Les voies de la diplomatie.
177 pages
Français

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Les voies de la diplomatie. , livre ebook

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Description

En revisitant ses quarante-trois années de carrière, Charles Crettien, ministre plénipotentiaire, ancien ambassadeur, dénonce l'invraisemblable mépris du chef de l'Etat pour les diplomates français. Il refait son parcours depuis l'Iran du Shah jusqu'à l'Amérique latine des guérillas et de la cocaïne en passant par le Proche-Orient, le Maghreb, l'Afrique, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis,. Il montre ce qu'apportent les agents du Quai d'Orsay en matière d'expansion économique, de sécurité extérieure et de défense, de rayonnement pour notre patrimoine culturel et de dialogue avec l'autre pour servir à la paix dans le monde. Son coup de gueule est un refus de se soumettre au jugement hâtif d'un homme politique qui croit rénover en cassant l'outil de la fonction publique.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2010
Nombre de lectures 206
EAN13 9782296697997
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0650€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES VOIES DE LA DIPLOMATIE

affaires étranges …
Du même auteur
sous le nom de CHARLES DANTANT


La Chaldéenne aux éditions Bruno Leprince 2004

Chemins croisés avec Anne DANTANT aux éditions Bruno Leprince 200


© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-11727-3
EAN : 9782296117273

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Charles CRETTIEN


LES VOIES DE LA DIPLOMATIE

affaires étranges …


L’Harmattan
à Anne, ma femme
merci pour la vie .
I Une lettre… sans réponse
« Si les hommes passent, les nécessités nationales
demeurent. »
Pierre Mendès France
devant l’Assemblée nationale - 5 février 1955

Paris, le 4 septembre 2007
Monsieur Jean-David Levitte
Conseiller diplomatique à la Présidence de la République.

Cher Jean-David,

D’après ce que je peux lire ou entendre, vous occupez une position déterminante auprès de notre nouveau Président de la République. Je vous en félicite et je m’en réjouis car je connais votre carrière, comme vous connaissez la mienne, longue et parfois périlleuse. Je ne doute pas un instant que vous saurez rapidement ramener un peu de discernement et de modération dans les propos que M. Sarkozy tient à l’encontre de notre maison et des fonctionnaires qui y servent. Vous avez certainement lu le livre de Yasmina Reza et vous n’avez pas pu manquer la page 49 dans laquelle elle fait dire au futur président : « Il devient très important de se débarrasser du Quai d’Orsay. L’ambassadeur de France en Russie, le précédent, un couillon. L’ambassadeur à Beyrouth un fameux crétin. J’ai un mépris pour tous ces types, ce sont des lâches. »
Nos chemins se sont croisés bien des fois et si nous avons pu avoir des approches parfois différentes, notamment il y a 20 ans quand j’étais ambassadeur dans les Emirats arabes unis, nous n’avons jamais eu l’un à l’égard de l’autre le sentiment que nous étions, ni vous ni moi, des lâches méritant le mépris présidentiel.
Si tel était le cas et si ce mépris était confirmé j’augurerais mal de notre avenir international qui repose, qu’on le veuille ou non, sur le travail quotidien des diplomates français. Tout le monde n’est pas Charles Maurice de Talleyrand-Périgord, c’est vrai. Tout le monde ne peut pas porter un sac de riz sur les plages de Somalie !
Je vous connais assez pour imaginer que vous saurez faire comprendre au Président de la République que la diplomatie ne gagne rien à se faire au travers des couvertures des hebdomadaires people ou non.
Je sais pouvoir compter sur votre sens du service public pour rectifier les choses. Quels sont les fondements du jugement porté par Nicolas Sarkozy sur notre maison et nos missions ? Va-t-il falloir un jour se débarrasser du Conseil d’Etat, de la Cour des Comptes et de l’Inspection des Finances ?

Toujours cordialement vôtre.


Cette lettre est restée sans réponse, je le regrette mais je regrette davantage encore que le mépris présidentiel pour les agents du Quai d’Orsay se soit confirmé, portant un coup rude à une institution qui a donné par le passé des preuves de son savoir-faire au service de l’Etat. Aujourd’hui on nomme Untel ou Untel pour lui faire plaisir, le récompenser de petits services rendus ou pour le chasser sur des terres lointaines : Martinon, l’imbécile, qui était le porte-parole de la présidence est consul général à Los Angeles, Fabrice Delloye, l’ex-époux d’Ingrid Betancourt est ambassadeur de France au Costa Rica, Ruffin, an excellent écrivain, un bon médecin, ambassadeur au Sénégal, etc.

Alors on m’interroge. A quoi sert un diplomate ? Que fait-il dans son quotidien dont on ne retient trop souvent que la futilité de certaines mondanités ? Comment entre-t-on au ministère des Affaires étrangères ?
Tout le monde sait ce que fait un policier, un médecin hospitalier, un gendarme, un professeur, un pompier, un militaire, un fonctionnaire des impôts… mais personne ne semble savoir ce qu’est réellement ce métier de diplomate dont la discrétion rend l’efficacité peu évidente.

J’ai servi au Quai d’Orsay de 1953 à 1996, quatre décennies de nomadisme au service de la République. Aujourd’hui devant la grossièreté des attaques présidentielles je me sens tenu de dire la vérité d’un travail quotidien, celui que j’ai accompli avec toujours le même intérêt depuis les premières responsabilités du temps de ma jeunesse jusqu’à celles confiées à un ambassadeur. Je ne dois pas gâcher les expériences acquises. Je dois faire passer le message après avoir eu la chance de faire ma route depuis l’Iran de Reza Shah jusqu’à la Colombie de Pablo Escobar en passant par le Proche-Orient à l’époque de Nasser et au cours des premières années du conflit israélo-palestinien, l’Afrique du nord après l’indépendance de l’Algérie, la Grande-Bretagne sous un gouvernement travailliste, les Etats-Unis de Ronald Reagan, les Emirats du golfe Arabo-Persique à la naissance de leur développement, la Somalie déjà sous l’emprise de l’anarchie et des pirates, l’Amérique latine, ses guérilleros et sa cocaïne.
Quarante-trois années au Quai d’Orsay avec six présidents de la République : René Coty, Charles de Gaulle, Georges Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac et combien de ministres des Affaires étrangères ! « Comment avez-vous fait avec des hommes si différents ? », m’a-t-on demandé un jour. La réponse m’avait été donnée par Alain Savary alors qu’il était ministre de l’Education nationale de François Mitterrand : « Mais, Charles, il faut savoir servir ».

Servir, c’est la vocation essentielle de toute la haute fonction publique mais il y a des différences entre les grands corps de l’Etat car seule la diplomatie peut échapper aux jeux dévastateurs des combinazioni qui font la vie politique à l’intérieur du pays, toutes tendances confondues. Pourquoi ? Parce que les diplomates vivent et travaillent à l’étranger et que la distance les conduit à avoir une vision plus glorieuse de la France que celle qui assaille les hauts fonctionnaires métropolitains. Dégagés des luttes partisanes puisque leur vocation est de représenter la France dans son ensemble, de guider les choix du pouvoir exécutif, de travailler au rayonnement économique et culturel du pays, ils ne pèsent pas sur les choix électoraux de l’Hexagone et se doivent de respecter toutes les options des Français de l’étranger.
Alors si Nicolas Sarkozy décide de faire des diplomates les représentants d’un éphémère sarkoland il est en bonne voie pour réussir son vœu de candidat : tuer le Quai d’Orsay.
II 1948. Les études
Comment se prépare-t-on à devenir un diplomate français ? Bien sûr tout le inonde connaît l’École nationale d’administration et l’on s’amuse souvent de ces énarques coulés dans un même moule, formatés par les mêmes normes. Mais qui connaît le concours d’Orient qui attire chaque année au Quai d’Orsay des étudiants qui se sont spécialisés dans les langues d’Asie ou d’extrême-Asie, d’Europe centrale ou du Moyen-Orient et qui ont acquis, en plus du chinois, du japonais, du russe, du serbo-croate, de l’arabe, du persan, de l’ourdou et d’autres nombreux idiomes, la culture et l’histoire de ces régions qui émergent, en ce début du XXI e siècle, dans le dialogue des nations avec une force telle qu’elles deviennent des enjeux essentiels ; des étudiants qui ont aussi une solide culture générale acquise à l’université. J’ai fait partie de ceux-là comme d’ailleurs mon collègue Jean-David Levitte.

En 1948 le centre universitaire méditerranéen à Nice, ma ville de naissance, organise des cours du soir d’arabe. Écolier peut-être déjà curieux d’autres choses que du latin je m’y inscris. Mes parents ne m’ont jamais contrarié dans mes choix, fussent-ils inattendus pour eux et c’est à leur intelligence et à leur affection que je dois d’avoir pu vivre ce que j’ai vécu de par le monde, loin des palmiers de la promenade des Anglais mais souvent autour de cette mer Méditerranée qui, avant d’être polluée comme elle l’est aujourd’hui, sentait encore le large et déposait sur les lèvres un sel d’aventure.
L’enseignant bénévole au centre universitaire était un fonctionnaire français en retraite ayant servi en Tunisie. Certains de ces cadres de l’Administration du protectorat, les contrôleurs civils, avaient compris que le dialogue était la seule vertu pour conduire dans l’harmonie l’é

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