L UTILISATION DE LA GUERRE DANS LA CONSTRUCTION DES SYSTÈMES POLITIQUES EN SERBIE ET EN CROATIE, 1989-1995
351 pages
Français

L'UTILISATION DE LA GUERRE DANS LA CONSTRUCTION DES SYSTÈMES POLITIQUES EN SERBIE ET EN CROATIE, 1989-1995 , livre ebook

-

351 pages
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Description

Le présent ouvrage expose et analyse l’utilisation politique de la guerre comme outil de consolidation du pouvoir chez les présidents serbe et croate. Pourtant leur maintien entre 1990 et 1995 n’est pas seulement le fait de l’exploitation de la guerre, il est aussi le résultat des votes successifs des électeurs. De quelle manière les régimes politiques de Serbie et de Croatie peuvent-ils par conséquent être définis ? Loin d’être un phénomène uniquement politique, « l’autoritarisme nationaliste » est distillé par le haut et s’auto-alimente aussi grâce à l’interaction qui se crée entre les masses et leurs élites.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2002
Nombre de lectures 165
EAN13 9782296301092
Langue Français
Poids de l'ouvrage 11 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Diane MASSON
L'utilisation de la guerre dans la
construction des systèmes
politiques en Serbie et en Croatie
1989-1995Collection Logiques Politiques
dirigée par Pierre Muller
Dernières parutions
Emmanuel NEGRIER (dir.), Patrimoine culturel et décentralisation: une
étude en Languedoc-Roussillon, 2002.
Laure DELCOUR, La politique de l'Union européenne en Russie
(19902000), 2002.
Simon HUG et Pascal SCIARINI (dir.), Changements de valeurs et
nouveaux clivages politiques en Suisse, 2002.
Laurence EBERHARD HARRIBEY , l'Europe et lajeunesse, 2002.
Elise FERON et Michel HASTINGS (dir.), L'imaginaire des conflits
communautaires, 2002.
Catherine PRUDHOMME-LEBLANC, Un ministère français face à
l'Europe, 2002.
Hélène REIGNER, Les DDE et le politique. Quelle co-administration des
territoires?, 2002.
Stéphanie MOREL, Ecole, territoires et identités, 2002.
Virginie MARTIN, Toulon sous le Front National: entretiens
nondirectifs, 2002.
Eric AGRIKOLIANSKY, La Liguefrançaise des droits de l'homme et du
citoyen depuis 1945, 2002.
Olivier FAVRY, L'ami public américain: les nouvelles relations
industrie-Etat aux Etats-Unis de 1979-1991, 2002.
François CONSTANTIN, Les biens publics mondiaux, 2002.
Jean-Louis MARIE, Philippe DUJARDIN et Richard BALME (sous la
direction de), L'ordinaire, 2002.L'Harmattan L'Harmattan L'Harmattan
Hongrie Italia5-7, rue de
l'ÉcolePolytechnique Hargita u. 3 Via Bava, 37
1026 Budapest 10214 Torino75005 Paris
HONGRIE ITALIEFRANCEcgL'Harmattan, 2002
ISBN: 2-7475-3154-6«Il m'a regardé avec une émotion extraordinaire, un éclat
sombre dans les yeux, et m'a serré le bras avec force.
- Je vais vous dire le tragique de l'histoire. Autrefois, j'étais
avocat. L'autre jour, le colonel m'a consulté sur un banal point
de droit et} 'avais tout oublié. En ce moment, je vous parle de
mon parti et je découvre de nouveau que tout cela est vague...
nébuleux. Vous avez bien remarqué comme c'était obscur et
général, n' est-ce-pas ? Oui: j'ai oublié mes arguments et}' ai
perdu mafoi.
Cela fait quatre ans maintenant que je me bats dans l'armée
serbe. Au début, je ne pouvais pas le supporter, je voulais
arrêter, j'étais hanté par ce que tout cela avait d'irrationnel.
Aujourd'hui, c'est mon travail, ma vie. Tous les matins, je me
réveille en pensant à mes canons; la nuit, je fais des rondes
pour inspecter chaque homme de la batterie: veiller à ce
qu'Untel accomplisse son tour de garde en prenant toutes les
précautions, remplacer aux attelages les chevaux fourbus par
des frais, voir ce qu'il faut faire pour corriger le défaut de visée
de la pièce numéro trois. Cela et ma nourriture, mon lit, mon
soleil: c'est toute ma vie. Lorsque je vais en permission chez
moi pour voir ma femme et mes enfants, leur existence me
semble si insipide, si loin de la réalité... très vite, je m'ennuie,
et j'attends le moment de revenir ici, retrouver mes amis, mon
travail, mes canons... C'est horrible.
Il s'est tu, et nous avons poursuivi notre marche en silence.
Une cigogne est passée en volant bas et s'est abattue sur le toit
de la maison où elle avait son nid. Très loin, du côté de la
rivière, est monté soudain, sans que l'on sache pourquoi, le
bruit d'une rafale de coups de feu qui s'est éteint dans le
silence épais».
John Reed, La guerre dans les Balkans (1916).
«Nous allâmes nous recueillir sur sa tombe [Ante Starcevié]
qui était recouverte de neige, pendant que Gregorij evié, penché
tel un saule pleureur sur les grilles qui la clôturaient, nous
raconta comment Starcevié, qui avait fondé le Parti du Droit,
qui défait à la fois l'Autriche et la Hongrie et qui tentait de
restituer à la Croatie l'indépendance qui avait été la sienne il y
a huit siècles. «La devise de Starcevié était « La Croatie n'a
besoin que de Dieu et des Croates », dit Gregorijevié. Pendant
trente ans, tandis que le charme, la richesse et la cruauté
triomphante de la Hongrie du XIXème siècle auraient pu nous
inciter, nous autres jeunes Croates, à oublier notre pays, il nousfit comprendre que si nous oubliions la tradition de notre race,
nous perdrions notre âme aussi sûrement que si nous
commettions un péché mortel ». (...) Enfant, on m'a emmené
voir Starcevié, reprit Gregorijevié, d'une voix tendue comme
s'il avait été un prédicateur gallois. A tous il nous communiait
sa force ». Constantin jeta d'un air narquois: «Sa mère était
serbe». « Mais elle s'est convertie au moment de son mariage
à la vraie foi », rectifia Gregorijevié en fronçant les sourcils ».
Rebecca West, Agneau noir etfaucon gris (1941).Prononciation du serbo-croate
e ex : Smederevo=é - Smédérévo
ex : Dubrovnik - Doubrovniku =ou
c ex : Karlovac - Karlovats= ts
ex : Cacakc = tch -
Tchatchak-é ex : Peé - Pétch= tch
=y ex : Valjevo - ValJ!.évoJ
ex : Sabac - ChabatsS =ch
ex : Rozaje - Rojayéz =J
d ex : Dakovica -lliakovica= dj
g =g ex : Trogir = Trogyjr
s =s ex : Osijek = Ossiyek
(entre deux consonnes)r
ex : Drvar = Deurvar= eurA monpère.Introduction
Depuis 1990, l'espace yougoslave a fait l'objet d'une
multiplication d'ouvrages et d'analyses diverses, toutes disciplines
confondues. Pourquoi alors avoir choisi de s'aventurer sur un tel
terrain d'étude? En 1993, deux des républiques issues de la nouvelle
configuration yougoslave étaient en règle générale présentées de la
manière suivante: une Serbie au régimel autoritaire, voire totalitaire
ou fasciste2, et une Croatie à la démocratisation rendue problématique
par la guerre3. Qui ne se souvient pas de la campagne de Médecins
sans frontières associant Slobodan Milosevié à Adolf Hitler, ou
encore demandant aux Serbes d'arrêter leurs massacres? Le régime
croate bénéficiait pour sa part, d'une sorte de caution internationale.
L'agression initiale des troupes de l'Armée populaire yougoslave
(JNA) en juin 1991 faisait en effet de lui une victime dont il fallait
prendre la défense, et dont on masquait les dérapages autoritaires, en
les imputant à l'état de guerre. Par ailleurs, le droit des peuples à
l'autodétermination avait triomphé avec la reconnaissance de la
Slovénie et de la Croatie par l'Allemagne en décembre 1991, puis par
la CEE en janvier 1992. C'est seulement lorsque les autorités croates,
avec le président Franjo Tudman à leur tête, ont commencé à montrer
des aspirations territoriales grandissantes sur la Bosnie-Herzégovine
que les premières voix se sont élevées pour critiquer le bellicisme du
régime de Zagreb. On découvrait alors soudainement les pratiques peu
démocratiques en vigueur dans ce pays. Le changement de discours
1
Nous distinguerons dans ce travailla notion de « régime politique» et celle
de «système politique », le plus souvent confondues de manière abusive:
« La notion de régime politique sert à rendre compte de la spécifique
dont sont organisés les pouvoirs publics, c'est-à-dire leur mode de
désignation, leurs compétences respectives et les règles juridiques et
politiques qui gouvernent leurs rapports. Cette notion doit être distinguée du
concept, plus large, de système politique qui inclut non seulement
l'organisation constitutionnelle des gouvernants mais aussi d'autres acteurs et
d'autres processus tels que, par exemple, le régime des partis, les libertés
publiques et les médias, les mécanismes de socialisation politique des
citoyens ». Guy Hermet, Bertand Badie et al. Dictionnaire de la science
politique et des institutions politiques. Paris: Armand Colin, 2000, 287 p. Sur
le concept de système politique, voir: Jean-Louis Vullierme. Le concept de
système politique. Paris: Presses Universitaires de France, 1989, 576 p.
2Notamment Jacques Julliard. Ce fascisme qui vient. Paris: Seuil, 1994,
201 p.
3Voir Marc Gjidara. «Pour les Croates ». Krisis, avril 1993 (13-14), pp.
131154.du philosophe Alain Finkielkraut, auteur entre autres de Comment
peut-on être croate?, en est un exemple édifiant4.
Notre intention n'était pas de mettre ces régimes dos à dos,
de mesurer leurs responsabilités respectives ou encore de désigner les
« bons» et les «mauvais», mais d'étudier, à partir de la matrice

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