La vie sur un fil
121 pages
Français

La vie sur un fil , livre ebook

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121 pages
Français

Description

Ce recueil de nouvelles raconte les drames devenus si ordinaires dans les hôpitaux publics africains, des hôpitaux-entreprises où la qualité des soins, la sécurité des malades et leur dignité sont reléguées au second plan. A travers onze nouvelles, l'auteur met le doigt sur les nombreuses plaies des structures de soins: mauvais accueil, environnement repoussant, pannes fréquentes d'appareils, non-disponibilité de médicaments, erreurs médicales, corruption, mercantilisme...

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Publié par
Date de parution 01 juillet 2013
Nombre de lectures 166
EAN13 9782336321165
Langue Français
Poids de l'ouvrage 8 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Abdoul Kane La vie sur un
Nouvelles de mon hôpital
LA VIE SUR UN FILNouvelles de mon hôpital
ABDOULKANELA VIE SUR UN FILNouvelles de mon hôpital
© L'HARMATTAN-SÉNÉGAL, 2013 « Villa rose », rue de Diourbel, Point E, DAKARhttp://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr senharmattan@gmail.com ISBN : 978-2-336-30428-1 EAN : 9782336304281
PRÉFACE
Une envie pressante d’aller à la rencontre des personnages fascinants qui peuplent et animent les scènes parfois insoutenables que l’auteur de ce recueil de nouvelles vient déposer au pied de la conscience humaine, suffit à nous épargner un plus long exorde.
L’hôpital public figure ici le lieu chaotique où vient s’entasser, sous la force centripète de la maladie et de l’indigence, la misère physique, morale et matérielle d’une société dont les valeurs sont questionnées. Dans cet établissement public de santé, les humains et les bêtes se disputent le titre foncier, du matériel de toute sorte rivalise d’infirmités avec des machines de très mauvais caractère, les soignants s’accrochent à tout, même aux « lianes » dansantes des câbles électriques, tandis que les malades s’agrippent au fil ténu d’un espoir rongé inexorablement par la ruineuse navette public-privé, le chapelet interminable des factures à honorer, l’inévitable rançon aux vertus lubrifiantes sur les rouages de l’administration, sans compter parfois (suprême injure !) la prise en otage.
Dans ce décor de tous les jours et de tous les dangers, un personnage massif et difforme se remarque par ses saillies incandescentes, les insanités et autres semblables qui polluent sa bouche maculée de cola et tourmentent les oreilles et le moral de la cantonade. Cette figure imposante est celle de « la marâtre », femme dominatrice, à la peau et au caractère qui tiennent du tigre. Le redoutable fauve semble lui avoir prêté son instinct de prédateur qu’elle exprime avec une mâle autorité.
Dans un autre service hospitalier, les cohortes de carabins vivent aussi dans la crainte d’une « marâtre » et d’un « savant ». Les jouvencelles du corps paramédical redoutent également le savant, mais leur rapport de force obéit à la loi de l’alternance du jour et de la nuit : soustrait aux regards diurnes, enflammé par la symphonie des perles, la rhétorique des
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ABDOULKANEyeux et les instincts de la chair, le savant éperdu s’agenouille et abdique ses titres et son rang aux mini jupes. Le codon est petit, mais la cellule entière écrit sous sa dictée ! Cependant des chats rôdent, qui savent discerner et décoder derrière le rideau épais des murs, les inaudibles frémissements cataires auxquels la bête a complaisamment prêté le nom de son espèce. Laissons les blouses et les jupes à leur fièvre vespérale et posons notre regard sur une vertu qui connaît souvent le sort d’un vêtement. Neuf, celui-ci est formidable ; on se plait à raconter l’histoire du textile, l’immédiateté de l’attirance scellée par l’éclat des motifs colorés ; on prend le plus grand soin de l’habit: lavage précautionneux, amidonnage digne de la chimie, repassage attentionné et pliage qui tiennent de la haute couture ; puis viennent l’accoutumance, la lassitude du même, l’agacement du toujours, la poubelle du y en a assez ! Telle se présente la « solidarité éprouvée ». Mais faut-il vraiment s’étonner des tournures que prend la mise à l’épreuve ? Quoi de plus naturel, de plus inéluctable que l’usure que le temps inflige aux êtres et aux choses ; et même aux idées ? Rien ne semble pouvoir résister au temps qui passe, qui efface les joies comme les souffrances, érode le courage et finit par dissiper même la peur ; qui dissout les pactes les plus sacrés et délivre des promesses tenues dans l’ivresse d’un moment ; qui disperse les familles et rassemble les ennemis d’hier, corrompt les humeurs et cicatrise les plaies … L’étendue et le temps sont la fille et le fils de l’éternité, qui recèle tous les possibles. Des Aliou, il y en aura sans doute jusqu’à la fin des temps ; des Aliou de haut lignage comme de basse extraction, des vertueux comme des opportunistes. Que dire, à présent, du sympathique binôme, Loulou et Badou ! Un couple de prénoms que l’on verrait bien au frontispice d’une école maternelle. Pourquoi pas ? En plus, Loulou est bien un de ces prénoms « unisexe », et l’équilibre du genre serait respecté. Mais nous sommes ici plongés dans un univers où le refrain de la mort scande la bruyante complainte de “vieux machins ” qui n’obéissent qu’à nos deux héros machinistes. Pourtant, leur science est à la maintenance hospitalière ce que la maternelle est au système éducatif. Il faut faire avec, dira-t-on, en attendant que leurs vieux joujoux rendent leur dernier râle, signant ainsi la
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La vie sur un fil. Nouvelles de monhôpital retraite définitivede ces « ingénieurs » du préscolaire. Définitive ? Peut-être pas ; l’hôpitalcompte tant de reconvertis !Nulbesoindle motla fresque du chaos » ; e m’arrêter sur « exprimesuffisammentlachose!
Commentconcevoir une « analpha-bêtise»agissante quand ilsagitde prodiguerdessoins médicaux, si ce n’est offrir à la grande faucheuseunauxiliaire zélé ? Dans cette scène de la « Sainte mère», le lecteurne manquerapasd’être saisi d’effroi, face à la suprême sanctiond’une méprisequin’a peut être pas dit son dernier mot sur leregistrenécrologiquedel’hôpital. Un acteur insolite. Un chat toutnoir, emmaillotédesasombre qui préfigure le rôle du félidé robe dansle macabrescénarioqui va bientôt s’offrir à notre indignation. Le mystérieuxcomportementde la bête (qui fut adulée comme un dieu sousd’autrescieux et en destemps qui remontent à un lointain brumeux) auraitdûalertersurlimminence d’un homicide. Il a été leseulàprévoir l’irréparable; le seul à savoir! Flairant la mort encejour fatidique,ilenprédit l’arrêt, mais ne sut le dire autrement quedansun miaulementquidéfie toute herméneutique. Dans la tragédie quisejoue sous nosyeuxincrédules, « sainte mère»ne laisse pas de troublerparsondétachementapparemment sans retour vis-à-vis du monde d’ici-bas,ycomprisdelamort. L’au-delà submerge son esprit et son cœur;ilne semble yavoirplace que pour lÉternité. Non, tout le mondenestpas« sainte mère »! Mais serait-elle encore la dévote impassible silechat, parlant notredialecte et cédant à l’indiscrétion, lui avait révélél’erreur fatale quiaemporté à jamais son fils, comme le coup de balaiqui anéantitpourtoujours les preuves matérielles de la mise à mort ?Possible. Certainespersonnes semblent baigner irréversiblement danslamer tranquilledel’ataraxie et de la béatitude.
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