Identité et transcendance
350 pages
Français

Identité et transcendance , livre ebook

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350 pages
Français

Description

Dans cet essai philosophique et dialectique, l'auteur esquisse une odyssée de la raison : croyant à la puissance de la raison humaine, il démontre la spécificité de la philosophie : elle est critique de la raison et sa mise en oeuvre effective ouvre de nouveaux horizons de liberté, d'autonomie personnelle, sociale, politique et économique. La primauté et l'universalité de l'intelligence comme principes dynamiques de changement et de dépassement, sont affirmés.

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Publié par
Date de parution 01 septembre 2011
Nombre de lectures 2 262
EAN13 9782296466715
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1400€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

IDENTITÉ ET TRANSCENDANCE
Problématiques africaines Collection dirigée par Lucien AYISSI
Il s’agit de promouvoir la pensée relative au deveniréthique et politique de l’Afrique dans un monde dont on proclame de plus en plus la fin de l’histoire et de la géographie. L’enjeu principal de cette pensée à promouvoir est la réappropriation conceptuelle, par les intellectuels africains (philosophes, politistes, et les autres hommes et femmes de culture), d’un débat qui est souvent initiéet menéailleurs par d’autres, mais dont les conclusions trouvent dans le continent africain, le champ d’application ou d’expérimentation. La pensée à promouvoir doit notamment s’articuler, dans la perspective de la justice et de la paix, autour des questions liées au vivre-ensemble et aux modalitéséthiques et politiques de la gestion de la différence dans un espace politique oùla précaritéfait souvent le lit de la conflictualité. La collection«Problématiques africaines » aégalement l’ambition d’être un important espace scientifique susceptible de rendre de plus en plus présente l’Afrique dans les débats mondiaux relatifs à l’éthique et à la politique.
Déjà parus
Pascal MANI,Le vade-mecum du chef de terre. Comment réussir une carrière dans la préfectorale, 2010. Serge-Christian MBOUDOU,L'heuristique de la peur chez Hans Jonas. Pour une éthique de la responsabilitéàl'âge de la technoscience, 2010. Aaron Serge MBA ELA II,Chroniques philosophiques dun pédagogue, 2010. Roger Bernard ONOMO ETABA, Le tourisme culturel au Cameroun, 2009. AndréLiboire TSALA MBANI,Les défis de la bioéthiqueàl’ère éconofasciste, 2009. Joseph EPEE EKWALLA,Les syndicats au Cameroun. Genèse, crises et mutations, 2009. Hubert MONO NDJANA,Histoire de la philosophie africaine, 2009.
Marcien Towa
IDENTITÉ ET TRANSCENDANCE
Préface deJoseph Ndzomo-Molé
© L’Harmattan, 2011 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-55418-4 EAN : 9782296554184
À la mémoire de mon père KO ONDOBO
PREFACE
«Ce qui a fait jusquici la faiblesse de lAfrique, cest le poids des croyances magiques quune raison philosophique peut amenerà dissiper pour hâter lavènement de la science et de la technologie. Ce que nous appelons le secret de lOccident sur le plan scientifique nest pas un secret, et nous navons pas tantàsortir de nous-mêmes pour aller voler le secret de la scienceàlOccident qu’àrentrer en nous-mêmes(). »
Bernard Nanga,«Philosophie et développement», publiéà titre posthume par Emmanuel Malolo Dissakè dansLaspirationà être, Presses Universitaires de France, Dianoïa, juillet 2002, p. 206 du collectif. Quand on a luIdentitéet transcendancede Marcien Towa, on ne peut pas ne pas frémir à l'idée que ce texte de haute teneur philosophique aurait pu, lui aussi, connaître le sort ordinaire, auquel il aéchappéde justesse, des thèses universitaires les plus originales, c'est-à-dire les moins scolaires : celui de tomber dans l'oubli après le rituel académique de la soutenance publique. Pourquoi y a-t-il lieu de se féliciter de la publication, quoique tardive, de cette thèse de Doctorat d'État soutenue trente-quatre ans plus tôt ? C'est qu'à la différence de la plupart des autres, elle apporte sa contribution au patrimoine philosophique des idées, dans un contexte dominépar lthique du mandarinat universitaire, oùil est plus courant de se spécialiser dans la pensée d'un auteur prestigieux, et de s'en vanter toute une carrière durant, et même après. Towa, il est vrai, n'est pas moins bon historien de la philosophie que ceux dont l'activitéphilosophique se limite àécrire desarticles scientifiqueset à expliquer, avec une fiertéquasi-sacerdotale, des auteurs canonisés par la tradition universitaire occidentale comme des 1 maîtres à penser : les commentaires qu’on lit dansIdentitéet
1 E. Kant dit à cetégard dans la préface auxProlégomènesàtoute métaphysique future qui pourra se présenter comme science:«Il est des savants, qui font de l’histoire de la philosophie (tant ancienne que moderne) leur propre philosophie : ce n’est pas pour eux que les présentsProlégomènesontété écrits. Il faut qu’ils attendent que ceux qui travaillent à puiser aux sources de la raison elle-même aient
transcendancesur Platon, Descartes ou Hegel sont indiscutablement ceux d’un professionnel. Mais l’auteur de l’Essai sur la problématique philosophique dans lAfrique actuellene s’intéresse à ces maîtres que dans la mesure oùil trouve dans leurs textes l’écho de sa propre préoccupation : avec eux et, au besoin, contre eux, il peut se frayer son propre chemin au sujet du problème de l’identitéculturelle de l’Afrique. C’est en philosophe qu’il lit lesidéologues de lidentité 2 tels que Blyden ou Senghor , ou d’autres auteurs, par exemple Aimé Césaire et Frantz Fanon, dont il se dit très proche.
La question examinée est celle de savoir à quels référentiels renvoient les concepts développés par les théoriciens de l’âme africaine, à savoir lanégritude, lapersonnalitéafricaine, l’africanité ou l’authenticité. Ces concepts, en théorie, renvoient àquelque chose qu’on est censépenser à l'aide du schème de lapermanence dans le temps, c’est-à-dire, au sens kantien, à unesubstance, parce quecela est supposéêtrele mêmeà travers le temps et l’espace, et présuméêtre identiquecheztous les Nègres du monde et de lhistoire; et l’idée même d’authenticité, qui fait entrevoir celle d’inauthenticité, suggère qu’il y aurait des Nègres chez qui cequelque choses’exprime dans sa plécettenitude ; choseapparaîtrait toujours chez le Nègre,sous une forme ou sous une autre, même chez le plus aliéné, autrement dit, quand bien même il s’agirait de quelqu’un qui s’efforcerait, d’ailleurs en vain, de lerefouler, et quel que soit l’environnement culturel dans lequel il auraété éduqué.
L’idée d’identitéest donc abstraite, sans contenu assignable dans les doctrines oùelle est défendue :«Lhomogénéitéest loin d’être parfaite entre toutes ces doctrines. Cependant elles affirment toutes la nécessitéde demeurer soi. Mais que signifie cette exigence générale ? Quel contenu donneràcetêLe soi dont il est questiontre-soi ? 3 désigne-t-il l’é?tat actuel de nos cultures »
terminéleur tâche, et alors leur tour viendra d’instruire le monde de ce qui s’est fait (traduit par Louis Guillermit, Introduction de Jules Vuillemin, Librairie philosophique J. Vrin, Paris, 2001, p. 13). 2 M. Towa avait déjà consacré:un essai à Senghor Lé:opold Sedar Senghor négritude ou servitude ?, Editions CLÉ, Yaoundé, 1971. Paulin Hountondji parle de ce livre comme d’«une critique politique mordante de la doctrine senghorienne de la négritude » (Sur la "philosophie africaine". Critique de lethnophilosophie, François Maspero, Paris, 1976, 3, p. 69). 3 M. Towa,Identitéet transcendance, Introduction. 8
Les analyses de Towa accordent une place privilégiée à la théorie de l’émotion-féminité, par laquelle Senghor s’est rendu célèbre :«Le Nègre se définit essentiellement par sa facultéd’êtreému ». Ces formules se veulent délibérémentanticartésiennes; car Senghor tient à relativiserlidée de lHommetelle que l’a répandue Descartes, père putatif de l’humanisme moderne et, par conséquent, de la civilisation industrielle qui, d’après Towa, recèlele secret de la puissance occidentale, ou de la puissance tout court. En définissant le Nègre par la facultéd’êtreému, Senghor prend en effet à dessein le contre-pied duSum res cogitansde Descartes. Le contre-pied est, bien évidemment, ici une parodie polémique duCogito: il est implicitement reprochéà Descartes, et plus encore à sesémules, d’avoir commis une induction abusive, c’est-à-dire d’avoir, sans y prêter attention, parléde l’Hommesous les traits de l’Européen,cet être dont tout l’être nest que de penser; le reproche est donc en fait celui de l’occidentalisme. Ainsi, chaque race aurait doncson Descartes ?et Senghor serait-il leDescartes? Lde la race des Nègres 'auteur duDiscours de la méthodeécrit que«la puissance de bien juger, et distinguer le vrai davec le faux, qui est proprement ce quon nomme le bon sens ou la 4 raison, est naturellementégale en tous les hommes» , ou encore que «la raison, ou le sens, () est la seule chose qui nous rend hommes, et 5 nous distingue des bêtes» . Toutes les déclarations universelles des droits de l’homme procèdent de lacharte de Descartes, qui proclame 6 le caractère universel de la raison. Senghor conteste ainsi la légitimitéde définir le bon sens par la raison, ce qui revient, dans sa perspective, à réduire abusivement le bon sens à ce qu’il est chez les hommes de race blanche. Descartes aurait-il donc dûécrire, s’il avait, d’après Senghor, convenablementétudiél’êtrede chaque race, quela puissance de bien juger, et distinguer le vrai davec le faux, est naturellementégale en tous les hommes de race blanche,comme lest,en tous les hommes de
4 RenéDescartes,Discours de la méthode, suivi desMéditations métaphysiques, présentation et annotation par F. Misrachi, Paris, Union Générale d’Editions, 1973, I, p. 29. 5 Ibid., p. 30. 6 A. Césaire a montrédans leDiscours sur le colonialismeque toute l’histoire de l’Europe vis-à-vis des autres peuples est une violation flagrante et permanente de la charte de Descartes. 9
race noire, la facultéd’êtreému ?Ou encore quel’émotion est la seule chose qui distingue les Nègres des bêtes ?On eût voulu que Senghor fût conséquent en poussant jusqu’au bout sa parodie du Cogito. Car on cherche en vain en quoi sa théorie de l’émotion-nègre et de la raison-hellèneélève le Nègre, ou en quel sens le négrisme est un humanisme. Une lecture indulgente trouvera des circonstances atténuantes à Senghor, tant cette infériorisation du Nègre par un Nègre de bonne renommée internationale est invraisemblable, Senghor n’ayant sans doute pas eu à faire appel à l’émotion pour réussir à l’agrégation de grammaire et déchiffrer les textes de latin et de grec. Ainsi, Njoh-Mouellé, dansDe la médiocrité àlexcellence,hésite à admettre qu’il faille entendre à la lettre l’équation de Senghor, qui serait à mettre au 7 compte d’unracismeàrebours. Que faut-il penser«des conclusions 8 de type essentialiste » de Senghor ? se demande Njoh-Mouellé, qui hésite entre l’indignation et la compréhension :«En disant que nous ne savons comment prendre ces formules, nous voulons dire que nous nous refusons secrètementàcroire que leur auteur ait voulu quon les prenneàla lettre. Si au contraire nous nous trompons sur ses intentions, alors nous ne pouvons que proclamer notre total 9 désaccord avec des simplifications de ce genre. » De touteévidence, si l’objectif formel de Senghor, théoricien de 10 laphysiopsychologiedu Nègre , aétéde réhabiliter le Nègre, il s’y est pris exactement avec les mêmes armes et les mêmes techniques, et
7 E. Njoh-Mouellé,De la médiocrité àlexcellence. Essai sur la signification humaine du développement, suivi deDévelopper la richesse humaine, Les Editions du Mont Cameroun, 1988, chapitre 5, p. 60, note de l’auteur citant de mémoire une réponse reçue de Senghor le 28 janvier 1970 à Yaoundé, dans le cadre d’un colloque sur la négritude. Senghor, pourtant, n’a pasécrit un texte d’autocritique ; Towa montre que Senghor est restéfidèle à lui-même. L’idée d’un racisme à reboursest-elle d’ailleurs une excuse valable ? 8 Ibid., p. 59. 9 Loc. cit. 10 Laphysiopsychologie, comme l'explique M. Towa, désigne chez Senghor la doctrine d'après laquelle«la diversitédes civilisations provient de la diversitédes races et des ethnies » (Identitéet transcendance, chapitre II, 1). M. Towa cite à ce propos Senghor commentantélogieusement Gustave le-Bon :«c’est laconstitution psychique» (loc. cit.), laqui, chez chaque peuple, explique sa civilisation constitution psychiqueétant ici déclarée aussi fixe et héréditaire que lescaractères anatomiques. 10
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