Armand Carrel (1800-1836)
310 pages
Français

Armand Carrel (1800-1836) , livre ebook

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310 pages
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Description

Admirateur des généraux de la Révolution et de l'Empire, comploteur carbonaro contre les Bourbons de la Restauration, combattant aux côtés des libéraux en Espagne, secrétaire de l'historien Augustin Thierry, puis journaliste et fondateur avec Thiers et Mignet du National, A. Carrel est à placer parmi les grands défenseurs de la liberté de la presse, à côté de ses deux grands aînés Benjamin Constant et Chateaubriand.

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Publié par
Date de parution 01 mai 2011
Nombre de lectures 182
EAN13 9782296462359
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

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Extrait

ARMAND CARREL (1800-1836)
© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’École-polytechnique ; 75005 Paris http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-296-55048-3 EAN : 9782296550483
Gérard MINART
ARMANDCARREL (1800-1836)
L’homme d’honneur de la liberté de la presse
Du même auteur : Pierre DAUNOU, l’anti-Robespierre, éditions Privat, 2001. Les Opposants à Napoléon, éditions Privat, 2003. Frédéric BASTIAT, le croisé du libre-échange, L’Harmattan, 2004. Jean-Baptiste SAY, maître et pédagogue de l’École française d’économiepolitique libérale, éditions Charles Coquelin, 2005. Clemenceau journaliste, L’Harmattan, 2005. Actualité de Jacques RUEFF, le plan de redressement de 1958, une réussite du libéralismeappliqué, éditions Charles Coquelin, 2007. Collaboration àHistoire du libéralisme en Europe (sous la direction de Philippe Nemo et Jean Petitot), chapitre sur Daunou, Presses Universitaires de France, 2006.
PRÉFACE
Armand Carrel est l’un des quarante-quatre journalistes qui se trouvent à l’origine de la Révolution de 1830. En s’opposant à plusieurs ordonnances royales dont l’une suspend la liberté de la presse, en alertant l’opinion contre cette atteinte à la Charte de 1814 qui garantit une telle liberté, ils allument la mèche qui va faire sauter le trône de Charles X. Avec eux, les journaux font une entrée éclatante sur la grande scène de l’Histoire. Après avoir renversé un roi, la presse devientLe Quatrième Pouvoir.De toutes les révolutions qui ont marqué le cours tumultueux de notre vie politique, celle de juillet 1830 est la plus singulière. Le premier jour, peu nombreux sont ceux qui, parmi les quarante-quatre protestataires, croient à l’hypothèse d’une insurrection. Au départ, ce n’est donc qu’une sorte de résistance, forte mais passive, de journalistes soutenus par la plupart des typographes qui craignent de perdre leur emploi. Très vite, cette résistance se transforme en rébellion. Au troisième jour, ce sera une insurrection victorieuse du peuple de la capitale encadré par un groupe de républicains à qui les élèves de Polytechnique apportent leur savoir-faire d’ingénieurs pour l’édification des barricades. Une révolution typiquement parisienne : brève, vive, surgissant dans quelques quartiers sensibles pour mieux frapper le pouvoir au cœur, et qui met toutes les chances de son côté en exploitant les hésitations, les maladresses, voire les défections des troupes chargées du maintien de l’ordre. Une révolution sans véritable chef, guidée par le seul instinct des insurgés et vérifiant cette constatation de Tocqueville : « Ce sont les gamins de Paris qui, d’ordinaire, engagent les insurrections et ils le font en général 1 allégrement, comme des écoliers qui vont en vacances. » Bref, une ruade du peuple, selon le mot de Victor Hugo. « Charles X, note-t-il, croit que la révolution qui l’a renversé est une conspiration creusée, minée, chauffée de longue main. Erreur ! C’est tout simplement une ruade 2 du peuple. » Même jugement chez Béranger : « En dépit de tout ce qui a été dit et écrit par les légitimistes, aucun complot, aucune affiliation secrète n’a présidé à la généreuse insurrection
1 Alexis de Tocqueville, Souvenirs, Paris, 1999, Gallimard Folio/histoire, p.40. 2 Victor Hugo,Choses Vues, Paris, Gallimard/folio, 1972, p.109.
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qui renversa la branche aînée des Bourbons : j’ai vu même des gens bien 3 surpris que la victoire ait été obtenue sans eux. » Si la révolution de 1789, qui avait duré dix ans, avait été une éruption volcanique suivie de multiples répliques, celle de 1830, qui s’accomplit en trois journées –Les Trois Glorieuses, selon les historiens - est une foudroyante tornade. En quelques heures, elle déracine Charles X, sa famille, ses ministres, son armée, ses ultras, ses courtisans. C’en est fini, et définitivement, de la branche aînée des Bourbons, du drapeau blanc, de l’alliance du Trône et de l’Autel, des tentatives de retour à une monarchie absolue. Ce qui amène l’austère Guizot à juger l’événement avec un enthousiasme juvénile : « Pour moi, écrira-t-il, j’ai assisté, jour par jour, heure par heure, à la plus pure, à la plus sage, à la plus douce, à la plus courte de ces secousses 4 redoutables. » Au centre de cette tornade – et la déclenchant – quarante-quatre journalistes. Au cœur de ce groupe : trois amis. Parmi eux, un homme jeune – trente ans – svelte, énergique, libéral. Il est Normand. Il est né à Rouen, ville du grand Corneille. Il est fier comme le Cid. Il s’appelle Armand Carrel. Avant d’être dans la presse, il a été dans l’armée. Il y a conspiré pour la liberté au sein d’une société secrète puis a démissionné et s’en est allé en Espagne combattre avec les libéraux de ce pays. Au passage, il s’est battu contre les troupes françaises venues dans la péninsule ibérique rétablir la royauté. Fait prisonnier, il a été incarcéré, jugé, condamné à mort par les tribunaux de Louis XVIII, puis finalement acquitté. Ses deux amis se nomment Adolphe Thiers et François-Auguste Mignet. En janvier 1830, tous trois ont fondé un journal,Le National, qui brille de tous les feux du talent et de la liberté. Ce faisant, ils ont renforcé une opposition que Charles X et ses ministres veulent bâillonner. D’où l’explosion. Dans la vie d’Armand Carrel, les journées de Juillet constituent un tournant capital. Au cours des mois qui suivent, l’amitié qui unissait les fondateurs duNationalbrise irrémédiablement. Thiers et Mignet se se rallient à Louis-Philippe alors que Carrel durcit son opposition et, de libéral, devient républicain. Avant de mourir, à trente-six ans, d’une balle dans le ventre lors d’un duel absurde et tragique avec un autre journaliste, Emile de Girardin. 3  Cité par Maurice Block,Dictionnaire général de la politique, Paris, 1884, Emile Perrin, tome second, p.956. 4 Guizot,De la démocratie en France, Paris, 1849, Victor Masson, p.23.
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Que reste-t-il aujourd’hui d’Armand Carrel ? Déjà, quelques années après sa mort, son ami Chateaubriand posait la 5 même question : « Carrel, qui se souvient de vous ? qui pense à vous ? » Question toujours d’actualité. Qui, de nos jours, se rappelle qu’Armand Carrel fut l’un des grands journalistes de la fin de la Restauration et du début de la Monarchie de Juillet, l’un des chefs des libéraux avant de l’être des républicains, et, surtout, l’un des grands défenseurs de la liberté de la presse à côté des Benjamin Constant, des Chateaubriand, des Royer-Collard ? Des trois fondateurs duNational,des trois figures de proue du jeune libéralisme de l’époque, Thiers aura une carrière politique longue et tourmentée. Mort à l’âge de quatre-vingts ans, il obtiendra du peuple de Paris des funérailles en forme d’apothéose six ans après avoir « bombardé, mitraillé, saigné à blanc » - les mots sont de Gambetta – ce même peuple 6 lors de la Commune de 1871. Mignet sera l’un des hommes les plus illustres de la Monarchie de juillet et l’un des historiens les plus renommés de son temps. Il finira à l’Académie française et mourra à quatre-vingt-huit ans. Quant à Armand Carrel, il restera fidèle aux aspirations de sa jeunesse. Demeuré seul à la tête duNationalil poursuivra en journaliste son combat quotidien pour les libertés et, entre autres, pour la liberté de la presse. Jusqu’à ce jour fatal du duel avec Girardin. Né en 1800, Armand Carrel appartient à la même génération qu’Hugo, Balzac, Dumas, Vigny, Michelet, Sainte-Beuve, pour ne citer que les principaux. C’est la génération de ceux que l’on appellera « Les Enfants du Siècle ». C’est la génération romantique qui atteindra l’âge d’homme entre 1820 et 1825, époque où la France vit sous le régime d’une Charte relativement libérale « octroyée » par Louis XVIII à son retour sur le trône. Cette liberté qui explose dans toutes les directions après avoir été réprimée par les dictatures jacobine et napoléonienne, cette liberté nouvelle et précieuse, la génération de 1820 entend y mordre à pleines dents. Ces jeunes gens ardents, cultivés, libéraux, tapageurs ont trois références et une ambition. Les références, ce sont les révolutions anglaise, américaine et française. Anglaise surtout L’ambition, c’est l’agrandissement constant du champ des libertés qui a été entrouvert par la Charte. Et, en premier lieu, de cette liberté de penser,
5 Chateaubriand,Mémoires d’outre-tombe, Paris, 1973, Le Livre de Poche, tome 3, p.682. 6 Cité par Lucas-Dubreton dans :Monsieur Thiers, Paris, 1948, Fayard, p.398.
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de parler, d’écrire, à leurs yeux la plus sacrée de toutes mais aussi la plus constamment menacée car la liberté de la presse est le fortin avancé de toute Société de Droit. C’est elle qui couvre et protège les autres libertés. Voilà pourquoi la première démarche de tout pouvoir à tendance autoritaire sera d’abord et avant tout de réduire ou d’abattre ce fortin. Sous la Restauration, c’est la possibilité d’interpréter la Charte de différentes façons qui va offrir aux gouvernements autoritaires des occasions de censure ou de répression. En effet, la Charte du 4 juin 1814, dans son article 8 qui proclame la liberté des opinions, contient de profondes lacunes et plusieurs graves ambiguïtés. « Les Français, déclare cet article, ont le droit de publier et de faire imprimer leurs opinions, en se conformant aux lois qui doivent réprimer les 7 abus de cette liberté. » En omettant de préciser les contours de ce qu’elle nomme « abus », la Charte renvoie cette définition à la loi, autrement dit au bon plaisir des gouvernements successifs. De surcroît, la Charte observe un silence préoccupant sur deux mesures préventives – l’autorisation préalable et la censure – qui avaient été expressément interdites dans la Constitution de 1791, référence, modèle et bible pour les libéraux en matière de liberté d’opinion. En effet, la Constitution de 1791 garantissait, comme droit naturel et civil, « la liberté à tout homme de parler, d’écrire, d’imprimer et publier ses pensées, sans que les écrits puissent être soumis à aucune censure ni 8 inspection avant leur publication ». Les Constituants de 1791 n’ignoraient pas la responsabilité pénale de la presse mais ils avaient formellement exclu que l’on appliquât à cette liberté des dispositions préventives, donc restrictives, pour n’accepter que des sanctions répressives après constatation des abus, lesquels, d’ailleurs, étaient précisément énumérés dans le texte même de la Loi suprême. Mirabeau avait résumé d’une phrase frappante l’ensemble du débat quand il avait déclaré dans la discussion préalable : « C’est à tort que tous les projets portent le motrestreindre: le mot propre estréprimer. La liberté de la presse ne doit pas êtrerestreinte; les délits commis par la voie de la 9 presse doivent êtreréprimés. » 7 Les Constitutions de la France depuis 1789, présentation de Jacques Godechot, Paris, 1970, GF-Flammarion, p.219. 8  Ibid., p.36. Sur l’importance de la Constitution de 1791 en matière de liberté de la presse, voir aussi le chapitre de Fernand Terrou intituléLes principes fondamentaux dela doctrine libérale, dansHistoire générale de la presse française, sous la direction de Claude Bellanger, Jacques Godechot, Pierre Guiral et Fernand Terrou, Paris, 1969, PUF, tome 2, p.3. 9  Eugène Hatin,Histoire politique et littéraire de la presse en France, Paris, 1861, Poulet-Malassis et de Broise, tome 8, p.43.
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