L'UMP face à son trio de présidentiables

Pascal Perrineau

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Page Figaro/CEVIPOF DE juin 2014

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• Publié par: CEVIPOF
• Publié le: 11 juin 2014
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• Langue: Français

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LE FIGARO mercredi 11 juin 2014
15ÉTUDES POLITIQUES CHAMPS LIBRES
PASCAL
PERRINEAU L’UMP face à son trio
de présidentiables
En deux ans, aucun « quadra » de l’UMP n’a pu s’imposer comme leader d’avenir,
laissant le champ libre à Nicolas Sarkozy, Alain Juppé et François Fillon.
ment liée au coût de son affrontement dras » de l’UMP auxquels l’opinion prê- aux turbulences qui ont saisi l’ensemble epuis le départ de son président
Jean-François Copé, l’UMP avec Jean-François Copé ; Nicolas te aux alentours de 20 % de cote d’ave- des dirigeants de l’UMP.
commence à poser les problè- Sarkozy, après une lente reconstruction nir*, Nathalie Kosciusko-Morizet et Dans les électorats décisifs de l’UMP,Dmes clefs de son avenir : celui de sa popularité, semble pâtir de la François Baroin sont les deux leaders de l’UDI et du MoDem qui constitueront Professeur
de la figure d’un nouveau présidentia- montée des affaires liées – entre autres - qui, en moyenne, obtiennent le plus de la base d’une victoire ou d’une défaitedes universités
ble, celui de la stratégie d’alliance au aux conditions de financement de la soutiens. Valérie Pécresse et Xavier Ber- en 2017, Alain Juppé bénéficie de forts
et chercheur au Centre centre qui a toujours marqué le destin campagne de 2012 et de l’idée que le trand ont plutôt connu une érosion de soutiens (67 % chez les sympathisants
de recherches des partis de gouvernement de droite temps politique de l’UMP doit s’éman- leur capital de popularité. Bruno de l’UMP, 64 % chez ceux de l’UDI et
politiques de Sciences esous la V République et celui de la place ciper du temps judiciaire d’un homme Le Maire et Laurent Wauquiez, qui pen- 54 % chez ceux du MoDem) devant
Po (Cevipof) de l’organisation dans le dispositif du même s’il s’agit de celui qui a été à deux dant de longs mois étaient « décro- François Fillon (60 %, 55 %, 50 %) et
choix de son présidentiable en 2017. reprises le candidat de l’UMP à l’élec- chés », ont rejoint, tout en connaissant Nicolas Sarkozy (70 %, 47 %, 15 %). On
Cette réflexion s’engage dans un tion présidentielle. toujours un handicap, le lot des « qua- voit se dessiner dans ces profils diffé-
Plus de deux ans après « contexte de tous les dangers » : une Dans la concurrence qui s’est installée dras » porteurs d’un renouvellement rents des capacités inégales à rassembler
sa double défaite, présiden- abstention protestataire à un haut ni- entre la personnalité du fondateur de démographique. Cependant, ces « qua- les milieux proches de l’UMP et du cen-
tielle et législative, l’UMP, veau, un Front national à 25 %, une orga- dras » sus- tre droit sur lesquels se construit toute
secouée par l’affaire nisation introvertie tout au délice délétè- ceptibles de victoire présidentielle à droite.Même dans un contexte politique
Bygmalion et la question re des conflits d’ambition, des désaccords capter le dé- C’est à partir de ces « fondamen-
où la défiance s’est installée et où des conditions de financement tactiques et des démarquages program- « boussole- taux » que l’UMP et la droite doivent
de la campagne de Nicolas matiques. Et pourtant, jamais la gauche ment de engager leur réflexion de « sortie de cri-les outsiders peuvent s’introduire dans le jeu,
se ». Quel est l’homme le plus suscepti-Sarkozy, est en pleine crise n’a été aussi faible et l’espace potentiel nombrela « présidentialité » ne se construit pas en
de leadership, de stratégie pour un retour de la droite aux affaires d’électeurs à ble de rassembler son « camp naturel »
et d’organisation. aussi important. De juin 2012 à juin 2014, quelques mois ou même en une paire d’années la recherche après deux ans de divisions permanen-»
Empêtrée dans de vieux dé- tous les partis de gauche, et particulière- d’un renou- tes ? Si une réponse convaincante n’est
bats, des stratégies ment le Parti socialiste, ont connu un vrai l’UMP et celle de l’ancien président de la vellement du leadership à l’UMP ne pas apportée dans les mois qui viennent,
obsolètes et des leaderships processus de délitement : - 30 points de République, la première s’impose large- semblent pas bénéficier de la crise ma- l’UMP retournera au culte de ses petites
ment chez les hommes, les personnes jeure que traverse l’UMP ; tout au et grandes différences, à sa culture de du passé, l’UMP est entrée « bonnes opinions » pour le PS, - 14 pour
dans l’avenir à reculons. Elle le Parti de gauche, - 11 pour le PC, - 7 pour âgées de plus de 50 ans, les cols blancs, contraire, puisque l’ensemble de ces l’échec, et ouvrira davantage l’espace
ne met pas à profit ces années Europe Écologie-Les Verts (baromètres les retraités, les électeurs proches de la leaders perd entre un et six points de d’une recomposition des droites en de-
d’opposition pour construire Figaro Magazine, TNS Sofres/Sopra, en- gauche et du centre (UDI et MoDem). mai à juin 2014. Leurs aînés Nicolas hors de la famille politique dont elle est
une alternative crédible tre juin 2012 et juin 2014). Les deux hommes font jeu égal chez les Sarkozy (- 3 points) et François Fillon l’héritière. ■
et récupérer l’énorme En face, le principal parti d’opposition femmes, les 25-34 ans et les sympathi- (- 1 point) connaissent le même sort. *Cote d’avenir Sofres des « quadras »
discrédit qui touche a accompagné cette forte érosion : sants de l’UMP. Nicolas Sarkozy ne par- Seul Alain Juppé reste stable et échappe UMP entre juin 2012 et juin 2014.
la majorité de gauche - 10 points pour l’UMP de juin 2012 à juin vient plus à s’imposer clairement que
au pouvoir. Des cinq leaders 2014 alors que la cote du Front national chez les 18-24 ans, les sympathisants du
politiques auxquels l’opinion restait stable. Pour inverser la tendance, Front national et, à un moindre degré, L'évolution comparée de la cote d'avenir d'Alain Juppé2
prête le plus d’avenir, trois l’UMP doit lier son sort à un homme ou parmi les couches populaires (ouvriers et de Nicolas Sarkozy (octobre 2012-juin 2014)
sont de l’UMP : Alain Juppé, une femme capable de la sortir de l’or- et employés). Peu à peu, Alain Juppé est
Nicolas Sarkozy et François nière. Or, en la matière, les électeurs en train de conquérir une position cen-
Différentiel * résultats à interpréter avec prudence
Fillon, dont Pascal Perrineau sont moins sévères puisque sur les cinq trale à partir de laquelle une vocation en raison de la faiblesse des effectifs A. Juppé N. Sarkozy en faveur
expose les atouts et les leaders politiques auxquels ils prêtent le majoritaire à un second tour d’élection
d'Alain JuppéSexe oct. 2012 juin 2014 Évol. oct. 2012 juin 2014 Évol.faiblesses respectives face plus d’avenir un seulement vient de la présidentielle peut se construire.
aux ambitions gauche (Ségolène Royal, 33 %), un du Cette « présidentialité » est un élé- Homme 36 43 +7 31 33 +2 +10
des « quadras ». ■ centre (François Bayrou, 33 %) et trois ment essentiel dans la conquête des
Femme 33 35 +2 33 32 -1 +2de l’UMP (Alain Juppé, 39 %, Nicolas grandes machines présidentielles que
Sarkozy, 33 %, François Fillon, 32 %)*. constituent les « partis de pouvoir » Âge
eAlain Juppé fait nettement la course sous la V République. Même dans un 21 22 +1 23 36 [phone] ans
en tête ; il semble avoir établi une véri- contexte politique où la défiance s’est
table hégémonie d’opinion depuis qua- installée et où les outsiders peuvent s’in- 25-34 ans 28 30 +2 31 33 +2 -3
tre mois. Depuis février 2014, Alain Jup- troduire dans le jeu, la « présiden-
35-49 ans 30 36 +6 30 36 +6 =
pé a gagné 5 points, Nicolas Sarkozy en a tialité » ne se construit pas en quelques
perdu 7 et François Fillon est resté plus mois ou même en une paire d’années. 50-64 ans 39 41 +2 32 27 -5 +14
stable en ne gagnant qu’un point. Le Cette difficulté se lit dans le fait que, de-1 Évolution de la cote 65 ans et plus 47 55 +8 41 31 -10 +24
maire de Bordeaux comme leader poli- puis deux ans, aucun « quadra » n’ait
d'avenir de F.