100 - l ASSOCIATION BELGE NAPOLÉONIENNE
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100 - l'ASSOCIATION BELGE NAPOLÉONIENNE

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100 - l'ASSOCIATION BELGE NAPOLÉONIENNE

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Langue Français
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Extrait

    Revue de  l’ASSOCIATION BELGE  NAPOLÉONIENNE
 
SOCIÉTÉ DE RECHERCHE HISTORIQUE       FONDÉE EN 1979
 Janvier - février 2004     A propos des Aigles impériales.     La baraque de l’Empereur à Boulogne.     La campagne d’Helvétie, Mars-sept. 1799, Masséna : stratège et tacticien.     La Campagne de Belgique racontée parc ceux qui l’ont vécue. 6evolet.    La brigade Detmer.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   
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  Bimestriel (ne paraît pas en juillet-août) BUREAU DE DÉPÔT - 5140 SOMBREFFE Edit. Resp : P. MAES – Résidencele Flaubert, rue Sainte-Anne 13 Bte19 – B-6220 FLEURUS. (P.V. 10 €)
 
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En couverture : originale de René V
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L’Association Belge Napoléonienne célèbre son 25eanniversaire et publie à cette occasion le numéro cent de sa Revue.  Fondée en 1979 à l’instigation de Charles BRASSINE, elle est depuis 1990 présidée par Patrick MAES qui a su poursuivre avec conviction, objectivité, rigueur et sincérité l’œuvre de ses prédécesseurs.  L’Histoire Napoléonienne ? quelles passions n’a-t-elle pas suscitées et ne suscite-t-elle pas toujours ! La violence des sentiments qui se sont exprimés est à la mesure de la grandeur du Héros.  Aux apologies nées du Mémorial de Sainte-Hélène répond une légende noire, à l’hagiographie des adeptes du Second Empire réplique un dénigrement systématique qui connaît son apogée avec la chute de Napoléon III.  Au début du XXe la démarche des historiens se fait plus siècle, impartiale, plus humaine. Le sujet prend de la hauteur.  C’est à cette philosophie que souscrit avec succès l’Association Belge Napoléonienne.  Elle oriente ses travaux sur l’occupation française de la Belgique entre 1795 et 1814, l’impact de la conscription, l’évolution militaire.  Elle se penche sur les survivants de l’épopée restés fidèles à leur chef, rendant hommage aux héros sans visage, de toutes origines, qui suivirent l’Empereur par les chemins de l’Europe…  Il faut féliciter l’Association Belge Napoléonienne, car elle accomplit son devoir de Mémoire, obéissant ainsi à la pensée de Bonaparte écrivant dès 1791 dans son discours de Lyon :  L’Histoire, cette base des sciences morales, ce flambeau de la vérité, cette destructrice des préjugés ne devra pas être oubliée !  
 
Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
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      A l’heure où l’Association Belge Napoléonienne va célébrer le 25e anniversaire de sa fondation et la parution du numéro cent de sa revue, je me sens, envers elle, un devoir, celui d’exprimer à son Président et à ses Membres, en ma qualité de Président fondateur, ma gratitude pour l’esprit qui les anime et les buts élevés qu’ils ont atteints.  En effet, lorsque l’on voit le chemin parcouru depuis le 5 mai 1979, où une poignée d’inconditionnels de l’Epopée napoléonienne tenaient la nouvelle association sur les fonts baptismaux, et aujourd’hui, l’on ne peut être qu’admiratif devant le travail accompli.  Les buts que se sont assignés les dirigeants actuels sont en soi une tâche ardue qui demande de l’enthousiasme et de la compétence, mais elle sera menée à bien, j’en ai la vive conviction.  La revue à laquelle de nombreux historiens apportent leur concours est une source d’informations originales, toujours agréables pour le lecteur, souvent précieuses pour le chercheur.  On n’aura jamais tout dit sur Napoléon. Cet univers qu’il représente n’est pas encore entièrement exploré et ce que l’on croit connaître, souvent on ne l’a qu’effleuré.  C’est à cette merveilleuse connaissance du personnage, de sa vie, de son œuvre, de son temps, qu’avec tant de bonheur et d’efficacité, se consacre l’Association Belge Napoléonienne.  Je m’associe de tout cœur au 25e de l’A.B.N. et lui anniversaire souhaite longue vie et succès persistant.  
    
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
 Charles Brassine Président fondateur.
Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
 
 ASSOCIATION BELGE NAPOLÉONIENNE  L’histoire d’un siècle : 1770 – 1870  
Comité d’honneur.  M. R. BRUNON< Mme ROYEN. M. le vicomte B. DUHESME. M. A. DUURING. M. R. VAN DEN NESTE, consultant A.B.N. Gén. de Brig. Aviateur er G. VAN EECKHOUDT, M. B. CHEVALLIER, Conservateur de Malmaison. Général. De brigade (2S) A. BERNÈDE. Mme. A. de CHEFDEBIEN, Directrice du Musée de la Légion d’honneur. Contre-Amiral G. PRUD’HOMME, Conservateur du Musée de la Marine de Paris. M. J. PEROT,Directeur du Château de Compiègne.  Conseil d’administration.  Président : P. MAES Vice-Présidents : M.A. JACOBS  R. PÉTRIS Trésorier : J.C. CRANEMBROUCK Secrétaire : J. MAES Administrateurs : M. COGNAUX  E. JEANDRIENS  R. PHILIPS  Ch. ROUSCHOP  L. TUYPENS  Ch. DEPAUW  Cooptés : J. ROUVROIS  P. MANIET  E. CHARLES  Gestionnaire Fonds Royen : P. VERLY Conseillers historiques : S. DELLOYE.  P. HOOGSTOEL  J.J. PATTYN  N° d’inscription au M.B. : 8630/79  Compte bancaire : 143-0595772-02 Compte IBAN : BE32-1430 5957 7202 SWIFT: GEBABEBB CCP : 000-0429927-23  Cotisations :
 
Belgique : 37 € - C.E : 45 € - Hors C.E : 52 €
Présidence et siège social : Résidence le Flaubert Rue Sainte-Anne 13 Bte19 – B-6220 FLEURUS  Tél. : 071/88.86.59. Internet : http://www.abnapoleon.tk E.Mail : as.bel.napoleon@skynet.be
Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
A propos des Aigles impériales. P. CHARRIE   La baraque de l’Empereur à Boulogne. A. LEGENDRE – P. MAES   Les gardes d’honneur lors du voyage impérial de 1808. P. MEGANCK   La campagne d’Helvétie, mars-septembre 1799, Masséna : stratège et tacticien Gén. de Brig.(2S) A. BERNÈDE   La campagne de Belgique racontée par ceux qui l’ont vécue. 6evolet       La brigade Detmer Cdt. R. BILLUART   
           
 16 mai 2004 :  Journée académique pour célébrer : Le bicentenaire de l’Empire. Le centième numéro de la revue A.B.N. Le 25eanniversaire de l’A.B.N.
P. 4. 
P. 10. 
P. 15. 
P. 25. 
P. 35.
P. 45.
Les articles et documents de cette publication ne peuvent être traduits ou reproduits, même partiellement, sans autorisation préalable et écrite de l’Association Belge Napoléonienne. Les articles signés n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. Le service de cette publication est exclusivement réservé aux sociétaires de l’A.B.N.
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Notre intention n’est pas de recommencer l’histoire des aigles, en dépit de l’intérêt qu’elle représente. Pierre Charrié a traité largement la question dans son ouvrage « Drapeaux et étendards de la Révolution et de l’Empire ». Par contre, pour ce centième numéro de la Revue A.B.N., il lui a semblé attrayant d’évoquer certains événements peu connus ou énigmatiques. En cette année bicentenaire de la proclamation de l’Empire, Pierre Charrié a également trouvé utile de commenter quelques décisions impériales et tenté d’apporter quelques lumières sur des questions toujours mal élucidées.
A PROPOS DES AIGLES IMPÉRIALES   Pierre CHARRIÉ  
    Les remises et les pertes.   L’Empereur, au début de son règne, a été très généreux.  En 1804, en raison d’une aigle par bataillon ou escadron, on peut évaluer à près de 1.100 le nombre d’aigles prévues pour l’armée et la marine.  A la cérémonie du 5 décembre 1804, il est bien évident que le nombre d’aigles prêtes était sensiblement inférieur à ce chiffre et, dans la pratique, c’est au cours de 1805 que la totalité est remise.  L’Empereur voyait grand et même un peu trop.  Par exemple, chaque légion de gendarmerie reçoit 4 aigles. De simples bataillons sans tradition militaire, comme les Tirailleurs du Pô, les Tirailleurs corses, les Pionniers noirs, reçoivent une aigle. Sans doute instruit par le passé, l’Empereur se garde d’omettre la Garde nationale, puisqu’une aigle est remise à chacune des Gardes départementales.   Il n’oublie pas non plus d’honorer ses vieux soldats avec 31 aigles pour les Vétérans. Par contre, il y a quelques restrictions incompréhensibles, comme les Mineurs privés d’aigle, contrairement aux Sapeurs et Pontonniers. Assez surprenant aussi l’octroi, pour les vaisseaux de 74 canons et plus, d’une aigle avec drapeau en sus de leur pavillon.  On peut dire qu’au début de l’Empire, pratiquement tous les Corps militaires ont l’emblème impérial, à part les malheureux mineurs. Seules des rares formations étrangères encore douteuses, telle la Légion hanovrienne, sont écartées.
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Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
Cette situation pléthorique ne va pas durer.  Les lourdes pertes d’Eylau et de Friedland vont amener l’Empereur à des restrictions aboutissant au règlement du 18 février 1808 réduisant chaque régiment à n’avoir qu’une seule aigle. Cette mesure ne sera totalement réalisée que fin 1809.  Désormais, les décisions impériales seront impré-visibles, selon l’humeur.  En 1810 et 1811, on constate que certaines nouvelles formations n’auront pas d’aigle, comme les 30e et 31e  Chasseurs à cheval. Par contre, elle est accordée au 8eChev égerau-L.s   En 1813, après le désastre de Russie et la levée des nouveaux régiments de conscrits, on comble les vides. Nouvelles soies et nouvelles aigles pour les anciens n’ayant plus d’emblèmes et pour les arrivants. Mais là encore, il y a des régiments écartés sans raisons apparentes, tels les 12eet 13eHussards.  Cependant le cas le plus frappant et le plus injuste concerne les fidèles alliés, les Polonais. Rappelons que la légion de la Vistule, organisée dès 1808, forme 4 régiments d’infanterie et 2 régiments de lanciers. Sans refaire l’histoire, rappelons que ces unités proviennent des légions polonaises de 1797 et de la Légion du Danube. A plusieurs reprises, des drapeaux sont réclamés, d’abord en 1808 par Chlopicki. Et un décret du 26 janvier 1809 décide que les Polonais auront des emblèmes identiques à ceux de l’armée française, mais il n’est pas parlé d’aigle. L’ordre n’est pas exécuté.  Le 31 août 1811, Kazsinowski, colonel, réclame à Clarke1ses drapeaux.  Ce dernier, en juillet 1812, demande à l’Empereur d’accorder une aigle à chacun des régiments, mais à nouveau il n’y a aucune suite.  Le 1erLanciers en Espagne, en 1811, porte toujours des guidons marqués « République Française » et, en 1813, à Spandau, l’infanterie ne présente que des hampes avec une pique.  Nous n’avons trouvé à ce jour aucun motif à cet ostracisme, car une simple négligence est improbable.  Autre anomalie de taille, le régiment d’Artillerie à pied de la Garde n’aura pas d’aigle avant 1815.  On connaît la colère et la menace de l’Empereur lors de la perte de l’aigle du 4ede ligne à Austerlitz. Pourtant, au fil du temps, les réprimandes s’estompent. Les aigles                                                           1 Henri-Jacques-Guillaume Clarke, duc de Feltre, né à Landrecies le 17 octobre 1765, décédé à Neuviller-la-Roche le 28 octobre 1818. Ministre de la Guerre à la place de Berthier du 9 août 1806 à la fin de l’Empire. 
Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
perdues « honorablement » sont remplacées discrètement et ceci sans contrepartie d’un trophée ennemi2.  Les remplacements ne sont pourtant pas automatiques, particulièrement à partir de 1809, du fait de la réduction à l’aigle unique régimentaire. Par ailleurs, il faut comprendre que c’était au colonel à faire une demande officielle au ministre, démarche pour le moins pénible ; aussi certains préféraient ne rien dire. On peut citer les aigles du 55e (Eylau), du 69e du 93 (Friedland),e (Trafalgar), du 11eDragons (Latein), du 15e Dragons (Albeck), qui  semblent ne pas avoir été remplacées. Par contre, en 1813, le remplacement est général.    Les aigles mutilées.   Les campagnes n’ont pas toujours été heureuses et les aigles ont souvent été mises en péril. Pour éviter la honte de déposer aux pieds de l’ennemi l’aigle d’or, celle-ci a parfois été non seulement dissimulée, mais aussi brisée afin de rendre le trophée informe et anonyme, fracassé à l’image de sa résistance.  L’aigle du 106e, rescapée de Russie, porte la trace d’un coup violent qui en a totalement déformé le dos. Elle a reçu un début de destruction. Une partie de la douille est écrasée, le fuseau manque, la patte droite est tordue, le caisson est cassé, deux chiffres sont perdus.  Celle du 133e, jadis au château de Hesse-Darmstadt, est décapitée et largement trouée, sans fuseau ; seul le caisson est intact. Elle avait été retrouvée en 1840 dans le Mein. Geste désespéré dont nous ignorons les détails.  L’aigle du 123e, tombée aux mains des Prussiens au château de Witemberg le 13 janvier 1814, a également dû subir une démolition : tête écrasée, caisson ouvert, pattes et fuseau totalement aplatis. Ce sont des violences volontaires.   L’aigle du 2e du 9 bataillone léger a vécu une histoire extravagante à Mohrungen le 25 janvier 1807. Nous n’avons pas ici une mutilation décidée car l’aigle, par accident, s’est détachée du socle quelque temps avant le combat et a été placée dans un fourgon pour réparation. En conséquence, le bataillon a combattu avec une hampe munie seulement du caisson. L’affaire ayant mal tourné, trois porte-aigles étant successivement tués, ce caisson portant le chiffre « 9 » est finalement enlevé par les Russes. L’aigle, échappée à la déroute, est remontée sur une hampe de fortune. Ces circonstances permette au 9e nt léger de passer sous silence la perte du drapeau. La vérité                                                           2 4 Lee l’obtient en novembre 1806, même chose pour le 18e ligne de (Eylau), le 4e Dragons (Krems), le 15e ligne et le 1 deer Carabiniers (Friedland), le 14ede ligne (brisée à Eylau), le 86e(perdue en mer).
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demeure longtemps un secret jusqu’à ce que le colonel Meunier, proposé pour le grade de général, voie son nom rayé par l’Empereur en disant :le colonel a perdu une aigle à Mohrungen… Il l’avait appris par les gazettes russes.   
 Les aigles cachées.   L’attachement des soldats à leurs aigles n’est plus à démontrer. Lorsque, malgré leur courage, l’ennemi s’apprête à les capturer, nous avons vu que certains s’efforcent de détruire leur aigle, objet de tant de sacrifices. D’autres vont les enfouir ou encore les porter sur eux en captivité, au prix de ruses et d’abnégation. C’est le cas pour le 123e, le 125e, pour le Cdt Jacquement du 67e, pris sur le vaisseau « l’Aigle » à Trafalgar. Ils réussiront à ramener « l’oiseau » en France lors de leur libération.  Durant la retraite de Russie on brûle les soies ; pour les aigles c’est plus difficile. Ce travail fait à la hâte est souvent un échec et ce sont pour les Russes des trophées faciles. On peut citer l’emblème du 28e Dragons, acheté par les autorités sur un marché, ou encore l’aigle du 4e dissimulée dans un porte-manteau qui Cuirassiers, malheureusement sera volé.  L’histoire de l’aigle du 29e léger est différente et a longtemps été occultée.  En 1963, le long de la rivière Lochitsa, un pêcheur découvre une aigle en un endroit où l’on a déjà trouvé des fusils français. L’aigle est complète avec un caisson sans numéro mais comportant à l’avers et au revers neuf trous. Nous avons eu en main cette aigle qui garde ses poinçons d’origine. Elle a été utilisée deux fois. Les deux trous centraux, les plus gros, doivent correspondre à la 1ère utilisation (un seul chiffre). Le cas n’est pas unique. Nous avons pu reconstituer le chiffre 29, ce qui correspond au 29eléger, division Partouneaux, brigade Camus, présent à Birisov le 28 novembre 1812, détruit le lendemain à la Bérézina. On est en droit de penser qu’en raison d’une situation désespérée, le chef de Corps a décidé d’abord de retirer le numéro, puis de jeter l’aigle et sa hampe3dans la rivière. Il n’existe aucune information sur le sort de la soie, probablement brûlée.  Autre aigle cachée, celle du 23eléger retrouvée en 1980 au fond d’un puits à Soreze. On pense qu’elle aurait été ainsi sauvée de la destruction en mai 1814, lors du retour du Roi, par le capitaine Adhemard.  
                                                          3Il restait un morceau de bois pourri. 
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En 1815, lors de la dissolution du 7e à Chasseurs cheval, il est rapporté que le brigadier-fourrier Gasser aurait enterré l’aigle dans un bois aux environs de Melle4.  Citons enfin le 18e Dragons qui, lors de sa retraite d’Oporto en mai 1809, a éprouvé de lourdes pertes. Les circonstances sont mal connues, mais il est prouvé qu’il a perdu trois aigles. Une a été sauvée par le capitaine du train Sergent Bilange qui, durant sa captivité, a pu la soustraire aux recherches des Anglais. A son retour en France, il l’a remise à Davout le 8 mai 1815. Dans une lettre, cet officier avoue ne pas connaître le régiment mais il pense qu’il s’agit de dragons. On peut penser que le numéro était enlevé, mais il s’agit très probablement du 18eLes deux autres aigles ont disparu mysté- Dragons. rieusement car elles n’ont pas été prises.  N’oublions pas Labédoyère, colonel du 7ede ligne. Lui aussi cache son aigle durant la Première Restauration. Le 7 mars 1815, à Grenoble, à l’arrivée de l’Empereur, elle est portée en triomphe sur une branche de saule. D’après le « Mémorial » et les archives du baron Peyrusse, elle était dissimulée dans un tambour. Elle réapparaît à Strasbourg en 1836, chez le prince Louis Napoléon et ses conjurés5.    Lodyssée de laigle du 86ede ligne.   Lors de l’évacuation du Portugal suite à l’accord de Cintra en 1808, le 86ede ligne- colonel Lacroix - se trouve embarqué sur le bâtiment de transport anglais « Three Brothers ». La troupe à bord comporte l’état-major : le colonel, un chef de bataillon, un adjudant major, un chirurgien major, un officier payeur, un officier d’habil-lement, un adjudant, un tambour-major, un maître armurier et la musique. A ajouter la 1èrecompagnie du 1ebataillon. Effectif total : 284 hommes dont 8 officiers.  Le 15 septembre 1808, le convoi met à la voile. Rapidement, il essuie une violente tempête qui dure une semaine.  Le 24, le vent impétueux et la mer démontée obligent l’équipage à manier les pompes.  Le 25, une voie d’eau importante se déclare sur ce navire vétuste et en mauvais état. Le capitaine tente de revenir à Lisbonne.   
                                                          4Deux-Sèvres.   5 Elle a peut être été conservée par Napoléon III. En janvier 1871 on dit avoir trouvé aux Tuileries une aigle en bronze doré ( ?)
Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
Le 6 février 1810, la garnison doit capituler. L’aigle et son drapeau sont remis et déposés au Royal Hospital de Chelsea à Londres. Cette aigle, tout à fait insolite, est en métal creux, sensiblement plus petite que le modèle officiel et aussi plus légère. La tête est fléchie et le caisson réduit. Il s’agissait d’une mesure tout à fait exceptionnelle mais qui s’explique pour une garnison lointaine et isolée où il était nécessaire d’animer l’amour de la patrie et de son Empereur.  Autre anecdote, celle du célèbre colonel Marbot du 23eChasseurs à cheval, en 1814.  A contre-cœur, il doit renvoyer au Ministre l’étendard et la cravate de son régiment, mais il ne se hâte guère, puisqu’il les envoie seulement le 21 décembre 1814. Par contre il conserve l’aigle.  Lors des Cent-Jours, Marbot passe au 7e Hussards. Comme tous les régiments, il reçoit une aigle modèle 1815 et un étendard au Champ de Mai. Pourtant, c’est l’ancienne aigle qui sera arborée, notre colonel changeant le numéro sur le caisson 23 par 7 hD6de 3 mm s aiépt  etéenrga tuot el , environ. Même changement sur le revers. Les trous de l’ancien 23 sont encore visibles. La dorure très mate est Le 26, la situation ne s’améliore pas. Les infiltrations bien conservée mais n’est pas très belle, car elle a dû être redoublent et on organise des chaînes de seaux. Ces hâtivement refaite. ustensiles faisant défaut, on avise de se servir des shakos Après Waterloo, Marbot, bonapartiste obstiné, conserve de la troupe en y adaptant une anse en corde. Malgré cette l’aigle7Reste à connaître le destin de l’aigle modèle 1815.. tâche épuisante, le navire sombre non loin d’un corsaire Rien ne figure sur l’état de versement à l’arsenal de anglais qui refuse de prendre un seul homme à son bord. Bourges. Seuls 28 militaires, dont le colonel et 3 officiers, trouvent place sur une chaloupe. Outre les hommes, sont perdus : Dernière curiosité, celle de la fameuse aigle du 4e de l’aigle du 1er d’Austerlitz qui se trouve au Musée de l’Ermitage àbataillon, la comptabilité, la caisse, les draps ligne cadis et les toiles pour l’habillement, 300 fusils, la Saint-Pétersbourg. Elle porte sur la tête une vis et un écrou. buffleterie, les gibernes, les habits des musiciens et des sapeurs ainsi que les instruments de musique. Comment expliquer ce vandalisme ?   C’est le malheureux major Bigarré qui donne la raison.    Le grand-duc Constantin avait placé le trophée comme Les ai les curlit avec un système de fixation.ornement de son  outrgansformieéuss.esBigarré, mis à l’écart par l’Empereur, a maintes fois etenté d’être admis à reprendre du service. Demande sans suite puisqu’il s’est vu expédié à Naples…    D é es vénements fortuits, des décisions personnelles ont  affecté quelques aigles, bien entendu en toute illégalité.  Celle du 66ede ligne a connu bien des épreuves.Les énigmes.    En 1805, le régiment est envoyé e n eGmubadeluoéus pet. roLise  Depuis plus de 40 ans que nous nous occupons dnraavpireea ux«,  lesAt ctcéeornn é» ,p ars ulra  flleoqttuee la nsgloanitse. Aigalreqs et soies, demblématique, nous avons été amené à faire un constat placées dans des caisses, sont jetées à la mer. Une partie qui doit nous rendre modestes. En effet, malgré de sera retrouvée mais aucune aigle. Le régiment reste ainsi multiples recherches, des investigations patientes, il faut sans emblèmes. Aussi le général Ernouf décide-t-il de faire                                                           confectionner une aigle par un artisan local ainsi qu’une6Le « h » minuscule est couché, suivi en haut d’un petit « d » majuscule.  soie sans inscription, tout ceci à titre provisoire.7Elle est actuellement au musée de l’Armée de Paris.
Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
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reconnaître notre ignorance sur de nombreuses questions historiques et cela est valable pour toutes les époques. Notre insuffisance la plus regrettable concerne les aigles et drapeaux de la Garde Impériale. Sur cette valeureuse phalange, tout semble avoir été dit ou écrit, mais les faits sont là, intangibles.  Nous allons les passer rapidement en revue.  On constate d’abord l’absence de sources valables.  Il n’y a aucune description d’époque ni aquarelles officielles et cette situation est propre à la Garde, car pour les autres troupes, la documentation existe sans être abondante ou toujours véridique. Cet hermétisme est conforté par le manque presque complet d’originaux et d’aigles authentiques.  Il y a, en premier lieu, la question du motif ornant les couronnes d’angle des soies et le socle de l’aigle. D’habitude, on pense qu’il doit être identique, cependant rien n’est sûr et nous devons rester dans les hypothèses.  Le 1er à pied semble avoir, sur le drapeau Grenadiers modèle 1804, le chiffre « I » dans les angles. Mais on lui accorde une grenade sur l’aigle. Même problème pour le 1erChasseurs à pied avec, peut-être, un cor sur le caisson. Le revers de ces drapeaux n’est pas confirmé. Par contre, au 2eChasseurs à pied, sur le drapeau de 1811, on attribue avec logique le chiffre « 2 » dans les couronnes et sous l’aigle.  Pour les Grenadiers à cheval nous avons quelques assurances, puisqu’il existe deux aigles et deux étendards. Le revers est particulier avec aigle couronnée et foudre, grenade en double motif.  Aux Chasseurs à cheval, le problème est entier car on ignore le revers. On penche pour les armoiries de l’aigle couronnée posée sur un manteau impérial, toujours avec la légende « VALEUR ETDISCIPLINE», mais on peut aussi supposer le dessin comme celui des Grenadiers à cheval. Le cor sur le guidon et sur le caisson est vraisemblable.  En fait, le guidon modèle 1804 est entièrement reconstitué.   Sur les Gendarmes d’élite, aucune indication.  Sur le guidon des Mamelouks modèle 1804, l’incertitude est totale. Certains donnent un « N » comme motif des couronnes. Même chose sur l’aigle ? C’est possible, mais ce n’est certainement pas un croissant.  Aux Dragons, le guidon est connu. Il a la grenade aux angles et sur l’aigle.  Aux Chevau-légers, sur l’étendard modèle 1804, rien n’est sûr, peut-être le chiffre « I ».
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L’étendard du régiment d’Artillerie à cheval est orné au revers de l’aigle couronné étreignant deux canons croisés. Aux angles le « N » peut être également sur le caisson.  Voilà un tableau plein d’aléas. Il faut faire preuve de prudence dans les descriptions.  Pour rester sur le sujet des emblèmes de la Garde, nous ajouterons quelques précisions sur le fameux drapeau des Adieux. En effet, Mme Rousseau, restauratrice au Musée de l’Armée de Paris, a travaillé sur ce drapeau récemment et nous a obligeamment donné des détails fort intéressants. La soie n’a plus aucune trace de couleur ; néanmoins les trois bandes se distinguent parfaitement. Les dorures demeurent belles. Cette soie n’est pas double mais quadruple, du moins sur la bande centrale, sur les côtés et également sur les couronnes et les petites aigles. Par contre, la soie est simple sur le décor de palmettes. L’œil des petites aigles est constitué par une petite perle noire. Enfin, le corps des abeilles est bombé par adjonction de soie. Nous pensons qu’il s’agit d’une fabrication propre à la Garde.  Une dernière anecdote pour le moins pittoresque : le général Petit, à la suite du baiser de Fontainebleau sur sa joue droite, n’a plus jamais8présenté cette joue après avoir été embrassé sur la joue gauche.    Les trucages et les faux.   Depuis longtemps, on s’est ingénié à réaliser des aigles falsifiées. Quelques rares, d’une grande qualité, sont susceptibles de tromper les meilleurs spécialistes, mais la grande majorité est constituée de reproductions assez ordinaires.   Le plus curieux, c’est de constater que même des gouvernements ont fait sciemment des copies ; c’est ce que nous nommons des trucages. Les autorités russes se sont montrées sur ce point les plus redoutables. En effet, il existe un ordre du Tzar Alexandre Ier 16 décembre 1813 pour compléter du certains trophées. Ce fait est confirmé par Igor Groutso, expert russe, dans un article paru dansEtudes napoléoniennes, T. IV :  …Il arrivait souvent que l’on ait pu prendre un drapeau entier, mais seulement une partie de la soie ou l’aigle. Dans ce cas, les spécialistes de l’arsenal de Saint-Pétersbourg, en suivant les modèles originaux à leur disposition, montaient les aigles qui manquaient au sommet des hampes ou fabriquaient des hampes et redonnaient ainsi aux drapeaux leur aspect d’origine…                                                            8Durant 48 ans.
Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
Jean Brunon, qui connaissait bien les emblèmes français, au cours de plusieurs visites en Russie, avait repéré certaines de ces contrefaçons, comme dans le cas du 9eCuirassiers qui perd son étendard à Vilna le 5 décembre 1812. Ce dernier est conservé à Moscou. La soie est bien authentique mais l’aigle, qui ne porte aucun chiffre et n’en garde aucune trace, est une reproduction.  L’étendard du 14e Cuirassiers gardé à la cathédrale Notre-Dame de Kazan est surmonté d’une aigle déjà qualifiée de très douteuse par Hollander. Elle a bien été refaite.  Au musée de Borodino figure une aigle sans fuseau marquée « 146 » qui est celle réalisée pour le film « Guerre et Paix. ». Le bon drapeau avec aigle est à l’Ermitage.  Pour le 44ede ligne, seuls les 3eet 4ebataillons font la campagne de Russie. Les 1er 2 ete sont en bataillons Espagne avec l’aigle. Selon une lettre de Victor Partourneaux du 4 juillet 1812, les bataillons ont seulement reçu la nouvelle soie modèle 1812. Celle-ci, gardée à Saint-Pétersbourg, a aussi une aigle reconstituée.  Si les contretypes russes sont passables, on ne peut en dire de même pour une soi-disant aigle du 16e de ligne figurant à la chapelle de Montserrat, en Espagne, qui est ridicule avec un drapeau totalement fantaisiste. Même les Autrichiens à Vienne, d’habitude sérieux, s’obstinent à montrer une aigle portant « 3 R » sur le caisson !  En dehors des grands musées, on peut recenser un grand nombre d’aigles reconstituées ou carrément factices. Dans le premier lot, nous trouvons des aigles contenant des éléments valables associés à d’autres volontairement ajoutés pour rendre l’ensemble vraisemblable. Elles méritent d’être soigneusement analysées.  Dans le second lot, le plus important, il y a des réalisations improvisées à l’aide de moules plus ou moins réussis.  Vers 1925, la Maison Azan, à Paris, éditait un catalogue avec prix de diverses aigles avec caisson vierge. D’autres réalisations pour collectionneurs sont assez soignées, mais elles ne trompent pas. Moins innocente, nous connaissons une série lancée il y a une trentaine d’années sur le marché, avec toujours un numéro sur le caisson. Beaucoup de gens ont été bernés. Pourtant, ces aigles étaient loin d’être parfaites. Plusieurs ont été vendues en salles de vente sans aucun scrupule.  En fait, outre les renseignements historiques, l’ultime critère de véracité demeure dans l’existence de poinçons corrects sur les diverses parties de l’aigle.  A ce sujet, nous n’avons pas trouvé un système cohérent pour ces suites de lettres, chiffres romains, signes divers.  Encore un secret à percer !
Périodique A.B.N. n°100, janvier-février 2004.
Porte-drapeau des Grenadiers à pied - Dessin de Raffet
N.D.L.R.  Les emblèmes impériaux : coq, aigle, éléphant ou lion ?  Quel animal héraldique aura l’honneur de représenter le nouvel empire ?  Le coq est proposé, mais Napoléon peut-il considérer comme digne de lui cet animal de basse-cour ?  L’éléphant jouit au conseil d’une majorité écrasante. Un des conseillers, Laumond, présente déjà sa devise :Mole et mente, ce qui signifie :Par la masse et par l’esprit.  Le lion, en revanche, est très en faveur. Ségur fait remarquer que le roi des animaux peut, d’un geste de la patte, mettre en fuite le léopard britannique.  Napoléon préfère l’aigle, l’aigle éployée, qui rappelle les Carolingiens, pour le sceau ; l’aigle au repos, d’origine romaine, pour la hampe des drapeaux. Mais pour lui, il faut un autre emblème. A Tournai, dans le tombeau de Chilpéric, on a trouvé des abeilles de métal. L’ennui est que les abeilles obéissent à une reine ! Mais cette reine est-elle à craindre depuis que la France possède un empereur ?  L’abeille entrera dans l’Empire subrepticement, puisqu’elle ne fera l’objet d’aucun décret, mais bientôt elle ornera les tapis et les tentures, ainsi que les bordures des drapeaux.
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