Endoétrangers
275 pages
Français
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Français

Description

Depuis 2005, les "endoétrangers" sont reconnues par le Conseil de l'Europe comme "minorité ethnique". Cette appellation unique masque une population hétérogène connue sous les catégories "Rroms", "Manouches", "Gitans", "gens du voyages", dont les situations et expériences sont liées à l'histoire, au politique, à l'économique. Cet ouvrage rassemble les travaux de sociologues, anthropologues, politologues et d'intervenants sociaux qui travaillent avec et auprès de ces populations au quotidien.

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Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2013
Nombre de lectures 108
EAN13 9782296513310
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1250€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

ENDOÉTRANGERS
Exclusion, reconnaissance et expérience des Rroms et gens du voyage en Europe
Sous la direction de Kàtia Lurbe I Puerto et Frédéric Le Marcis
Endoétrangers
C O L L E C T I O N Carrefours
Cette collection a pour objectif de se pencher sur les tensions dialectiques qui animent notre monde et sur les nouvelles for mes d’expression qui en découlent (tendance à l’uniformisation culturelle mais diversification des identités ethnoculturelles, indi vidualisation constante mais émergence de nouvelles formes de solidarité,...), et ce dans une perspective transdisciplinaire.
La collection présente trois thèmes majeurs : la multiculturalité, les migrations et l’ethnicité au sens large du terme.
Directeur: Marco Martiniello (FRSFNRS et Université de Liège)
Comité éditorial: GianniD’AMATO(Université de Neufchâtel, Suisse),MichelineLABELLE(UQAM, Montréal, QuébecCanada), PatrickSIMON(INED, Paris, France), AlyTANDIAN(Université Gaston Berger de Saint Louis, Sénégal)
Ouvrages parus dans la collection : 1 • GautierPIROTTE,Une société civile postrévolutionnaire. Étude du nouveau secteur ONG en Roumanie. Le cas de Iasi, 2003. 2 • MarcoMARTINIELLO& AndreaREA(eds),Affirmative Action. Des dis cours, des politiques et des pratiques en débat, 2003. 3 • FabienneBRION(éd.),Féminité, minorité, islamité. Questions à pro pos du hijâb, 2004. 4 • NouriaOUALI(ed.),Trajectoires et dynamiques migratoires de l'immi gration marocaine de Belgique, 2004. 5 • AnnickLENOIRACHDJIAN,:Appréhender la nation, vivre en diaspora regards arméniens, 2006.
Endoétrangers
Exclusion, reconnaissance et expérience des Rroms et gens du voyage en Europe
Sous la direction de Kàtia LURBE I PUERTOet Frédéric LE MARCIS
6 Carrefours
MîsE E pàgE : CW DEsîg
D/2012/4910/24
© HarmattanAcademia s.a. Gràd’PàcE, 29 B-1348 Louvain-la-neuve
ISBN : 978-2-8061-0062-7
Tous droits de reproduction, d’adaptation ou de traduction, par quelque procédé quece soit, réservés pour tous pays sans l’autorisation de l’éditeur ou de ses ayants droit.
www.editionsacademia.be
Kàtia LURBE I PUERTO,docteur en sociologie de l’Université Autonome de Barcelona et de l’École des hautes études en sciences sociales de Paris, est actuellement chercheuse associée à l’Institut Français d’éducation (IFé), ENS de Lyon. Elle a travaillé en Angleterre, en Espagne, en France et au Luxembourg sur des questions relatives à la santé (accès aux soins ; soins à la santé mentale des migrants ; prévention et promotion à la santé) et à l’intervention sociale (programmes d’intégration sociosanitaire des popu lations étrangères). Elle a assumé la direction scientifique de la recherche « Santé et Prévention chez des Rroms/Tsiganes de la Région d’ÎledeFrance », financée par l’INPES/IRESP (20082011).
Frédéric LE MARCIS(ENSLyon, UMR5206 Triangle),anthropologue, est professeur à l’École Normale Supérieure de Lyon (ENSLyon), actuellement en délégation à l’Institut de Recherche pour le Développement (UMR 912 SESSTIM) et en poste au Burkina Faso. Il a travaillé en Afrique et en France sur des questions relatives à la santé (accès aux soins de migrants rroms, expérience du sida en Afrique du Sud). Il travaille actuellement sur la ques tion de la production des connaissances dans le cadre d’essais cliniques menés en Afrique et étudie leurs effets sur le politique et les sujets.
EXCLUSION, RECONNAISSANCE ET EXPÉRIENCE DES « ENDOÉTRANGERS » EN EUROPE
Kàtia LURBE I PUERTO Frédéric LE MARCIS
Depuis l’année 2010 ceux qui sont nommés de manière sou-vent indistincte « Rroms » et/ou « gens du voyage » occupent de 1 manière récurrente une place importante dans le débat public . Qu’il s’agisse de la discussion dans la presse écrite de « l’affaire des bébés bulgares » (cf. infra), du démantèlement des squats de Rroms originaires des Balkans ou des violences ayant fait suite à la mort 2 d’un jeune manouche dans le cadre d’un contrôle de la route , il
1. Les situations étant diverses selon les pays et les langues dans lesquels les auteurs de cet ouvrage travaillent, nous avons choisi de manière pragmatique et dans un souci d’homogénéité de lecture d’uniformiser l’orthographe du terme« Rrom » (que nous accordons en nombre et gardons invariable en genre) au lieu de « Rom ». renvoie à l’orthographe romani etLe doublement du « r » permet d’éviter les confusions avec la ville de Rome. Avant son usage politique (impulsépar le projet de fabrication d’une identité européenne rrom par certaines élites politiques rroms), il n’était pas usité par la grande partie des populations origi naires ou non de l’Europe de l’Est que ce terme désigne aujourd’hui. Malgré l’apparition du terme dans le discours politique à l’échelle européenne, les popu lations concernées ne s’y reconnaissent pas forcément davantage et lorsqu’il leurest demandé de s’autodénommer, se définissent aussi bien comme Manouche, Sinti, Gypsy ou encore Espagnol, Français, Belge, etc. L’orthographe retenue pour ce terme dans cet ouvrage relève donc d’une logique éditoriale et n’est pas le produit d’une prise de position sociologique ou politique. La difficile obtention d’un consensus sur ce sujet et les dimensions politiques sousjacentes à l’acte de nommer rappellent la nécessaire réflexivité du chercheur en la matière. Notrepropos n’est pas de discuter de la pertinence de telle ou telle appellation, mêmesi nous reconnaissons l’importance de ces questions (Martiniello, Simon 2005 ; Cossée 2010), mais de nous interroger notamment sur les politiques de déno minations, sur leurs effets en terme de pratiques institutionnelles et d’expérien ces de subjectivation. 2. Cf. « Mobilisation contre la délinquance rom »,Le Figaro11/06/2010 ; « Sarkozy accusé de “stigmatiser” les Roms et les gens du voyage »,Libération, 22/07/2010. La production de ce discours a suscité la mobilisation de chercheurs travaillant sur ces questions, comme en témoigne la tribune publiée dans le quotidienLe Monde par des chercheurs du réseau et centre de ressources
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ENDOÉTRANGERS
est un registre commun à l’ensemble de ces discours produits, celui del’incongruité. Il s’applique de manière indifférenciée sur les popu-lations dénommées « Rroms », « Manouches », « Tsiganes », « gens du voyage », etc. Deux exemples récents illustrent ce constat. Le premier concerne le traitement médiatique d’une affaire de trac de bébés bulgares, le second est relatif aux commentaires recueillis sur le site d’un journal en ligne à la suite de la parution d’un article relatant les réexions menées lors du colloque à l’origine de ce 3 projet éditorial .
1.
 « L’AFFAIRE DES BÉBÉS BULGARES » : LA PRODUCTION SOCIALE DE « L’ENDOÉTRANGER »
De 2004 à 2006, la presse quotidienne française s’est fait l’écho de ce qui a été alors dénommé « l’affaire des bébés bulgares ». Des femmes bulgares, la plupart prostituées, sous l’emprise de compa-triotes traquants et majoritairement d’origine rrom venaient accoucher en France et revendaient dès leur naissance leurs bébés à des familles françaises en mal d’enfants. Ces dernières étaient en majorité d’origine tsigane. L’analyse des commentaires publiés à l’occasion de cette « affaire » témoigne de la force de stéréotypes con-cernant ces populations dans l’opinion générale et de leurs consé-quences sur l’incapacité des observateurs à saisir au-delà d’un discours culturaliste, les enjeux économiques et sociaux auxquels ces populations font face. Fatima Mernissi propose la notion de « discours sonores » pour désigner les propos qui se font entendre dans le domaine légal et juridique et dans les médias, deux milieux de diffusion d’idées qui permettent la reproduction et l’amplica-tiondans la société de contenus et de formes des discours (Mernissi
UrbaRom (http://urbarom.crevilles.org/) : « Roms et “gens du voyage” : briser l’engrenage de la violence »,Le Monde, 27/07/2010. 3. Il s’agit du Colloque International « Dynamiques, politiques et expériencesdu rapport aux “endoétrangers” en Europe : Rroms, Manouches, Yéniches, Gitans et gens du voyage » qui a tenu lieu du 27 au 29 avril 2009 à l’Université Victor Segalen – Bordeaux 2.
Exclusion, reconnaissance et expérience des « endoétrangers »…
1990 :16-17). En introduisant ce volume par une discussion des discours sonores collectés autour de l’affaire de la vente des vingt-trois bébés bulgares à des familles d’accueil françaises entre 2001 et 2005 nous souhaitons nous placer d’emblée dans une posture critique visant à interroger les lieux communs, les raccourcis cultu-ralistes, voire racistes, qui saturent les discours produits sur les popuCes diver-ou « rroms. » tsiganes », « gitanes », lations dites « sesappellations renvoient à ce que nous désignons par la gure socialel’endoétranger », de « discours produits également au sujet de populations appelées sintis, manouches. En France, ces désigna-tionssont parfois remplacées par une catégorie administrative qui masquemal une logique fondée sur l’identication ethnique, celle de « gens du voyage ». La brève réexion sur cette affaire va au-delà du cas spécique concernant deux catégories de groupements humains fortement stigmatisés – « les Tsiganes bulgares » et « les Gitans français » – elle s’inscrit dans une problématique plus vaste, celle de la production sociale et de la construction cognitive et symbolique de « l’endoétranger », une gure sociale d’altérité dé-nie comme étrange, intemporelle, menaçante et voire même hostile à la « société » dans laquelle elle s’inscrit. Dans les descriptions faites par la presses’articulent en effet les registres de l’ethnie, de la misère et du crime.Ayant lieu un mois à peine après l’adhésion de la Bulgarie à l’Union européenne, le procès de l’affaire des bébés bulgares fait laune des journaux, suscitant dans l’espace public l’inquiétude sur unesoi-disant recrudescence du trac organisé de 4 bébés entre l’Europe de l’Ouest et l’Europe de l’Est . À partir d’un regard croisé sur les différentes versions diffusées par la presse écrite, il est possible de reconstituer chronologiquement
4. Le jugement médiatisé révèle la faille du système pénal français. La France a en effet signé le 25/05/2000 le traité des Nations unies intitulé « Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants » mais ne disposait pas au moment du procès d’une qualification per mettant de juger ces crimes dans son code pénal. Le jugement de l’affaire par le Tribunal correctionnel de Bobigny consacre ainsi l’entrée dans la jurisprudencedu délit de « traite d’être humain », introduit dans le code pénal par la loi du 18/03/2003.
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