Il y a 100000 ans, le plus ancien atelier de fabrication de pigments
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Description

Il y a 100000 ans, le plus ancien atelier de fabrication de pigments Comment les hommes préhistoriques fabriquaient-ils leurs pigments? Une collaboration internationale vient d'apporter, pour la première fois, des renseignements sur les recettes et les techniques élaborées par les artisans, il y a 100000 ans, soit 60000 avant les peintures de la grotte de Chauvet. Leurs travaux révèlent une complexité comportementale et des capacités de planification insoupçonnées jusqu'à présent. Les pigments rouges, jaunes et noirs, le plus souvent constitués d'oxydes de fer, ont été utilisés par l'homme préhistorique en Afrique et en Europe depuis au moins 200 000 ans. Jusqu'à présent, la préparation et le stockage des pigments avant le Paléolithique supérieur (40 000 -10000 ans) étaient méconnus. En 2008, deux ensembles d'outils et de fragments de matière colorante ont été découverts à la grotte de Blombos*, en Afrique du Sud, dans des niveaux âgés de 100 000 ans. Le premier se compose d'un grand coquillage, plus précisément une coquille d'ormeau, recouvert d'une matière colorante rouge de 5 mm d'épaisseur et contenant également un fragment de matière colorante utilisé ainsi qu'un éclat de quartzite (roche constituée de cristaux de quartz). Un galet, portant des traces de percussion, préservait le contenu de ce coquillage.

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Publié le 24 janvier 2012
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Langue Français

Extrait

Il y a 100000 ans, le plus ancien atelier de fabrication de pigments

Comment les hommes préhistoriques fabriquaient-ils leurs pigments? Une collaboration internationale vient d'apporter, pour la première fois, des renseignements sur les recettes et les techniques élaborées par les artisans, il y a 100000 ans, soit 60000 avant les peintures de la grotte de Chauvet. Leurs travaux révèlent une complexité comportementale et des capacités de planification insoupçonnées jusqu'à présent.

Les pigments rouges, jaunes et noirs, le plus souvent constitués d'oxydes de fer, ont été utilisés par l'homme préhistorique en Afrique et en Europe depuis au moins 200 000 ans. Jusqu'à présent, la préparation et le stockage des pigments avant le Paléolithique supérieur (40 000 -10000 ans) étaient méconnus. En 2008, deux ensembles d'outils et de fragments de matière colorante ont été découverts à la grotte de Blombos*, en Afrique du Sud, dans des niveaux âgés de 100 000 ans.

Le premier se compose d'un grand coquillage, plus précisément une coquille d'ormeau, recouvert d'une matière colorante rouge de 5 mm d'épaisseur et contenant également un fragment de matière colorante utilisé ainsi qu'un éclat de quartzite (roche constituée de cristaux de quartz). Un galet, portant des traces de percussion, préservait le contenu de ce coquillage. Ce premier ensemble comprend également une plaquette de quartzite et des éclats de quartz qui comportent des résidus de pigment et des traces d'utilisation comme meules et broyeurs. Enfin, un os allongé, sans doute employé pour mélanger ou appliquer le pigment, une omoplate de phoque et une vertèbre d'herbivore accompagnaient cet ensemble. Le second ensemble est constitué d'un ormeau recouvert également en son fond d'une couche de pigment. Il contient aussi un petit bloc de quartzite taillé, enduit de pigment, ainsi qu'un fragment de minéral rouge portant des traces d'abrasion et de taille.

En étudiant de manière approfondie les fragments de colorants ainsi que les résidus présents sur les outils et dans les coquillages mis au jour, l'équipe (incluant des chercheurs du CNRS et de l'Université Bordeaux 1, en collaboration avec le Centre de recherche et de restauration des musées de France) est parvenue à reconstituer la recette mise en oeuvre par les hommes préhistoriques pour fabriquer leur pigment. Ils ont notamment mis en évidence l'utilisation délibérée de trois types de roches riches en deux minéraux, l'hématite et la goethite, des oxydes de fer parmi les plus répandus. Les artisans de l'époque ont produit une poudre colorante soit en débitant puis en broyant ces roches, soit en les abrasant contre des meules en quartzite. La découverte de fragments d'os spongieux suggère que la moelle osseuse devait être utilisée comme liant. De plus, la présence d'une trace circulaire, formée après séchage des pigments sur la paroi du coquillage le mieux conservé, révèle que le mélange colorant était liquide. Enfin, les coquillages ont été utilisés en tant que contenants à plusieurs reprises pour mélanger et stocker du pigment.

Cet atelier constitue le plus ancien témoignage d'une production et d'une conservation de matières colorantes. Sa découverte permet d'enrichir considérablement nos connaissances dans ce domaine. La complexité des techniques mises en oeuvre implique des capacités cognitives permettant la planification et l'exécution de tâches complexes, comme la combinaison de matières premières de différentes natures et origines, l'utilisation du feu pour faciliter l'extraction de moelle osseuse, l'emploi de coquillages en tant que récipients ou palettes de couleur. Les artisans disposaient déjà, il y a 100 000 ans, d'un savoir-faire concernant les propriétés colorantes de différents minéraux, notamment les oxydes de fer.

A quoi servaient ces pâtes colorantes? L'absence de résine, de gomme ou de cire semble écarter l'hypothèse de leur emploi en tant qu'adhésifs pour l'emmanchement d'outils. Le coloriage d'une matière (pierre, peau, corps humain), la conservation ou protection de certains matériaux (tannage des peaux, protection du corps contre le Soleil...), la consommation en tant que médicament ou complément alimentaire, la production de représentations abstraites ou figuratives, figurent parmi les quatre hypothèses d'utilisation les plus plausibles.

* Ce site archéologique était déjà connu pour la découverte des gravures abstraites et des parures en coquillage parmi les plus anciennes répertoriées au monde, datant respectivement de 90-75000 et de 75000 ans.

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