Au bord des fleuves de Babylone
160 pages
Français

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Au bord des fleuves de Babylone , livre ebook

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160 pages
Français

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Description

Alors qu'il était en voyage d'affaires à Bagdad après la guerre des six jours, l'auteur a été témoin d'une tragédie qui frappa les juifs d'Irak. Accusés d'espionnage au bénéfice d'Israël, plusieurs d'entre eux, parmi lesquels des chrétiens et des musulmans, ont été pendus en 1969. A travers ce roman, l'auteur leur rend hommage.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 2012
Nombre de lectures 45
EAN13 9782296482425
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Au bord des fleuves de Babylone
Antoine Safar


Au bord des fleuves de Babylone


A la mémoire des Juifs d’Irak


L’H ARMATTAN
© L’H ARMATTAN , 2012
5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-56289-9
EAN : 9782296562899

Fabrication numérique : Actissia Services, 2012
REMERCIEMENTS
au Rabbin Daniel Farhi,
à Madame Gisèle Altman,
à Monsieur Jean Azouvi,
à Madame Isabelle Berkowitz,
à Madame Corinne Dejean,
à Madame Carole Salomon,


Et à toutes les personnes qui m’ont conseillé
dans la réalisation de ce livre.
INTRODUCTION
Les Juifs d’Irak, qui en parle encore ?

Leur tragédie est-elle devenue, à l’instar de tant d’évènements qui ont ensanglanté l’humanité, une petite virgule perdue dans les méandres du temps ?

Je ne suis pas juif mais témoin d’une tragédie qui, en 1969, juste après la guerre des six jours, alors que j’étais en voyage d’affaires à Bagdad, frappa les Juifs de ce pays. Je tiens par ce roman, basé sur des faits réels, fruit de mes recherches à travers des archives, des documents, des livres que j’ai achetés ou qui m’ont été offerts, des renseignements sur Internet, de mes souvenirs personnels jumelés avec une histoire tissée d’amitiés, d’amour, de joie, de drames, de passions, d’émotions et d’espoir, à leur rendre justice.

NB : je tiens à signaler que mon roman est essentiellement inspiré de deux livres : Adieu Babylone de Naim KATTAN et Le Souffle du Levant de Chlomo HILEL. Je tiens ici à leur rendre hommage.

***

C’était en 1969. J’étais à Londres à cette époque. Le hasard ou la providence voulurent que je fisse la connaissance d’un chaldéen, un chrétien d’Irak. Désireux d’approfondir l’histoire des Juifs de ce pays, je lui demandai un rendez-vous qu’il m’accorda spontanément. Il s’appelait Jean, mais vivant en Angleterre, il avait pris le surnom de Johnny. Prévoyant d’avoir avec lui un long entretien, je glissai mon magnétophone dans ma poche.

Il habitait dans une luxueuse résidence à Queensway. A peine avais-je franchi le seuil de son appartement qu’il me reçut à bras ouverts. Il me conduisit vers le salon où il me pria de m’installer dans un fauteuil fort confortable.

Il me proposa d’emblée une tasse de café. Il s’excusa de devoir s’éclipser un instant me laissant seul le temps de revenir avec un plateau en argent sur lequel fumaient deux belles tasses en porcelaine entourées de confiseries de tous genres.

Je remarquai entre-temps que son appartement était d’un décor sobre, sans luxe ostentatoire. Accrochés au mur, des tableaux choisis avec beaucoup de goût, des paysages et des natures mortes. Sur le buffet trônait le portrait de sa femme et de ses trois enfants. Dans un coin de la salle à manger, je remarquai un joli piano droit. Il s’installa en face de moi. Après avoir branché mon magnétophone, curieux, je lui demandai :

« Qui joue du piano ?
Ma femme, me répondit-il avec un gentil sourire, elle est actuellement en voyage. »

Et nous commençâmes à mieux nous connaître. Quelle fut grande sa joie quand je lui appris que j’étais libanais ! Ah, ce Liban qu’il connaissait si bien et qu’il adorait !
A Bagdad
Après quelques minutes de conversation, il aborda lui-même le sujet qui m’intéressait le plus.

« Alors vous désirez avoir des renseignements sur les Juifs d’Irak. Bon, par quoi commencerai-je ? Voulez-vous que je vous en parle rapidement ou en détails ?
Oh plutôt avec le maximum de détails !
Je vous préviens que ce sera très long.
Qu’à cela ne tienne. Je vous écoute. »

Je dois dire que je suis tombé sur un Johnny volubile. Je le laissai parler en l’écoutant avec une grande attention.

« Toutefois, avant de parler des Juifs d’Irak, je voudrais évoquer un sujet qui me tient beaucoup à cœur, celui de l’Irak en général et de Bagdad en particulier. »

Et prenant une pause, il poursuivit :
« Avez-vous entendu parler de Haroun el Rachid, ce grand calife contemporain de Charlemagne, à qui il offrit une somptueuse horloge à eau, le clepsydre, alors qu’en Europe, l’on comptait sur le soleil pour connaître à peu près l’heure ? Bagdad, cette ville qui connut une grande culture quand l’Occident était plongé dans l’illettrisme, cette ville avec ses astrologues, ses savants, ses mathématiciens et ne dit-on pas que ce sont les Arabes qui ont inventé le zéro qu’ils avaient, semble-t-il, appris des Indiens. L’algèbre et les chiffres que nous utilisons et qui sont la base de tant d’inventions ne sont-ils pas des découvertes de cette partie du monde ? Ses poètes tels que le chantre du vin et de l’amour, Abou Nawas, qui était chrétien et Al-Moutanabi. Bagdad, la ville des mille et une nuits, de Sindbad le Marin, d’Ali Baba et des quarante voleurs. Bagdad, traversé par ce fleuve immense qui a pour nom le Tigre. Et c’est un véritable tigre. Il coule, il coule, faisant danser sur ses flancs des barques de toutes les couleurs. Il lui arrive parfois, me dit Johnny dans un grand éclat de rire, de charrier les cadavres d’un bœuf ou d’un âne mais cela fait partie du charme de la ville. Et vous voyez souvent en été des jeunes gens en slip le traverser, hardiment !
Dois-je vous parler de ces cabanes construites en nattes de roseau que l’on appelle les chardaghs et de ces cafés, dont surtout le fameux Café Haj Amin, qu’on a plantés à son bord ? Dois-je vous parler des hommes en tenues folkloriques, les têtes ornées d’un keffieh, d’un agal ou d’un yashmagh égrenant leur chapelet d’ambre et des hommes en costume occidental buvant leur café amer aromatisé de cardamome ou sirotant une bonne limonade à base de citron ou de jus de mûre et fumant leur narguilé tout en jouant au tric-trac ?
Dois-je vous parler des bonnes pâtisseries et de la glace arabe faite à base de musc et d’eau de fleur d’oranger ?
Dois-je vous parler du bon verre d’arack zahlaoui, soit disant importé du Liban, que l’on ingurgite le soir avec de petites assiettes de mezzés ? En général, dans certains de ces restaurants, les femmes et les hommes ne se mélangent pas. Il y a néanmoins une partie réservée aux familles ou aux femmes seules.
Dois-je vous parler de ses belles artères telles que la rue Rachid, la rue Abou Nawas qui longe le fleuve où les calèches que l’on appelait arabia croisent les automobiles roulant à toute vitesse dans un concert étourdissant de klaxons ? Ne parlons pas des feux de signalisations, l’on se demande à quoi ils servent !
Il est inutile à Bagdad d’avoir une adresse précise, c’est par exemple telle rue près de la mosquée, face à la pharmacie, à gauche de l’épicerie. »

Il me parlait aussi de cette île couverte d’une épaisse végétation qui porte un nom un peu bizarre, Jazirat Oum el khanazir (traduction en français : île mère des cochons) à laquelle on accède dans de petites barques pour pique-niquer et manger le mazgouf.

« Savez-vous ce qu’est le mazgouf ? » me demanda Johnny. Comme je lui répondis par la négative, en bon irakien, il se mit à me le décrire avec force détails.

« On l’appelle plutôt samak mazgouf. Il s’agit d’un poisson grillé. Mais il y a une façon spéciale de le préparer. C’est une carpe d’environ quarante-cinq centimètres. En général, un pêcheur installé sur la jetée la conserve dans l’eau, attachée à un poteau afin qu’elle reste en vie. Celui-ci exhibe un long couteau avec lequel il tue le poisson, ensuite, il le sale, le saupoudre de curry, l’enfile sur une broche en bois et le dispose près du feu, jamais au-dessus. Puis il le retourne, le pose sur la braise et y ajoute des oignons et des tomates. »

Sa façon de parler du mazgouf me donnait l’eau à la bouche. Comme ce devait être succulent !

Et Johnny de poursuivre :
« En général, les pique-niqueurs le mangent installés sur une natte au bord du fleuve mais il est aussi servi couramment dans les restaurants et même à la maison.
Ah ! reprit-il, j’ai oublié de vous parler de ces petits souks où fourmillent des hommes et des femmes se déplaçant comme des fantômes, vêtus de leurs abayas et des vendeurs des quatre saisons proposant à tue-tête leurs marchandises.
L’on ne peut parler de Bagdad sans évoquer ses magnifiques mosquées avec leurs minarets et surtout la mosquée du côté de Kazimiah que l’on ne peut admirer que de loin car c’est l’endroit le plus sacré du chiisme. »

Johnny sortait complètement du sujet car j’étais venu le v

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