Essai sur la négation de la mère
130 pages
Français

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Essai sur la négation de la mère , livre ebook

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Français

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Description

Un manque mine nos sociétés depuis les Temps Modernes, il est ici interprété comme le refoulement, comme l'oubli absolu du lien primordial avec la mère ; sur cet abandon prospèrent le totalitarisme, le négationnisme et le révisionnisme, trois versions de l'instrumentalisation de la mémoire occultée de la mère. Ressaisir ce laissé-pour-compte de notre philosophie, mettre en lumière ses implications psychologiques, économiques, juridiques et sociales est le projet qui anime les pages de cet essai philosophique.Š

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juillet 2011
Nombre de lectures 40
EAN13 9782296465244
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Essai sur la négation de la mère
Collection Créations au féminin
dirigée par Michèle Ramond
Nous souhaitons avec cette nouvelle collection encourager des essais valeureux sur ce « féminin » que les créations des femmes mais aussi des hommes construisent dans le secret de leur fabrique imaginaire. Notre projet implique une réflexion libre et libérée qui dépasse les stéréotypes, y compris la catégorie de sexe biologique ; nous ne nous limiterons pas, même si nous les favorisons, aux écrivains et aux créateurs « femmes », et nous serons attentifs, dans tous les domaines de la création, à l'émergence d'une pensée du féminin hors cadre institutionnel et biologique, dégagée de l'assignation sexuelle, de ses limitations et de ses tabous.
Penser le féminin, le supposer productif et actif, le repérer, l'imaginer, le théoriser est une entreprise sans doute risquée, vaguement suspecte d'essentialisme ; nous savons bien cependant que l'universel est une catégorie trompeuse et partiale, incomplète, et qu'il nous faut constamment exorciser la peur, le mépris ou l'indifférence qu'inspirent les femmes et leurs créations. Le féminin fait partie de l'humain, cela semble une évidence, mais il souffre d'une exclusion qui correspond à l'invisibilité des femmes dans bien des secteurs de la vie sociale, artistique et politique. La crainte de voir leurs œuvres reléguées dans un genre mineur a favorisé chez les femmes elles-mêmes une prévention contre la pensée du féminin. Il est temps de dépasser ces réserves. Malgré les déformations simplistes ou les préjugés qui le minent, le féminin insiste dans le tréfonds de l'expression littéraire et artistique. Notre collection en proposera les lectures les plus variées sans esquiver ni les objections ni les polémiques.
Dernières parutions
Michèle Ramond, Masculinféminin ou le rêve littéraire de García Lorca , 2010.
Jeanne Hyvrard
Essai sur la négation de la mère
L’Harmattan
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-55167-1
EAN : 9782296551671
1. La totalnité placentaire
Penser la fusion, c’est penser le cordon ombilical et le placenta, dénommé autrefois l’arrière - faix , d’un nom qui s’est malencontreusement perdu avec et comme celui de la parturition, car ils permettaient tous les deux d’en comprendre l’importance et le poids et de garder trace de la trace dans la mémoire.
C’est a priori et jusqu’à plus ample connaissance d’une médecine et d’une philosophie enfin réconciliées, l’univers d’avant le manque et/ou le désir. Une notion telle que la frustration n’y est pas pertinente parce que le besoin lui-même et a fortiori sa mise en forme distancée de désir n’ont pas encore eu la possibilité de se faire jour.
Et pour cause… C’est encore la nuit matricielle, le temps d’avant la création du monde, fût-ce un monde local. Et il l’est, puisque c’est celui de chaque existence individuel e.
Si la vie du nourrisson est primaire, principale, primordiale, celle du fœtus échappe encore pour le moment à la langue, la rejetant dans ce qu’on appel e faute de mieux, faute de littérature surtout, l’innommable.
Ce qui relie la mère et l’enfant, bien que complexe et multiple, est un lien unique qui les rattache physiquement l’un à l’autre et ne laisse aucun espace, aucun vide, aucune cavité dans laquelle quelque chose de l’ordre du besoin et/ou du désir pourrait prendre place.
Un lien unique, au sens d’unicité.
L’univers matriciel fonctionne sans vide ni espace comme une totalité fermée, même si cette fermeture peut à tout moment cesser, soit à terme par la parturition, afin de continuer la métamorphose engagée lors de la conception, soit lors d’une fausse couche qui porte si bien son nom, laissant ainsi trace de l’inaccomplissement de la fonction.
Ou ne laissant pas même de trace.
Pour l’homme masculin, et cette formulation n’est pas un pléonasme car si l’humanité est universelle en tant qu’espèce tant sur le plan physiologique que philosophique, il y a deux sexes, chacun donnant réalité à l’aure, car il y en a deux ou pas du tout.
Pour l’homme masculin donc (est-on obligé de préciser) car la coutume a fait couvrir du nom d’homme les deux sexes, dans une pratique étrange, car à y réfléchir, s’il fallait attribuer à l’un des deux sexes la lourde charge de représenter les deux, ce fardeau reviendrait plutôt au sexe féminin, la mère étant capable d’enfanter les deux, portant dans son ventre aussi bien des corps masculins que féminins.
On répondra avec justesse et justice que c’est l’homme qui par ses gamètes détermine le sexe de l’enfant et qu’on pourrait donc tout aussi bien le faire bénéficier du même raisonnement. Soit.
Ce serait faire bon marché du fait que la femme seule peut allaiter naturellement l’enfant, et que socialement, c’est encore elle qui s’en occupe principalement.
Pour l’homme masculin donc, la perte de cette fusion lors de la parturition, est une perte irrémédiable, non seulement parce qu’en dépit des fantasmes elle est irréversible, mais parce qu’elle divise le temps entre un avant la fusion et un après.
Cette banalité ne l’est pas autant qu’il paraît, car ce n’est pas le cas pour la femme, qu’on peut en poursuivant la même terminologie logique appeler : l’homme féminin.
Ce terme s’inventant pour prendre en compte à la fois son caractère d’humanité universelle et aussi sa différence sexuelle, sans la laisser abolir à la faveur défaveur de la domination masculine, solidement ancrée dans ce qu’on persiste à appeler la civilisation, reléguant ainsi la question des femmes aux oubliettes de la philosophie et du reste qui en découle : économie, société, violence.
Sans parler du ou de la politique.
Pour la femme, la perte de la fusion due à la parturition n’est pas aussi radicale et encore moins irrémédiable car lorsqu’elle devient mère à son tour, ce qui sans être une obligation est tout de même une habitude, elle retrouve dans une autre posture, au moins lors de sa gravidité, la situation fusionnelle, sa gravité et sa gravitation.
Et qu’advient-il alors lorsqu’el e a gesté et enfanté une fille qui à son tour pourra reproduire le lien ombilical, la fusion devenant ainsi aussi bien un futur qu’un passé, la différence sexuelle de l’enfant féminin n’assurant même pas la distanciation minimum qu’aurait permis un enfant masculin ?
Et encore ce n’est pas sûr, car l’enfantement d’un enfant masculin par un corps féminin peut tout aussi bien produire un effet de complémentarité qui lui aussi, mais par un autre processus, pousserait à s’enfermer dans la fusion.
Car la fusion peut se faire par l’identification, la similarité, la mêmeté , si on admet ce néologisme, comme el e peut se faire par la complémentarité. D’où la nécessité d’inventer cette notion, le mot mêmeté pour dire le recouvrement parfait.
Faut-il alors admettre, qu’en dépit de ces réflexions, la coupure entre un avant et un après irréversible de la fusion n’est pas pour l’univers mental de l’homme féminin, c’est-à-dire finalement la femme, un ordonnancement pertinent ?
Au moins philosophiquement parlant, même si les dites femmes sont dans la réalité sociale dans l’obligation de se soumettre à cet ordre, quitte à en tomber malades, ce qu’el es ne manquent pas de faire sous des formes diverses.
Cet ordre mental n’est pas pertinent, non seulement pour les mères de filles en raison du risque fusionnel induit par la similarité, mais également pour les mères de garçons, la fusion menaçant alors par la complémentarité, tout aussi redoutable – si ce n’est davantage – dans une organisation psychosociale, qui non seulement ne lui fait aucune place, mais la rejetant dans l’innommable va, sans avoir besoin même de la dénier, jusqu’à l’ignorer.
Le concept de maternalité recourant là aussi au néologisme, pourrait recouvrir ce qui concerne l’univers de la mère non seulement dans son aspect d’enfantement, ce qu’on appelle habituellement la maternité et qui n’est pas tout à fait la même chose, mais tout l’univers mental s’y rapportant, y compris la gestation non représentable par le sujet féminin dans notre système philosophique en vigueur, ainsi que toutes les modifications physiques, psychiques, sociales et culturelles induites dans la vie de la mère du fait de la dite maternité.
Dans cette définition, mathématiquement parlant, la maternité est un sous-ensemble de la maternalité.
Cet élargissement du concept est rendu nécessaire pour passer outre l’enfermement philosophique de l’ontologie classique occidentale, inadéquat pour penser le monde

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