Danseurs contemporains du Burkina Faso
218 pages
Français

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Danseurs contemporains du Burkina Faso , livre ebook

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Description

Un puissant mouvement contemporain de création chorégraphique se développe en Afrique. La compagnie Salia nï Seydou s'y inscrit, parmi les plus remarquées sur le plan international. Cet ouvrage s'attache à cerner la démarche artistique que développent les membres de cette compagnie et met en lumière des éléments d'histoire chorégraphique moderne au Burkina Faso, des voies problématiques de transmission des techniques européennes de danse, des enjeux économiques et géopolitiques...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2006
Nombre de lectures 309
EAN13 9782336280325
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Danseurs contemporains du Burkina Faso
Ecritures, attitudes, circulations de la companie Salia nï Seydou au temps de la mondialisation

Gérard Mayen
Photo de couverture : Marc Coudrais
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
© L’Harmattan, 2006
9782296005754
EAN : 9782296005754
Sommaire
Page de titre Page de Copyright Introduction AVANT-PROPOS MODES D’APPROCHE Première séquence - Et s’ils n’étaient pas noirs ? Un enjeu de regard
ENTRE SAVOIR ET NON SAVOIR EN CROISANT DES GÉANTS BRISÉS EN L’ABSENCE DE CRITIQUES AFRICAINS... ... EST-CE NOUS, LES AFRICAINS ?
Deuxième séquence - La légende de France
TEMPS DIVERS, TEMPS MÊLÉS D’UNE MODERNITÉ CHORÉGRAPHIQUE BURKINABÉ
Troisième séquence - Les espaces de la Cie Salia nï Seydou
INSCRIPTIONS, PROJECTIONS, CIRCULATIONS
Quatrième séquence - Mondialité de la Cie Salia nï Seydou : corporéités, transmissions, inventions
Corporéités Ambiguïté des corps glorieux Féminin, un genre un peu spécial Transmissions, composition Danser ses mondialités Restauration, déplacement Une vertigineuse accélération Une hypothèse postcontemporaine
Épilogue Bibliographie Beaux-Arts à l’Harmattan
Introduction
Depuis le milieu des années 90, l’actualité de la création chorégraphique en Afrique sub-saharienne a été l’objet d’un vif regain d’intérêt de la part des opérateurs culturels européens, tout particulièrement français. La compagnie burkinabé. Salia nï Seydou est l’une des plus fréquemment citées et programmées. Ses fondateurs, Salia Sanou et Seydou Boro, sont devenus incontournables dans nombre d’initiatives ou de structures créées avec l’objectif d’encourager l’essor de ce courant de création à l’échelle du continent.
L’étude qui suit tente de rendre compte du développement de la compagnie Salia ni Seydou depuis sa création (ou plutôt, d’une façon de percevoir celui-ci depuis l’Europe...). Ce développement recouvre celui d’une forme artistique, qu’il conviendra de caractériser et de mettre en perspective. Faut-il recourir à la notion de danse contemporaine à son propos ? Les formes inventées entretiennent-elles surtout un rapport de continuité, ou au contraire de rupture, avec celles qui les ont précédées dans leur contexte ? Du reste, cette question est-elle parfaitement pertinente? Comment ces formes s’inventent-elles ? Dans quelle mesure portent-elles la marque de la mise en relation directe de ces artistes avec leurs homologues, mais aussi avec les publics, médias, programmateurs et diplomates des pays du Nord (français principalement) ? Quelles influences exercent-elles dans leur propre environnement ? Que font-elles bouger ? Quels corps fabriquent-elles ?
Ainsi l’observation de la seule compagnie Salia nï Seydou devra-t-elle s’articuler sur une réflexion embrassant les enjeux culturels de la mondialisation. Dans leur aventure singulière, ses membres évoluent selon un va-et-vient permanent entre Paris, Montpellier et Ouagadougou. Sont-ils en train d’inventer un nouveau type d’artistes aux prises avec les défis de la globalisation ?
Dès lors, la responsabilité de ceux — non africains particulièrement — qui les accompagnent de leur curiosité et de leurs commentaires ne consiste-t-elle pas à ce qu’ils redéfinissent, eux aussi, leur position dans ce contexte très mouvant ? L’enjeu serait alors de commencer de forger une méthodologie critique apte à rendre compte avec pertinence de ces nouvelles formes. Car il semble aussi peu satisfaisant de prétendre apprécier ces formes sans prendre en compte le contexte spécifique qui entoure leur apparition, que d’entendre les remiser sur le rayon d’une africanité supposée à ce point particulière qu’il faudrait tenir ces productions à l’écart d’un débat critique ouvert.
Ainsi introduite, on ne s’étonnera donc pas de ce que cette étude consiste avant tout à faire émerger des questions, à les formuler et commencer de les articuler. Si elle n’a porté que sur la seule compagnie Salia nï Seydou, elle dégage, à travers celle-ci, de vastes horizons de problématisation.
AVANT-PROPOS
« A chaque pas de chaque enquête, une nouvelle porte s’ouvre, qui ressemble le plus souvent à un abîme ou à une fondrière »
Michel Leiris 1
SUR LES ENJEUX

Une révélation contemporaine
Journaliste, responsable des pages spectacles du quotidien régional Midi Libre à Montpellier, m’intéressant particulièrement à la danse, j’ai découvert Salia Sanou et Seydou Boro en 1993, lors de la création de la pièce Pour Antigone , de Mathilde Monnier. Ils faisaient partie des artistes africains auxquels celle-ci avait fait appel pour moitié de sa distribution. Mais c’est seulement deux ans plus tard que ces deux danseurs burkinabé piquèrent ma curiosité à vif. Ils avaient été entre-temps intégrés aux effectifs permanents du Centre chorégraphique national de Montpellier, dont Mathilde Monnier avait pris la direction. Salia Sanou et Seydou Boro se fondaient ainsi dans le paysage familier de la danse contemporaine à Montpellier, et ils créaient alors, parallèlement, leur propre pièce Le siècle des fous 2 .
Celle-ci me toucha, mais avant toute chose, me permit de faire sauter un verrou mental. En effet, dans le contexte de la presse quotidienne régionale où j’évoluais, je subissais la pression d’une sorte de culpabilisation, d’essence populiste, mettant en cause le vif intérêt qui était le mien pour les formes artistiques contemporaines. Dans l’esprit de ma hiérarchie, il était entendu que ces formes sont élitistes, n’intéressent que des cercles restreints des couches moyennes éduquées, en tout cas non lectrices d’un journal tel que Midi Libre ; et qu’il conviendrait donc de porter une grande attention journalistique aux spectacles de variétés du Zénith, prisés des lecteurs, plutôt qu’aux dernières “élucubrations” de la recherche chorégraphique. Dans ce contexte peu favorisant, l’éclairage que je m’obstinais à porter sur ces dernières relevait de l’engagement militant.
C’est de ce complexe que Le siècles des fous contribua à m’affranchir, en me plaçant devant une réalité qui ne m’avait pas effleuré jusque là : cette pièce montrait qu’une expression artistique contemporaine pouvait provenir tout aussi bien de pays éloignés, forgée par des artistes dont le profil est sans rapport avec les cercles restreints des couches moyennes expertes et aisées occidentales. Du coup, il fallait s’entendre sur la définition de ces fameuses expressions contemporaines, si dérangeantes aux yeux des marchands de papier imprimé. Sont-elles finalement autre chose que les formes produites aujourd’hui par des artistes en recherche — certes volontiers au prix de ruptures — dès lors qu’à leurs yeux les formes reçues en héritage, ou transmises par l’académie, ne leur permettent plus de s’exprimer valablement dans leur temps ? Est-ce terriblement plus compliqué que cela ?
Dix ans plus tard, je n’ai peut-être pas beaucoup dévié de cette première intuition — tout en la dépassant considérablement, espéré-je.
L’anthropologue Jean-Loup Amselle alerte ses lecteurs sur l’instrumentalisation qui est faite de l’Afrique, lorsqu’on se retourne vers elle « comme une source de jouvence et de régénération pour l’humanité toute entière » 3 . Ainsi amorçais-je moi aussi le grand détour par le continent noir pour activer mon questionnement sur des problématiques d’intellectuel blanc. Toutefois, cela opérait de manière paradoxale : c’est justement par leur revendication directe d’une légitimité sur la scène des expressions contemporaines, que des artistes africains attiraient mon attention. Et non par le supposé caractère plus authentique, spontané, proche du corps et des émotions, « thématique qu’on peut globalement subsumer sous la notion de primitivisme », généralement rattaché par les imaginaires blancs aux productions artistiques noires — ô combien particulièrement la danse — dans le rapport de « délicieuse frayeur » que Jean-Loup Amselle met à jour.
Tout à l’inverse dans le cas qui nous intéresse, africain rime avec contemporain. En soulignant l’originalité de mon intuition d

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