TIC, éducation et psychanalyse

Jean-Luc Rinaudo

Description

Voici une lecture des pratiques médiatisées par les TIC, dans le champ de l'éducation et de la formation, à partir de trois domaines notionnels de la psychanalyse : le négatif, le transitionnel et les processus groupaux. Comment le rapport aux TIC s'installe dans un travail psychique de déliaison et de construction ou de renforcement du lien ? A l'heure où la formation à distance et le travail collaboratif prennent de plus en plus d'importance, il importe de comprendre ce qui se joue au niveau groupal, en e-formation.

Sujets

• Psychiatrie
• Communication
• Psychologie
• Éducation
• Medias
• Psychanalyse

Informations

• Publié par: L'Harmattan
• Date de parution: 01 novembre 2011
• Nombre de lectures: 72
• EAN13: 9782296473508
• Langue: Français

Extrait

TIC,
ÉDUCATION
ET PSYCHANALYSE
Collection « Savoir et Formation »

Série Psychanalyse et éducation
Dirigée par Claudine Blanchard Laville

Depuis plusieurs années, des recherches se développent qui étudient les pratiques professionnelles du champ de l’éducation et de la formation en prenant en compte les processus inconscients et leur influence sur les décisions et les conduites des acteurs de ce domaine. La série Psychanalyse et éducation se propose d’offrir au lecteur un choix significatif de travaux issus de ces recherches se recommandant explicitement d’une approche clinique d’orientation psychanalytique.


Déjà parus
M. CIFALI, M. BOURASSA, M. THEBERGE, Cliniques actuelles de l’accompagnement , 2010.
Nicole BAUDOUIN, Le sens de l’orientation , 2007.
Catherine YELNIK, Face au groupe-classe , 2006.
C. BLANCHARD-LAVILLE, P. GEFFARD (coord.), Processus inconscients et pratiques enseignantes , 2009.
Jean-Luc Rinaudo


TIC,
ÉDUCATION
ET PSYCHANALYSE


Préface de Sylvain Missonnier
© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
[e-mail]
[e-mail]

ISBN : 978-2-296-55570-9
EAN : 9782296555709

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
Préface
Je ne suis certes pas un spécialiste des questions éducatives. Toutefois, mon vif intérêt pour la psychopathologie psychanalytique du virtuel quotidien et la clinique de la scolarité convergent avec le témoignage rétrospectif de ce parcours scientifique que nous propose ici Jean-Luc Rinaudo, centré sur les pratiques médiatisées par les technologies de l’information et de la communication dans les champs de l’éducation et la formation.

On assiste aujourd’hui, chez les professionnels de la santé mentale à une méconnaissance du rôle des TIC avec un discours oscillant entre le charybde de l’alarmisme dénonciateur a priori et le Scylla du prosélytisme idéalisant systématique. Le cheminement exploratoire de Jean-Luc Rinaudo se tient résolument à l’abri de ces positions extrémistes au profit d’une approche psychanalytique du rapport subjectif aux TIC. D’ailleurs, cet ouvrage est justement inauguré par une archéologie de l’approche psychanalytique des technologies de l’information et de la communication, fondée sur une lecture éclairante de textes de Freud, Searles et Winnicott. Elle donne à l’auteur une boussole épistémologique pertinente à la mesure de l’espace intersubjectif envisagé : le négatif et le transitionnel offrent deux pôles théoriques dans lesquels les méridiens observés sur le terrain entre formés et formateurs trouvent une traduction dynamique.

Ancré solidement dans ce substrat psychanalytique, l’auteur peut envisager combien la transitionnalité des TIC dans les pratiques médiatisées est seulement une virtualité qui ne s’actualise pas à coup sûr. Seule une vision casuistique, fondée sur l’économie psychique d’un sujet indissociable de son groupe d’appartenance permet d’en appréhender la destinée singulière. À chaque fois, l’équilibre, voire l’intrication, entre figuration du négatif et sublimation transitionnelle correspondra à un script processuel unique. Dans cet esprit, les pratiques médiatisées par les TIC dans l’enseignement et la formation sont de véritables supports projectifs dont les entretiens non-directifs pratiqués auprès de professionnels par Jean-Luc Rinaudo, dans les recherches relatées dans cet ouvrage, viennent recueillir les stratégies défensives, les identifications projectives et le pouvoir potentiel de transformations réciproques des pratiques et des usagers.

Avec ce matériel, la proposition de René Kaës qui distingue négativité par obligation (le rejeté hors de soi), négativité relative (ce qui n’a pas été mais pourrait être) et négativité radicale (l’irreprésentable) est une bonne illustration de la pertinence du référentiel psychanalytique. Mais c’est bien l’originalité de l’immersion de ce corpus dans la complexité des interactions formés/formateurs médiatisées par les TIC qui donne à la trajectoire de cet ouvrage sa force de conviction.

Dans son recueil de données de la conflictualité en présence chez les enseignants, Jean-Luc Rinaudo adopte une méthodologie résolument clinicienne. Une question s’impose alors : comment une interrogation si affûtée sur les conditions favorables ou défavorables à la fécondité de la négativité relative chez ces professionnels peut-elle se priver secondairement de la mise en œuvre de stratégies de transformation ? Sans confondre le travail de l’enseignant chercheur en sciences de l’éducation et celui du clinicien en exercice face à un patient exprimant une demande (contrairement à l’enseignant), les focus group pourraient constituer un cadre métis où évaluation et dynamisme clinique mutatif s’allieraient plus avant dans un cadre soumis à un consentement éclairé.

Lecteur, il est temps maintenant d’ouvrir la « boîte de compas » de Jean-Luc Rinaudo et de savourer au fil des pages la profonde acuité dialectique des trois cercles de la négativité, de la transitionnalité et de la groupalité si sensiblement ajustée ici à la complexité de la rencontre contemporaine de l’éducation et des TIC.


Sylvain Missonnier
Professeur de Psychopathologie Clinique
de la Périnatalité et de la Première Enfance
Université Paris Descartes
La boîte de compas
Lorsque j’entrai au collège, mon père me confia sa boîte de compas. C’était une vieille boîte cartonnée, avec plusieurs compas de précision, à balustre, qu’il possédait depuis l’école et sa formation initiale d’ajusteur.
J’ai longtemps ressenti un sentiment partagé, vis-à-vis de cette boîte, mêlé de fierté de posséder ces outils d’adultes, de professionnels sérieux et d’envie envers les compas neufs colorés, fantaisistes de mes camarades de classe. Quand ces derniers n’avaient qu’à ouvrir rapidement les deux branches de leur compas pour tracer un cercle au diamètre demandé dans l’énoncé d’un exercice, je devais tourner la molette centrale pendant quelques secondes qui me paraissaient très longues, avant d’obtenir l’écartement désiré, et surtout j’avais l’impression d’être différent des autres élèves.
En quelques mois, les compas de mon père furent inutilisables, sans mine, vis perdue, cassés… Sans doute étais-je trop jeune pour saisir la valeur réelle d’un tel don. Peut-être qu’alors je ne pouvais que me trouver dans une position ambivalente vis-à-vis de mon père, faite à la fois d’admiration et de rivalité, propre à ces débuts d’adolescence (on disait, je crois, pré-adolescence).

Bien sûr, les fragments de son histoire qu’un chercheur rend publics pour rendre compte de sa motivation et de son engagement dans un travail de recherche ne sont peut-être que d’élégants écrans qui masquent des éléments qu’il souhaite garder pour lui, ou d’autres encore, plus profondément enfouis, inconscients, qu’il ignore lui-même et que, peut-être, il ne veut pas connaître. Il me semble toutefois que mon intérêt pour l’informatique, depuis la programmation en langage Pascal ou Logo, des premiers temps de découverte de cette technologie, à la gestion de base de données en ligne pour alimenter des sites Internet de travail partagé, puis, par la suite, la mise en œuvre de recherches compréhensives sur les pratiques médiatisées par ces technologies dans le champs de l’éducation sont probablement pour moi des façons de tenter symboliquement de réparer les compas de la boîte, de rejoindre mon père dans le monde de la technique pour m’inscrire dans une filiation qui m’a autorisé à passer d’une place de fils d’ouvrier à celle d’intellectuel, chercheur impliqué des TIC. Je tente sans doute ainsi de garder vivants et créateurs les liens à mon père, par delà son absence.
Approche clinique des pratiques médiatisées
Pratiques médiatisées
L’objet de cet ouvrage est de proposer des éléments d’intelligibilité des pratiques médiatisées des enseignants et des apprenants dans le cadre professionnel {1} . Les recherches sur les technologies