Haïti, d un coup d état à l autre
216 pages
Français

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Haïti, d'un coup d'état à l'autre , livre ebook

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Description

29 février 2004: exil forcé du président Aristide hors du pays où il avait été légalement élu trois ans auparavant, participation à ce coup d'Etat de la France et des Etats-Unis, massacre contre la population haïtienne restée fidèle à la démocratie. Fallait-il subir sans rien faire les informations médiatiques tronquées, détournées, mensongères, les accusations lancées à la volée et jamais prouvées qui ont alors déferlé sur la France ? L'auteur a vécu quelques années en Haïti et a voulu ce livre comme témoignage.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2006
Nombre de lectures 176
EAN13 9782336251035
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Haïti, d'un coup d'état à l'autre

Mireille Nicolas
Du même auteur
Jistis, murs peints d’Haïti , Editions Alternatives, Paris 1994
Arioi (Sous le pseudonyme maohi de Vairaumati No Rai’atea), Editions Au Vent des Iles, Tahiti 2000
Le plus long voyage , Editions l’Harmattan, Paris 2003
De ma terrasse d’Ibn-Khaldoun, lettres d’Algérie 1961-1964, (Première lauréate du concours des Nuits de la Correspondance, série Non Fiction, de la ville de Manosque, septembre 2003), Editions Manuscrit.com , Paris 2003
Moemoea, l’aïeule des îles Marquises , Editions Jeunesse L’Harmattan, Paris, 2004
Mon Anthologie de littérature antillaise
Quatre tomes :

De la culture De la politique De l’économie La femme antillaise, de l’humiliation à la libération
Editions L’Harmattan, Paris 2005
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadao.fr harmattan1@wanadoo.fr
© L’Harmattan, 2006
9782296001954
EAN : 9782296001954
Sommaire
Page de titre Du même auteur Page de Copyright PREAMBULE PREMIERE PARTIE : - Mon Journal du Coup d’Etat de 1991. DEUXIEME PARTIE. TROISIEME PARTIE. Conclusion
« Se le ou nan bezwen ou konn ki moun ki zanmi ou »
« C’est dans le besoin qu’on compte ses amis »,
c’est pourquoi je dédie mon témoignage :
A Carla Mory, ma petite-fille, née le 28 février 2004.
A Maïa et Benoît, ses parents, sans qui je n’aurais pu mener ce travail à bien.
A Eliane Aubert et Claude Laurent, soutiens et conseillers comme il n’y en a guère.
Et, enfin, à Lilas Desquiron qui, si généreusement, me fait l’honneur de me considérer comme une compatriote « natif - natal ».
PREAMBULE
J’ai, pour la première fois, entendu parler d’Haïti par un livre d’Anna Seghers 1 . Je venais d’être nommée, à la rentrée de septembre 1971, professeur de Lettres Modernes au lycée Gerville-Réache, à Basse-Terre de Guadeloupe. Je voulais, pour mieux me situer et vivre pleinement la chance qui m’était accordée, découvrir tout de la Caraïbe, ces îles parfaitement alignées en un quart de cercle magique à la ceinture des Tropiques. Tout, leur beauté, leur histoire tragique, le génocide des « Indiens » dès le début du XVIème siècle, puis l’ignominie de la traite esclavagiste, et les soubresauts, les convulsions des espérances et des désillusions, et enfin le présent des champs de cannes et des disparités sociales. Oui, je voulais tout connaître, de Cuba à Aruba.

Et voici qu’un jour, dans ma boulimie voyageuse, papivore et politique 2 , je découvre la romancière allemande Anna Seghers. Elle racontait la révolution des esclaves d’Haïti contre les maîtres blancs ; Toussaint Louverture contre Napoléon, David contre Goliath. Cela m’émut considérablement ; la chute du texte surtout, quand on comprend, dans Les Noces d’Haïti , que Michel Nathan meurt à la même époque que Toussaint, loin l’un de l’autre, certes, mais la concordance des dates soulignant leurs conceptions fraternelles. Un homme blanc avait pu suivre sa conscience ; un homme blanc avait eu assez de force intérieure, de réflexion, de lucidité aussi, d’abnégation sûrement, pour s’éloigner de ses concitoyens, pour dire non à ce que pensaient et faisaient à l’époque les autres hommes blancs.

Ce sont toujours là des choses qui me touchent beaucoup, choisir son pays, choisir ses convictions, son parti, ses luttes, sa classe même, contre tout déterminisme imposé par la naissance. Je me mis donc à lire la littérature haïtienne ; Jacques Roumain et Jacques-Stephen Alexis confirmèrent mon désir de découvrir leur pays.

En outre, loin des livres et dans la vie quotidienne antillaise que j’appréhendais tous les jours un peu mieux, Haïti, de plus en plus, m’apparaissait particulière, unique, mystérieuse, incompréhensible aussi.

Nombreux étaient les Guadeloupéens à lui porter des sentiments complexes. Contradictoires, même ; une espèce d’admiration qui confinait au mythe, mêlée bizarrement de mépris social ; les Haïtiens en Guadeloupe étaient les pauvres des pauvres ; de riches Guadeloupéens, pour aller à la chasse préféraient louer leurs services pour courir après le gibier plutôt que d’emmener leurs chiens. C’eût été dommage d’abîmer les bêtes dans des ravines difficiles... Et puis, ils étaient toujours en dictature, là-bas, alors qu’on se flattait de la république...

En même temps, que de nostalgie d’une épopée qu’ils n’avaient pas vécue ! Que de jalousie, même ! Ici à Matouba, dans les hauts de Basse-Terre, Louis Delgrès reposait dans une tombe toujours fleurie au mois de mai ; il n’était pas arrivé à libérer la Guadeloupe de l’esclavage ; la France, un jour, y avait concédé, en 1848, par l’entremise de Victor Schoelcher. Un des drames des Guadeloupéens, je l’ai bien senti, est là.

Haïti avait pris son droit, toute seule. Tout seuls, des esclaves, contre l’armée la plus puissante du monde, le 1 er janvier 1804. Avant tous les autres. Et, quand les Caribéens parlaient de Toussaint Louverture et de son pays, bien des sentiments se mêlaient. Un peuple fier, courageux, qui avait mis « la négritude debout », selon l’expression d’Aimé Césaire, mais qu’une sorte de malédiction poursuivait, comme il arrive parfois aux personnalités d’exception, aux artistes de génie, aux surdoués incompris, et qui végétait maintenant sous la dictature Duvalier.

C’est pour tout cela qu’aux vacances de Pâques 1973, j’arrivai à Port-au-Prince avec une collègue guadeloupéenne qui avait une grande admiration pour la geste haïtienne. Nous avions obtenu du gouvernement de François Duvalier qu’on appelait Papa Doc, une autorisation de circuler dans le pays ; la carte d’entrée et la lettre m’impressionnèrent... Elles doublaient le passeport avec forces signatures et photos d’identité.

Parties pour deux semaines, ma collègue et moi, nous avons réagi de la même façon ; trop seules, sans l’aide de ces Haïtiens que j’ai rencontrés bien plus tard et qui m’ont aidée à aimer leur pays, nous avons été écrasées d’effroi par la misère omniprésente. Ni la découverte de l’épopée d’antan à travers Cap-Haïtien, la Citadelle, le Palais Sans-Souci, ni même l’émerveillement dans les nombreuses galeries de Port-au-Prince et de Pétionville devant un art qui n’a toujours pas cessé de me séduire - aujourd’hui que j’écris, en cette fin d’année 2004, trente ans après - rien ne parvint à l’époque à nous retenir. Nous n’étions pas de taille à supporter ce que nous croisions de par les rues et les ruelles ; partout, les enfants en bande nous sollicitaient avec une gentillesse qui augmentait notre commisération; l’un d’entre eux me demanda de l’adopter ; aux vitres des restaurants, des visages s’écrasaient ; il fallait parvenir à ne pas les voir pour arriver à déglutir. Mais les êtres qui avaient ces visages nous attendaient, en ligne, de part et d’autre de la porte que nous devrions bien franchir à un moment. Portant entre leurs mains des espèces de bidons de fer blanc dans lesquels on pouvait déposer nos restes ou n’importe quoi qu’on voulait bien leur donner. Nous deux, les deux jeunes voyageuses, nous n’arrêtions pas d’acheter les confiseries que des enfants nous proposaient sur de petits étals pendus à leurs cous, pour pouvoir les offrir à d’autres. Au pays de Mackandal, de Bouckman, de Toussaint, au pays de Charlemagne Péralte, au pays de Jacques Roumain et de Jacques-Stephen Alexis, on croisait sans cesse dans la rue des regards qui nous imploraient de nous taire parce qu’ils y lisaient tout ce qu’on ne comprenait pas. D’autres regards, on ne les croisait jamais. Des lunettes noires les cachaient.

Une petite aventure me parut, elle aussi, significative de l’état dans lequel vivaient même ceux qui n’étaient pas dans la misère. J’avais découvert chez des amis à l’autre bout de la Caraïbe, en Jamaïque, des peintures de Pétion Savain ; une grande force étrange, des coloris nouveaux ; « un grand peintre haïtien », m’avait-on affirmé alors. Et voilà que ma collègue et moi, alors que nous sortons de notre petite pension pr

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