Géomorphologie de la Russie
406 pages
Français

Géomorphologie de la Russie , livre ebook

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406 pages
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Description

Ce manuel présente les formes de relief et de modelé de la Russie et les phénomènes qui les façonnent. L'étude des grandes structures précède celle d'échelle moyenne. Elle se poursuit par l'évolution des versants et les grands agents de transport et se termine par une focale sur le domaine pergélisol. Cette géomorphologie culturelle linguistique et régionale ne néglige pas les contraintes d'aménagement du territoire ni la mise en valeur du patrimoine paysager.

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Date de parution 15 août 2017
Nombre de lectures 12
EAN13 9782140042683
Langue Français
Poids de l'ouvrage 43 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Laurent Touchart
Géomorphologie de la Russie Le colosse aux plaines d’argile
Géomorphologie de la Russie
Laurent Touchart Géomorphologie de la Russie Le colosse aux plaines d’argile
Ouvrages du même auteur Bartout P. & Touchart L., Dir., (2016)Eaux et mœurs, du Berry et d’ailleurs. Châteauroux, Credi éditions, 112 p. (ISBN 9782953165067). Touchart L., Bartout P. & Motchalova (2015)Mieux comprendre les étangs. Expériences nationales et internationales du Berry limousin à l’Europe orientale. Brive-la-Gaillarde, les Monédières, 422 p. (ISBN 978-2-36340-117-5). Touchart L. (2014)Les territoires de l’eau en Russie. Paris, L’Harmattan, 333 p. (ISBN 978-2-343-02596-4). Touchart L. (2011)La Russie et le changement climatique, une nouvelle géographie du froid. Paris, L’Harmattan, 270 p. (ISBN 978-2-296-56244-8). Touchart L. (2010)Les milieux naturels de la Russie, une biogéographie de l’immensité. Paris, L’Harmattan, 460 p. (ISBN 978-2-296-11992-5). Touchart L. (2008)La vie au fil de l’eau. Lacs du monde. Grenoble, Glénat, 160 p. (ISBN 9-782723-464987). Brunaud D. & Touchart L. (2007)L’étang de Landes de sa création au classement en réserve naturelle. Guéret, Société des Sciences Naturelles, Archéologiques et Historiques de la Creuse, collection « Etudes creusoises », 106 p. (ISBN 978-2-903661-35-9). Touchart L., Dir. (2007)Géographie de l’étang, des théories globales aux pratiques locales. Paris, L’Harmattan, 228 p. (ISBN 978-2-296-02936-1). Touchart L. & Graffouillère M., Dir. (2004)Les étangs limousins en questions. Limoges, Editions de l’Aigle, 188 p. (ISBN 2-9521309-0-6). Touchart L. (2003)Hydrologie, mers, fleuves et lacs. Paris, Armand Colin, collection « Campus », 190 p. (ISBN 9-782200-264611). Touchart L. (2002)Limnologie physique et dynamique, une géographie des lacs et des étangs. Paris, L’Harmattan, 395 p. Ouvrage récompensé par le prix Jules Girard. (ISBN 2-7475-3463-4). Touchart L. (2000)Les lacs, origine et morphologie. Paris, L’Harmattan, 210 p. (ISBN 2-7384-9800-0). Gautier E. & Touchart L. (1999)Fleuves et lacs. Paris, Armand Colin, collection « Synthèse », 96 p. (ISBN 9-782200-218300). Létolle R. & Touchart L. (1998)Grands lacs d’Asie. Paris, L’Harmattan, 232 p. Ouvrage récompensé par le prix Francis Garnier. (ISBN 2-7384-7136-6). Touchart L. (1998)Le lac Baïkal. Paris, L’Harmattan, 240 p. (ISBN 2-7384-6411-4).© L’Harmattan, 2017 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-12571-8 EAN : 9782343125718
Introduction générale « Et pendant ce temps, dans le faubourg de Viborg, dans la maison de la veuve Pchénitsina, les jours et les nuits s’écoulaient, paisibles. Nul changement. Les quatre saisons se suivaient tout comme l’année précédente. La vie ne s’arrêtait pas, et si elle se renouvelait dans ses manifestations, c’était avec la lenteur des phénomènes géologiques : ici une montagne s’effrite peu à peu, ailleurs la mer dépose du limon durant des siècles » (I. Gontcharov, 1859,Oblomov, quatrième partie, chapitre premier, dans la traduction d’A. Adamov). On peut imaginer que tout se trouve dans cette citation, même en restant dans son divan : d’abord les enjeux d’une meilleure connaissance des formes de terrain de la Russie, à travers l’esprit de ses habitants ; ensuite une épistémologie de la géomorphologie, à partir ème de cette seconde moitié du XIX siècle pendant laquelle elle est sortie du giron de la géologie, aux portes du faubourg de Vyborg à Saint-Pétersbourg ; enfin les changements d’échelles, par-dessus le temps long des grands reliefs comme les montagnes russes, quand l’apathie le cède à l’oisiveté, ou à travers les moments plus courts du cycle de l’érosion sculptant les formes de modelé, quand Ilya Ilitch est transporté par l’amour d’Olga, avant de retomber dans sa léthargie.Les enjeux géomorphologiques Quel est le rôle du substrat sur les écosystèmes, dans un pays où le biotope est dit ne dépendre quasiment que des formations superficielles ? Ne risque-t-on pas d’assimiler faussement la Russie à ses seules vastes plaines, si l’on néglige l’étude de sa structure géomorphologique ? Pourquoi n’y a-t-il que trois routes traversant le Caucase sur 600 km ? L’égoïsme de Chakro ne peut-il emprunter que le chemin central ? Par son appartenance au nord de la Ceinture de Feu, l’Extrême-Orient russe connaît-il plus ou moins de risques sismiques et volcaniques que le Japon ? Le défonçage des routes russes par la gélifraction est-il inéluctable ? La Russie restera-t-elle dans les années à venir parmi les premiers producteurs d’hydrocarbures de la planète ? Gardera-t-elle la première place mondiale d’extraction des diamants bruts, acquise en 2014 (Jacque, 2015) ? Les connaissances géomorphologiques permettent-elles d’anticiper cette évolution ? Saint-Pétersbourg est-elle vraiment une ville unique et comment la ville de pierre est-elle devenue l’exception traditionnelle de ce pays de brique et de bois ? L’UNESCO reconnaîtra-t-elle bientôt les premiers géoparcs de Russie ? Les colonnes,stolby, ne sont-elles qu’une curiosité géomorphologique extravagante ou cette réserve naturelle aux portes de Krasnoïarsk est-elle amenée à devenir un pôle touristique majeur de la Sibérie ?
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Pour tenter d’apporter quelques réponses à ces questions et gagner une meilleure compréhension du territoire russe, il convient de miser sur cinq grands éléments géographiques.La Russie, terre vivante, ou comment les scientifiques russes ont contribué à intégrer la géomorphologie dans l’écosystème et le développement durable La compréhension de l’ensemble du milieu naturel nécessite une bonne connaissance de ses formes de relief et de modelé et de leur évolution passée et en cours. « L’étude intégrée du milieu écologique », que le géomorphologue français Jean Tricart (1972, p. 83), grand amateur de la science soviétique, appelait de ses vœux, avait été un fil directeur des ème travaux russes depuis le XIX siècle. De terminologie américaine, l’écosystème est pourtant un concept qui doit beaucoup aux savants russes (Odum, 1953), sous différentes appellations qui se sont succédé depuis Vassili Dokoutchaev. Le père de la pédologie mondiale avait d’abord créé le mot desovokoupnost(la conjugaison), pour signifier l’interdépendance entre les processus du monde vivant et ceux de leur habitat minéral, le milieu le plus caractéristique de ces interrelations étant, selon lui, le sol.Plus tard, à l’époque soviétique, le terme dekompleks(le complexe au sens de système) était très en vogue dans la démarche scientifique d’étude des milieux, les Russes insistant alors tout particulièrement, par rapport à leurs homologues occidentaux, sur les changements d’échelles.Dans les années 1940, deux mots créés par les savants russes dans la lignée de longues réflexions précédentes, étaient pratiquement employés comme synonymes d’écosystème, mais leur double racine faisait mieux apparaître la composante géomorphologique du biotope que dans celui-là. Il s’agissait d’une part dubiokosnoé télode Vladimir Vernadski, où l’adjectif «kosnoé» (inerte) est clairement associé à la partie vivante, et dont le meilleur exemple restait encore, selon son auteur, le sol.Il s’agissait d’autre part de la biogéocénose de Vladimir Soukatchiov (Sukačëv, 1944), qui marqua des générations de savants soviétiques pratiquant une étude écosystémique dès lors appelée biogéocénologie, dont la composante « géo » était manifeste (Dylis, 1978).Aujourd’hui, cependant, l’équivalent de la géographie environnementale française dans les universités russes est plutôt appelé la géoécologie. Dans l’esprit, celle-ci n’est pas vraiment différente de la biogéocénologie, mais son origine est allemande. Bien que le terme ait été créé dès 1939 par Carl Troll, dans un article qui traitait de la nouvelle utilisation des photographies aériennes pour la recherche environnementale et leur intérêt dans les pays éloignés où on ne peut que difficilement faire du terrain, il fallut attendre les années 1970 pour que la géoécologie se diffusât largement dans tous les pays du bloc de l’Est, en particulier en République Démocratique d’Allemagne, en Roumanie (Troll, 1970) et en URSS (Troll’,
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1972). Cette géographie écologique était, dans l’esprit allemand, très proche de l’écologie des paysages (Landschaftsökologie) et cela ne pouvait que fructifier sur le terreau de l’étude des paysages dans laquelle excellait l’école russe de géographie (Rougerie et Beroutchachvili, 1991). Les formes de relief et de modelé étant importantes dans la compréhension d’un paysage, de nombreux géomorphologues russes, y compris les structuralistes de formation (Gorškov, 2010), ont ainsi conduit leur pratique vers la géoécologie, en en faisant une géographie russe de l’environnement. Ceux qui veulent souligner plus clairement le rôle de l’étude des formes de terrain dans cette optique parlent de « géomorphologie écologique » (Kružalin, 2001). Or, depuis Dokoutchaev, les milieux naturels étaient d’abord présentés par les Russes dans leur zonalité, puis à travers les emboîtements d’échelles. La composante géomorphologique de la géoécologie a donc fondé son travail sur les zones, les domaines et les régions écologiques. C’est précisément ce que les Russes appellent « les régimes géomorphologiques » (Timofeev, 2006, Bronguleevet al., 2008). En outre, le passage de la biogéocénologie à la géoécologie a renforcé la compréhension de l’ensemble du milieu naturel et humain. Cette association a par la suite été modernisée en liens entre la géomorphologie et le développement durable. Il est à cet égard intéressant de lire les documents fondateurs de ce concept onusien en langue russe. Dans le communiqué final du sommet mondial pour le développement durable de Johannesbourg de 2002, le terme de « gestion intégrée » est employé à de multiples reprises dans le texte français, correspondant dans le texte russe à l’expression de «kompleksnoé ratsionalnoé ispolzovaniéutilisation raisonnée». Or cette « systémique » des ressources naturelles avait été depuis longtemps le fer de lance des précurseurs soviétiques du développement durable. Quand Boris Eltsine ratifia en avril 1996 le décret de laConception de la transition de la Fédération de Russie vers le développement durable, puis quand, en 1997, le gouvernement russe approuva laStratégie d’Etat du développement durable de la Fédération de Russie, il insista sur le caractère progressif, graduel, étape par étape, de la marche de la Russie et de l’humanité vers le développement durable. Il reprenait ainsi précisément les caractéristiques de la noosphère définie par le savant russe Vernadski dans ème les premières années du XX siècle, qui voyait en celle-ci « le stade suprême du développement de la biosphère » (Remizovet al., 2002, p. 86).Or les idées de Vernadski avaient été largement mises à profit par les géomorphologues russes, notamment Florensov ou encore Timofeev (Simonov, 2005). De son côté, la célèbre école russe de géographie du paysage, d’abord fondée sur le Landschaft (landšaft) et un support géomorphologique traditionnel, avait évolué en direction du concept de paysage (pejzaž), soulignant le caractère culturel et pictural (Uvarov, 2011). Se référant ainsi à
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