L eau et la pensée grecque
217 pages
Français

L'eau et la pensée grecque , livre ebook

-

217 pages
Français

Description

L'eau matière et substance de vie, se révèle une et multiple. Ses étonnantes métamorphoses nous racontent une histoire infinie. Cet essai tente de découvrir le rôle du premier des liquides dans la quête du sens et l'éclaircie du réel. Religion et poésie dessinent les paysages du monde grec antique et tracent la carte du sacré. L'auteur nous invite à découvrir trois états de la pensée de l'eau en Grèce ancienne et montre comment l'eau, dans ses multiples visages nourrit et féconde la double dimension du rêve et de la pensée.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 avril 2010
Nombre de lectures 301
EAN13 9782296249325
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

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Thierry Houlle

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© L’Harmattan, 2010
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-11219-3
EAN : 9782296112193

A Françoise
et à nos enfants, Alexis et Charlotte

« Pour commencer, chantons les MusesHéliconiennes, reines de l’Hélicon, la
grande etdivine montagne. Souvent, autour de la source auxeauxsombres et
de l’autel du très puissantfils de Cronos, elles dansentde leurs pieds délicats.
(…)
Ce sontelles qui à Hésiodeun jour apprirent un beauchant, alors qu’ils
paissaientses agneauxaupied de l’Hélicon divin. (…)
Etbienheureuxcelui que chérissentles Mude ses lèses :vres coulentdes
accents suaves »
(Hésiode,Théogonie, 1-5,20-21, 96-97)

Puisqu’il estici question en ce commencementde l’influence des Muses et
des sources, jeveuxrendre hommage à deuxhistoriens qui ontpourune part
inspiré cevoyage dans laGrèce antique, Jean-Pierre Vernant et Pierre
VidalNaquet ;j’ajouteraiun hommagetoutà faitparticulier à l’intention deClaude
Mettra, cet homme singulier, savant, rêveur et défricheur, homme de la terre et
de l’eau, marchant au cœur des paysages, dont la voix poétisante a nourri ces
pages.

Je remercie enfin les lectrices et les lecteurs qui m’ont gracieusement et
chaleureusement soutenu pour mener à bien l’achèvement de ce livre.

Illustration de couverture. Jean-Auguste-DominiqueINGRES, La Source (164x82),
Paris, Musée d’Orsay.
Crédit photo :© RMN (Musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski

INTRODUCTION

L’eau, matière etélémentnaturel, multiple dans ses formes, l’estaussi
dans sesvariétés qui recouvrentlestrois états de la matière. L’eauest
l’élémentdes métamorphoses. L’empreintevariable des eauxsur le paysage
naturel estclairementdéterminante, qu’il s’agisse des mers oudes fleuves, des
prairies oudes forêts. L’eauest une composante essentielle des climats et un
élémentphysique souventdominantdansunterritoire,tantpar ses formes que
par ses mouvements quitransfigurentles matières. Sa présence conditionne la
vie, l’abondance du végétal etle foisonnementde l’animal, ce que les anciens
avaientnaturellementobservé. L’air estl’élémentle plus proche de l’eauavec
laquelle il entretientdes rapports physiques étroits, il joueun rôle essentiel
dans le climat, façonne lui aussi dans ses mouvements les paysages etparticipe
aumaintien de lavie, mais sa nature estmoins nettementperceptible, si ce
n’estdans sa mobilité, etmoins ordonnable auxbesoins des hommes. Lieude
vie, l’eaua dessiné le paysage social etculturel des hommes qui l’ontà leur
tourtransformé, adaptantl’eauà leurs besoins. Sauvage
oudomestiquée,terrestre oumarine, elle atracé des lignes etdes chemins dans l’espace quotidien
desusages etdes pratiques, etson écoulementa compté letemps des hommes
etdu travail. Dans la conscience religieuse, l’eaupure etlustrale atracé dans
les rites etles prièresun cheminvers les dieux ;etles récits cosmogoniques
ontraconté commentles Eauxoriginelles ontbaigné les paysages de leur
puissance génératrice. La matière mouvante etinformelle a ainsi imprégné de son
mystère l’imaginaire etla pensée des premiers peuples qui l’ontsacralisée;
climats etpaysages ne sauraientêtrevraimentcompris hors des significations
religieuses propres à chacune des cultures anciennes. Ainsi les phénomènes
naturels sontautantde signes à déchiffrer etl’eauapparaîten bonne place au
catalogue des merveilles. Cette relation étroite entre l’être humain etl’eau

10

L’EAU ET LA PENSEE GRECQUE

définit une expérience singulière, oùse mêlentfascination etrespect,
etconstitue les couches les plus anciennes etles plus profondes de la pensée. Nous
gardons le souvenir de ces anciennes divinités, issues dumonde gréco-romain,
qui ontimprégné la culture de l’Occident. Nous restons attachés,
souventinconsciemment, à d’anciennesvalorisations qui hantentl’imaginaire. Dansune
multiplicité et unevariété étonnante de croyances, l’eaureligieuse se maintient
etse renouvelle àtravers les siècles. Mais si les formes changent, ce
sontsou1
ventles symboles originels qui continuentà s’exprimer . Inutile de souligner
les enjeuxconsidérables qui naissentde cette dépendancevitale des sociétés
humaines etqui fontde l’eau un composantcosmique et un élémentpremier
2
de la biosphère . Nousverrons que le monde méditerranéen, en raison de ses
conditions climatiques, devaitêtre particulièrementsensible à lavaleur de
l’eau.
Nous ne proposons pas dans le cadre de cette étudeune nouvelle histoire
de l’eau, c’est-à-direune histoire des rapports générauxentre l’eauetles
3
hommes, àtravers les âges , ni une histoire destechniques hydrauliques, bien
4
que nous en abordions certains aspects . Nous nous sommes demandé, aupoint
d’émergence de la philosophie, ce que furentles croyances dumonde grec
antique, quels sentiments étaientattachés auxmanifestations de l’eau ;puis,
quelstypes de liens avaientpuse former entre l’eauetles savoirs
scientifiques, entre l’eauetla philosophie. L’eauest un souci commun parmi les
humains etelle conditionne, sous des formes diverses, l’expérience religieuse,
5
les pratiques etle savoir . Les croyances archaïques de la Grèce, sans jamais
disparaître, laisserontplace à de nouvelles spéculations;c’estalors que l’eau,
perçue etsurtoutpensée comme «naturelle »,mobilise de multiples
recherches. Dans les enquêtes sur la nature, la pensée présocratique amorceun
questionnementetouvre le champ de lathéorisation. De là, notre projetde
comprendre commentl’eau, posée commeun problème défini oucommeun
ensemble de problèmes, participe à l’évolution des «théories »;comment
l’eaupeutreprésenterun principe ou un modèle d’explication duréel. En
interrogeantsa nature, ses formes etses mouvements, les physiologues grecs ont
tenté, non sans succès, de lui arracherune partde son mystère. La physique de
l’eau, l’étude des météores etducycle de l’eaus’inscrirontdans le devenir des
sciences, mais les résultats réels dans ce domaine nécessiterontde nombreux

1. P. ThuLes millier, «ythes de l’eau», inLa Recherche,n°221, spécial L’eau, mai
1990, 537-547.
2. Michel Lamy,L’eau de la nature et des hommes,2e partie : L’eaudevie, 1995.
3. Pourunetelle approche, nous renvoyons en particulier àHervé Maneglier,Histoire
de l’eau. Du mythe à la pollution, 1991.
4. Pourune histoire de l’hydraulique dans l’Antiquité, nous renvoyons à Marcel
Nordon,L’eau conquise. Les origines et le monde antique,1991.
5. Pourunevaste synthèse,voirLe grand livre de l’eau, 1995.

INTRODUCTION

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1
siècles. Aujourd’hui, l’eau estencoreun objetcomplexe pour les savants , et
ses mouvements sontchaque jour l’objetd’une multitude de mesures et
d’observations. Le géographe Elisée Reclus écrivaitdansun beau texte à la
fois poétique etscientifique : « l’histoire d’un ruisseau, même de celui qui naît
2
etse perd dans la mousse, estl’histoire de l’infini» . Il estcertain que, dans
ces multiplestransformations, l’eauouvre les champs divers de l’hydraulique,
3
de la climatologie etde la météorologie , de la biologie etde la médecine, ou
encore de la géographie etde la géologie. Elle a entraîné parfois quelques
spéculations hasardeuses. L’œuvre de Platon, entre poésie etscience, offre
pour sa partl’intérêtde se situer enun pointde confluence qui rassemble des
croyances, encorevivantes, etdes savoirs nouveaux. Dans le registre
symbolique etpoétique, lestextes de Platon sontnourris de multiplestraditions qu’il
exploite augré de ses recherches. S’ilutilise largementl’imaginaire de l’eau,
les réalités mythiques, ilymêle aussi des spéculations physiques
etscientifiques. Nous avons doncvouluinterroger comments’estconstituéeune pensée
de l’eau, en faisant valoir les continuités, les ruptures etles innovations.

1. L’eau religieuse

Quels sontle sens etlavaleur dusymbole de l’eaudans la pensée des
Grecs anciens ? L’eau, dans sa dimension physique etdans sesvalences
symboliques, està la foisune etmultiple. Germe de lavie sociale, les eauxontfait
naîtreune multitude d’images, de rites etde dieux. Dans l’Antiquité, le bassin
méditerranéen etle monde des Grecs sontanimés par les figures multiples de
l’eau, notre étude se propose de retrouv

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