Combattre le terrorisme : conseils de réformateurs arabes
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Combattre le terrorisme : conseils de réformateurs arabes

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Combattre le terrorisme : conseils de
réformateurs arabes
Author: Jean-Paul Ney<jean-paul.ney@digital-network.net>
Le sujet des moyens à mettre en oeuvre pour combattre le terrorisme islamique a fait couler
beaucoup d’encre sous la plume des réformateurs arabes qui dénoncent la pensée
fondamentaliste, encouragent la critique individuelle ainsi que l’instauration de valeurs
démocratiques et le respect des droits de l’Homme dans le monde musulman. En février 2005,
un groupe de réformateurs a transmis aux Nations unies un texte demandant la création d’un
tribunal international chargé de juger les dignitaires religieux coupables d’incitation à la violence
et au meurtre. Cette requête a été examinée par le Conseil des nations unies chargé des
affaires légales, et distribuée aux membres du Conseil de sécurité de l’ONU. [1]
Après les attentats du 7 juillet 2005, les réformateurs arabes ont précisé leurs arguments et
élargi le champ de leur critique, celle-ci ne visant plus seulement les extrémistes musulmans,
mais aussi les pays européens, et en particulier a la Grande-Bretagne, qui autorise les activités
extrémistes au nom des droits de l’individu. Les réformateurs ont en outre durci le ton vis-à-vis
de la majorité silencieuse des musulmans et des intellectuels musulmans modérés, qui
capitulent face à la pression exercée par les fondamentalistes au lieu de s’élever ouvertement
contre elle. Voici quelques-unes des recommandations d’écrivains réformateurs arabes.
L’Europe ne doit plus se montrer permissive à l’égard des extrémistes musulmans.
L’une des réactions aux attentats a été la condamnation de l’Europe, et plus particulièrement
de la Grande-Bretagne, accusée d’avoir accordé l’asile à des musulmans extrémistes,
permettant à ces derniers de propager leurs idées dans les écoles, les mosquées et les médias
- au nom de la liberté d’expression. L’intellectuel saoudien Mashari Al-Dhaydi, chroniqueur au
quotidien londonien Al-Sharq Al-Awsat, écrit : « Le temps est venu, pour ceux qui se voilent la
face, de s’apercevoir que les ennemis de la liberté ont, malheureusement, exploité
l’atmosphère de liberté des pays européens pour détruire ses fondations et étouffer dans
l’oeuf la liberté comme concept destiné à devenir réalité dans les pays arabes et musulmans.
Ils se sont servis de la liberté pour répandre le fanatisme religieux. Ceux qui propagent le
programme idéologique et politique de Ben Laden (...) sont les plus grands adversaires de la
liberté défendue par les pays européens (...)
Le terrorisme fondamentaliste ne connaît pas de frontières. Quiconque imagine qu’il peut se
sentir bien à proximité d’un loup et le transformer en chiot domestique sera sidéré le jour où le
loup s’abattra sur son troupeau. Un loup est un loup, et ne peut pas être autre chose (...) » [2]
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Abd El-Rahman Al-Rachid, directeur général de la chaîne Al-Arabiya et ancien directeur du
quotidien Al-Sharq Al-Awsat, édité en arabe à Londres, a appelé à l’expulsion des extrémistes
musulmans : « Pendant maintenant dix ans, moi-même et d’autres écrivains arabes avons mis
en garde contre les dangers de la permissivité - pas de la tolérance - face à un extrémisme qui
se répand actuellement comme la peste parmi les musulmans en Grande-Bretagne et parmi
ceux qui émigrent en Grande-Bretagne.
Nous n’avons jamais compris pourquoi les autorités britanniques avaient accordé l’asile à des
personnages suspects impliqués dans des crimes terroristes. Pourquoi la Grande-Bretagne
accorderait-elle l’asile à des Arabes condamnés pour crimes politiques ou extrémisme religieux
- et parfois même condamnés à mort ? (...)
Notre combat est contre l’idéologie, plutôt que contre les terroristes eux-mêmes. Les
terroristes profitent au maximum de la liberté d’expression et de mouvement et récompensent
[leurs bienfaiteurs] par la propagande et la peur.
Une telle permissivité de la part du gouvernement britannique a permis aux extrémistes arabes
et musulmans de trouver un refuge sûr en Grande-Bretagne, loin de leurs propres pays, au point
que les extrémistes ont pris le pas sur les modérés (...)
Le temps et venu pour les autorités britanniques d’être réalistes et déterminées face à
l’extrémisme, avant que le chaos total ne s’abatte sur la société britannique. Autrefois, nous
vous disions : ’Arrêtez les !’ Aujourd’hui, nous vous disons : ’Expulsez-les !’ » [3]
Dans un article du quotidien saoudien Al-Jazirah, le chroniqueur Hamad Ben Hamad Al-Salami
nomme les disciples de Ben Laden résidant en Grande-Bretagne qui expriment ouvertement leur
soutien aux opérations terroristes d’Al-Qaïda dans les médias - notamment sur la chaîne Al-
Jazira et dans le quotidien arabe Al-Qods Al-Arabi : « Ceux [qui ont pris pour cible] l’Arabie
Saoudite, [le nouvel] Irak, l’Egypte et d’autres pays se sont à présent dressés contre le pays
qui les héberge et leur assure travail et subsistance. Parmi eux se trouvent [Mohammed] Al-
Musaari, [Saad] Al-Faqih, Abou Qatada, Abou Al-Muntazar, [Hani] Al-Sibaï et [Abd El-Bari]
Atwan. Ils leurrent des millions de personnes dans leurs apparitions en robes et tarbouches,
parfois ornées de motifs [islamiques], prétendant détenir la connaissance en matière d’éthique
islamique (...) » [4]
L’incitation à la haine sur Internet doit prendre fin
Dans un autre article, Al-Rachid qualifie l’Internet d’« arène privilégiée des extrémistes » : «
La plupart des crimes terroristes sont liés à l’Internet (...) Un groupe terroriste commet des
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assassinats, et un autre groupe d’extrémistes justifie ces actes, encourage la violence et recrute
[des activistes]. » Al-Rachid explique que l’Internet est devenu un moyen d’action efficace pour
les terroristes pour plusieurs raisons : il est facile d’utilisation, les messages arrivent rapidement
au public, il est peu onéreux et n’est pas censuré. » Il affirme en outre que « le principal
medium de corruption de la pensée des jeunes musulmans à travers le monde est l’Internet -
pas les écoles - parce que les jeunes gens utilisent intensément l’Internet et par lui en
apprennent davantage sur l’incitation à la haine, le recrutement et l’éducation terroriste. »
Selon Al-Rachid, les sites extrémistes doivent être censurés, et il faut comprendre que « la
source du danger intellectuel se trouve aujourd’hui dans les médias, Internet compris. » [5]
Les intellectuels arabes doivent mettre fin au double langage
Les réformateurs arabes ont en outre durement critiqué leurs confrères. Mouna Al-Tahawi,
commentatrice égyptienne et chroniqueur pour Al-Sharq Al-Awsat, évoque le désir qu’ont
certains intellectuels de satisfaire leur public : « Il est temps de déclarer avec détermination que
ce que prétendent les musulmans après un attentat terroriste - ’C’est George Bush qui me l’a
fait faire’ - est stupide (...) Il est temps pour moi de cesser de réprimander autrui. Nous savons
tous à quel point l’extrémisme s’est développé dans nos sociétés, et il est trop facile
d’ignorer les faits et de dire ’nous ne sommes pas comme cela’ au lieu d’affronter le
problème (...)
On a beaucoup parlé des groupes et des individus extrémistes ayant trouvé refuge à Londres.
Mais on n’a pas assez parlé de ces prétendus intellectuels qui passent leur temps à justifier le
terrorisme (...)
En écoutant les interviews qui leur ont été accordées sur les chaînes arabes après les
attentats de Londres, on pourrait croire que ce sont George Bush et Tony Blair qui se sont rendus
à Leeds, ont amené ces jeunes gens à Londres et ont appuyé sur la détente. Les prétendus
intellectuels se sont réjouis qu’en ce 7 juillet, George Bush et Tony Blair aient appris une leçon
qu’ils ne seraient pas prêts d’oublier. Bien entendu, tout cela a été dit en arabe. Ces
prétendus intellectuels pensent que c’est là ce que le monde arabe désire entendre.
Mais en lisant leurs commentaires dans les journaux américains, on pourrait croire qu’ils ont
perdu la mémoire et oublié tout ce qu’ils ont dit quelques jours plus tôt sur la télévision arabe.
Tout à coup, ceux qui n’avaient pas été capables de prononcer une seule phrase sans
mentionner les noms de George Bush et Tony Blair se montrent prudents et attristés. Au lieu de
tout mettre sur le dos de George Bush, ils confient au Washington Post et au New York Times
qu’ils sont surpris et effrayés, incapables de comprendre pourquoi de jeunes musulmans se font
sauter dans les transports publics de Londres (...)
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Il est temps de parler d’une seule voix, plutôt que de tenir un double langage - l’un qui
s’adresse à l’Occident [et l’autre au monde arabe]. Le monde arabe en a assez de la violence
- dont il a beaucoup souffert (...)
Parlons d’une seule voix qui assume ses responsabilités, et commençons par envisager des
moyens d’émerger du chaos effrayant qui nous affectera tous (...) » [6]
Il faut distinguer les terroristes de leurs sympathisants
Dr Mamoun Fandy, savant égyptien et chroniqueur, s’est aussi intéressé à l’approche
hypocrite du terrorisme caractéristique, d’après lui, des intellectuels arabes. Il estime que c’est
le besoin d’émissions bon marché qui pousse les chaînes satellites à diffuser le produit
facilement disponible du fanatisme, plutôt que des shows onéreux de qualité. Fandy écrit : «
Les événements terroristes de Londres, l’assassinat de l’ambassadeur d’Egypte en Irak et la
réaction arabe indiquent un problème qui dépasse le simple problème du terrorisme : c’est le
problème des Arabes qui s’identifient au terrorisme, et leur nombre croît chaque jour(...) En
Egypte, il existe actuellement un groupe d’écrivains et de directeurs, et même de politiciens de
plus de 50 ans, qui prennent du Viagra politique, entrent en état d’ivresse et d’excitation quand
ils maudissent les Etats-Unis et applaudissent les terroristes. Ils ne comprennent pas qu’ils
attisent des flammes qui consumeront tout le monde, qu’agir ainsi revient à se suicider, à
l’instar des conducteurs de voitures piégées (...)
Depuis le 11 septembre, je lis et j’écoute les médias égyptiens, et je ne peux pas nommer cinq
écrivains qui condamnent le terrorisme sans équivoque (...) Le Caire va-t-il mal au point de
n’abriter aucun homme ou femme qui dise ’non’ au terrorisme ? (...)
Le discours terroriste consiste avant tout en [émissions] télévisées bon marché (...)
L’augmentation importante du nombre de chaînes satellites et leur grand besoin de
programmes sont la principale raison du développement du courant fondamentaliste.
Quand on compare, par exemple, le coût de production d’un film vidéo [de la chanteuse
libanaise] Nancy Ajram au coût de la programmation de l’un de nos plus grands cheikhs prônant
le terrorisme, nous nous apercevons que le coût du film, ou d’une heure d’émission télé de
qualité, peut atteindre vingt mille dollars - alors que pour une heure [de produit], un cheikh se fait
payer, au plus, 1000 dollars (...)
Les émissions télévisées bon marché sont l’incubateur du terrorisme et l’atelier où se créent
les discours terroristes (...) Si les Etats-Unis ou les pays arabes désirent combattre le terrorisme,
ils doivent commencer par séparer les terroristes des sympathisants de la terreur (...)
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Malheureusement, tous les grands hommes d’affaires qui traitent avec les Etats-Unis et
l’Occident s’identifient au terrorisme (...) Si ce n’était pas le cas, pourquoi ceux qui profitent
vraiment des dollars américains et occidentaux gardent-ils le silence ? Pourquoi sont-ils les
premiers à posséder des chaînes télévisées bon marché qui prônent la terreur ? (...) » [7]
Les musulmans doivent dénoncer les terroristes ; l’Occident doit cesser de se monter naïf
Dans un autre article, écrit après les attentats de Charm El-Cheikh du 23 juillet, Mamoun Fandy
a appelé les musulmans à émettre des fatwas contre le terrorisme, ajoutant : « Les musulmans
du monde entier doivent avoir le courage de repousser le terrorisme (...) De même que Ben
Laden et les siens qualifient les musulmans modérés de disciples de l’Occident et
d’incroyants, il est temps pour les guides musulmans de proclamer que Ben Laden est un impie
(...)
En outre, il est temps de retirer le titre de ’mosquée’ aux lieux où se fabriquent des bombes
(...) Les musulmans modérés peuvent boycotter ces mosquées, vu qu’ils n’ont pas le courage
de les arracher à l’emprise des extrémistes. Quand une mosquée devient une usine à bombes,
elle cesse d’être une mosquée et doit être traitée comme un lieu de crime (...) »
Fandy a en outre évoqué la naïveté occidentale face à ceux qui sont perçus comme des «
islamistes modérés » : « J’ai rencontré un grand nombre de musulmans, plus particulièrement
en Occident, qui dénoncent la violence en public mais affirment dans le cadre de conversations
privées que ’l’Occident mérite [le terrorisme]’. En public, ils disent que c’est la vengeance
des événements en Palestine et en Irak. Dans leurs conversations privées, je n’ai entendu que
de la haine aveugle motivée par un sens de la destruction nihiliste, virus qui touche de nombreux
musulmans, notamment en Occident.
Nombreux sont ceux qui condamnent Ben Laden, mais malheureusement beaucoup ne l’ont
aucunement condamné. [Ces derniers] vivent pour la plupart en Europe et aux Etats-Unis. Ils ne
sont pas des cellules dormantes, comme les appellent les naïfs en Occident ; ce sont des
cellules bien éveillées, prêtes à frapper à tout moment.
Bien sûr, cela n’arrange rien qu’un homme ’bon’ comme le maire de Londres, Ken
Livingstone, invite Youssef Al-Qaradhawi [à Londres], tout comme cela n’arrange rien quand
Tony Blair et George Bush invitent des personnes susceptibles de devenir des terroristes à des
réunions au gouvernement britannique et à la Maison blanche. Il est regrettable que les chaînes
occidentales, et en particulier la CNN et la BBC, abritent des militants islamistes qui prônent le
terrorisme, les traitant comme des spécialistes et des analystes (...)
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Il n’y a que deux choses qui puissent arrêter le terrorisme : (...) l’émission de fatwas écartant
Ben Laden et ses partisans du giron de l’islam, et un Occident qui renoncera à sa naïveté au
sujet des ’islamistes modérés’. Il n’y a pas d’ ’islamistes modérés’ : il y a des musulmans
ordinairesmenant des vies ordinaires, et il y a des terroristes et des gens susceptibles de se
transformer en terroristes. » [8]
Les musulmans doivent interdire les attentats suicides pour des raisons morales
Jamal Ahmed Khashoggi, ancien directeur du quotidien saoudien Al-Watan, a appelé les
musulmans à bannir les attentats suicides : « Il est temps pour nous de prendre position
fermement et clairement, par le biais des plus hautes instances islamiques, et de bannir,
explicitement et sans exception, toutes les ’opérations suicides’. Non parce que l’Occident
nous le demande, ni parce que les gouvernements arabes ont été consumés par le feu de ces
opérations, mais parce qu’elles vont contre l’esprit et la lettre de l’islam (...)
Nous devons retourner à la position ’fondamentaliste’ qui adhère à la lettre et à l’esprit de la
charia sans subir les influences de la politique et des intérêts. C’est ce que les plus grands
dignitaires saoudiens, tels que le cheikh Abd El-Aziz Ben Baz et Mohammed Ben Athamin ont fait
en décrétant que les opérations suicides étaient interdites. L’actuel mufti [saoudien], le cheikh
Abd El-Aziz Aal Al-Cheikh a persisté sur la même voie. La position de ces cheikhs [contre les
attentats suicides] date d’avant les attentats du 11 septembre - il n’y a donc pas lieu de dire
qu’elle est la conséquence de pressions exercées par les Etats-Unis [sur l’Arabie Saoudite].
L’appel à encourager et à soutenir les attentats suicides était à son sommet dans les années
1990 : nous avions finalement découvert l’arme qui faisait couler le sang israélien et propageait
parmi eux l’horreur qu’ils nous avaient fait subir. Des opérations suicides effrayantes, de long
en large d’Israël, dans les clubs, les cafés, les bus, ont pris pour cibles soldats et civils sans
distinction.
Nous n’avons pas ménagé les enfants, les vieillards et les femmes, qui ont été cruellement
tués. Nous étions en colère - nous le sommes encore - et nous n’avons pas prêté attention au
côté vicieux de ces attaques, qui violaient la loi religieuse, très claire, contre le suicide. Nous
n’avons pas tenu compte de l’ordre explicite du Prophète de ne tuer que les combattants, ni les
femmes, ni les enfants.
La colère nous aveuglait : nous aimions les analyses qui affirmaient qu’Israël affrontait sa plus
difficile épreuve depuis la guerre d’octobre [1973]. Les journaux publiaient des nouvelles de la
peur en Israël et de l’émigration. Et nous les avons cru (...)
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Les deux cheikhs [Ben Baz et Ben Athamin] appartiennent à l’école salafiste qui se base sur le
texte clair [du Coran]. C’est pourquoi ils n’ont pas tenu compte de toutes les justifications
politiques, contrairement à ceux qui prétendaient qu’ il valait mieux ’comprendre la situation et
les intérêts stratégiques’, refusant d’autoriser les opérations suicides.
Le cheikh Ben Athamin a été très clair dans sa réponse à un homme qui voulait son opinion sur
la jurisprudence concernant ces opérations [suicides] : ’A mon avis, [celui qui perpètre de tels
actes] se suicide et sera puni en Enfer’ (...)
S’il était possible de tracer le diagramme des opérations suicides depuis qu’elles sont
devenues l’arme de choix des guerriers du djihad, nous pourrions témoigner de leur
dégradation morale, qui les conduit à faire sauter des enfants à Bagdad et de paisibles
passagers dans les transports de Londres (...) Comme il serait sage que tous ceux qui autorisent
les attentats suicides reviennent à la position fondamentaliste les interdisant - même les
dignitaires religieux respectés, comme le cheikh Youssef Al-Qaradhawi, ou ces mouvements
dont la cause est juste, comme le Hamas. Ce fut une grave erreur morale que de recourir à ces
opérations, et c’est faire preuve de vertu que de s’en détourner (...) » [9]
Les institutions religieuses doivent prendre des mesures pratiques contre les terroristes
Saad Allah Khalil, dont les écrits sont affichés sur des sites réformateurs, critique aussi les
dignitaires religieux de l’islam : « Encore combien de temps allons-nous nous voiler la face,
penser que le monde est ignorant et ne sait rien de nous ? Combien de temps allons-nous nous
mentirà nous-mêmes ? Que nous sommes suffisants si nous imaginons que nous pouvons,
avec des déclarations et des télégrammes [condamnant le terrorisme], convaincre le monde de
l’innocence de notre pensée et de notre culture ! (...)
Il est vrai que tous les musulmans ne sont pas des terroristes. Mais depuis le 11 septembre, tous
les terroristes ne sont-ils pas musulmans ?
(...) Y a-t-il un cheikh ou une autorité religieuse islamique qui nie l’affiliation des assassins et de
leurs guides à l’islam ? Ne donnent-ils pas à Ben Laden le titre de ’cheikh’ et parfois celui de
’cheikh moudjahid [combattant du djihad] ? Ne trouvent-ils pas toujours une excuse et une
justification à ces assassinats ? (...)
Les terroristes déforment délibérément les préceptes de l’islam et l’image des musulmans,
devenant ainsi inévitablement les ennemis de l’islam et des musulmans. Pourquoi, dans ces
circonstances, ne prend-on pas clairement et honnêtement parti (...), à l’instar des cheikhs qui
prennent position contre certaines écoles de pensée musulmanes et leurs disciples ? Pourquoi
ne pas assécher toutes les sources des terroristes et demander des comptes à ceux qui
encouragent, à leurs partisans et à ceux qui s’efforcent de les justifier ? (...)
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Les institutions religieuses, les autorités religieuses officielles et non officielles doivent prendre
des mesures réelles, non formelles, pour sauver ce qui peut être sauvé. Si elles ne le font pas,
sous peu le monde se tiendra comme un seul homme contre l’islam et les musulmans. » [10]
Les musulmans doivent créer une nouvelle culture religieuse
Evoquant la dimension religieuse du terrorisme, le chercheur irakien Madjed Al-Gharbaoui a
appelé à ne pas se contenter d’émettre de nouvelles fatwas contre le terrorisme, mais de créer
une nouvelle culture religieuse tranchée et de dénoncer ceux qui exploitent la religion à des fins
politiques. Il écrit :
« Le terrorisme au nom de la religion et de l’islam est devenu un véritable danger menaçant la
sécurité mondiale et le bien-être des peuples (...) Je ne veux pas minimiser l’importance des
raisons psychologiques, politiques et économiques [du terrorisme], mais elles ne sont que
secondaires.
La raison essentielle en est l’idéologie religieuse (...) Tous les actes sanglants et toutes les
catastrophes dont ont souffert les peuples musulmans ont été commis au nom de l’islam. Au
nom de la religion, des guerres ont éclaté, le sang a coulé, le meurtre a été légitimé, des
droits ont été confisqués, des régimes renversés, les détenteurs d’opinions différentes
accusés d’impiété et les musulmans d’opinions différentes d’hérésie (...) La religion était et
demeure une couverture justifiant les actes terroristes et les politiques arbitraires (...)
Le discours religieux a remodelé la logique des mouvements [islamistes], qui se base sur le
mépris de la vie et l’amour de la mort, la haine de l’autre et la glorification de soi, le dédain de
ce monde et [l’importance accordée] à l’au-delà, [le désir de] satisfaire Allah par le sacrifice,
quel qu’en soit le but.
Le discours religieux n’a pas appris aux membres des mouvements islamistes l’indulgence, la
tolérance, la miséricorde, mais bien la haine d’autrui, la recherche de la mort et de
l’annihilation de l’autre (...) Selon les mouvements islamistes, l’individu n’a pas été créé
pour occuper la terre et vivre sa vie, mais bien pour le monde à venir ; un tel individu aspire
chaque jour au martyre pour Allah afin d’être libéré du fardeau de [ses] responsabilités et de
gagner le Paradis pour satisfaire Allah à jamais (...) Cette culture est complètement dissociée
des valeurs humaines auxquelles appelle le Coran (...)
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Comment affronter cette façon de penser ? (...) A mon avis, même les fatwas ne sont d’aucune
aide, parce que [les dignitaires religieux qui les émettent] sont dénoncés par les mouvements
islamistes extrémistes (...)
Il est nécessaire de créer une nouvelle culture religieuse qui tracera les limites des lois de la
charia dans le Coran, explicitera ce qui caractérise la vie du Prophète et clarifiera quand et
comment la loi devient absolue (...) Ensuite, il est nécessaire de discuter sérieusement de la
question de l’abolition de chapitres du Coran [naskh] et [de se demander] s’il est exact que le
verset de l’épée [Coran 9 : 5] a banni toute miséricorde, indulgence et pardon dans le Coran
(...) Il s’impose de considérer les premiers musulmans comme des êtres humains pourvus de
sentiments, d’aspirations, de buts politiques [et non comme étant divins] (...)
Nous devons révéler au grand jour l’affront commis par ceux qui ont employé la religion et les
écritures religieuses à des fins politiques et sociales d’ordre personnel (...) » [11]
La majorité silencieuse doit hausser le ton contre les terroristes
Le renommé chroniqueur Amir Taheri a appelé la majorité silencieuse et modérée des
musulmans dans le monde à s’élever contre les extrémistes qui déforment l’image de
l’islam. Il écrit : « Que faire contre des personnes qui sont prêtes a courtiser une certaine mort
pour tuer autrui ? (...) En premier lieu, ne pas se laisser impressionner par le fait qu’un être
ayant perdu toute humanité suite à un lavage de cerveau soit disposé à mourir pour tuer. La
seule façon raisonnable d’affronter de tels individus est une nouvelle forme d’armement.
A l’instar de toutes les autres armes, qui impressionnent la première fois, les bombes humaines
continueront de terroriser et de fasciner tant que nous ne leur aurons pas trouvé d’antidote (...)
Comme toutes les autres armes, cette nouvelle arme à été conçue par certains, financée par
des investisseurs, fabriquée en un lieu donné et déployée par des dirigeants identifiables et
destructibles. Ces armes humaines sont conçues et façonnées par un flot ininterrompu de
propagande
anti-occidentale
provenant
de
chaînes
satellites
arabes,
de
prétendues
associations islamiques et d’innombrables madrassas [écoles islamiques] et mosquées à
travers le monde, y compris à Londres (...)
L’attentat de Londres n’est pas le fait d’un petit nombre de personnes. C’est le fruit amer
d’une religion qui est devenue l’otage d’une minorité d’extrémistes, tandis que la majorité
contemple la situation avec inquiétude et stupéfaction. Tant que nous n’entendrons pas les
musulmans condamner ces attentats sans moduler leur propos de ’mais’ et de ’si’, les
bombes humaines et les meurtriers auront une bonne raison de croire qu’ils bénéficient du
soutien de tous les musulmans. Le vrai combat contre l’ennemi du genre humain pourra débuter
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quand la ’majorité silencieuse’ dans le monde islamique fera entendre sa voix contre les
assassins, contre ceux qui les endoctrinent, qui croient en eux et les financent. » [12]
La guerre contre le terrorisme nécessite une action d’envergure dans les domaines de la
pensée, de la politique et de l’éducation
Dr Kazem Habib, commentateur irakien et militant pour les droits de l’Homme, a indiqué des
directions à suivre dans la guerre conte le terrorisme : « (...) Les appels des conférences et des
associations, des cheikhs et des forces politiques musulmanes, ne peuvent mettre un terme aux
opérations terroristes et aux effusions de sang perpétrées en différents lieux. Là où se trouvent
des musulmans extrémistes, il ne sert à rien d’expliquer en quoi le meurtre d’un homme qui
n’a commis aucun crime est défendu par l’islam - car la majorité des écoles religieuses, la
grande majorité des imams dans les mosquées, et la plupart des prédicateurs sur les chaînes
télévisées arabes, enseignent la violence, propageant la violence et la haine des personnes
appartenant aux autres confessions et courants de pensée. Ils ne reconnaissent pas autrui ; ils
ne sont pas tolérants vis-à-vis des non-musulmans. En outre, ils prônent la haine des
musulmans qui ne suivent pas leur voie, les traitant d’impies - distinguant le meurtre d’un
musulman du meurtre d’un non-musulman, et prêchant qu’il est permis de tuer un non-
musulman mais défendu de tuer un musulman (...)
La plupart des imams des mosquées d’Europe, qu’ils soient ou non arabes, enseignent
aujourd’hui la haine de l’Occident et des autres religions, parce qu’ils considèrent les
Occidentaux comme des impies qui ne sont d’aucune utilité pour l’islam (...) Ils les voient en
outre comme des ’parasites’ dont il faut se débarrasser, ou qu’il faut convertir à l’islam - afin
de transformer le Dar al-Harb en Dar al-Islam (...) Dans le monde musulman, l’éducation
religieuse dispensée dans les écoles religieuses et publiques ne diffère en rien de celle des
mosquées en Europe ; elle n’est que bien pire ! Chaque année, ces écoles produisent un
grand nombre de terroristes qui se déploient à travers le globe (...) »
Afin de combattre le terrorisme, le Dr Habib propose un programme international de lutte contre
le retard et la pauvreté dans le monde, ainsi que contre les régimes totalitaires et tyranniques
des pays arabes et musulmans. Il suggère de ne pas négocier avec les forces de l’islam
politique, y compris le mouvement des Frères musulmans, qui cherche à atteindre les mêmes
objectifs que les forces terroristes internationales ; seules leurs méthodes diffèrent, explique-t-il.
Il demande à ce que les gouvernements qui autorisent la propagation de la haine au sein de
leurs institutions éducatives rendent des comptes, et il presse les autorités compétentes de
trouver des solutions pratiques aux problèmes qui existent dans différentes régions du monde -
et en particulier au Moyen-Orient - vu qu’en leur absence, des solutions extrémistes
émergeront et engendreront de nouvelles effusions de sang.
Selon le Dr Habib, « La guerre contre le terrorisme nécessite une action d’envergure dans les
domaines de la pensée, de la politique et de l’éducationsi l’on désire venir à bout de la
pensée salafiste islamique, extrémiste et terroriste, et de la dawa salafiste qui appelle à la
création d’un régime islamique fondamentaliste (...) » [13]
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Source : institut de recherche médiatique du moyen orient (MEMRI) avec autorisation.
[1] Quelques mois après que la requête eut été soumise, signée par quelques 4000
intellectuels arabes et kurdes, le sous-secrétaire général pour les affaires légales et le Conseil
onusien pour les affaires légales Nicolas Michel a répondu par une lettre adressée aux
réformateurs arabes Dr Jawad Hashem, Dr Shaker Al-Naboulsi et Lafif Lakhdar (à l’origine de
l’initiative). Il a expliqué que la création d’un tribunal dépendait d’une résolution du Conseil
de sécurité de l’ONU ou d’un accord international. Il a ajouté qu’une copie de la requête
avait été distribuée à tous les membres du Conseil de sécurité. www.metransparent.com, le 2
juillet 2005.
[2] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), le 12 juillet 2005. La traduction se base aussi bien sur le texte
original en arabe que sur la traduction en anglais d’ Al-Sharq Al-Awsat.
[3] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), le 9 juillet 2005.
[4] Al-Jazirah (Arabie Saoudite), le 10 juillet 2005.
[5] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), le 18 juillet 2005.
[6] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), le 18 juillet 2005
[7] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), le 11 juillet 2005.
[8] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), le 25 juillet 2005.
[9] Al-Watan (Arabie Saoudite), le 19 juillet 2005.
[10] www.metransparent.com, le 13 juillet 2005.
[11] www.elaph.com, le 8 juillet 2005.
[12] Al-Sharq Al-Awsat (Londres), le 8 juillet 2005.
[13] www.rezgar.com, le 16 juillet 2005.
150801 : Combattre le terrorisme : conseils de réformateurs arabes
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