possé dait toute une cour d’admirateurs, de disciples et d’adoratrices qui él oignaient de lui toute impression de solitude. Et, par surcroît, un réel t alent, dont, la consécration ne devait pas plus à l’intrigue qu’à une publicité tap ageuse.
On le savait accueillant. Et c’est peut-être pourqu oi quelque solliciteur, aujourd’hui, s’autorisait à franchir sa porte à une heure qui n’était point celle des visites.
L’homme que Gustave n’avait pas cru devoir évincer attendait donc dans l’atelier. C’était, cet atelier, une immense pièce vitrée sur tout un côté et qui occupait trois étages d’une maison de la rue Campag ne-Première, à Montparnasse. Un escalier intérieur permettait d’ac céder à une galerie qui communiquait elle-même avec l’appartement privé du maître, au quatrième étage de l’immeuble. Tout cela avait été aménagé à grands frais et avec un goût
sûr. Quiconque pénétrait ici pour la première fois était frappé et séduit par la somptuosité des meubles et des tapisseries, par l’h eureux choix des toiles accrochées à la cimaise, par la personnalité, en un mot, qui se dégageait de l’ensemble. Enfin, face au chevalet de travail et p our peu que celui-ci supportât quelque portrait en voie d’achèvement, on était sai si d’une sorte de respect. N’était-ce pas là qu’avaient pris naissance tant de chefs-d’œuvre ? Le dernier en date — un portrait de la comtesse Tracovitz — avait fait beaucoup de bruit.
Le visiteur de ce matin était peut-être très profan e en matière de peinture. Il se désintéressait totalement de ce qui, d’ordinaire , excitait la curiosité et l’admiration des autres. Par contre, c’était la dis position des lieux qui semblait l’intéresser. Il allait d’un recoin à l’autre, soul evait les portières, s’inquiétait de savoir ce qu’on trouvait derrière chaque issue.
Un architecte ? C’était bien possible. Sa serviette de cuir pouvait renfermer des épures, des plans, des devis. Mais en ce cas, p ourquoi eût-il fait mystère de son nom et de sa qualité à Gustave ?
Ce qu’on pouvait affirmer à coup sûr, c’est qu’il n e s’agissait pas d’un de ces pauvres rapins qui venaient souvent faire appel à l a générosité de Gilbert Fontanys et qui ne repartaient jamais les mains vid es... L’allure générale de l’inconnu ne l’apparentait nullement à cette sympat hique faune. Il était habillé avec une réelle élégance. Ses manières étaient corr ectes, voire distinguées. Il avait parlé avec autorité. Et c’est bien ce qui ava it décidé le valet de chambre à lui obéir.
Quand Gilbert Fontanys passa de son appartement sur la galerie qui dominait l’atelier, il aperçut le personnage qui, p oursuivant ses investigations, ouvrait la porte d’un placard où se trouvait la rés erve des liqueurs, apéritifs, champagnes et vins fins que le peintre offrait volo ntiers aux amis qui venaient le visiter. Surpris et égayé, l’artiste se pencha sur la balustrade.
— Vous avez déjà soif, cher monsieur ? Ne vous gêne z pas, je vous en prie ! Je vous recommande mon porto...
L’indiscret, ainsi interpellé, ne témoigna d’aucune confusion. Il referma sans hâte la porte du placard et attendit calmement d’êt re rejoint par celui dont il briguait l’audience. Dès qu’ils furent face à face, il tendit une carte de visite.
Fontanys se prit à lire à mi-voix :
— Bellavent, commissaire à la Police Judiciaire...
Restituant la carte, le patron de Gustave s’exclama :
— Diable ! La police chez moi... Serais-je pour que lque chose dans une affaire de femme coupée en morceaux... ou m’accuse- t-on d’avoir dérobé quelque nouvelle Joconde ?
Le visiteur daigna sourire. Puis il s’exprima avec beaucoup de civilité :
— Je vous prie de bien vouloir m’excuser, maître. J ’espère n’être pas trop importun. En vous attendant, je m’étais mis à la be sogne.
— Quelle besogne ?
— Vous allez comprendre. Je ne vous dérange pas tro p ?
— Nullement !
Le peintre désigna un divan, où le commissaire et l ui-même prirent place. En même temps, la mémoire lui revenait. Bellavent ? Il avait lu ce nom dans les journaux, à propos de crimes plus ou moins sensatio nnels qui avaient appelé le policier à jouer un rôle de premier plan. Il ne dou tait plus d’avoir devant lui une sorte de célébrité. Toutefois, il ironisa encore :
— Évidemment, nous ne travaillons pas dans la même partie. C’est pourquoi je m’étonne...
Il fut interrompu :
— Vous vous étonnerez bien davantage, mon cher maît re, lorsque vous saurez ce qui m’amène vers vous. En quelques mots, voici : un crime sera commis la nuit prochaine et il y a des chances pour que ce crime ait lieu ici même. En tout cas, la victime se comptera au nombre de vos invités. N’est-il pas exact que vous donnez ce soir une grande réception ?
Fontanys se frotta les yeux, comme un homme qui hés ite à croire qu’il est bien réveillé.
— Quelle est cette plaisanterie ? fit-il.
— Si c’était une plaisanterie, je ne me serais pas donné la peine de venir vous mettre au courant. Je n’aurais pas pris non pl us la précaution de laisser votre domestique dans l’ignorance de ma véritable p ersonnalité.
— Viendriez-vous me demander ma complicité ?
— Un peu, oui.
— Je vous écoute...
Le commissaire Bellavent prit sa serviette, qu’il o uvrit sur ses genoux. Il en tira un dossier. Il préambula :
— C’est hier matin, lundi 25 février, que nous avon s reçu, au quai des Orfèvres, la lettre que voici. Elle vous concerne i ndirectement. Et si vous voulez vous donner la peine d’en prendre connaissance...
L’artiste déchiffra :
À M. le Chef de la Brigade Criminelle.
Monsieur,
Je vous fais savoir loyalement que dans la nuit du 26 au 27 février, je rayerai de la liste des mortels l’un des invités de M. Gilbert Fontanys. Faites votre devoir, si vous le pouvez. Je ferai le mien.
Pointant son doigt en direction du papier, Bellaven t observa :
— Et c’est signé :Une conscience.
— Le prototype de la lettre anonyme ! remarqua à so n tour Gilbert Fontanys.
Il avait glissé tout le mépris possible dans ces qu elques mots. Il ajouta :
— Une farce du plus mauvais goût ! Une sinistre bla gue ! Et permettez-moi de vous dire, monsieur le commissaire, que la polic e doit avoir mieux à faire qu’à attacher de l’importance à de pareilles mystifications.
— Telle a été notre première réaction, en effet. Et la lettre a bien failli aller au panier. Mais la mémoire nous est revenue. Nous n ous sommes souvenus...
— Vous vous êtes souvenus ?
— Nous nous sommes souvenus d’une autre lettre, par venue à nos bureaux il y a un an, presque jour pour jour...
— Et que disait-elle, cette autre lettre ?
— La voici. Un hasard a bien voulu qu’elle ait été conservée. Lisez aussi, je vous prie...
Le peintre, dont la curiosité s’éveillait, satisfit au nouveau désir du policier. Lorsqu’il eut achevé sa lecture, il reconnut :
— Évidemment, il y a une troublante similitude entr e les deux lettres. Tout révèle qu’elles sont du même auteur. L’une et l’aut re ont été écrites à la machine. Les mêmes termes y sont employés. Même sig nature :Une consciencela victime. Il. La seule variante réside dans la personnalité de s’agissait alors d’une danseuse...
Penché vers son interlocuteur, le commissaire éprou va le besoin de souligner du doigt le passage capital de l’ancienne lettre. Il détailla :
— ...«dans la nuit du 24 au 25 février, je rayerai de la liste des mortels la danseuse Estrella... »Voilà ce qu’on nous écrivait, il y a un an.
— Et alors ?
— Alors, nous n’avions pas voulu prendre la chose a u sérieux. Des missives de ce genre, nous en recevons dix, vingt par jour ! Elles émanent de plaisantins ou de détraqués. S’il fallait les prendre toutes en considération, nous n’y suffirions pas. Mais trois jours plus tard...
— Trois jours plus tard ?
— Nous apprenions que la malheureuse Estrella avait bel et bien été assassinée, alors qu’elle regagnait son domicile, a près avoir exercé son métier de danseuse nue dans une boîte de nuit à l’enseigne dela Perruche Bleue. Elle avait été frappée de deux coups de couteau dans la région du cœur. Nous nous mîmes en campagne. Trop tard ! L’assassin ne fut ja mais découvert.
— Et le voilà qui recommence, douze mois passés ?
— Je ne vous le fais pas dire, mon cher maître. Mai s vous pensez bien que, cette fois, nous allons prendre nos précautions.
Il y eut un silence. Fontanys, gardant sous les yeu x les deux lettres anonymes, l’une périmée et l’autre toute fraîche, n e dissimulait plus l’intérêt qu’il prêtait aux révélations du commissaire.
Celui-ci n’allait pas tarder à fournir de nouvelles précisions :
— Ces lettres ont été soumises à un expert qui, com me vous à l’instant, en a reconnu la complète identité. Jusqu’aux enveloppe s dont le cachet prouve qu’elles ont été postées au même bureau, avenue d’O rléans. Toutefois, elles ont été dactylographiées sur deux machines différentes, la première de marque américaine, la seconde de fabrication française. Il y a là un détail qui peut avoir son utilité.
— Auriez-vous déjà des soupçons ?
— Aucun. Ce qui importe, c’est d’aller au plus pres sé et de parer le coup.
— Évidemment ! fit Fontanys.
Rêveur, il évoqua :
— Bizarre avertissement ! D’ordinaire, les malfaite urs évitent d’ébruiter leurs intentions et ne prennent surtout pas la police pou r confidente. Voilà donc un gaillard qui pousse le cynisme jusqu’à vous faire p art de ses projets. C’est comme un défi. Il faut qu’il soit fou, fou à lier...
— Fou ? Permettez-moi d’être d’un avis contraire. U n dément n’aurait pas aussi bien réussi à se soustraire aux recherches ap rès le meurtre d’Estrella. Pour moi, il s’agit plutôt d’une sorte de dilettant e du crime. C’est là une espèce particulièrement redoutable. Ces raffinés ont à la fois toutes les audaces et toutes les ruses. Mais l’heure n’est pas aux consid érations générales. Puis-je vous poser quelques questions ?
— Je vous en prie...
— Cette réception ?
— Aura lieu ce soir, ici même. J’ai accoutumé de ré unir ainsi chez moi, deux
ou trois fois l’an, des amis, des relations, des ge ns dont je suis l’obligé ou qui sont les miens. C’est un mélange assez curieux : artistes et bourgeois, bohèmes et gens chics, médiocrités et célébrités...
— Tous connus de vous ?
— Tous !
— Combien avez-vous lancé d’invitations ?
— Cent cinquante environ.
— Vous avez la liste ?
— La voici...
Le commissaire, une fois en possession du papier qu e le peintre était allé prendre dans un sous-main, murmura :
— Ainsi donc, parmi ces noms, figure celui d’un con damné... ou d’une condamnée à mort !
— Qui ?
— Si je le savais, ma tâche serait aisée. Mais n’es t-il pas permis de supposer que le nom de l’assassin figure aussi sur cette liste ?
— Hypothèse à rejeter, monsieur le commissaire. Je me porte garant de tous mes invités. Et d’ailleurs, quelle certitude a vez-vous que le crime aura lieu chez moi ? La lettre ne le dit pas. Et la danseuse Estrella n’a-t-elle pas été frappée dans la rue ?
— C’est juste. Mais il faut tout prévoir. Notre cor respondant ne doit pas être l’ennemi d’un meurtre spectaculaire. Il choisira pe ut-être...
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